La SCI Les 3 Caryatides a fait construire un immeuble de bureaux à Dammarie-les-Lys, avec plusieurs intervenants, dont le Cabinet d’Architecture Alibert et la société SO.FRA.BAT. Les travaux ont été réceptionnés sans réserve le 20 mars 2009. Suite à des défauts de couverture constatés, la SCI a assigné SO.FRA.BAT et son assureur en référé pour désigner un expert. Une expertise a été ordonnée, et le rapport a été déposé en août 2016. En mars 2017, la SCI a assigné plusieurs parties pour obtenir des dommages-intérêts. Le tribunal a débouté la SCI de ses demandes en février 2020, entraînant un appel de sa part.
Entre-temps, la société SO.FRA.BAT a ouvert une procédure collective, ce qui a interrompu l’instance. La SCI a déclaré sa créance et a assigné l’administrateur judiciaire de SO.FRA.BAT. La cour a autorisé la réinscription de l’affaire en janvier 2023. Dans ses conclusions, la SCI demande la confirmation du jugement de première instance, tout en réclamant des sommes importantes à plusieurs parties. SO.FRA.BAT et ses co-défendeurs demandent la confirmation du jugement et le déboutement de la SCI. Les autres parties, dont Axa France IARD et le Cabinet d’Architecture Alibert, soutiennent également le jugement initial et formulent des demandes reconventionnelles. La clôture de l’affaire a été prononcée en avril 2024. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 6
ARRET DU 20 SEPTEMBRE 2024
(n° /2024, 15 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/20532 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGZ7C
Décision déférée à la Cour : Jugement du 4 Février 2020 – Tribunal judiciaire de MELUN RG n° 17/00908
APPELANTE
SCI LES 3 CARYATIDES agissant poursuites et diligences de ses gérants, Madame [D] [K] et Monsieur [S] [K]
[Adresse 16]
[Localité 13]
Représentée à l’audience par Me Guillaume CADIX de l’AARPI GALLICA, avocat au barreau de PARIS, toque : B0667
INTIMEES
S.A.R.L. SO.FRA.BAT prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 12]
Représentée par Me Christine DAGNEAU-BACHIMONT de la SCPA DAGNEAU-BACHIMONT & DUQUESNE, avocat au barreau de MELUN
Me [V] [J] (SELARL MJC2A) – Mandataire judiciaire de la S.A.R.L. SO.FRA.BAT
[Adresse 1]
[Localité 14]
Représenté par Me Christine DAGNEAU-BACHIMONT de la SCPA DAGNEAU-BACHIMONT & DUQUESNE, avocat au barreau de MELUN
Me [H] [X] (SELARL AJ ASSOCIES) – Administrateur judiciaire de la S.A.R.L. SO.FRA.BAT
[Adresse 9]
[Localité 14]
Représenté par Me Christine DAGNEAU-BACHIMONT de la SCPA DAGNEAU-BACHIMONT & DUQUESNE, avocat au barreau de MELUN
S.A. AXA FRANCE IARD assureur de la société SO.FRA.BAT, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 8]
[Localité 17]
Représentée par Me Sophie BELLON de la SELARL GALDOS & BELLON, avocat au barreau de PARIS, toque : R056, substituée à l’audience par Me Olivia WICKER
S.A. MMA IARD prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 10]
Représentée par Me Laurence IMBERT de la SELARL IMBERT & ASSOCIES, avocat au barreau de MELUN
LA MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 11]
Représentée par Me Jean DE BAZELAIRE DE LESSEUX de l’AARPI COSTER BAZELAIRE ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0244
S.A.R.L. CABINET D’ARCHITECTURE ALIBERT
[Adresse 5]
[Localité 15]
Représentée par Me Jean DE BAZELAIRE DE LESSEUX de l’AARPI COSTER BAZELAIRE ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0244
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 30 Mai 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Valérie GUILLAUDIER, conseillère faisant fonction de présidente
Madame Laura TARDY, conseillère
Madame Viviane SZLAMOVICZ, conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Laura Tardy dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Céline RICHARD
ARRET :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Laura TARDY, conseillère, pour la conseillère faisant fonction de présidente empéchée et par Alexandre DARJ, greffier, présent lors de la mise à disposition.
La SCI Les 3 Caryatides a fait construire, en qualité de maître d’ouvrage, un immeuble de bureaux à Dammarie-les-Lys.
Sont intervenues à l’opération :
– la société Cabinet d’Architecture Alibert, en tant que maître d »uvre, assurée auprès de la société Mutuelle des Architectes de France (la société MAF),
– la société SO.FRA.BAT notamment pour les lots maçonnerie, VRD, charpente et couverture, assurée auprès de la société Axa France IARD,
– la société CMV, sous-traitante de la précédente, en charge des travaux de couverture, assurée par la société Covea Risks aux droits de laquelle vient la société MMA IARD.
