Conditions d’éligibilité à la prestation de compensation du handicap : enjeux et choix des familles

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Conditions d’éligibilité à la prestation de compensation du handicap : enjeux et choix des familles

Contexte de la Demande

Par courrier recommandé daté du 6 mai 2024, [R] et [W] [L] ont saisi le tribunal judiciaire de Marseille pour contester la décision de la CDAPH des Bouches du Rhône, qui a rejeté leur demande de prestation de compensation du handicap (PCH) pour leur fille [U], née le 5 janvier 2008. Cette décision a été confirmée après un recours administratif le 11 avril 2024.

Arguments des Demandeurs

Lors de l’audience du 18 septembre 2024, [R] et [W] [L] ont soutenu que le handicap de leur fille, atteinte de trisomie 21, nécessite la présence constante de sa mère. Ils ont précisé que l’état de santé de [U] est stable et qu’elle bénéficie d’une allocation pour l’éducation de l’enfant handicapé (AAEH) avec un taux d’incapacité de 80%.

Position de la MDPH

La MDPH a reconnu l’éligibilité de [U] à la PCH, mais a souligné que les parents avaient choisi de bénéficier de l’AAEH et de son complément, qui ne peuvent pas être cumulés avec la PCH. Ce choix, effectué en octobre 2022, a conduit au rejet de leur demande en l’absence d’éléments nouveaux.

Conditions d’Accès à la PCH

Pour bénéficier de la PCH, il est nécessaire de remplir certaines conditions, notamment résider en France et être atteint d’un handicap générant des difficultés dans la réalisation d’activités essentielles. La PCH peut inclure des aides humaines, techniques, ou spécifiques, et son attribution est personnalisée.

Évaluation des Besoins de [U]

La MDPH a produit un plan personnalisé de compensation, indiquant que [U] est accueillie dans un institut spécialisé durant la semaine. L’évaluation des besoins d’aide humaine se fait donc sur les temps où elle n’est pas prise en charge.

Décision du Tribunal

Le tribunal a rejeté la demande de [R] et [W] [L], considérant que leur option pour l’AAEH en octobre 2022, sans changement de situation, rendait leur demande de PCH non recevable. Les dépens de l’instance ont été laissés à leur charge, et la décision peut être frappée d’appel dans le mois suivant sa notification.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

23 octobre 2024
Tribunal judiciaire de Marseille
RG
24/02277
REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
Caserne du Muy
CS 70302 – 21 rue Ahmed Litim
13331 Marseille cedex 03
04.86.94.91.74

JUGEMENT N°24/04096 DU 23 Octobre 2024

Numéro de recours: N° RG 24/02277 – N° Portalis DBW3-W-B7I-455R
Ancien numéro de recours:

AFFAIRE :
DEMANDEURS
M. [R] [L] (Père)
Mme [W] [L] (Mère)
[U] [L] née le 05 Janvier 2008
7 Place du Gaillardet
Residence les Ballustres
comparants en personne assisté de Me Abdramane KOUYATÉ, avocat au barreau de MARSEILLE,

C/ DEFENDERESSE
Organisme MDPH DES BOUCHES-DU-RHONE
4, QUAI D’ARENC – CS 80096
13304 MARSEILLE CEDEX 02
comparante en personne représentée par Madame [Z] inspectrice juridique munie d’un pouvoir spécial

Appelé(s) en la cause:
Organisme CONSEIL DEPARTEMENTAL DES BOUCHES DU RHONE
4, QUAI D’ARENC
13002 MARSEILLE
non comparante, ni représentée

DÉBATS : A l’audience Publique du 18 Septembre 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : MEO Hélène

Assesseurs : MOLINO Patrick
MATTEI Martine

Greffier lors des débats : DIENNET Cécile,

A l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 23 Octobre 2024

NATURE DU JUGEMENT

réputée contradictoire et en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

Par courrier recommandé enregistré le 6 mai 2024, [R] et [W] [L], dans les intérêts de leur enfant [U] [L], née le 5 janvier 2008, ont saisi le pôle social du tribunal de Judiciaire de Marseille, afin de contester la décision de la Commission des Droits et de l’Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH) des Bouches du Rhône en date du 15 février 2024 rejetant leur demande déposée le 13 juin 2023 aux fins d’obtenir la prestation de compensation du handicap aide humaine (PCH), laquelle a été confirmée le 11 avril 2024 à la suite du recours administratif préalable formé par Monsieur et Madame [L].

Les parties ont été convoquées dans les formes et délais légaux à l’audience du 18 septembre 2024.

[R] et [W] [L] comparaissent accompagnés de leur fille et assistés de leur conseil. Ils maintiennent leur demande en exposant que le handicap de [U], atteinte de trisomie 21, nécessite la présence de sa mère. Ils précisent que l’état de santé de leur fille n’est pas susceptible d’évolution favorable et que [U] bénéficie de l’allocation pour l’éducation de l’enfant handicapé (AAEH) en raison d’un taux d’incapacité fixé à 80%.

