Conditions de recevabilité des recours en matière sociale : délais et implications

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Conditions de recevabilité des recours en matière sociale : délais et implications

Cadre Juridique de l’Appel

L’article R.1461-2 du Code du travail stipule que l’appel doit être porté devant la chambre sociale de la cour d’appel, et qu’il doit être formé, instruit et jugé avec représentation obligatoire. Selon l’article 538 du code de procédure civile, le délai de recours ordinaire est d’un mois en matière contentieuse, commençant à courir à partir de la notification du jugement, conformément à l’article 528.

Notification et Délai de Recours

L’article 668 précise que la date de notification par voie postale est celle de l’expédition pour l’expéditeur et celle de la réception pour le destinataire. La date d’expédition est déterminée par le cachet du bureau d’émission, tandis que la date de réception d’une lettre recommandée est celle apposée par l’administration des postes lors de la remise.

Délai pour Remettre les Conclusions

L’article 908 du code de procédure civile impose à l’appelant un délai de trois mois pour remettre ses conclusions au greffe, sous peine de caducité de la déclaration d’appel. De plus, le décret n° 2020-1717 établit que si une demande d’aide juridictionnelle est faite avant l’expiration d’un délai, l’action est réputée intentée dans le délai si la demande est suivie d’une introduction en justice dans un nouveau délai.

Conditions de l’Aide Juridictionnelle

Les règles relatives à l’aide juridictionnelle ne prévoient pas de report du délai pour remettre les conclusions au greffe. Cependant, elles visent à garantir la célérité de la procédure et une bonne administration de la justice, tout en assurant un accès effectif au juge d’appel pour les personnes éligibles à l’aide juridictionnelle.

Situation de l’Appelant

Dans cette affaire, la demande d’aide juridictionnelle a été déposée le 16 janvier 2024, après l’expiration du délai d’appel d’un mois qui a commencé le 13 décembre 2023. L’appel interjeté le 21 janvier 2024 est donc déclaré irrecevable pour cause de tardivité. Même si l’appel n’était pas tardif, la caducité de la déclaration d’appel serait encourue, car les conclusions n’ont pas été remises dans le délai imparti.

Décision Finale

En conséquence, l’appel de Mme [D] [S] est déclaré irrecevable comme tardif, et la caducité de sa déclaration d’appel est constatée. Mme [D] [S] est condamnée aux dépens d’appel. Il est rappelé que cette ordonnance peut faire l’objet d’un déféré à la cour dans les quinze jours suivant sa date.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

7 novembre 2024
Cour d’appel de Versailles
RG
24/00234
COUR D’APPEL

DE VERSAILLES

Chambre sociale 4-1

Prud’Hommes

Minute n°

N° RG 24/00234 – N° Portalis DBV3-V-B7I-WJSB

AFFAIRE : [S] C/ S.A.S. INTELCIA FRANCE,

ORDONNANCE D’INCIDENT

prononcée publiquement par mise à disposition de la décision au greffe le SEPT NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,

par Thierry CABALE, magistrat chargé de la mise en état de la Chambre sociale 4-1,

après que la cause en a été débattue en audience publique, le vingt-trois septembre deux mille vingt quatre,

assisté de Stéphanie HEMERY, greffière,

Incident suite à l’avis d’irrecevabilité d’appel (appel tardif: article 538 du code de procédure civile) soulevé d’office par le conseiller de la mise en état

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DANS L’AFFAIRE ENTRE :

Madame [D] [S]

née le 08 janvier 1985 à [Localité 5] SENEGAL

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentant : Me Magali VERTEL, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : T54

(Bénéficie d’une aide juridictionnelle totale numéro 2024-004343 du 28/06/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de VERSAILLES)

APPELANT

C/

S.A.S. INTELCIA FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Laurent LIGIER de la SELARL LIGIER & DE MAUROY, Constitué, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 1983 – N° du dossier 24.0040 – Représentant : Me Victoire BERN, Plaidant, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 1933 substituée à l’audience par Me Marine COLOMERA, avocat au barreau de LYON

INTIME

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Expéditions exécutoires délivrées aux avocats le —————

Par déclaration au greffe du 21 janvier 2024, Mme [D] [S] a relevé appel d’un jugement du conseil de prud’hommes de Dreux du 8 décembre 2023, dans un litige l’opposant à la société Intelcia France, intimée.

Par avis préalable notifié aux parties par le greffe via le Rpva le 24 avril 2024, le conseiller de la mise en état a sollicité leurs observations sur la caducité de la déclaration d’appel au visa des articles 908 et 911-1 du code de procédure civile.