Les travaux ont été réceptionnés le 20 mars 2009 sans réserve.
La SCI Les 3 Caryatides, constatant des défauts de couverture de l’immeuble, a assigné en référé la société SO.FRA.BAT et son assureur, la société Axa France IARD, aux fins de désignation d’un expert.
Par ordonnance du 3 octobre 2014, le juge des référés a ordonné une expertise et a désigné M. [O] [N] [M] pour y procéder.
Cette ordonnance du 3 octobre 2014 a été déclarée commune à la société Cabinet d’Architecture Alibert et à la société MAF par ordonnance du 3 avril 2015 et à la société Covea Risk par ordonnance du 19 juin 2015.
M. [N] [M] a déposé son rapport le 20 août 2016.
Par acte du 3 mars 2017, la SCI Les 3 Caryatides a assigné les sociétés SO.FRA.BAT, Axa France IARD, Cabinet d’Architecture Alibert, MAF et MMA IARD aux fins de les voir condamnées à lui payer la somme de 83 736,07 euros TTC.
Par ordonnance du 9 avril 2018, le juge de la mise en état a débouté la SCI Les 3 Caryatides de sa demande d’expertise sur de nouveaux désordres.
Par jugement en date du 4 février 2020, le tribunal judiciaire de Melun a statué en ces termes :
– déboute la SCI Les 3 Caryatides de toutes ses demandes,
– déboute la société SO.FRA.BAT de sa demande de mise hors de cause,
– dit n’y avoir lieu à statuer sur les demandes de garantie,
– condamne la SCI Les 3 Caryatides aux dépens qui comprendront les frais d’expertise,
– dit que les avocats en la cause en ayant fait la demande, pourront, chacun en ce qui le concerne, recouvrer sur la partie condamnée ceux des dépens dont ils auront fait l’avance sans avoir reçu provision en application de l’article 699 du code de procédure civile,
– condamne la SCI Les 3 Caryatides à payer à la société SO.FRA.BAT, la société Axa France IARD, la société Cabinet d’Architecture Alibert, la société MAF et la MMA la somme de 700 euros chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.
Par déclaration en date du 6 mars 2020, la SCI Les 3 Caryatides a interjeté appel du jugement, intimant devant la cour d’appel de Paris la société SO.FRA.BAT, la société Axa France IARD, la société MAF, la société MMA IARD et la société Cabinet d’Architecture Alibert.
Par ordonnance en date du 27 octobre 2022, le conseiller de la mise en état a constaté l’interruption de l’instance en raison de l’ouverture d’une procédure collective au profit de la société SO.FRA.BAT et a fixé au 24 novembre 2022 le délai pour accomplir les diligences prévues par l’article R. 622-20 du code de commerce.
Par ordonnance en date du 21 novembre 2022, le tribunal de commerce de Melun a relevé la SCI Les 3 Caryatides de la forclusion encourue.
Par acte en date du 1er décembre 2022, la SCI Les 3 Caryatides a déclaré sa créance.
Par acte en date du 14 décembre 2022, la SCI Les 3 Caryatides a assigné en intervention forcée Maître [X] [H] de la société AJ Associés, administrateur judiciaire de la société SO.FRA.BAT et Maître [J] [V] de la société MJC2A, mandataire judiciaire de la société SO.FRA.BAT.
Par ordonnance en date du 15 décembre 2022, le conseiller de la mise en état a ordonné la radiation de l’affaire et rappelé que le réenrôlement est subordonné à l’accord préalable du magistrat en charge de la mise en état sur justification de l’accomplissement des diligences dont le défaut a entraîné la radiation.
Le 20 décembre 2022, la SCI Les 3 Caryatides a déposé une requête en reprise de l’instance.
Par ordonnance en date du 19 janvier 2023, le conseiller de la mise en état a autorisé la réinscription de l’affaire au rôle de la cour compte tenu du fait que la SCI Les 3 Caryatides, demanderesse à la requête, justifiait de l’accomplissement des diligences prévues à l’article R.622-20 du code de commerce et que les défendeurs à la requête ne s’y opposaient pas.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 11 avril 2024, la SCI Les 3 Caryatides demande à la cour de :
– confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Melun du 4 février 2020 (RG N°17/00908), au besoin par substitution de motifs :
– en ce qu’il a reçu les demandes de la SCI Les 3 Caryatides,
– en ce qu’il a rejeté la demande de mise hors de cause de la société SO.FRA.BAT,
– réformer ce jugement :
– en ce qu’il a rejeté, au fond, les demandes de la SCI Les 3 Caryatides,
– en ce qu’il l’a condamnée aux dépens,
– en ce qu’il l’a condamnée au paiement d’une indemnité de procédure,
Et statuant à nouveau :
– condamner in solidum la société SO.FRA.BAT (fixer à son passif), la société Axa France IARD, la société Cabinet d’architecture Alibert, la société MAF, la société MMA (anciennement Covea Risks) à payer à la SCI Les 3 Caryatides la somme de 144 603,52 euros TTC, subsidiairement celle de 83 736,07 euros TTC, avec intérêts au taux légal, à compter de la présente assignation et capitalisation des intérêts,
– condamner in solidum la société SO.FRA.BAT (fixer à son passif), la société Axa France IARD, la société Cabinet d’Architecture Alibert, la société MAF, la société MMA (anciennement Covea Risks) aux entiers dépens, avec bénéfice à Maître Guillaume Cadix, du recouvrement direct de l’article 699 du code de procédure civile,
– condamner in solidum la société SO.FRA.BAT (fixer à son passif), la société Axa France IARD, la société Cabinet d’Architecture Alibert, la société MAF, la société MMA (anciennement Covea Risks) à payer à la SCI Les 3 Caryatides la somme de 15 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens, de première instance et d’appel,
– rejeter toute prétention contraire.
Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 25 janvier 2023, la société SO.FRA.BAT, la société AJ Associés et la société MJC2A demandent à la cour de :
A titre principal,
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de Melun dont appel,
– débouter la SCI Les 3 Caryatides de l’intégralité de ses demandes à l’encontre de la société SO.FRA.BAT,
A titre subsidiaire,
– limiter le montant des condamnations à la somme de 23 490,22 euros ;
– condamner les sociétés Axa France IARD, MMA (anciennement Covea Risks), Cabinet d’Architecture Alibert et son assureur la société MAF à relever et garantir la société SO.FRA.BAT de toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre ;
En tous cas,
– condamner la SCI Les 3 Caryatides à payer à la société SO.FRA.BAT une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la SCI Les 3 Caryatides aux entiers dépens de l’instance, comprenant les honoraires d’expertise judiciaire, dont distraction, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, au profit de Maître Christine Dagneau, avocat aux offres de droit, sur son affirmation qu’elle n’en a pas reçu provision.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 25 janvier 2023, la société MMA IARD demande à la cour de :
– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a :
– débouté la SCI Les 3 Caryatides de toutes ses demandes,
– débouté la société SO.FRA.BAT de sa demande de mise hors de cause,
– dit n’y avoir lieu à statuer sur les demandes de garantie,
– condamné la SCI Les 3 Caryatides aux dépens qui comprendront les frais d’expertise (‘),
– condamné la SCI Les 3 Caryatides à payer à la société SO.FRA.BAT, la société Axa France IARD, la société Cabinet d’Architecture Alibert, la société MAF et la société MMA IARD la somme de 700 euros chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,
Recevant la SCI Les 3 Caryatides en son appel,
– l’en débouter,
Constatant que M. [N] [M] relève l’absence de désordre,
– débouter la SCI Les 3 Caryatides de toutes ses demandes, fins et conclusions en ce qu’elles sont dirigées à l’encontre de la société MMA IARD,
– débouter la société SO.FRA.BAT, la société Axa France IARD, la société Cabinet d’Architecture Alibert et la société MAF de toutes leurs demandes, fins et conclusions en ce qu’elles sont dirigées à l’encontre de la société MMA IARD,
Subsidiairement et si par extraordinaire la juridiction estimait pouvoir accueillir en leur principe les demandes de la SCI Les 3 Caryatides,
– limiter les condamnations au quantum retenu par l’expert judiciaire,
– limiter la responsabilité de la société CMV compte tenu de l’intervention de SO.FRA.BAT en tant que locateur d’ouvrage et de l’architecte,
En tout état de cause, au regard des dispositions du contrat n° 111369616,
– dire et juger que les dommages subis par les ouvrages ou travaux effectués par l’assuré et ses sous-traitants sont exclus,
– dire y avoir lieu à application de la franchise contractuelle opposable à hauteur de la somme de 1 428 euros,
En tout état de cause, recevant la société MMA IARD en sa demande reconventionnelle,
– condamner toute partie perdante à payer à la société MMA IARD la somme de 4 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner toute partie perdante aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Laurence Imbert, avocat associée de la SELARL Imbert & Associés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 14 septembre 2022, la société Axa France IARD, en qualité d’assureur de la société SO.FRA.BAT, demande à la cour de :
A titre principal
– déclarer mal fondée la SCI Les 3 Caryatides en son appel ainsi qu’en l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
– constater que c’est à bon droit que les premiers juges ont jugé qu’en l’absence de désordre compromettant la solidité de l’immeuble ou le rendant impropre à sa destination, la responsabilité décennale des différents intervenants à l’opération de construction ne peut être recherchée ;
– dire et juger que les garanties de la société Axa France IARD ne peuvent s’appliquer au présent litige au regard des termes de la police et des clauses formelles d’exclusion de garantie définies au contrat,
– débouter, dès lors, la SCI Les 3 Caryatides de ses demandes de condamnation dirigées contre la société Axa France IARD, en qualité d’assureur de la société SO.FRA.BAT, pour le tout ;
– rejeter, dès lors, l’appel interjeté par la SCI Les 3 Caryatides ainsi que toute demande plus ample dirigée contre la société Axa France IARD ;
Et partant,
– confirmer purement et simplement en toutes ses dispositions le jugement critiqué ;
A titre subsidiaire, si par extraordinaire, la cour venait à retenir la garantie de la société Axa France IARD,
– limiter le coût des travaux de reprise aux sommes retenues par l’expert judiciaire,
– débouter, ou à défaut, minorer, la somme sollicitée au titre de l’article 700 du code de procédure civile par la SCI Les 3 Caryatides,
En tout état de cause,
– condamner in solidum ou à défaut solidairement la société CMV, son assureur la société MMA, la société Cabinet d’Architecture Alibert et son assureur, la société MAF, dont les responsabilités ont été clairement établies par l’expert judiciaire en page 18 de son rapport, à relever et garantir indemne la société Axa France IARD, assureur de la société SO.FRA.BAT, de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre en principal, intérêts, frais et accessoires,
– dire que la société Axa France IARD ne peut être tenue que dans les termes et limites de son contrat d’assurance, lequel prévoit notamment l’application de ses franchises opposables d’un montant de 1 698 euros,
– écarter toute demande qui contreviendrait ou excéderait les limites de garantie prévues au contrat,
A titre reconventionnel,
– condamner la SCI Les 3 Caryatides et, à défaut, tout succombant à payer à la société Axa France IARD la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la SCI Les 3 Caryatides et, à défaut, tout succombant au paiement des entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Sophie Bellon conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 14 septembre 2022, la société Cabinet d’Architecture Alibert et la société MAF demandent à la cour de :
– confirmer le jugement entrepris et débouter la SCI Les 3 Caryatides et toutes autres parties de l’intégralité de leurs demandes formées à l’endroit de la société Cabinet d’Architecture Alibert et de la société MAF ;
– dire et juger irrecevables la SCI Les 3 Caryatides et toutes parties en leurs demandes formées contre la société Cabinet d’Architecture Alibert et la société MAF pour défaut de saisine préalable du Conseil régional de l’Ordre des Architectes et pour cause de prescription,
– condamner toute partie perdante aux entiers dépens qui pourront être recouvrés directement par Maître de Bazelaire de Lesseux, avocat, par application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
– condamner toute partie perdante à verser à la société MAF la somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Subsidiairement :
– débouter la SCI Les 3 Caryatides et toutes autres parties de leurs demandes formées contre la société Cabinet d’Architecture Alibert et la société MAF,
– limiter le montant des condamnations aux sommes retenues par l’expert judiciaire dans son rapport ;
– condamner la société SO.FRA.BAT, la société Axa France IARD en qualité d’assureur de la société SO.FRA.BAT, la société MMA IARD anciennement Covea Risks en qualité d’assureur de la société CMV à garantir la société Cabinet d’Architecture Alibert et la société MAF de toute condamnation prononcée à leur encontre ;
– ne pas entrer en voie de condamnation solidaire ou in solidum à l’endroit de la société Cabinet d’Architecture Alibert et de la société MAF avec les autres parties,
– appliquer les termes et limites de la police d’assurance souscrite par la société Cabinet d’Architecture Alibert auprès de la société MAF, et notamment déclarer opposable la franchise pour toute condamnation prononcée sur un fondement autre que décennal.
La clôture a été prononcée par ordonnance du 25 avril 2024.
A titre liminaire, la cour constate que la société SO.FRA.BAT, représentée par Maître [H], administrateur judiciaire, et Maître [V], mandataire judiciaire, développe dans ses écritures une fin de non-recevoir tirée de la prescription quinquennale de droit commun opposée à la SCI Les 3 Caryatides. Cependant, cette prétention ne figure pas dans le dispositif de ses conclusions, de sorte que la cour n’en est pas saisie.
Sur la recevabilité des demandes de la SCI Les 3 Caryatides à l’égard des sociétés Cabinet d’Architecture Alibert et MAF
Moyens des parties :
La SCI Les 3 Caryatides fait valoir que les fins de non-recevoir soulevées par les sociétés Cabinet d’Architecture Alibert et MAF doivent être rejetées en premier lieu car ces sociétés demandent à la cour, dans leur dispositif, d’examiner la forme après le fond, ce qui est contraire à l’article 122 du code de procédure civile et en justifie le rejet. Elle rappelle également la compétence exclusive du conseiller de la mise en état pour statuer sur les fins de non-recevoir conformément à l’article 789 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que la clause de saisine du conseil régional des architectes pour avis lui est inopposable par analogie avec les clauses attributives de compétence et parce qu’elle est trop imprécise sur la nature du litige visé. Elle ajoute que les intimées n’ont pas opposé la clause lors de la procédure en référé et qu’elles y ont implicitement renoncé. Enfin, elle rappelle que la clause ne peut lui être opposée par la société MAF.