La MDPH, régulièrement représentée par une inspectrice juridique, expose que les troubles présentés par [U] la rendent éligible à la PCH mais précisent que Monsieur et Madame [L] ont opté pour le bénéficie de l’AAEH et le complément 2, laquelle ne peut se cumuler avec la PCH, et qui leur était financièrement plus favorable. Elle ajoute que ce choix a été effectué en octobre 2022 soit moins d’un an avant leur demande de sorte qu’elle a été rejetée en l’absence d’élément nouveau.

Le Conseil Départemental des Bouches du Rhône, appelé à la cause, n’est pas représentée.

A l’issue des débats, les parties ont été avisées par Madame le Président que le jugement mis en délibéré serait rendu le 23 octobre 2024, date à laquelle il serait mis à la disposition des parties au Greffe et par ailleurs notifié par lettres recommandées avec accusé de réception.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application des dispositions de l’article 474 du Code de procédure civile, et compte tenu de l’absence du défendeur, régulièrement convoqué, le présent jugement sera réputé contradictoire.

Selon l’article L.114 du Code de l’action sociale et des familles, « constitue un handicap. Toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de santé invalidant ».

La prestation de compensation du handicap (ci-après PCH) constitue une aide financière destinée à financer les besoins liés à la perte d’autonomie des personnes handicapées. Son attribution est personnalisée et les besoins de compensation doivent être inscrits dans un plan personnalisé défini par l’équipe pluridisciplinaire de la MDPH sur la base du projet de vie exprimée par la personne.

La PCH peut constituer une aide humaine, une aide technique, des aides liées à l’aménagement du domicile et/ou du véhicule, ou des aides spécifiques et exceptionnelles correspondant à des charges spécifiques, ou des aides animalières.

Il résulte des articles L.245-1 et suivants du code de l’action sociale et des familles que pour bénéficier de la PCH, la personne doit résider de façon stable et régulière en France et être soit mineur handicapé, soit âgée de plus de 20 ans ou plus de 16 ans si la personne n’ouvre plus droit aux allocations familiales, ou âgée de moins de 60 ans (la demande pouvant être effectuée jusqu’à l’âge de 75 ans dès lors que les critères d’attribution sont remplis avant l’âge de 60 ans) et être atteinte d’un handicap qui génère de façon définitive ou pour une durée prévisible d’au moins un an :
•soit une difficulté absolue pour réaliser au moins une activité essentielle, lorsqu’elle ne peut pas du tout être réalisée par la personne elle-même,
• soit une difficulté grave pour réaliser au moins deux activités essentielles, quand la personne peut l’effectuer difficilement et de façon altérée par rapport à l’activité habituellement réalisée par une personne du même âge et en bonne santé.

La liste des activités concernées figure dans le référentiel figurant à l’annexe 2-5 du code de l’action sociale et des familles et sont réparties en 4 grands domaines :
• la mobilité : déplacement à l’intérieur et à l’extérieur du domicile
• l’entretien personnel : toilette, habillage, alimentation, élimination
•la communication : parole, ouïe, capacité à utiliser les moyens de communication
• la capacité générale à se repérer dans l’environnement et à protéger ses intérêts.

Monsieur et Madame [L] sollicitent la PCH aide humaine en exposant que la présence de l’un des deux parents est nécessaire au regard du handicap de [U].

S’agissant des conditions d’accès à la PCH aide humaine pour les enfants, ainsi que l’a justement rappelé la MDPH à l’audience, le bénéficiaire de l’AAEH de base doit ouvrir droit à un complément, remplir les conditions d’éligibilité générales de la PCH rappelées ci-dessus et opter pour la PCH en remplacement des compléments.

Ainsi l’accès à la PCH se fait sous forme d’un droit d’option comme le précisent les articles L 245-1-III-1 et D 245-32-1 du code de l’action sociale et des familles (CASF) entre le complément de l’AAEH et la PCH.

La demande peut intervenir pour les primo-demandeurs, en fin de droit à l’occasion du renouvellement de l’AAEH ou en cours de droit mais uniquement en cas de changement de situation s’il existe une évolution du handicap ou des facteurs ayant déterminé les charges prises en compte.

La MDPH a produit le plan personnalisé de compensation au titre duquel Monsieur et Madame [L] ont, le 4 octobre 2022, opté pour l’attribution de l’AAEH de base et d’un complément, plus favorable.
Il sera noté que [U] est accueillie dans un institut spécialisé du lundi au vendredi de 8h30 à 16 heures de sorte que l’évaluation en besoin d’aide humaine pour [U] s’effectue sur les temps où elle n’est pas prise en charge.

Dès lors, la demande de Monsieur et Madame [L], qui ont exercé leur option en octobre 2022 sans justifier d’un changement de la situation de [U] n’était pas recevable devant la MDPH.
Le recours sera par conséquent rejeté.

En application des dispositions de l’article 696 du Code de procédure civile, il y a lieu de laisser les dépens de l’instance à la charge du demandeur qui succombe.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant en audience publique, par jugement réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe en premier ressort,

REJETTE le recours formé par [R] et [W] [L], dans les intérêts de leur enfant [U] [L],

LAISSE les dépens de l’instance à la charge de [R] et [W] [L],

DIT que la présente décision peut être immédiatement frappée d’appel dans le mois de la réception de sa notification, à peine de forclusion.

La Greffière La Présidente

C. DIENNET H.MEO


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