Aux termes d’un avis préalable transmis aux parties via le Rpva le 15 mai 2024, le conseiller de la mise en état a sollicité leurs observations sur l’irrecevabilité de l’appel comme tardif, au visa de l’article 538 du code de procédure civile.

Par conclusions d’incident remises au greffe par le Rpva le 20 juin 2024, l’intimée a soulevé la caducité de la déclaration d’appel.

Les parties ont été convoquées à l’audience d’incident du 23 septembre 2024.

Par dernières conclusions d’incident remises au greffe et notifiées par le Rpva le 20 juin 2024, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé complet des moyens, l’intimée demande au conseiller de la mise en état de prononcer la caducité de la déclaration d’appel de Mme [S] (DA n° 24/00529).

L’intimée fait essentiellement valoir que :

– il résulte de l’article 43 du décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 que le recours est réputé avoir été intenté dans le délai si la demande d’aide juridictionnelle s’y rapportant est adressée ou déposée au bureau d’aide juridictionnelle avant l’expiration dudit délai ;

– la caducité de la déclaration d’appel est encourue par la partie qui ne régularise pas ses conclusions dans le délai de trois mois à compter de l’inscription de l’appel, dès lors que ce délai n’a pas été suspendu ou interrompu par une demande d’aide juridictionnelle faite dans le délai pour conclure ;

– contrairement à ce qu’indique le conseil de l’appelante dans ses observations notifiées par le Rpva, le 26 avril et le 6 mai 2024, la demande d’aide juridictionnelle n’a d’effet interruptif qu’à l’égard du délai d’exercice du recours et non pas à l’égard du délai pour conclure, ce qui emporte caducité de la déclaration d’appel en l’absence de conclusions d’appelant notifiées avant le 22 avril 2024.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 20 septembre 2024, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé complet des moyens, l’appelante demande au conseiller de la mise en état de :

vu les dispositions des articles 668 et 669 du code de procédure civile,

– débouter la société Intelcia de sa demande de prononcer de la caducité de la déclaration

d’appel en l’absence de tardiveté de la déclaration d’appel et de l’absence de tardiveté de la

notification des conclusions ;

– laisser les dépens à chacune des parties.

Elle fait essentiellement valoir que :

– le dépôt de sa demande d’aide juridictionnelle le 16 janvier 2024 nonobstant l’incompétence du bureau d’aide juridctionnelle de Chartres, a interrompu le délai d’appel du jugement du 8 décembre 2023 qui a couru à compter du vendredi 22 décembre 2023, date de la distribution du courrier recommandé à son destinataire contre sa signature ; en tout état de cause, l’appel a été interjeté dans le délai d’un mois à compter de la distribution du courrier de notification du jugement ;

– la demande d’aide juridictionnelle a, en outre, interrompu le délai pour conclure de l’article 908 du code de procédure civile ; ce n’est pas dans l’esprit actuel du législateur que de ne pas reconnaître le report de la date de notification des conclusions par l’effet interruptif d’une demande d’aide juridictionnelle d’autant que le nouvel article 911 du code de procédure civile prévoit la possibilité pour le conseiller de la mise en état, à la demande d’une partie ou d’office, d’allonger ou de réduire les délais réglementaires prévus aux articles 908 à 910 ; le délai de trois mois pour conclure de l’appelant courant à compter du lendemain de la notification de la décision d’admission au bénéfice de l’aide juridictionnelle, en l’espèce à compter du 14 juillet 2024, ses conclusions d’appelant du 11 septembre 2024 ont été remises et notifiées dans le délai prescrit et la caducité de sa déclaration d’appel n’est pas encourue pour ce motif.

MOTIFS DE LA DECISION

L’article R.1461-2 du Code du travail précise que «l’appel est porté devant la chambre sociale de la cour d’appel. Il est formé, instruit et jugé suivant la procédure avec représentation obligatoire ».

Selon l’article 538 du code de procédure civile, le délai de recours par une voie ordinaire est d’un mois en matière contentieuse.

Par application de l’article 528, alinéa 1er, « Le délai à l’expiration duquel un recours ne peut plus être exercé court à compter de la notification du jugement, à moins que ce délai n’ait commencé à courir, en vertu de la loi, dès la date du jugement.’

L’article 668 du même code dispose que « Sous réserve de l’article 647-1, la date de la notification par voie postale est, à l’égard de celui qui y procède, celle de l’expédition et, à l’égard de celui à qui elle est faite, la date de la réception de la lettre.

Enfin, selon l’article 669, ‘La date de l’expédition d’une notification faite par la voie postale est celle qui figure sur le cachet du bureau d’émission.’

La date de la remise est celle du récépissé ou de l’émargement.

La date de réception d’une notification faite par lettre recommandée avec demande d’avis de réception est celle qui est apposée par l’administration des postes lors de la remise de la lettre à son destinataire.’

Par ailleurs, aux termes de l’article 908 du code de procédure civile, à peine de caducité de la déclaration d’appel, relevée d’office, l’appelant dispose d’un délai de trois mois à compter de la déclaration d’appel pour remettre ses conclusions au greffe.

Il résulte de l’article 43 du décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, que lorsqu’une action en justice ou un recours doit être intenté avant l’expiration d’un délai devant les juridictions de première instance ou d’appel, l’action ou le recours est réputé avoir été intenté dans le délai si la demande d’aide juridictionnelle s’y rapportant est adressée ou déposée au bureau d’aide juridictionnelle avant l’expiration dudit délai et si la demande en justice ou le recours est introduit dans un nouveau délai de même durée à compter:

1° De la notification de la décision d’admission provisoire ;

2° De la notification de la décision constatant la caducité de la demande ;

3° De la date à laquelle le demandeur de l’aide juridictionnelle ne peut plus contester la décision d’admission ou de rejet de sa demande en application du premier alinéa de l’article 69 et de l’article 70 ou, en cas de recours de ce demandeur, de la date à laquelle la décision relative à ce recours lui a été notifiée ;

4° Ou, en cas d’admission, de la date, si elle est plus tardive, à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné.

Lorsque la demande d’aide juridictionnelle est présentée au cours des délais impartis pour conclure ou former appel ou recours incident, mentionnés aux articles 905-2, 909 et 910 du code de procédure civile et aux articles R. 411-30 et R. 411-32 du code de la propriété intellectuelle, ces délais courent dans les conditions prévues aux 2° à 4° du présent article.

Ces règles, qui ne prévoient pas, au profit de l’appelant, un report du point de départ du délai pour remettre ses conclusions au greffe, en application de l’article 908 du code de procédure civile, poursuivent néanmoins un but légitime au sens de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en l’occurrence la célérité de la procédure et une bonne administration de la justice. Elles sont, en outre, accessibles et prévisibles, et ne portent par une atteinte disproportionnée au droit d’accès au juge d’appel, un rapport raisonnable de proportionnalité existant entre les moyens employés et le but visé.

En effet, en se conformant à l’article 38 du décret, la partie qui entend former un appel avec le bénéfice de l’aide juridictionnelle est mise en mesure, de manière effective, par la désignation d’un avocat et d’autres auxiliaires de justice, d’accomplir l’ensemble des actes de la procédure.

Ce dispositif, dénué d’ambiguïté pour un avocat, permet de garantir un accès effectif au juge d’appel au profit de toute personne dont la situation pécuniaire la rend éligible au bénéfice d’une aide juridictionnelle au jour où elle entend former un appel.

Il ne place pas non plus l’appelant dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire dès lors qu’il bénéficie, lorsqu’il forme sa demande d’aide juridictionnelle avant de faire appel, du même report du point de départ de son délai de recours que celui dont bénéficient les intimés pour conclure ou former appel incident lorsqu’ils sollicitent le bénéfice de l’aide juridictionnelle.

En l’espèce, il est justifié du dépôt d’une demande d’aide juridictionnelle le 16 janvier 2024, soit au-delà du délai d’appel d’un mois qui a couru à compter du 13 décembre 2023, date de la distribution à Mme [S] du courrier recommandé de notification du jugement attaqué selon les mentions non utilement contredites portées sur l’avis de réception, et qui a expiré le lundi 15 janvier 2024, de sorte que l’appel interjeté le 21 janvier 2024 est irrecevable comme tardif.

En tout état de cause, à supposer l’appel non-tardif, la caducité de la déclaration d’appel serait encourue dès lors que le délai pour conclure dont disposait l’appelant ayant couru, faute d’avoir été suspendu par la demande d’aide juridictionnelle, à compter du 21 janvier 2024, les premières conclusions d’appelant remises au greffe via le Rpva le 11 septembre 2024 l’ont été après l’expiration, le lundi 22 avril 2024, du délai prévu par l’article 908 précité.

Les dépens d’appel seront mis à la charge de Mme [S]

PAR CES MOTIFS:

DÉCLARE l’appel de Mme [D] [S] irrecevable comme tardif ;

En tout état de cause,

CONSTATE que la caducité de sa déclaration d’appel est encourue ;

CONDAMNE Mme [D] [S] aux dépens d’appel.

RAPPELLE que la présente ordonnance peut faire l’objet d’un déféré à la cour dans les quinze jours de sa date.

La greffière, Le magistrat chargé de la mise en état,


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