Demandes nouvelles en appel irrecevables
Aux termes des dispositions de l’article 564 du code civil : « A peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait . »
Aux termes des dispositions de l’article 565 du code civil : « Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent. »
Deux actions aux finalités distinctes
L’action en concurrence déloyale et l’action en contrefaçon n’ont pas les mêmes finalités.
L’action en concurrence déloyale a pour objet d’assurer la protection de celui qui ne peut se prévaloir d’un droit privatif. La concurrence déloyale doit être appréciée au regard de la liberté de commerce et d’industrie ce qui implique qu’un produit qui ne fait pas l’objet de protection au titre d’un des droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit, sous certaines conditions tenant à l’absence de faute par la création d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit.
Droit privatif ou faute
L’action en contrefaçon sanctionne l’atteinte à un droit privatif alors que l’action en concurrence déloyale repose sur l’existence d’une faute au sens de l’article 1240 du code civil, une demande formée sur le fondement de la concurrence déloyale et une demande formée sur le fondement de la contrefaçon ne tendent donc pas aux même fins.
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 2
ARRÊT DU 15/12/2022
****
N° de MINUTE :
N° RG 21/00465 –��N° Portalis DBVT-V-B7F-TM42
Jugement (N° 18/08339)
rendu le 06 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Lille
APPELANTS
Monsieur [M] [C]
né le 04 décembre 1985 à [Localité 8]
demeurant [Adresse 6]
[Localité 4]
Monsieur [Y] [C]
né le 18 janvier 1955 à [Localité 7]
demeurant [Adresse 2]
[Localité 3]
La SARL Global Industrial Security Systems (nom commercial Securirack)
représentée par son gérant Monsieur [M] [C]
ayant son siège social [Adresse 1]
[Localité 4]
représentés par Me Coraline Favrel, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
INTIMÉE
La SAS Ecolog Innovation
prise en la personne de son représentant légal
ayant son siège social [Adresse 13]
[Localité 5]
représentée par Me Virginie Levasseur, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
assistée de Me Sandrine Minne, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Catherine Courteille, président de chambre
Claire Bertin, conseiller
Jean-François Le Pouliquen, conseiller
— ——————–
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Anais Millescamps
DÉBATS à l’audience publique du 12 septembre 2022 tenue en double rapporteur par Catherine Courteille et Jean-François Le Pouliquen après accord des parties et après rapport oral de l’affaire par Jean-François Le Pouliquen. Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2022 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Catherine Courteille, président, et Anais Millescamps, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 21 février 2022
****
Vu le jugement du tribunal judiciaire de Lille du 6 novembre 2020 ;
Vu la déclaration d’appel de la société Global Industrial Security Systems, de Monsieur [M] [C] et Monsieur [Y] [C], reçue au greffe de la cour d’appel de Douai le 21 janvier 2021 ;
Vu les conclusions de Messieurs [Y] et [M] [C] et de la société Global Industrial Security Systems, déposées au greffe le 21 janvier 2022 ;
Vu les conclusions de la société Ecolog Innovation, déposées au greffe le 7 février 2022 ;
Vu l’ordonnance de clôture du 21 février 2022.
EXPOSE DU LITIGE
Messieurs [Y] et [M] [C] ont enregistré deux modèles de renforts destinés à protéger et à renforcer les pieds d’échelle dans les entrepôts de stockage auprès de l’INPI, sous les numéros 2015-1465 et 2015-1466.
En vertu d’un contrat de licence de dessins et modèles, ces renforts sont commercialisés par la société Global Industrial Security Systems, sous le nom commercial de Securirack.
Entre 2014 et 2017, la société Ecolog Innovation a sollicité la société Global Industrial Security Systems, pour fournir et poser ces modèles de renforts auprès de ses clients.
En 2017, les relations ont cessé. La société Ecolog Innovation propose désormais ses propres renforts de racks à ses clients.
Estimant que les modèles proposés par la société Ecolog Innovation sont des contrefaçons, Messieurs [Y] et [M] [C] ainsi que la société Global Industrial Security Systems ont fait procéder à un constat d’huissier sur le site internet d’Ecolog innovation le 30 novembre 2017, suivi de deux procès-verbaux de saisie contrefaçon les 10 avril et 18 octobre 2018.