Quant à la prescription, la société indique que la responsabilité des constructeurs et sous-traitants à l’égard du maître de l’ouvrage est soumise à un régime particulier, dérogatoire du droit commun de l’article 2224 du code civil, et que la prescription est décennale par application des articles 1792-4-1 à 1792-4-3 du code civil. Elle rappelle que la réception a été prononcée. Elle soutient que le délai décennal a été interrompu et que son action n’est pas prescrite.
Les sociétés Cabinet d’Architecture Alibert et MAF soutiennent qu’en l’absence de désordre de nature décennale, le litige est contractuel et que la clause de saisine préalable du conseil régional de l’ordre des architectes s’applique, la société Cabinet d’Architecture Alibert pouvant valablement l’opposer à la SCI Les 3 Caryatides. Elles rappellent que les fins de non-recevoir peuvent être opposées en tout état de cause y compris en appel et que la clause instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge est licite et suspensive du délai de prescription. La société MAF indique pouvoir également opposer la clause à la SCI car elle est subrogée dans les droits de son assurée.
Les sociétés soutiennent que l’action de la SCI, fondée sur la responsabilité contractuelle, est soumise à la prescription quinquennale de l’article 2224 du code civil et que son action est prescrite, ayant commencé à courir à compter de la réception le 20 mars 2009 et n’ayant été suspendue que par l’assignation en référé du 3 février 2015, jusqu’à l’ordonnance d’expertise rendue le 3 avril 2015, en précisant que la prescription est expirée le 20 mai 2014. Elles font valoir que les dispositions de l’article 1792-4-3 du code civil ne s’appliquent pas car elles ne s’appliquent qu’aux désordres de nature décennale et aux recours entre sous-traitants.
Réponse de la cour :
1) Sur la recevabilité des fins de non-recevoir
L’article 122 du code de procédure civile énonce que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
Les fins de non-recevoir peuvent être soulevées en tout état de cause de sorte que le fait que les sociétés Cabinet d’Architecture Alibert et MAF aient, dans le dispositif de leurs écritures, sollicité la confirmation du jugement avant d’opposer deux fins de non-recevoir à la SCI Les 3 Caryatides est sans incidence sur la recevabilité de celles-ci.
La SCI Les 3 Caryatides oppose également, dans le corps de ses conclusions, l’incompétence de la cour pour statuer sur les fins de non-recevoir soulevées par les sociétés Cabinet d’Architecture Alibert et MAF au profit du conseiller de la mise en état. Cependant, cette prétention, tirée de l’incompétence de la cour, ne figure pas dans le dispositif de ses conclusions. Dès lors, la cour n’est pas saisie d’une prétention tirée de son incompétence pour statuer sur les fins de non-recevoir opposées par les intimées.
Enfin, la SCI Les 3 Caryatides soutient que les sociétés Cabinet d’Architecture Alibert et MAF ont implicitement renoncé à se prévaloir de l’application de la clause de saisine préalable de l’ordre des architectes dès lors qu’elles ne l’ont pas soulevée dès la procédure en référé. Cependant, la circonstance que les sociétés intimées n’aient pas opposé la fin de non-recevoir aux demandes de la SCI en première instance dès la procédure en référé, et ne l’aient fait qu’au moment de la procédure au fond, n’est pas suffisant pour caractériser leur volonté univoque de renoncer à cette fin de non-recevoir.
Par conséquent, les sociétés Cabinet d’Architecture Alibert et MAF sont recevables à soulever des fins de non-recevoir.
2) Sur la fin de non-recevoir tirée de la clause de saisine préalable du conseil régional de l’ordre des architectes
En l’espèce, le contrat conclu entre la SCI Les 3 Caryatides et la société Cabinet d’Architecture Alibert stipule en son article 5.2 qu »en cas de litige portant sur l’exécution du présent contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le Conseil Régional de l’Ordre des Architectes dont relève l’architecte, avant toute procédure judiciaire.’
Il est constant que la clause imposant la saisine pour avis de l’ordre des architectes préalablement à toute action judiciaire institue une procédure de conciliation préalable dont la méconnaissance constitue une fin de non-recevoir insusceptible de régularisation (Cass., 3e Civ., 16 novembre 2017, n° 16-24.642). Cette clause n’est pas applicable lorsque le litige porte sur la réparation de désordres de nature décennale relevant des dispositions de l’article 1792 du code civil (Cass., 3e Civ., 23 mai 2007, n° 06-15.668). De même, cette clause est présumée abusive dans les relations entre consommateur et professionnel (Cass., 3e Civ., 11 mai 2022, n° 21-16.023).
L’action de la SCI Les 3 Caryatides dirigée contre l’architecte étant fondée à titre principal sur l’article 1792 du code civil, la clause n’est pas applicable, le fait que celui-ci soutienne qu’il n’y a pas de désordre décennal étant manifestement inopérant dans le cadre de l’examen de la fin de non-recevoir.
En ce qui concerne la société MAF, les premiers juges ont retenu à bon droit que la saisine préalable, par le maître d’ouvrage, de l’ordre des architectes prévue au contrat le liant à l’architecte, n’est pas une condition de recevabilité de l’action directe engagée contre l’assureur de celui-ci.
Le tribunal a, dans les motifs de sa décision, rejeté la fin de non-recevoir mais ne l’a pas reprise dans le dispositif du jugement. Il convient donc d’ajouter à celui-ci et de rejeter la fin de non-recevoir tirée du défaut de saisine préalable du conseil régional de l’ordre des architectes.
3) Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription
Soutenant que l’action de la SCI Les 3 Caryatides ne peut être fondée que sur la responsabilité civile de droit commun et non la garantie décennale, les sociétés Cabinet d’Architecture Alibert et MAF opposent une fin de non-recevoir tirée de la prescription quinquennale acquise.
Aux termes de l’article 1792-4-3 du code civil, en dehors des actions régies par les articles 1792-3, 1792-4-1 et 1792-4-2, les actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs désignés aux articles 1792 et 1792-1 et leurs sous-traitants se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux.
Le délai de dix ans offert au maître d’ouvrage pour agir contre les constructeurs sur le fondement de l’article 1792-4-3 du code civil est un délai de forclusion, qui n’est pas, sauf dispositions contraires, régi par les dispositions concernant la prescription, le régime de responsabilité contractuelle de droit commun des constructeurs étant harmonisé avec celui de la garantie décennale.
La SCI Les 3 Caryatides, maître d’ouvrage, ayant dénoncé des désordres postérieurs à la réception, le délai applicable est le délai de forclusion prévu par l’article 1792-4-3 du code civil et non le délai de prescription de droit commun de cinq ans comme soutenu par les sociétés Cabinet d’Architecture Alibert et MAF.
La réception étant intervenue le 20 mars 2009, l’action en responsabilité, que ce soit sur le fondement de la garantie décennale ou la responsabilité contractuelle des constructeurs, devait être exercée avant le 20 mars 2019.
La SCI Les 3 Caryatides a assigné les sociétés Cabinet d’Architecture Alibert et MAF au fond devant le tribunal de grande instance de Melun le 3 mars 2017. Son action n’est donc pas forclose, étant précisé en outre que la procédure préalable devant le juge des référés avait interrompu ce délai pour en faire courir un nouveau.
L’action intentée par la SCI Les 3 Caryatides n’est donc ni prescrite ni forclose.
Le tribunal a, dans les motifs de sa décision, rejeté la fin de non-recevoir mais ne l’a pas reprise dans le dispositif du jugement. Il convient donc d’ajouter à celui-ci et de rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription et de la forclusion.
Sur les demandes de la SCI Les 3 Caryatides
1) Sur la réparation des désordres
Moyens des parties :
La SCI Les 3 Caryatides sollicite la condamnation des sociétés SO.FRA.BAT (ou la fixation à son passif), Cabinet d’Architecture Alibert, leurs assureurs et la société MMA IARD en qualité d’assureur de la société CMV, sous-traitant de la société SO.FRA.BAT, à l’indemniser des préjudices tirés des désordres de la couverture, à hauteur de la somme de 144 603,52 euros TTC à titre principal, de la somme de 83 736,07 euros TTC à titre subsidiaire. Elle soutient que l’entrepreneur a manqué à son obligation de résultat de livrer un ouvrage exempt de vices, et que l’entrepreneur principal répond de la faute de son sous-traitant. Elle se prévaut également de la faute de l’architecte qui avait une mission complète et qui aurait dû relever les malfaçons qui sont nombreuses et généralisées. Au titre des travaux réparatoires, elle sollicite la reprise des désordres des lucarnes ainsi que ceux des bavettes et des bandes porte-solin, ainsi qu’une majoration de 12 % pour l’assurance dommages-ouvrage obligatoire (2 %) et le coût de la maîtrise d’oeuvre (10 %).
La société SO.FRA.BAT, représentée par Maître [H], administrateur judiciaire et par Maître [V], mandataire judiciaire, indique qu’aucun désordre n’est de nature décennale et que les demandes fondées sur les dispositions de l’article 1792 du code civil doivent être rejetées. Elle se prévaut de l’expertise et de la note du sapiteur et précise que les désordres relevés par la SCI, comme par l’expert, concernent en réalité l’autre immeuble construit (corrosion du zinc), que la longueur des bavettes n’est pas une malfaçon, comme les bandes porte-solin qui sont conformes au DTU. Elle précise que l’absence de voligeage au-dessus des lucarnes n’a pu être constatée car la SCI a refusé de déposer les éléments, comme l’absence de membrane sur la partie verticale des lucarnes entre le béton et le zinc. Elle conteste le coût de la reprise dont elle soutient qu’elle est injustifiée. La société Axa France IARD, son assureur, conclut dans le même sens.
La société Cabinet d’Architecture Alibert rappelle qu’elle n’est pas conducteur de travaux, qu’elle avait une obligation de moyens et qu’elle ne peut engager sa responsabilité pour des vices indécelables relevant de l’autocontrôle de l’entreprise. Elle ajoute que les défauts relèvent du vice d’exécution et non de conception, de sorte qu’elle n’a pas manqué à son devoir de conseil. Elle indique que les malfaçons relevées correspondent en réalité à des prestations conformes au DTU. Elle fait valoir que le devis produit est excessif.
La société MMA IARD, assureur de la société CMV intervenue comme sous-traitante, conclut à l’absence de désordres décennaux ne permettant pas à la SCI de poursuivre la responsabilité décennale de son assurée. Au titre de la responsabilité contractuelle, elle indique que la société CMV est intervenue sous le contrôle des sociétés SO.FRA.BAT et Cabinet d’Architecture Alibert et que sa responsabilité, si elle existe, ne peut qu’être limitée. Elle ajoute que les montants demandés au titre de la reprise des désordres sont excessifs, excédant le montant retenu par l’expert.
Réponse de la cour :
L’article 1792 du code civil dispose que tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n’a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d’une cause étrangère.
1) Sur les désordres
La SCI forme une action en indemnisation de ses préjudices fondée à titre principal sur la responsabilité décennale de la société Cabinet d’Architecture Alibert et subsidiairement sur sa responsabilité contractuelle.
La SCI Les 3 Caryatides a confié les lots gros-oeuvre et charpente-couverture d’un bâtiment à construire à [Adresse 18], à la société SO.FRA.BAT, et les travaux ont été réceptionnés le 20 mars 2009 sans réserve pour le lot couverture. La SCI a ultérieurement fait état de l’existence de fuites en provenance du toit.
Aux termes de ses conclusions, elle fait état des désordres suivants :
– relevés dans le rapport d’inspection de la société Lopes Couverture :
– percements des bacs,
– rouille des bavettes de vélux,
– défauts d’agrafure des vélux et noues,
– absence de chemise de garantie,
– défauts de soudure des contre-talons,
– absence de reliefs de faîtage sur les bacs (« coins de mouchoir »),
– défauts de fixation du voligeage,
– défauts de fixation des couvre-joints,
– relevés dans l’expertise :
– pose non conforme du zinc sur forme béton,
– longueur non conforme des bavettes,
– non conformité des bandes porte-solin,
– relevés dans le constat d’huissier en date du 17 octobre 2017 :
– présence de traces d’infiltration d’eau,
– fuite au niveau de la mezzanine et des coulures présentes en-dessous,
– présence de traces d’infiltration d’eau et de moisissures.
Il résulte de l’expertise que lors de la première réunion, l’expert a relevé ‘l’absence de désordres particuliers au droit du 2e étage sous comble, et constaté des traces de condensation dues à l’inoccupation des locaux.’ Lors de la seconde réunion, ‘des traces ont été constatées au droit de la jouée droite dernière lucarne de la façade sud, pouvant faire penser soit à une infiltration, soit à un phénomène de condensation’ étant précisé que l’expert avait constaté une déchirure d’environ 1,5 cm sur le dessus de la lucarne, côté brisis ardoise. Il a donc fait procéder à un arrosage conséquent de la lucarne en cause afin de déterminer la cause et l’origine des traces, et n’a constaté ni infiltration ni humidité particulière à l’intérieur de la pièce, ‘ni le jour même (30 juin 2015), ni le 9 septembre ou le 7 octobre 2015.’ Il en a donc conclu à l’absence de désordre.
Selon l’expert, le sapiteur a ‘constaté au droit du bâtiment du [Adresse 2] un inquiétant début de corrosion avec apparition de rouille blanche’ et l’expert a précisé que le phénomène de corrosion du zinc résultait de l’absence d’interposition de membrane neutre, type papier anglais, entre le support maçonné (béton) et le zinc des dessus de lucarne. Il a également relevé une non-conformité : la fixation des habillages des lucarnes avec des pointes ou vis. Il a écarté les autres non-conformités alléguées par la SCI et exposées dans le rapport de la société Lopes Couverture au regard des prescriptions du DTU.
Cependant, il ressort de la note technique du sapiteur (pièce 7 de la société SO.FRA.BAT) qu’en réalité le constat de la corrosion du zinc par celui-ci ne concerne pas l’immeuble litigieux, [Adresse 2], mais un autre immeuble édifié par les parties, [Adresse 7]. C’est donc par erreur que l’expert a mentionné que l’immeuble litigieux était affecté d’une corrosion du zinc. De même, les non-conformités alléguées par la SCI et issues du rapport de la société Lopes Couverture ont été écartées par le sapiteur pour l’immeuble de la [Adresse 19], faute de les avoir constatées en l’absence de démontage, ou car elles concernent l’autre immeuble. Quant aux non-conformités alléguées des bavettes sur lucarne et bandes porte-solin, le sapiteur comme l’expert ont précisé que les prestations réalisées n’étaient pas interdites par le DTU, le sapiteur ajoutant seulement que cette technique requiert de justifier de l’adhérence du joint avec le jambage béton, preuve qui ne lui a pas été rapportée, sans qu’il n’en déduise une non-conformité.
En outre, l’expert précise que la condensation constatée est due à l’inoccupation des lieux, non aux vices de construction allégués, et ne conclut pas à une atteinte à la solidité ou à une impropriété à l’usage du fait de cette condensation. La SCI ne verse aux débats aucun élément susceptible de venir contredire les conclusions de l’expert.
Par conséquent, la SCI Les 3 Caryatides ne rapporte pas la preuve de ce que l’immeuble litigieux était affecté de désordres ou de malfaçons lors de l’expertise.
La SCI considère que les désordres relevés l’année suivante par l’huissier constituent, aux termes de ses écritures, une aggravation du désordre, établissant l’impropriété de l’ouvrage à son usage car le clos et le couvert ne sont pas assurés au regard des dégâts décrits. L’huissier a constaté des traces d’infiltration à côté des fenêtres, le cloquage et l’effritement des peintures, des traces d’infiltration au plafond, une fuite au niveau de la mezzanine avec des coulures présentes, des traces d’infiltrations d’eau et de moisissures sur les murs de façade ouest et est, de même que sur le mur de façade sud, au-dessus et à côté de la fenêtre.
L’importance des infiltrations, les moisissures, le cloquage et l’effritement de la peinture démontrent que le bâtiment n’est pas hors d’eau, ces désordres rendant ainsi l’ouvrage impropre à sa destination.
Toutefois, ils ne peuvent être considérés comme l’aggravation de désordres initiaux, l’expertise ayant écarté l’existence de désordres préexistants.
2) Sur l’imputation des désordres
La garantie décennale de l’article 1792 du code civil est une garantie de plein droit due par les constructeurs dès lors que les désordres entrent dans leur sphère d’intervention, et dont ils ne peuvent s’exonérer qu’en rapportant la preuve d’une cause étrangère.
Il a été jugé supra que l’expertise, avec le sapiteur, n’avait relevé l’existence d’aucun désordre et que les désordres relevés par l’huissier étaient de nature décennale car ils portaient atteinte au clos et au couvert et constituaient ainsi une impropriété à destination.
La SCI Les 3 Caryatides n’a produit aux débats aucune expertise ni aucun avis technique ou autre document technique quant aux désordres constatés par l’huissier, permettant d’établir leur origine ou de les relier de façon certaine aux travaux réalisés.
Ainsi, la SCI Les 3 Caryatides ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, que ces désordres relèvent de la sphère d’intervention des sociétés SO.FRA.BAT, chargée du lot couverture, ou Cabinet d’Architecture Alibert, maître d’oeuvre, dans la mesure où leur origine est demeurée indéterminée et où aucun lien formel ne peut être établi avec les travaux réalisés.
Dans la mesure où l’origine des désordres est demeurée ignorée, la SCI Les 3 Caryatides n’établit pas non plus qu’ils ont pour origine une faute de la société SO.FRA.BAT, chargée du lot couverture, de la société Cabinet d’Architecture Alibert, maître d’oeuvre, ou de la société CMV, sous-traitant de la société SO.FRA.BAT, chargée de la couverture de l’immeuble, permettant d’engager leur responsabilité civile de droit commun, contractuelle pour les sociétés SO.FRA.BAT et Cabinet d’Architecture Alibert et délictuelle pour la société CMV, sous-traitant.
Par conséquent, les demandes indemnitaires de la SCI Les 3 Caryatides doivent être rejetées, et la décision des premiers juges confirmée. Il n’y a pas lieu d’examiner des appels en garantie.
Sur les frais du procès
Le sens de l’arrêt conduit à confirmer le jugement sur la condamnation aux dépens et sur celle au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
En cause d’appel, la SCI Les 3 Caryatides, partie succombante, sera condamnée aux dépens et à payer aux sociétés SO.FRA.BAT représentée par Maître [H], administrateur judiciaire et par Maître [V], mandataire judiciaire, Cabinet d’Architecture Alibert et MAF la somme de 2 000 euros chacune et aux sociétés Axa France IARD et MMA IARD la somme de 1 000 euros chacune, au titre des frais irrépétibles. Les demandes de la SCI Les 3 Caryatides fondées sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile seront rejetées.
Le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile sera accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.