Le 15 décembre 2010, le Crédit lyonnais a accordé un prêt immobilier de 155 000 € aux époux [W] pour l’achat de leur résidence principale, avec un remboursement sur 180 mensualités à un taux d’intérêt de 3,10 %. Le Crédit logement a agi en tant que caution. À partir de mars 2017, les époux [W] ont cessé de payer les mensualités. Le 4 février 2019, le Crédit logement a réglé 25 442,57 € au LCL pour les échéances impayées. Malgré une mise en demeure, les époux n’ont pas remboursé cette somme, ce qui a conduit le Crédit logement à les assigner en paiement le 1er avril 2019. Le tribunal judiciaire de Montpellier a rendu un jugement le 17 mars 2022, condamnant les époux à payer la somme due, ainsi que des intérêts et des frais. Les époux [W] ont interjeté appel de cette décision le 30 mars 2022, contestant la preuve de leur dette et demandant une réduction de celle-ci. Le Crédit logement a également formulé des demandes en réponse à l’appel.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
4e chambre civile
ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2024
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 22/01743 – N° Portalis DBVK-V-B7G-PLVT
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 17 mars 2022
Tribunal judiciaire de Montpellier – N° RG 19/01809
APPELANTS :
Monsieur [M] [W]
né le [Date naissance 3] 1953 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 4]
et
Madame [H] [K] épouse [W]
née le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentés par Me Nicolas BEDEL DE BUZAREINGUES de la SCP BEDEL DE BUZAREINGUES, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
S.A. Crédit Logement
Société anonyme immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 302 493 275 prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.
[Adresse 5]
[Localité 6]
Représentée par Me Caroline TREZEGUET de la SCP DORIA AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué sur l’audience par Me Ophélie MUOT, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 13 mai 2024 révoquée avant l’ouverture des débats et nouvelle clôture au 1er juillet 2024.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 01 juillet 2024,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre
M. Philippe BRUEY, Conseiller
M. Emmanuel GARCIA, Conseiller, magistrat de permanence désigné par ordonnance du premier président en date du 04 juillet 2024
Greffier lors des débats : Mme Sabine MICHEL
lors de la mise à disposition : Mme Henriane MILOT
ARRET :
– contradictoire ;
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffier.
* *
FAITS ET PROCÉDURE
1- Selon offre de prêt du 15 décembre 2010, acceptée le 28 décembre 2010, le Crédit lyonnais (LCL) a consenti à Mme [H] [K] épouse [W] et à M. [M] [W] (ci-après les époux [W]), un prêt immobilier d’un montant de 155000€ remboursable en 180 mensualités, au taux d’intérêt de 3,10 % l’an, afin de financer l’acquisition de leur résidence principale à [Localité 10] (Hérault).
2- Le Crédit logement s’est porté caution du remboursement de ce prêt.
3- A compter du mois de mars 2017, les époux [W] ont cessé d’honorer les échéances du prêt.
4- Le 4 février 2019, le Crédit logement, en exécution de son engagement de caution, a réglé au LCL la somme de 25 442,57 € au titre des échéances impayées du 15 avril 2017 au 15 janvier 2019.
5- Par courriers recommandés du 29 janvier 2019, reçus le 7 février 2019, le Crédit logement a vainement mis en demeure les époux [W] de lui régler la somme de 25 442,57 €, sous huitaine.
6- C’est dans ce contexte que par acte du 1er avril 2019, le Crédit logement a fait assigner en paiement les époux [W].
7- Par jugement contradictoire en date du 17 mars 2022, le tribunal judiciaire de Montpellier a :
Dit que la SA Crédit logement est recevable en son recours à l’encontre des époux [W], débiteurs principaux ;
Condamné solidairement les époux [W] à payer à la SA Crédit logement la somme de 25 442,57 € outre intérêts au taux légal à compter du 4 février 2019 ;
Ordonné la capitalisation des intérêts dus au moins pour une année entière par application des dispositions de l’article 1154 ancien devenu 1343-2 du code civil ;
Rejeté la demande de délais de paiement ;
Rejeté les demandes plus amples ou contraires ;
Dit n’y avoir lieu à ordonner l’exécution provisoire ;
Condamné in solidum les époux [W] à payer à la SA Crédit logement la somme de 1 500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamné in solidum les époux [W] aux dépens de l’instance en ce compris les frais d’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire portant sur l’immeuble cadastré A [Cadastre 7] à [Localité 10] (Hérault).