Par acte d’huissier du 7 novembre 2018, Messieurs [Y] et [M] [C] ainsi que la société Global Industrial Security Systems ont fait assigner la société Ecolog Innovation, devant le tribunal judiciaire de Lille, en contrefaçon de dessins et modèles et en concurrence déloyale pour obtenir réparation de leurs préjudices.
Par ordonnance du 9 décembre 2019, le juge de la mise en état a rejeté la demande de Messieurs [Y] et [M] [C], ainsi que la société Global Industrial Security Systems tendant à la désignation d’un expert aux fins de chiffrer leur préjudice.
Par jugement rendu le 6 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Lille a :
— débouté la société Ecolog Innovation de sa demande tendant à l’irrecevabilité de la société Global Industrial Security Systems à agir en contrefaçon de dessins et modèles ;
déclaré la société Global Industrial Security Systems, ainsi que Messieurs [Y] et [M] [C] recevables en leurs demandes en contrefaçon de dessins et modèles ;
déclaré Messieurs [Y] et [M] [C] recevables en leurs demandes en contrefaçon de droitsd’auteurs ;
déclaré la société Global Industrial Security Systems irrecevable à agir en contrefaçon de droits d’auteur ;
annulé les saisies-contrefaçon opérées le 10 avril 2018 et le 18 octobre 2018 dans les locaux de la société Ecolog Innovation ;
En conséquence :
écarté des débats les pièces numérotées 10,11,13,15,17,20,21 et 22 par les demandeurs ;
annulé les modèles N°2015-1465 et N°2015-1466 déposés le 20 mars 2015 à l’INPI par Messieurs [Y] et [M] [C] ;
débouté ces derniers et la société Global Industrial Security Systems de leurs demandes au titre de la contrefaçon de dessins et modèles ;
débouté Messieurs [Y] et [M] [C] de leurs demandes au titre de la contrefaçon de droitsd’auteur ;
débouté la société Global Industrial Security Systems de ses demandes au titre de la concurrence déloyale ;
débouté la société Ecolog Innovation de sa demande au titre de la procédure abusive ;
condamné Messieurs [Y] et [M] [C] ainsi que la société Global Industrial Security Systems aux entiers dépens avec faculté de recouvrement au profit de Maître [X] ;
condamné Messieurs [Y] et [M] [C] ainsi que la société Global Industrial Security Systems in solidum à payer à la société Ecolog Innovation la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
dit n’y avoir lieu à exécution provisoire ;
rejeté toutes demandes, fins et présentions plus amples ou contraires, des parties.
Par déclaration reçue au greffe de la cour d’appel de Douai le 21 janvier 2021, Messieurs [Y] et [M] [C] ainsi que la société Global Industrial Security Systems, ont interjeté appel des chefs du jugement ayant annulé les saisies-contrefaçons opérées le 10 avril et 18 octobre 2018 dans les locaux de la société Ecolog Innovation, écarté des débats les pièces numérotées 10,11,13,15,17,20,21 et 22 par les demandeurs, débouté la société Global Industrial Security Systems de ses demandes au titre de la concurrence déloyale, les ayant condamnés aux entiers dépens avec faculté de recouvrement au profit de Maître [X], et au paiement in solidum de la somme 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et rejeté toute demandes, fins et prétentions, plus amples ou contraires des parties.
