La SA CONSUMER FINANCE a accordé un crédit personnel de 12.000 euros à M. [O] [F] [H] [R] et Mme [D] [Y] le 24 mai 2022, remboursable en 72 mensualités de 190 euros à un taux de 4,441% par an. Après que les emprunteurs ont cessé de rembourser, la société leur a envoyé deux lettres de mise en demeure, en novembre 2022 et août 2023, suivies d’une déchéance du terme en septembre 2023. En mars 2024, la société a assigné les emprunteurs devant le juge des contentieux de la protection pour obtenir le paiement de 12.166,92 euros, 500 euros de dommages et intérêts, et 600 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. Lors de l’audience du 4 juillet 2024, la SA CONSUMER FINANCE a maintenu ses demandes, tandis que M. [O] [F] [H] [R] et Mme [D] [Y] ne se sont pas présentés. Le jugement du 8 octobre 2024 a prononcé la déchéance totale des intérêts contractuels, condamné les emprunteurs à payer 10.248,05 euros sans intérêts, et débouté la société de ses demandes en dommages et intérêts et au titre de l’article 700. Les emprunteurs ont également été condamnés aux dépens. La décision est exécutoire à titre provisoire.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 2]
NAC: 5AA
N° RG 24/01537 – N° Portalis DBX4-W-B7I-S2SV
JUGEMENT
N° B
DU : 08 Octobre 2024
S.A. CA CONSUMER FINANCE
C/
[O] [F] [H] [R]
[D] [Y]
Expédition revêtue de
la formule exécutoire
délivrée le 08 Octobre 2024
à Me Jérôme MARFAING-DIDIER
Expédition délivrée
à toutes les parties
JUGEMENT
Le Mardi 08 Octobre 2024, le Tribunal judiciaire de TOULOUSE,
Sous la présidence de Florence LEBON, Vice Présidente, au Tribunal judiciaire de TOULOUSE, chargé des contentieux de la protection statuant en matière civile, assistée de Anne-Christelle PELLETIER Greffier, lors des débats et Fanny ACHIGAR Greffier chargé des opérations de mise à disposition.
Après débats à l’audience du 04 Juillet 2024, a rendu la décision suivante, mise à disposition conformément à l’article 450 et suivants du Code de Procédure Civile, les parties ayant été avisées préalablement ;
ENTRE :
DEMANDERESSE
S.A. CA CONSUMER FINANCE, dont le siège social est sis [Adresse 1] – [Localité 4]
représentée par Maître Jérôme MARFAING-DIDIER de la SELARL DECKER, avocats au barreau de TOULOUSE
ET
DÉFENDEURS
M. [O] [F] [H] [R], demeurant [Adresse 5] – [Localité 3]
non comparant, ni représenté
Mme [D] [Y], demeurant [Adresse 5] – [Localité 3]
non comparante, ni représentée
Suivant offre préalable acceptée le 24 mai 2022, la SA CONSUMER FINANCE, sous l’enseigne SOFINCO, a consenti à M. [O] [F] [H] [R] et Mme [D] [Y] un crédit personnel d’un montant de 12.000 euros, remboursable en 72 mensualités d’un montant de190€, au taux de 4,441% par an, hors contrat d’assurance.
M. [O] [F] [H] [R] et Mme [D] [Y] ayant cessé de faire face aux échéances du crédit, la SA CONSUMER FINANCE leur a adressé une lettre de mise en demeure de régler ces échéances en date du 29 novembre 2022 puis une seconde en date du 25 août 2023, restées vaines. La SA CONSUMER FINANCE leur a adressé la déchéance du terme par lettre recommandée du 18 septembre 2023.
Par actes de commissaire de justice en date du 29 mars 2024, la SA CONSUMER FINANCE a ensuite fait assigner M. [O] [F] [H] [R] et Mme [D] [Y] devant le juge des contentieux de la protection de Toulouse pour obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, leur condamnation solidaire au paiement des sommes suivantes :
– 12.166,92 euros en principal avec intérêts au taux conventionnel à compter du 08 février 2024,
– 500 euros à titre de dommages et intérêts,
– 600 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.
A l’audience du 04 juillet 2024, la SA CONSUMER FINANCE, représentée par son conseil, se réfère oralement à son assignation et maintient ses demandes.
Interrogée sur le respect des diverses obligations édictées par le Code de la consommation et les moyens pouvant être relevés d’office, elle a produit à l’audience la fiche de liaison avec le tribunal comportant ses observations par lesquelles elle a rejeté toute irrégularité.
Il convient de se reporter a son assignation pour un plus ample exposé des moyens conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
Convoqués par assignation remise à l’étude du commissaire de justice le 29 mars 2024, M.[O] [F] [H] [R] et Mme [D] [Y] n’ont pas comparu et n’étaient pas représentéd.
L’affaire a été mise en délibéré au 08 octobre 2024.
En application de l’article 472 du code de procédure civile, en l’absence du défendeur, le Tribunal ne fait droit à la demande que s’il l’estime recevable, régulière et bien fondée.
I. SUR LA DEMANDE EN PAIEMENT AU TITRE DU CONTRAT DE PRET PERSONNEL
A titre liminaire, il est rappelé que l’article R632-1 du code de la consommation permet au tribunal de relever d’office les moyens tirés de l’application du code de la consommation. Par ailleurs, la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne impose au juge national d’examiner d’office l’existence de violations de ses obligations par le prêteur afin de garantir l’effectivité de l’objectif de protection du consommateur poursuivi par la directive 2008/48/CE (cf. notamment CJUE, C-679/18, OPR FINANCE SRO, 05/03/2020).
Aux termes de l’article 1353 du Code civil celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
Il appartient donc au créancier qui réclame des sommes au titre d’un crédit à la consommation de justifier des sommes dues et de la régularité de l’opération, en produisant spontanément les documents nécessaires.
– Sur la régularité du contrat de prêt et le droit aux intérêts du prêteur
En l’espèce, la SA CONSUMER FINANCE produit, au soutien de ses demandes :
– L’offre préalable de crédit signée électroniquement par M. [O] [F] [H] [R] et Mme [D] [Y] le 24 mai 2022,
– le certificat de validation concernant la signature électronique,
– La fiche d’informations précontractuelles européenne normalisée (FIPEN),
– La notice d’assurance, le document d’information sur l’assurance,
– la consultation du FICP en date du 22 mai 2022 concernant chacun des emprunteurs,
– La fiche de dialogue sur les revenus et charges des emprunteurs, ainsi que la pièce d’identité de M. [O] [F] [H] [R] et Mme [D] [Y], un justificatif de domicile, les bulletins de paie d’avril et mai 2022 et le contrat de travail de M., et la fiche de paie d’avril 2022 concernant Mme,
– Le tableau d’amortissement du prêt,
– La lettre de mise en demeure par courrier recommandé avec accusé de réception du 29 novembre 2023 sommant M. [O] [F] [H] [R] et Mme [D] [Y] de régler leur dette à peine de déchéance du terme du crédit (AR non produit),la lettre de mise en demeure par courrier recommandé avec accusé de réception du 25 août 2023 sommant M. [O] [F] [H] [R] et Mme [D] [Y] de régler leur dette à peine de déchéance du terme du crédit (ARnon réclamé) et la lettre recommandée les avisant de la déchéance du terme en date du 18 septembre 2023 (AR non réclamé),
– Un décompte de la créance,
– Un historique des opérations effectuées sur le compte.
a)Sur la notice d’assurance et la FIPEN
En application des articles L. 312-12 et L.312-14 du code de la consommation, préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l’intermédiaire de crédit fournit à l’emprunteur, sous forme d’une fiche d’informations, sur support papier ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l’emprunteur, compte tenu de ses préférences, d’appréhender clairement l’étendue de son engagement. Cette fiche comporte, en caractères lisibles, la mention » Un crédit vous engage et doit être remboursé. Vérifiez vos capacités de remboursement avant de vous engager « .
L’article L341-2 prévoit que le prêteur qui n’a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 312-14 est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.
Aux termes de l’article L.312-29 du code de la consommation, lorsque l’offre de contrat de crédit est assortie d’une proposition d’assurance, une notice est remise à l’emprunteur, qui comporte les extraits des conditions générales de l’assurance le concernant, notamment les nom et adresse de l’assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus.
A défaut de production de la notice de prévue par l’article L.312-29, la déchéance du droit aux intérêts doit être prononcée par application de l’article L341-4 du même code
La charge de la preuve de l’existence de cette notice d’assurance et de sa remise repose sur l’organisme prêteur, lequel doit non seulement rapporter la preuve de l’existence de cette fiche mais encore de ce que sa teneur répond aux exigences de l’article précité.
En l’espèce, la SA CONSUMER FINANCE ne justifie pas de la remise du double de la fiche d’informations précontractuelles et celui de la notice d’information en matière d’assurances qui doivent être visées par les emprunteurs. Il convient de rappeler que la signature par l’emprunteur d’une fiche explicative et de l’offre préalable de crédit comportant chacune une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur lui a remis la fiche pré contractuelle d’information normalisée européenne et la notice d’assurance constitue seulement un indice qu’il incombe à celui-ci de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires (Civ. 1re, 8 avr. 2021, n° 19-20. 890 ; articles L.312-12 et L.312-7 du Code de la consommation).
Si le contrat de crédit apparaît signé électroniquement et que sa réalité n’est pas contestée par les débiteurs, le fichier de preuve protect&sign fourni ne permet pas de déterminer quels documents précontractuels ont été signés ou remis à chacun des emprunteurs.
En conséquence, et en l’absence d’indication de la signature de la fiche d’informations précontractuelles et la notice d’information en matière d’assurances par les emprunteurs, ni que ceux-ci ait pris connaissance de leur contenu, leur remise n’est pas attestée.
b) Sur l’avertissement donné quant à la défaillance de l’emprunteur
Les articles L312.-28 et R.312-10 du code de la consommation prévoient que le contrat de crédit est établi sur support papier ou sur un autre support durable, constituant un document distinct de tout support ou document publicitaire, ainsi que de la fiche mentionnée à l’article L. 312-12.
Conformément à l’article R.312-10 6°, c), le contrat de crédit doit comporter un avertissement relatif aux conséquences d’une défaillance de l’emprunteur, ces conséquences étant par ailleurs énumérées par l’article L.312-36.
L’avertissement doit donc mentionner les risques encourus au titre de l’article L.312-39 du même code, à savoir le remboursement immédiat du capital restant dû majoré des intérêts échus mais non payés et d’une indemnité, au titre de l’article 4 de l’arrêté du 26 octobre 2010, à savoir l’inscription au FICP et au titre de l’article L.141-3 du Code des assurances, à savoir son exclusion du bénéfice du contrat d’assurance s’il a été souscrit.
A défaut du respect de ces obligations, la déchéance du droit aux intérêts doit être prononcée par application de l’article L341-4 du même code.
Dans les paragraphes du contrat du 24 mai 2022 donnant l’avertissement relatif aux conséquences d’une défaillance de l’emprunteur (VI-2), l’exclusion du bénéfice de l’assurance en cas de défaillance n’est pas mentionnée, alors qu’une assurance a été souscrite par M. [O] [F] [H] [R] et Mme [D] [Y].
c) Sur la vérification de la solvabilité
En application de l’article L.312-16, avant de conclure le contrat de crédit et au plus tard sept jours après la signature de l’offre de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur, étant précisé que » de simples déclarations non étayées faites par un consommateur ne peuvent, en elles-mêmes, être qualifiées de suffisantes si elles ne sont pas accompagnées de pièces justificatives » (CJUE, 4e ch., 18 décembre 2014, aff. C-449/13, § 37). Le prêteur consulte le fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP).
Selon l’article L.312-17 du code de la consommation, lorsque les opérations de crédit sont conclues sur le lieu de vente ou au moyen d’une technique de communication à distance, une fiche d’informations distincte de la fiche mentionnée à l’article L. 312-12 est fournie par le prêteur ou par l’intermédiaire de crédit à l’emprunteur. Cette fiche, établie sur support papier ou sur un autre support durable, comporte notamment les éléments relatifs aux ressources et charges de l’emprunteur ainsi que, le cas échéant, aux prêts en cours contractés par ce dernier.
La fiche est signée ou son contenu confirmé par voie électronique par l’emprunteur et contribue à l’évaluation de sa solvabilité par le prêteur. Les informations figurant dans la fiche font l’objet d’une déclaration certifiant sur l’honneur leur exactitude.
Si le montant du crédit accordé est supérieur à 3.000 euros, la fiche est corroborée par des pièces justificatives, à jour au moment de l’établissement de la fiche d’information, dont la liste est définie par l’article D.312-8 du même code, à savoir :
1° Tout justificatif du domicile de l’emprunteur ; et
2° Tout justificatif du revenu de l’emprunteur ; et
3° Tout justificatif de l’identité de l’emprunteur.
L’article L341-2 prévoit que le prêteur qui n’a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 312-14 et L. 312-16 est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.
En l’espèce, la société CA CONSUMER FINANCE produit les justificatifs des ressources de M. [O] [F] [H] [R] mais ne produit, concernant Mme [D] [Y], qu’une seule fiche de paie du mois d’avril 2022 alors que le contrat porte sur la somme conséquente de 12.000 €. La société CA CONSUMER FINANCE se montre ainsi défaillante dans son obligation de vérifier la solvabilité des emprunteurs.
d) Sur le corps d’écriture du contrat
L’article R312-10 du code de la consommation dispose que » le contrat de crédit prévu à l’article L. 312-28 est rédigé en caractères dont la hauteur ne peut être inférieure à celle du corps huit. » et qu’il doit être » lisible « .
Le respect du corps 8 de la taille des caractères constitue une condition de lisibilité, pour l’emprunteur, des informations devant figurer au contrat selon les articles L312-28 et R312-10 ensembles du même code. Par suite, à défaut de respect de cette exigence, il doit être considéré que les informations énumérées à l’article R312-10 n’ont pas été valablement transmises au débiteur. Auquel cas, la déchéance du droit aux intérêts doit être prononcée par application de l’article L341-4 du même code.
Le corps huit correspond à » 3 mm en points Didot » (cf : A. Favre-Rochex, J.-Cl. Civil Annexes, Assurances, fasc. 5-1 : Contrat d’assurance – règles communes – cadre législatif et réglementaire, n° 78). On mesure le corps d’une lettre de la tête des lettres montantes, l, d, b, à la queue des lettres descendantes, g, p, q. Il suffit, pour s’assurer du respect de la prescription réglementaire, de diviser la hauteur en millimètres d’un paragraphe (mesuré du haut des lettres montantes de la première ligne au bas des lettres descendantes de la dernière ligne) par le nombre de lignes qu’il contient. Le quotient ainsi obtenu doit être au moins égal à trois millimètres.
Par arrêt en date du 20 décembre 2019 (n°16/05633) la cour d’appel de Rennes a pu juger que “ Cette hauteur n’est pas légalement définie et, au plan technique, la taille du corps huit ressort à 3 millimètres ou à 2,82 millimètres selon qu’elle est calculée en points Didot, utilisés en imprimerie, ou en points DTP ou Pica, utilisés en publication assistée par ordinateur.
Il n’y a donc pas de violation manifeste des dispositions de l’article R. 312-10 lorsque le prêteur soumet aux emprunteurs des offres dont la taille des caractères, mesurée selon les modalités précitées, est supérieure à 2,82 millimètres, dès lors que leur présentation les rend lisible.”
Afin de vérifier la lisibilité du contrat du 24 mai 2022 et notamment le respect de son écriture en caractère 8, il convient de vérifier si le quotient de la hauteur du paragraphe divisée par le nombre de ligne est supérieure à trois millimètres sur un paragraphe. Par exemple, le paragraphe intitulé » Convention sur la preuve et dématérialisation des relations contractuelles « , en page 1 de l’offre du contrat de crédit, mesure 22 millimètres et est composé de 8 lignes, chacune d’entre elle mesurant ainsi environ 2,75 millimètres.
De même le paragraphe “conditions d’acceptation et de rétractation du contrat de crédit”, en page 2 de l’offre, mesure également 22 mm et est composé de 8 lignes, chacune d’entre elle mesurant ainsi environ 2,75 millimètres.
Ainsi, le contrat ne respecte pas les exigences légales sur ce point, contrairement à ce que fait valoir la société CA CONSUMER FINANCE aux termes de son assignation.
En conséquence de l’ensemble de ces éléments, il convient de déchoir la société la société CA CONSUMER FINANCE de son droit aux intérêts.
– Sur les conséquences de la déchéance du droit aux intérêts et le montant de la créance
Les articles L312-39 et D312-16 du code de la consommation prévoient qu’en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l’emprunteur défaillant une indemnité égale à 8% du capital restant dû à la date de défaillance, sans préjudice de l’application de l’article 1231-5 et 1231 du code civil.
En application de l’article L.341-8 du même code, lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts dans les conditions prévues aux articles L. 341-1 à L. 341-7, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu. Les sommes déjà perçues par le prêteur au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux de l’intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.
La jurisprudence nationale étend cette déchéance à tous les accessoires des intérêts contractuels, à savoir les frais de toute nature mais également les primes d’assurance (cf. Civ. 1ère, 31/03/2011, n° 09-69963 et CA Paris, 29/09/2011, Pôle 04 ch. 09 n°10/01284).
Cette limitation légale de la créance du prêteur déchu du droit aux intérêts exclut qu’il puisse prétendre au paiement de l’indemnité légale de 8 %.
Du fait de la déchéance du droit aux intérêts, les sommes versées l’ont été au titre du capital exclusivement. Pour fixer les sommes dues par l’emprunteur, il convient alors de déduire du capital versé l’ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit par l’emprunteur depuis l’origine.
Les sommes dues se limiteront dès lors à la différence entre le montant effectivement débloqué au profit de M. [O] [F] [H] [R] et Mme [D] [Y] (12.000€) et les règlements effectués y compris après la déchéance du terme (1.751,95€), tels qu’ils résultent du décompte et de l’historique de compte, soit 10.248,05 euros.
Par conséquent, M. [O] [F] [H] [R] et Mme [D] [Y] seront condamnés solidairement à payer à la SA CONSUMER FINANCE la somme de 10.248,05 euros, au titre du capital restant dû et à l’exclusion de toute autre somme.
Bien que déchu de son droit aux intérêts, le prêteur est fondé, en vertu de l’article 1231-6 du Code civil, à réclamer à l’emprunteur le paiement des intérêts au taux légal sur le capital restant dû à compter de la mise en demeure, le taux d’intérêt étant en principe majoré de plein-droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice.
Cependant par arrêt du 27 mars 2014, la Cour de Justice de l’Union Européenne (affaire C-565/12, Le Crédit Lyonnais SA/Fesih Kalhan) a dit pour droit que l’article 23 de la directive 2008/48 s’oppose à l’application d’intérêts au taux légal lesquels sont en outre majorés de plein-droit deux mois après le caractère exécutoire d’une décision de justice prononçant la déchéance du droit aux intérêts si » les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur à la suite de l’application de la sanction de la déchéance des intérêts ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier s’il avait respecté » ses obligations découlant de ladite directive. La Cour de Justice a ainsi indiqué que » si la sanction de la déchéance des intérêts se trouvait affaiblie, voire purement et simplement annihilée, en raison du fait que l’application des intérêts au taux légal majoré est susceptible de compenser les effets d’une telle sanction, il en découlerait nécessairement que celle-ci ne présente pas un caractère véritablement dissuasif » (point 52).
En l’espèce, le taux légal est fixé à 4,92 % au 2eme semestre 2024 lorsque le créancier est un professionnel, tandis que le taux contractuel est fixé à 4,411%. Il résulte de ces éléments que les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal majoré de cinq points ou même au seul taux légal, nonobstant la déchéance des intérêts, sont supérieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier s’il avait respecté ses obligations découlant de la directive 2008/48.
Afin d’assurer l’effet de la directive 2008/48 notamment de son article 23, et par conséquent le caractère effectif et dissuasif de la sanction de la déchéance du droit aux intérêts, il convient d’écarter toute application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil ainsi que celle de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier, et de dire que cette somme ne produira aucun intérêt, même au taux légal.
II. SUR LA DEMANDE DE DOMMAGES ET INTERETS
La SA CONSUMER FINANCE ne démontre aucun préjudice distinct du simple retard de paiement et sera déboutée de sa demande en dommages et intérêts.
III. SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES
M. [O] [F] [H] [R] et Mme [D] [Y], parties perdantes, supporteront in solidum la charge des dépens, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.
L’équité et la situation économique des parties commandent de dispenser M.[O] [F] [H] [R] et Mme [D] [Y] du paiement des frais irrépétibles exposés par le prêteur, tel que permis par l’article 700 du code de procédure civile.
En application de l’article 514 du code de procédure civile, la présente décision est de plein droit exécutoire à titre provisoire.
Le juge des contentieux de la protection, par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,
PRONONCE la déchéance totale du droit aux intérêts contractuels de la
SA CONSUMER FINANCE concernant le contrat du 24 mai 2022 ;
CONDAMNE solidairement M. [O] [F] [H] [R] et
Mme [D] [Y] à payer à la SA CONSUMER FINANCE la somme de 10.248,05 euros;
DIT que cette somme ne portera pas intérêts ;
DEBOUTE la SA CONSUMER FINANCE de sa demande en dommages et intérêts;
DEBOUTE la SA CONSUMER FINANCE de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile;
CONDAMNE in solidum M.[O] [F] [H] [R] et Mme [D] [Y] aux dépens;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire à titre provisoire ;
REJETTE les prétentions pour le surplus ;
La greffière, La vice-présidente