8- Le 30 mars 2022, les époux [W] ont relevé appel de ce jugement.
PRÉTENTIONS
9- Par dernières conclusions remises par voie électronique le 25 juin 2024, les époux [W] demandent à la cour :
A titre liminaire, ordonner le rabat de l’ordonnance de clôture au jour de l’audience ;
Infirmer la décision entreprise en ce qu’elle a dit qu’ils ne rapportaient pas la preuve de la régularisation des échéances des 15/04/2017, 15/05/2017 (le dispositif contenant une erreur matérielle en mentionnant deux fois la date du 15/06/2017) et de la régularisation partielle de l’échéance du 15/06/2017, et en ce qu’elle a dit que les époux [W] ne rapportaient pas la preuve de l’extinction, a minima partielle, de leur dette, et statuant à nouveau, de :
Dire et juger que la dette des époux [W] est éteinte, a minima partiellement ;
Dire et juger que la SA Crédit logement ne rapporte pas la preuve qu’elle a été appelée en paiement par le LCL, préalablement à son règlement ; dire et juger que la SA Crédit logement n’a pas averti les époux [W] préalablement à son paiement ;
Dire et juger que la SA Crédit logement n’a donc aucun recours à l’encontre des époux [W] ;
En conséquence, infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné les époux [W] au paiement de la somme de 25 442,57 € assortie des intérêts légaux à compter du 4 février 2019, et avec capitalisation des intérêts échus ;
Rejeter l’ensemble des demandes en paiement telles que formulées par la SA Crédit logement ;
Subsidiairement, dire et juger que la créance de la SA Crédit logement à l’égard des époux [W] doit être limitée à la somme de 5 392,16 € ;
Infirmer la décision entreprise en ce qu’elle a rejeté la demande de délais de paiement formulée par les époux [W] ;
Accorder les plus larges délais de paiement aux époux [W] ;
Condamner la SA Crédit logement au paiement de la somme de 1 500 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
10- Par dernières conclusions remises par voie électronique le 24 juin 2024, la SA Crédit logement demande à la cour de :
Ordonner le rabat de la clôture de la procédure à la date de l’audience de plaidoirie fixée au 3 juin 2024 et ce faisant admettre les présentes conclusions récapitulatives IV de la SA Crédit logement ;
A défaut, rejeter les conclusions récapitulatives III et pièces nouvelles signifiées par les époux [W] le 22 mai 2024, et les conclusions récapitulatives IV et pièces nouvelles des époux [W] soit à une date postérieure à la clôture de la procédure et non débattues contradictoirement ;
Statuer ce que de droit sur la recevabilité de l’appel formé à l’encontre du jugement entrepris, le dire non fondé ;
Débouter les époux [W] de toutes leurs demandes, fins et conclusions ; les rejeter à toutes fins qu’elles comportent;
Confirmer en toutes ses dispositions, si besoin par substitution de motifs, le jugement entrepris ;
Condamner solidairement les époux [W] à porter et payer au Crédit logement la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.
11- Vu l’ordonnance du clôture du 13 mai 2024 et la nouvelle ordonnance la révoquant et fixant à sa date du 1er juillet 2024 la nouvelle clôture.
Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
12- les parties sont en état de cautionnement antérieur à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021.
13- selon l’article 2308 alinéa 2 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, ‘Lorsque la caution aura payé sans être poursuivie et sans avoir averti le débiteur principal, elle n’aura point de recours contre lui dans le cas où, au moment du paiement, ce débiteur aurait eu des moyens pour faire déclarer la dette éteinte; sauf son action en répétition contre le créancier.’
14- il est constant que ce texte a vocation à s’appliquer quelle que soit la nature du recours exercé par la caution, personnel, comme en l’espèce, ou subrogatoire.