Aux termes de leurs dernières conclusions déposées au greffe le 21 janvier 2022, Messieurs [Y] et [M] [C] et la société Global Industrial Security Systems demandent à la cour de :
infirmer certaines dispositions du jugement du tribunal judiciaire de Lille du 6 novembre 2020 ;
interdire à la société Ecolog Innovation d’utiliser à quelque titre que ce soit et sur quelque support que ce soit, le produit Securirack, sous astreinte de 800 euros par infraction constatée, à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ;
condamner la société Ecolog Innovation au paiement à Securirack, M. [M] [C] et M. [Y] [C] de la somme de 30 000 euros au titre du préjudice résultant de la dévalorisation du produit et du parasitisme, et de la somme de 436 000 euros au titre du gain manqué par la société Securirack ;
ordonner la publication du dispositif de l’arrêt à intervenir sur un quart de la page d’accueil du site internet de la société Ecolog Innovation ainsi que sur sa page du réseau social Linkedin (fil d’actualité) pendant une durée de 3 mois ininterrompus à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ;
condamner la société Ecolog Innovation au paiement à Securirack, M. [M] [C] et M. [Y] [C] de la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
condamner la société Ecolog Innovation au paiement des entiers frais et dépens, en ce compris les frais de constats internet par huissier dans le cadre de ce litige, et rendus nécessaires, dont distraction au profit de Coraline Favrel, avocat aux offres de droit.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe le 7 février 2022, la société ecolog innovation demande à la cour de :
constater avoir été saisie d’un appel partiel et constater le caractère définitif du jugement en ce qu’il :
*l’a déboutée de sa demande tendant à l’irrecevabilité de la société Global Industrial Security Systems à agir en contrefaçon de dessins et modèles,
a déclaré la société Global Industrial Security Systems et Messieurs [Y] et [M] [C] recevables en leurs demandes en contrefaçon de dessins et modèles,
a déclaré Messieurs [Y] et [M] [C] recevables en leurs demandes en contrefaçon de droitsd’auteurs,
a déclaré la société Global Industrial Security Systems irrecevable à agir en contrefaçon de droits d’auteurs,
a annulé les saisies-contrefaçons opérées le 10 avril 2018 et 18 octobre 2018 dans les locaux de sa société
a écarté des débats les pièces numérotées 10, 11, 13, 15, 17, 20, 21 et 22 par les demandeurs,
a annulé les modèles N°2015-1465 et N°2015-1466 déposés le 20 mars 2015 à l’INPI par Messieurs [Y] et [M] [C],
a débouté ces derniers et la société Global Industrial Security Systems de leurs demandes au titre de la contrefaçon de dessins et modèles ;
a débouté Messieurs [Y] et [M] [C] de leurs demandes au titre de la contrefaçon de droitsd’auteur ;
Sur le grief de concurrence déloyale de :
dire irrecevables les demandes présentées par Messieurs [M] et [L] [en fait [Y]] [C] comme étant nouvelles ;
dire irrecevable les demandes présentées par la société Global Industrial Security Systems, Messieurs [M] et [L] [en fait [Y]] pour défaut d’intérêt à agir, ;
confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Global Industrial « Securité Systeme » de ses demandes au titre de la concurrence déloyale et condamné solidairement la société Global Industrial Security Systems et Messieurs [M] et [L] [en fait [Y]] [C] à payer 6 000 euros au titre de l’article 700 [du code de procédure civile] ;
infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté sa demande de condamnation pour procédure abusive et statuant à nouveau ;
condamner la société Global Industrial Security Systems et Messieurs [Y] et [M] [C] à lui payer une indemnité de 20 000 euros pour procédure abusive ;
condamner la société Global Industrial Security Systems et Messieurs [Y] et [M] [C] à lui payer une indemnité de 10 000 euros en application de l’article 700 [du code de procédure civile] ;
condamner la société Global Industrial Security Systems et Messieurs [Y] et [M] [C] aux entiers dépens d’instance avec faculté de recouvrement directe au profit de Me Levasseuren application de l’article 699 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 21 février 2022.
EXPOSE DES MOTIFS
La cour d’appel n’est pas saisie d’un appel à l’encontre des chefs du jugement ayant :
débouté la société Ecolog Innovation de sa demande tendant à l’irrecevabilité de la société Global Industrial Security Systems à agir en contrefaçon de dessins et modèles ;
déclaré la société Global Industrial Security Systems, ainsi que Messieurs [Y] et [M] [C] recevables en leurs demandes en contrefaçon de dessins et modèles ;
déclaré Messieurs [Y] et [M] [C] recevables en leurs demandes en contrefaçon de droitsd’auteurs ;
déclaré la société Global Industrial Security Systems irrecevable à agir en contrefaçon de droits d’auteur ;
annulé les modèles N° 2015-1465 et N°2015-1466 déposés le 20 mars 2015 à l’INPI par Messieurs [Y] et [M] [C] ;
débouté ces derniers et la société Global Industrial Security Systems de leurs demandes au titre de la contrefaçon de dessins et modèles ;
débouté Messieurs [Y] et [M] [C] de leurs demandes au titre de la contrefaçon de droitsd’auteur ;
Messieurs [Y] et [M] [C] et la société Global Industrial Security Systems ont formé appel à l’encontre des chefs du jugement ayant :
— annulé les saisies-contrefaçons opérées le 10 avril 2018 et le 18 octobre 2018 dans les locaux de la société Ecolog Innovation ;
— écarté des débats les pièces numérotées 10,11,13,15,17,20,21 et 22 par les demandeurs.
La demande d’infirmation du jugement de ces chefs n’est soutenue par aucun moyen. De plus, les appelants indiquent dans leurs conclusions ne pas remettre en cause ces chefs du jugement.
Le jugement sera confirmé de ces chefs.
I) Sur les demandes formées par Messieurs [Y] et [M] [C] et la société Global Industrial Security Systems sur le fondement de la concurrence déloyale et du parasitisme
A) Sur la recevabilité des demandes
1) Sur la nouveauté des demandes en appel
Aux termes des dispositions de l’article 564 du code civil : « A peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait . »
Aux termes des dispositions de l’article 565 du code civil : « Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent. »
La société Ecolog innovation fait valoir que les demandes formées par M. [M] [C] et M. [Y] [C] sur le fondement de la concurrence déloyale sont irrecevables en appel.
En l’espèce, M. [M] [C] et M. [Y] [C] n’ont pas formé de demande sur le fondement de la concurrence déloyale devant le premier juge, seule la société Global industrial security système ayant formé des demandes sur ce fondement.
L’action en contrefaçon sanctionnant l’atteinte à un droit privatif alors que l’action en concurrence déloyale repose sur l’existence d’une faute au sens de l’article 1240 du code civil, une demande formée sur le fondement de la concurrence déloyale et une demande formée sur le fondement de la contrefaçon ne tendent pas aux même fins.
M. [M] [C] et M. [Y] [C] font valoir que la demande est justifiée par la révélation d’un fait résidant dans la publication de la photographie du produit sécurirack sur la page Google business de la société Ecolog en mars 2021.
Cette publication ne constitue pas un élément nouveau justifiant que soit formée une demande nouvelle en cause d’appel. En effet, la publication représente une photographie d’un dispositif de renfort d’échelle. MM. [C] ont reproché dès la première instance la commercialisation d’un dispositif de renfort d’échelle contrefaisant selon-eux le dispositif sécurirack et la société Ecolog innovation n’a jamais contesté commercialiser un dispositif de renfort d’échelle. Le dispositif que la société Ecolog innovation indique commercialiser est précisément celui figurant sur la photographie figurant au procès-verbal de constat d’huissier produit par MM. [C].
Il convient en conséquence de déclarer irrecevables les demandes formées par MM. [C].
2) Sur l’intérêt à agir
Dans le dispositif de ses conclusions, la société Ecolog innovation demande à la cour de déclarer irrecevables les demandes présentées par la société Global Industrial Security Systems, Messieurs [M] et [L] [en fait [Y]] [C] pour défaut d’intérêt à agir.
La demande formée par MM. [C] étant déclarée irrecevable comme nouvelle en appel, il n’y a pas lieu de statuer sur leur intérêt à agir.
Dans les motifs de ses conclusions, la société Ecolog innovation ne conteste pas l’intérêt à agir de la société Global industrial security systems.
Il convient en conséquence de déclarer recevables les demandes de la société Global industrial security systems.
B) Sur le bien-fondé des demandes
1) Sur la concurrence déloyale
L’action en concurrence déloyale a pour objet d’assurer la protection de celui qui ne peut se prévaloir d’un droit privatif. La concurrence déloyale doit être appréciée au regard de la liberté de commerce et d’industrie ce qui implique qu’un produit qui ne fait pas l’objet de protection au titre d’un des droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit, sous certaines conditions tenant à l’absence de faute par la création d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit.
Les parties conviennent que de mai 2014 à avril 2017, la société Ecolog innovation a commercialisé le produit dénommé Securirack, destiné à réparer les pieds de rayonnages, proposé par la société Global industrial security systems. Le produit Securirack était fourni et posé par la société Global industrial security systems dans le cadre d’un contrat de sous-traitance.
A compter de 2017, la société Ecolog a commercialisé un produit similaire.
L’affirmation de la société Ecolog innovation selon laquelle les relations des deux parties se sont dégradées en raison du fait que la société Global industrial securiy systems refusait d’entrer dans un processus d’étude et de sécurisation de son dispositif n’est corroborée par aucune pièce.
L’attestation de M. [B] [N], directeur des opérations du groupe Alain Logistique, datée du 27 avril 2018 selon laquelle « depuis mars 2017, la société Securirack nous a contacté en direct pour offrir ses services de réparation sans passer par la société Ecolog innovation » ne permet pas d’établir que le démarchage de clients de la société Ecolog innovation par la société Securirack soit la cause de la rupture des relations entre la société Global Industrial Security Systems et la société Ecolog innovation. En effet, cette démarche peut avoir pour cause la fin des relations contractuelles et non l’inverse.
De même le courrier électronique, daté du 12 octobre 2016, adressé par M. [A] [O], commercial de la société Ecolog innovation, à M. [W] [U], président de la société Ecolog innovation, selon laquelle M. [M] [C] avait sollicité directement un client de la société Ecolog innovation est insuffisant à en établir la preuve. En effet, il n’est justifié d’aucun échange entre la société Ecolog innovation et la société Global industrial security systems à ce sujet et les relations commerciales ont perduré jusqu’au mois d’avril 2017.
La société Global industrial security systems fait valoir que la société Ecolog innovation a commercialisé un produit identique à celui commercialisé par la société Global industrial security systems dès la fin des relations commerciales puis à partir de 2018 a commercialisé un produit légèrement différent.
La société Ecolog innovation soutient n’avoir commercialisé que le produit de couleur bleue qu’elle commercialise actuellement. Sur le produit présenté par la société Ecolog innovation, outre la différence de couleur, l’angle des ailettes est plus aigu que l’angle des ailettes du produit securirack qui est arrondi.
La société Global industrial security systems produit un procès-verbal de constat daté du 30 novembre 2017 montrant que la photographie de la page d’accueil du site Securirack.fr présente une photographie d’étagères métalliques dont certains pieds sont équipés du système securirack. Le système securirack est de couleur jaune. A la date du constat, le site internet de la société Ecolog innovation présentait cette même photographie en illustration d’une catégorie dénommée réparation. Sur le site l’usine nouvelle, il est mentionné une annonce pour « réparation de montant d’échelle » au nom d’Ecolog innovation présentant la même photographie. L’annonce de la société Ecolog innovationétait toujours présente sur le site l’usine nouvelle le 15 avril 2021 ainsi qu’il résulte du procès-verbal de constat de la même date.
Sur le site internet de la société Ecolog innovation, la photographie d’illustration de la « coque échelle » montre, fixé sur un des pieds d’étagère, un élément de couleur jaune, ayant une apparence similaire à celle du securirack.
La société Global industrial security systems produit un procès-verbal de constat daté du 15 avril 2021 montrant des photographies de l’élément de couleur bleu à l’issue d’une recherche par le moteur de recherche Google avec le nom Ecolog innovation.
Elle produit une attestation de M. [K] [G] datée du 06 août 2019 aux termes de laquelle : « Je signale que je suis indépendant et que je travaille pour plusieurs prestataires dans le domaine de la logistique. Securirack est l’un de ces prestataires.
1) Le 21 septembre 2017, lors d’un rendez-vous chez Passion Froid à [Localité 10], j’ai présenté le matériel sécurirack et j’ai été très surpris que le client me dise qu’il avait déjà ce produit installé dans son entrepôt. J’ai demandé au client de bien vouloir me montrer le matériel et j’ai constaté que le matériel posé était en lieu et place identique au produit Securirack, forme, couleur, position des boulons, taille de boulons. Seule la hauteur de la pièce différait un peu et le fait qu’elle ne soit pas gravée « Securirack » a attiré mon attention (voir photo ci-dessous). Fort de cette observation, j’ai appelé le bureau qui m’a confirmé que nous n’étions jamais intervenu chez ce client. Nous n’avons jamais pu travailler avec Passion Froid à [Localité 10].
2) En avril 2018, chez le transporteur Alaine (71) en présence de M. [C] [Y], inventeur du securirack nous avons effectué un audit. Lors de la visite, j’ai pu constater qu’il y avait des pièces identiques aux securirack mais non gravées. Nous n’avons jamais pu travailler avec ce client.
3) En janvier 2019, lors de la visite prospective chez Sef logisitique à [Adresse 12] (84) le client m’a montré dans son bureau une pièce identique au securirack. Il m’a précisé qu’il avait eu une proposition de réparation des montants de racks de stockage par la société Ecolog et fait poser des pièces dans son entrepôt par ce dernier à des fins de réparation. Nous n’avons jamais pu travailler avec ce prospect. » La photographie mentionnée dans l’attestation n’est pas produite.
Elle produit également une attestation de M. [S] [F], datée du 20 janvier 2022 aux termes de laquelle : « Je signale que je suis indépendant et que je travaille pour plusieurs prestataires dans le domaine de la logistique. En 2019 Ecolog avait comme sous-traitant PM constructions à [Localité 11] pour effectuer l’installation de palletiers, la pose de protections et d’accessoires ainsi que des renforts Rack. Lorsque j’ai réalisé une prestation de réparation pour PM constructions, le 29 octobre 2019, je suis allé dans la société Alaine Logistique à [Localité 9] pour faire le montage de pièces de renfort de montants de racks de stockage. En faisant ma mission, j’ai remarqué que les pièces renforts-racks que je montais était similaires à celles du système Securirack, seule la couleur différait. Je comprends ce jour que le système de réparation Securirack que j’avais vu de couleur jaune et avait été posé par la société Securirack était en lieu et place identique, sauf la couleur, à ceux qu’Ecolog avait demandé de poser chez ce client Alaine [Localité 9] ».
Il n’est pas établi que la société Ecolog ait vendu un produit ayant une forme différente de celui de couleur bleue présenté dans ses conclusions. Ni la photographie présente sur le site internet de la société Ecolog le 30 novembre 2017 et sur le site l’Usine nouvel le 30 novembre 2017 et le 15 avril 2021, ni la photographie présente sur le site internet de la société Ecolog en illustration de la « coque échelle », ni les attestations produites aux débats ne permettent de l’établir. En effet, la photographie présente sur le site le 30 novembre 2017 et sur le site l’usine nouvelle est identique à celle présente sur le site de la société Securirack et peut s’expliquer par le fait que la société Ecolog a vendu les produits de la société Securirack jusqu’en avril 2017. La photographie d’illustration de la « coque échelle » ne permet pas de distinguer la forme exacte du produit. Les attestations produites aux débats ne permettent pas d’établir la forme des produits vus par les attestants.
Les formes du produit securirack et du produit vendu par la société Ecolog présentent de grandes similitudes. Ils ont une apparence identique à l’exception de l’angle des ailettes qui est plus aigu dans le produit Ecolog, l’angle des ailettes étant arrondi dans le produit Securirack.
Les produits présentés diffèrent par leur couleur. Cependant, s’agissant de produits destinés à la réparation de racks, la couleur du produit n’en constitue pas un élément significatif. De plus, M. [K] [G] atteste avoir constaté dans les locaux de la société Passion froid un matériel d’une couleur identique au securirack. Cette affirmation est corroborée par la photo d’illustration du « coque échelle » présente sur le site internet de la société Ecolog montrant un produit similaire à celui de la société Global industrial security systems de couleur jaune et par le fait que les produits présentés sur le site de la société Ecolog sont tous de couleur jaune. Il se déduit de ses éléments que la société Ecolog a également vendu des produits de réparation de rack de couleur jaune.
La société Ecolog produit un compte rendu de visite daté du 05 février 2013 aux termes duquel a été rencontré ce jour, M. [R] [V] responsable, maintenance et travaux pour l’ensemble des centrales HA Leclerc. Il y est mentionné que « dans le cas d’un montant abimé, [V] a trouvé une solution qui à la fois redresse et renforce le montant en question, ci-joint photos. Néanmoins, il avoue que son ferronnier ne sait plus faire ce genre de profilé. Il est à la recherche d’un fournisseur capable de lui proposer la fourniture. ». La photographie présentée dans le compte rendu montre un renfort d’un modèle identique au produit securirack. S’appuyant sur cette pièce, le tribunal a constaté l’absence de caractère nouveau des deux modèles enregistrés par MM. [C]. M. [Y] [C] fait valoir qu’il avait réalisé le renfort mentionné dans le compte rendu. Cette affirmation n’est soutenue par aucun moyen.
Cependant, s’il résulte du compte rendu de visite daté du 05 février 2013 que le modèle de renfort vendu par la société Global industrial security systems existait antérieurement à sa commercialisation par cette société, il n’est pas établi que d’autres entreprises que la société Global industrial security puis la société Ecolog aient vendu ce type de renfort de rack. En conséquence, ce type de renfort de rack n’est connu par les professionnels du stockage que par le produit vendu par la société Global industrial security.
La vente par la société Ecolog innovation d’un produit similaire au renfort de rack securirack est de nature à créer un risque de confusion avec le produit vendu par la société Global industrial security systems.
Ce risque de confusion est renforcé par le fait que la société Ecolog innovation a vendu pendant trois ans le renfort de la marque securirack et a maintenu sur la page internet « l’usine nouvelle » une photographie présentant le modèle securirack jusqu’au mois de novembre 2021.
2) Sur la parasitisme
Le parasitisme consiste pour un opérateur économique à se placer dans le sillage d’un autre en profitant indûment de la notoriété acquise ou des investissements consentis.
En l’espèce, la société Global industrial security systems qui fait valoir que M. [Y] [C] a inventé le système securirack ne justifie pas des investissements réalisés pour la mise au point de ce système. De plus, ainsi qu’il a été indiqué au I) il résulte du compte rendu de visite daté du 05 février 2013 que le modèle de renfort vendu par la société Global industrial security systems existait antérieurement à sa commercialisation par cette société.
De plus, il n’est pas établi que la société Ecolog innovation bénéficie de la notoriété de la société securirack en commercialisant des produits similaires. En effet, les deux entreprises opèrent dans le même secteur d’activité et il n’est pas établi que la société Global industrial security systems jouisse d’une notoriété ou d’une reconnaissance supérieure à celle de la société Ecolog innovation. Les documents relatifs à la promotion du système sécurirack par la société Global industrial security systems sont postérieurs à la rupture des relations commerciales entres les deux sociétés.
La preuve du parasitisme n’est pas établie.
3) Sur la demande tendant à interdire à la société Ecolog Innovation d’utiliser à quelque titre que ce soit et sur quelque support que ce soit, le produit Securirack, sous astreinte de 800 euros par infraction constatée, à compter de la signification de l’arrêt à intervenir
La demande doit être interprétée en ce qu’elle tant d’une part à interdire la vente par la société Global industrial security systems du produit similaire au produit securirack et d’autre part de diffuser des images du produit vendu par la société Ecolog innovationsimilaire au produit securirack ou du produit securirack.
Il sera fait droit à cette demande.
4) Sur la demande de dommages et intérêts
La société Global industrial security systems demande le paiement de la somme de 30 000 euros au titre de la dévalorisation du produit securirack et du fait que la société Ecolog innovation ait profité indument des efforts de la société Global industrial security systems pour développer le produit et sa valeur économique.
Ainsi qu’il a été indiqué, la parasitisme économique n’est pas établi. De plus, il n’est pas établi que la commercialisation du produit de la société Ecolog innovation dévalorise le produit securirack.
La société Global industrial security systems demande le paiement de la somme de 436 000 euros au titre du gain manqué du mois d’avril 2017 au mois de janvier 2022. La société Global industrial security systems s’appuie sur les sommes qu’elles a facturé à la société Ecolog innovation de 2015 à 2017 pour un montant moyen mensuel de 9 085 euros.
La commercialisation par la société Ecolog innovation d’un produit similaire à celui de la société Securirack créant un risque de confusion a nécessairement causé un préjudice à la société Global industrial security systems.
La perte de chiffre d’affaire subie par la société Global industrial security systems à la suite de la cessation des relations commerciales avec la société Ecolog innovation a pour cause la cessation de leurs relations commerciales et non la vente par la société Ecolog innovation d’un produit similaire au sien. Dans l’hypothèse ou la société Ecolog innovation n’aurait pas commercialisé de produit similaire au produit securirack après la cessation des relations commerciales, la société Global industrial security service aurait pu vendre des produits securirack à des clients de la société Ecolog innovation ou à d’autres entreprises. Il n’est pas établi que la société Global industrial security service aurait pu vendre un nombre équivalent de produits à ceux vendus lorsqu’il était sous-traitant de la société Ecolog innovation. De même, il n’est pas établi que certaines entreprises clientes de la société Ecolog innovation n’ont pas contracté avec la société Global industrial security service après la cessation des relations commerciales.
De plus, le préjudice subi par la société Global industrial security service ne peut résider dans la perte de chiffre d’affaire mais dans la perte de marge brute.
La société Global indutrial security service produit une attestation d’un expert comptable faisant état d’une marge de 90 %. Cet pourcentage qui apparaît particulièrement élevée n’est corroborée par aucun pièce. De plus, l’expert comptable ne mentionne pas les documents sur lesquels il s’est appuyé.
Au regard de ces éléments, la cour estime que la société Global industrial security service a subi un préjudice d’un montant de 100 000 euros.
La société Ecolog innovation sera condamnée au paiement de cette somme.
Le jugement sera infirmé de ce chef.
5) Sur la demande de publication de la décision
Le préjudice subi par la société Global industrial security systems est réparé par l’interdiction faite à la société Ecolog innovation de commercialiser un produit similaire au produit Securirack et par l’allocation de dommages et intérêts.
La société Global industrial security systems sera déboutée de sa demande de publication de la décision. Le jugement sera confirmé de ce chef.
II) Sur la demande en dommages et intérêts pour procédure abusive
La société Ecolog innovation succombant à l’appel sera déboutée de sa demande à ce titre.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
III) Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens
Le jugement sera infirmé de ce chef.
Succombant à l’appel, la société Ecolog innovation sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel et à payer à la société Global industrial security systems la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance et en appel.
Les procès-verbaux de constat d’huissier ne constituent pas des dépens.
PAR CES MOTIFS
— INFIRME le jugement sauf en ce qu’il a annulé les saisies-contrefaçons opérées le 10 avril 2018 et le 18 octobre 2018 dans les locaux de la société Ecolog Innovation ; écarté des débats les pièces numérotées 10,11,13,15,17,20,21 et 22 par les demandeurs ; débouté la société Global industrial security systems de sa demande de publication du jugement et débouté la société Ecolog innovation de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant
— DÉCLARE irrecevables comme nouvelles en appel les demandes formée par M. [Y] [C] et [M] [C] sur le fondement de la concurrence déloyale et du parasitisme ;
— DÉCLARE recevables les demandes formées par la société Global industrial security systems sur le fondement de la concurrence déloyale et du parasitisme ;
— FAIT interdiction à la société Global industrial security systems :
— vendre le produit similaire au produit securirack
— diffuser des images du produit vendu par la société Ecolog innovation similaire au produit securirack ou du produit securirack ;
— ASSORTIT cette interdiction d’une astreinte de 500 euros par infraction constatée courant à compter de la signification de la présente décision s’agissant de l’interdiction de vente et dans le délai de 2 mois à compter de la signification de la présente décision s’agissant de l’interdiction de diffusion ;
— CONDAMNE la société Ecolog innovation à payer à la société Global industrial security systems la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;
— DÉBOUTE la société Global industrial innovation de ses autres demandes indemnitaires ;
— CONDAMNE la société Ecolog innovation à payer à la société Global industrial security systems la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance et en appel ;
— DÉBOUTE les autres parties de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
— CONDAMNE la société Ecolog innovation aux dépens de première instance et d’appel ;
— AUTORISE Maître Coraline Favrel a recouvrer directement contre la partie condamnée, ceux des dépens dont elle a fait l’avance sans avoir reçu de provision.
Le greffier
Anaïs Millescamps
Le président
Catherine Courteille