15- il est également constant que l’application de ce texte est soumis à la démonstration cumulative de ses trois conditions : avoir payé sans être poursuivi ; ne pas avoir averti le débiteur principal; alors que celui-ci aurait eu des moyens de faire déclarer la dette éteinte.
16- Crédit Logement soutient avoir payé le 04 février 2019 sur la demande du LCL formulée le 24 janvier 2019 au moyen d’un site extranet formalisant une demande d’appel en garantie.
17- la cour est en présence d’un document informatique dénommé ‘demande d’appel en garantie’ non datée. Est joint un décompte sur huit pages relatif au prêt 40030599X3AX11AH pour la période du 15/01/2024 au 24/01/2019. Les époux [W] leur contestent toute valeur probante, soulignant que ces documents sont édités sans indication de provenance ni date certaine de telle sorte que la cour ne peut leur conférer la moindre valeur probante d’un paiement sur la poursuite de LCL.
18- Or, le Crédit Logement conforte l’existence de cette demande d’appel en garantie et de sa date par la production de captures d’écran et surtout par la production de ses courriers adressés sous forme recommandée en date du 29 janvier 2019, avis de réception signés le 7 février 2019 qui les informaient que ‘la banque nous a informé de votre défaillance dans le paiement de votre crédit et nous a demandé de payer à votre place.’ Il existe donc un faisceau d’indices convergents de nature à établir la réalité des poursuites antérieures au paiement de la part du créancier.
19 – s’agissant de la condition relative à l’avertissement préalable au paiement, ces courriers recommandés du 29 janvier 2019 n’ont été remis à leurs destinataires que le 7 février 2019, postérieurement au paiement du 4 février 2019. Les époux [W] n’ont donc pas été avertis du paiement qu’elle allait effectuer, peu important l’encaissement par le LCL du règlement le 13 février 2019 et sauf à dénier toute valeur à la date du 4 février 2019 figurant sur la quittance subrogative concomitante au paiement.
20- s’agissant des moyens dont disposaient les époux [W] de faire déclare la dette éteinte en tout ou partie, il s’avère que la cour partage l’analyse des premiers juges quant à l’insuffisante démonstration par eux de l’exacte imputation des versements qu’ils allèguent comme diminuant d’autant leur créance envers LCL, les décomptes, évolutifs, et l’instance toujours pendante entre la banque et eux mêmes, actualisée par les conclusions du LCL du 15 septembre 2023, démontrant la persistance du litige quant à l’imputation des fonds au crédit personnel de 33000€ et au crédit immobilier seul objet de la garantie de Crédit Logement. Au jour du paiement, les époux [W] ne disposaient donc pas de moyens de faire déclarer la dette éteinte.
21- au moins deux des conditions nécessaires pour mettre obstacle au recours de la caution n’étant pas remplies, les époux [W] sont tenus envers Crédit logement sur le fondement de l’article 2305 ancien du code civil à lui payer la somme de 25442,57 € avec intérêts au taux légal à compter du 4 février 2019 et le jugement sera confirmé de ce chef.
22- il convient en outre d’ajouter que les époux [W] invoquent une compensation limitant leur dette résiduelle à hauteur de 5392,12€ alors que Crédit Logement qui exerce son recours personnel ne peut se voir opposer des exceptions que le débiteur principal pourrait opposer au créancier principal. Ce moyen de compensation est donc inopposable au Crédit Logement.
23- s’agissant de la demande de délais de paiement, les époux [W] qui ont d’ores et déjà bénéficié, en l’absence d’exécution provisoire du jugement, de délais supérieurs à ceux que le juge peut leur accorder sur le fondement de l’article 1343-5 du code civil ne précisent ni ne justifient de plus fort leur situation économique actuelle qui permettrait de faire droit à une telle demande.
24- parties perdantes au sens de l’article 696 du code de procédure civile, les époux [W] supporteront les dépens d’appel.
Statuant contradictoirement
Confirme le jugement en toutes ses dispositions.
Y ajoutant
Condamne Mme [H] [K] épouse [W] et M.[M] [W] aux dépens d’appel.
Condamne Mme [H] [K] épouse [W] et M.[M] [W] à payer à la SA Crédit Logement la somme de 2000€ en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT