Concurrence déloyale : demande de mesure d’instruction rejetée

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Concurrence déloyale : demande de mesure d’instruction rejetée
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1. Il est important de démontrer l’existence d’un motif légitime pour demander une mesure d’instruction en vertu de l’article 145 du code de procédure civile. Il est nécessaire de fournir des éléments crédibles et plausibles, liés à un litige potentiel futur dont l’objet est clairement déterminé.

2. L’ordonnance sur requête est une décision provisoire qui ne nécessite pas le contradictoire si le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse, conformément à l’article 493 du code de procédure civile. Cependant, il est essentiel de justifier toute dérogation au principe du contradictoire et de limiter la mesure ordonnée aux faits dénoncés dans la requête.

3. En cas d’appel d’une ordonnance de référé, la cour d’appel est investie des attributions du juge qui l’a rendue, et le contradictoire est rétabli. Il est donc crucial d’apprécier l’existence du motif légitime au moment du dépôt de la requête, en se basant sur les éléments de preuve produits à l’appui de la requête et ultérieurement devant le juge.

Résumé de l’affaire

L’affaire oppose la société Oshibori Concept International à la société CAB Impression, qui commercialisent toutes deux des serviettes en coton rafraîchissantes. Oshibori Concept International accuse CAB Impression de concurrence déloyale et parasitisme en commercialisant des produits similaires sous des noms de domaine proches, créant ainsi de la confusion chez les clients. Suite à une ordonnance du tribunal de commerce de Créteil, CAB Impression a demandé la rétractation de cette ordonnance et la restitution des éléments saisis. Le juge des référés a accédé à cette demande, annulant l’ordonnance initiale. Oshibori Concept International a fait appel de cette décision, demandant la réintroduction de la mesure d’instruction et la levée du séquestre. CAB Impression, de son côté, demande la confirmation de la rétractation de l’ordonnance et la restitution des éléments saisis. Les deux parties demandent également des dommages et intérêts ainsi que le remboursement des dépens.

Les points essentiels

Contexte de l’affaire

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, il est possible d’ordonner des mesures d’instruction avant tout procès si un motif légitime de conserver ou d’établir la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige est présent.

Conditions pour l’application de l’article 145

Pour que l’article 145 s’applique, il doit exister un motif légitime, des faits crédibles et plausibles, un lien utile avec un litige potentiel futur, et la mesure d’instruction ne doit pas porter atteinte aux droits d’autrui.

Exigences pour la demande de mesure d’instruction

Le demandeur doit justifier d’éléments rendant crédibles ses suppositions, démontrer que le litige potentiel n’est pas voué à l’échec, et que la mesure améliorera sa situation probatoire. De plus, s’il dispose déjà de moyens de preuves suffisants, la demande peut être rejetée.

Ordonnance sur requête et principe du contradictoire

L’article 493 du code de procédure civile concerne les ordonnances sur requête, qui sont des décisions provisoires rendues non contradictoirement. Le juge doit rechercher si la mesure demandée nécessite une dérogation au principe du contradictoire.

Contestation d’une ordonnance de référé

Les articles 497 et 561 du code de procédure civile précisent que la cour d’appel, saisie de l’appel d’une ordonnance de référé, est investie des attributions du juge qui l’a rendue. Le contradictoire est rétabli et le juge doit apprécier l’existence du motif légitime au moment du dépôt de la requête.

Conclusion de l’affaire

Dans cette affaire, la société Oshibori Concept International reproche à la société CAB Impression d’avoir créé des sites internet similaires au sien pour commercialiser des produits identiques, créant ainsi une confusion dans l’esprit du public. Cependant, la cour a jugé que les faits de concurrence déloyale étaient crédibles mais que l’utilité de la mesure d’instruction n’était pas caractérisée. Par conséquent, l’ordonnance de référé a été confirmée, et la société Oshibori Concept International a été condamnée aux dépens et aux frais irrépétibles.

Les montants alloués dans cette affaire: – Régularisation des droits de retraite de Mme [O] à partir du 1er septembre 2021.
– Versement de l’arriéré de pension vieillesse pour la période du 1er septembre 2021 au 1er février 2022 à Mme [O].
– Condamnation de la CNAV aux dépens (montant non spécifié dans le texte).

Réglementation applicable

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé.

L’article 145 suppose l’existence d’un motif légitime, c’est-à-dire un fait crédible et plausible, ne relevant pas de la simple hypothèse, qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur dont l’objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction sollicitée, à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d’autrui. Elle doit être pertinente et utile.

Ainsi, si le demandeur à la mesure d’instruction n’a pas à démontrer l’existence des faits qu’il invoque puisque cette mesure in futurum est justement destinée à les établir, il doit néanmoins justifier d’éléments rendant crédibles ses suppositions et démontrer que le litige potentiel n’est pas manifestement voué à l’échec, la mesure devant être de nature à améliorer la situation probatoire du demandeur. De plus, si la partie demanderesse dispose d’ores et déjà de moyens de preuves suffisants pour conserver ou établir la preuve des faits litigieux, la mesure d’instruction demandée est dépourvue de toute utilité et doit être rejetée. Enfin, ni l’urgence ni l’absence de contestation sérieuse ne sont des conditions d’application de ce texte.

L’article 493 du code de procédure civile dispose lui que l’ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse.

Le juge doit donc également rechercher si la mesure sollicitée exigeait une dérogation au principe du contradictoire. Les circonstances justifiant cette dérogation doivent être caractérisées dans la requête ou l’ordonnance qui y fait droit.

La mesure ordonnée doit être circonscrite aux faits dénoncés dans la requête dont pourrait dépendre la solution du litige et ne pas s’étendre au-delà. Elle ne peut porter une atteinte illégitime au droit d’autrui.

Enfin, il résulte des articles 497 et 561 du code de procédure civile que la cour d’appel, saisie de l’appel d’une ordonnance de référé statuant sur une demande en rétractation d’une ordonnance sur requête, est investie des attributions du juge qui l’a rendue devant lequel le contradictoire est rétabli. Cette voie de contestation n’étant que le prolongement de la procédure antérieure, le juge doit apprécier l’existence du motif légitime au jour du dépôt de la requête, à la lumière des éléments de preuve produits à l’appui de la requête et de ceux produits ultérieurement devant lui.

Il résulte des articles 497 et 561 du code de procédure civile que la cour d’appel, saisie de l’appel d’une ordonnance de référé statuant sur une demande en rétractation d’une ordonnance sur requête, est investie des attributions du juge qui l’a rendue devant lequel le contradictoire est rétabli. Cette voie de contestation n’étant que le prolongement de la procédure antérieure, le juge doit apprécier l’existence du motif légitime au jour du dépôt de la requête, à la lumière des éléments de preuve produits à l’appui de la requête et de ceux produits ultérieurement devant lui.

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Vanessa BENICHOU du PARTNERSHIPS KING & SPALDING INTERNATIONAL LLP, avocat au barreau de PARIS
– Me Anne ATLAN, avocat au barreau de PARIS
– Me Florent DESARNAUTS, avocat au barreau de PARIS

Mots clefs associés & définitions

– Oshibori Concept International
– CAB Impression
– Concurrence déloyale
– Parasitisme
– Commercialisation sur internet
– Noms de domaine similaires
– Confusion chez les clients
– Mesure d’instruction in futurum
– Ordonnance du tribunal de commerce de Créteil
– Rétractation d’ordonnance
– Restitution des éléments appréhendés
– Secret des affaires
– Article 700 du code de procédure civile
– Dépens
– Appel de décision
– Levée de séquestre
– Protection des données à caractère personnel
– Condamnation aux entiers dépens
– Article R 153-1 du code de commerce
– Communication ou production de pièces
– Mémoire sur le secret des affaires
– Version confidentielle et non confidentielle des documents
– Pension de retraite : Somme périodique versée à une personne ayant cessé son activité professionnelle en raison de son âge, en fonction de ses années de cotisation et de son salaire moyen.

– Contestation du point de départ : Action en justice visant à modifier la date officielle de début du versement de la pension de retraite.

– Démarches effectuées : Ensemble des actions réalisées par un individu pour obtenir un droit ou accomplir une procédure administrative.

– Demande de retraite en ligne : Procédure permettant à un individu de soumettre sa demande de pension de retraite via un portail internet dédié.

– Justificatifs : Documents officiels fournis pour prouver une affirmation ou justifier une demande dans un contexte administratif.

– Régularisation de la carrière : Procédure administrative visant à corriger ou à compléter le relevé de carrière d’un individu pour le calcul de sa retraite.

– Enregistrement de la demande en ligne : Action de saisir et de soumettre les informations nécessaires à une demande administrative via un système informatique.

– Instruction de la demande : Analyse et traitement d’une demande par les services compétents pour vérifier sa conformité et décider de son issue.

– Pièces justificatives : Documents nécessaires pour appuyer une demande ou une déclaration et permettre son traitement par les autorités compétentes.

– Réponse à la demande de la CNAV : Décision communiquée par la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse suite à l’examen d’une demande de retraite.

– Déplacement physique : Action de se rendre en personne dans un lieu spécifique pour réaliser une démarche administrative.

– Formulaire manuscrit de demande : Document papier rempli à la main par une personne pour formaliser une demande administrative.

– Rejet de la demande initiale : Décision administrative refusant une demande en raison de non-conformité ou d’incomplétude des informations ou documents fournis.

– Annulation de la décision de la commission de recours amiable : Action juridique annulant la décision prise par la commission de recours amiable suite à une contestation.

– Liquidation des droits à retraite : Calcul final et détermination du montant de la pension de retraite d’un individu en fonction de ses droits acquis.

– Astreinte : Somme d’argent qu’une partie doit payer à l’autre en cas de non-exécution d’une décision de justice dans les délais prescrits.

– Situation de handicap : État d’une personne présentant une limitation des possibilités d’interaction avec son environnement, qui peut entraîner des besoins spécifiques.

– Privation de ressources : Situation où un individu se trouve sans accès à des ressources financières suffisantes pour subvenir à ses besoins.

– Gestion du dossier : Ensemble des opérations administratives réalisées pour traiter et suivre un dossier spécifique.

– Dommages et intérêts : Compensation financière accordée à une personne pour réparer le préjudice subi.

– Article 700 du Code de procédure civile : Disposition légale permettant à une partie dans un litige de demander à l’autre partie le remboursement des frais non couverts par les dépens.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

1 février 2024
Cour d’appel de Paris
RG n°
23/09078
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 2

ARRÊT DU 01 FEVRIER 2024

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/09078 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHU3J

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 10 Mai 2023 -Tribunal de Commerce de Créteil – RG n° 2023R00121

APPELANTE

S.A.R.L. OSHIBORI CONCEPT INTERNATIONAL, RCS de Paris sous le n°519 041 446, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Vanessa BENICHOU du PARTNERSHIPS KING & SPALDING INTERNATIONAL LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : A0305, substituée à l’audience par Me Anne ATLAN, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

S.A.R.L. CAB IMPRESSION, RCS de Créteil sous le n°782 837 971, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Florent DESARNAUTS, avocat au barreau de PARIS, toque : D1848, présent à l’audience

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 14 Décembre 2023 en audience publique, devant Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et Michèle CHOPIN, Conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 905 du CPC, les avocats ne s’y étant pas opposés.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Laurent NAJEM, Conseiller,

Qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*

EXPOSE DU LITIGE

La société Oshibori Concept International est une société française créée en 2009, qui selon son extrait Kbis exerce une activité de commerce de gros et d’intermédiation dans les produits d’hygiène et de santé. Elle commercialise via son site internet www.oshiboriconcept.com des serviettes en coton rafraîchissantes antibactériennes (ou non) à usage unique, dont le packaging et la senteur sont personnalisables.

La société CAB Impression est elle aussi française, créée en 2012, qui selon son extrait Kbis exerce une activité de vente de fournitures pour l’hôtellerie et la restauration, la conception et la réalisation graphique de menus (…) Elle commercialise aussi par internet des «oshibori», mot japonais désignant des petites serviettes chaudes ou froides présentées aux clients d’un restaurant pour s’essuyer les mains avant ou pendant le repas.

Reprochant à la société CAB Impression des actes de concurrence déloyale et parasitisme dans le fait de commercialiser sur internet les mêmes produits que les siens sous des noms de domaine similaires (www.oshibori.eu et www.oshibori-europe.com) créant la confusion dans l’esprit des clients, fussent-ils professionnels, la société Oshibori Concept International a sollicité par requête une mesure d’instruction in futurum à l’encontre de la société CAB Impression, mesure qu’elle a obtenue par ordonnance rendue le 29 décembre 2022 par le tribunal de commerce de Créteil.

Par acte du 8 mars 2023, la société CAB Impression a fait assigner la société Oshibori Concept International devant le juge des référés du tribunal de commerce de Créteil aux fins de voir :

– rétracter l’ordonnance sur requête du 29 décembre 2022 ;

– ordonner à l’huissier instrumentaire de lui restituer l’intégralité des éléments appréhendés à son préjudice et lui faire défense d’en conserver copie et de les communiquer à un tiers ;

A titre subsidiaire, en application de l’article R153-1 et suivants du code de commerce :

– maintenir le séquestre provisoire ordonné par l’ordonnance en date du 29 décembre 2022 pour l’ensemble des pièces appréhendées par l’huissier instrumentaire afin d’assurer la protection du secret des affaires ;

Faire application des articles R 153-1 et suivants du code de commerce et, en conséquence:

– impartir à la société CAB Impression d’avoir, dans un délai d’un mois de la signification de l’ordonnance à intervenir, à remettre une version intégrale de chaque pièce, une version non confidentielle ou résumée, un mémoire précisant, pour chaque information ou partie de la pièce en cause, les motifs qui lui confèrent le caractère d’un secret des affaires ;

– entendre séparément chacune des parties, assistée ou représentée par toute personne habilitée ;

– statuer sur la communication ou la production de chaque pièce et ses modalités ;

En tout état de cause :

– condamner la société Oshibori Concept International à lui verser 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Par ordonnance du 10 mai 2023, le juge des référés du tribunal de commerce de Créteil a :

– rétracté l’ordonnance sur requête rendue le 29 décembre 2022 en toutes ses dispositions ;

– dit que les opérations diligentées en vertu de celles-ci sont nulles ;

– ordonné au commissaire de justice instrumentaire de procéder à la restitution de l’ensemble des pièces et documents appréhendés dans le cadre de celles-ci sans qu’il puisse ni en conserver copies ni en divulguer le contenu ;

– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– mis les dépens à la charge de la société Oshibori Concept International ;

– liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 40,66 euros dont TVA 20%.

Par déclaration du 25 mai 2023, la société Oshibori Concept International a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 3 novembre 2023, elle demande à la cour, de :

– infirmer l’ordonnance du président du tribunal de commerce de Créteil du 10 mai 2023 dans l’ensemble de ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

– juger que la société Oshibori Concept International justifie d’un motif légitime à solliciter la mesure d’instruction in futurum telle qu’ordonnée par l’ordonnance du 29 décembre 2022 ;

– juger que la dérogation au principe du contradictoire est parfaitement justifiée compte tenu des circonstances d’espèce propres à qualifier le risque de dépérissement des preuves nécessaires au succès d’une future action au fond ;

– juger que la mesure ordonnée constitue une mesure légalement admissible, laquelle ne contrevient ni au secret des affaires ni à la protection des données à caractère personnel ;

– ordonner la levée totale de la mesure de séquestre ordonnée ;

En conséquence,

– débouter la société CAB Impression de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

– autoriser la SELAS Proesing à communiquer à la société Oshibori Concept International l’intégralité des éléments séquestrés ;

En tout état de cause :

– condamner la société CAB Impression à payer la somme totale de 15.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– la condamner aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de Me Vanessa Benichou, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 21 novembre 2023, la société CAB Impression demande à la cour, de :

– confirmer l’ordonnance de référé du président du tribunal de commerce de Créteil du 10 mai 2023 en ce qu’elle a rétracté purement et simplement l’ordonnance en date du 29 décembre 2022 ;

– ordonner à l’huissier instrumentaire de restituer à la société CAB Impression l’intégralité des éléments appréhendés à son préjudice et lui faire défense d’en conserver copie et de les communiquer à un tiers notamment la société Oshibori Concept International ;

– débouter la société Oshibori Concept International de l’intégralité de ses demandes ;

A titre subsidiaire, et si par extraordinaire la Cour infirmait l’ordonnance entreprise ;

En application de l’article R 153-1 et suivants du code de commerce,

– maintenir le séquestre provisoire ordonné par l’ordonnance en date du 29 décembre 2022 pour l’ensemble des pièces appréhendées par l’huissier instrumentaire afin d’assurer la protection du secret des affaires ;

– faire application de l’article R 153-1 et suivants du code de commerce et en conséquence,

– impartir à la société CAB Impression d’avoir dans un délai d’un mois à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir pour lui remettre :

1. La version confidentielle intégrale de chaque pièce,

2. Une version non confidentielle ou un résumé,

3. Un mémoire précisant, pour chaque information ou partie de la pièce en cause, les motifs qui lui confèrent le caractère d’un secret des affaires,

– entendre séparément chacune des parties, assistée ou représenté par toute personne habilitée,

– statuer sur la communication ou la production de chaque pièce et ses modalités ;

En tout état de cause :

– condamner la société Oshibori Concept International à verser à la société CAB Impression une somme de 15.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– la condamner en tous les dépens.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

SUR CE, LA COUR

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé.

L’article 145 suppose l’existence d’un motif légitime, c’est-à-dire un fait crédible et plausible, ne relevant pas de la simple hypothèse, qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur dont l’objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction sollicitée, à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d’autrui. Elle doit être pertinente et utile.

Ainsi, si le demandeur à la mesure d’instruction n’a pas à démontrer l’existence des faits qu’il invoque puisque cette mesure in futurum est justement destinée à les établir, il doit néanmoins justifier d’éléments rendant crédibles ses suppositions et démontrer que le litige potentiel n’est pas manifestement voué à l’échec, la mesure devant être de nature à améliorer la situation probatoire du demandeur. De plus, si la partie demanderesse dispose d’ores et déjà de moyens de preuves suffisants pour conserver ou établir la preuve des faits litigieux, la mesure d’instruction demandée est dépourvue de toute utilité et doit être rejetée. Enfin, ni l’urgence ni l’absence de contestation sérieuse ne sont des conditions d’application de ce texte.

L’article 493 du code de procédure civile dispose lui que l’ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse.

Le juge doit donc également rechercher si la mesure sollicitée exigeait une dérogation au principe du contradictoire. Les circonstances justifiant cette dérogation doivent être caractérisées dans la requête ou l’ordonnance qui y fait droit.

La mesure ordonnée doit être circonscrite aux faits dénoncés dans la requête dont pourrait dépendre la solution du litige et ne pas s’étendre au-delà. Elle ne peut porter une atteinte illégitime au droit d’autrui.

Enfin, il résulte des articles 497 et 561 du code de procédure civile que la cour d’appel, saisie de l’appel d’une ordonnance de référé statuant sur une demande en rétractation d’une ordonnance sur requête, est investie des attributions du juge qui l’a rendue devant lequel le contradictoire est rétabli. Cette voie de contestation n’étant que le prolongement de la procédure antérieure, le juge doit apprécier l’existence du motif légitime au jour du dépôt de la requête, à la lumière des éléments de preuve produits à l’appui de la requête et de ceux produits ultérieurement devant lui.

En l’espèce, la société Oshibori Concept International reproche à la société CAB Impression d’avoir créé opportunément, en sus de son site internet déjà créé pour le déploiement de son activité, les sites internet www.oshibori.eu puis www.oshibori-europe.com aux noms de domaine quasi-identiques au sien (www.oshiboriconcept.com), afin de faire la publicité de produits identiques à ceux de la société Oshibori Concept International que celle-ci commercialisait bien avant elle, dans le seul but de créer une confusion dans l’esprit du public.

Elle fait valoir qu’au cours du mois de juillet 2014, alors qu’elle n’avait jamais entendu parler de cette entreprise, elle a été contactée par le représentant de la société CAB Impression qui, prétextant de rechercher un fournisseur d’oshibori afin de les ajouter à son catalogue, a sollicité qu’elle lui transmette sa grille tarifaire, des échantillons de ses produits exclusifs ainsi que les tarifs revendeurs qu’elle pratiquait, éléments que la société Oshibori Concept lui a transmis ; qu’elle était loin d’imaginer que la société CAB Impression allait créer, quelques années plus tard, en février 2019, d’abord le site www.oshibori.eu puis, en octobre 2022 le site www.oshibori-europe.com pour ajouter à la confusion; qu’à compter du mois de novembre 2022, alors qu’elle avait poursuivi jusqu’alors sereinement son activité, elle a été alertée par deux clients qui lui ont indiqué par mails (en date des 18 et 20 novembre 2022) que souhaitant passer commande avec elle, ils avaient en réalité passé commande auprès de la société CAB Impression sans s’en apercevoir en raison de la confusion entretenue par cette dernière sur ses produits avec ceux d’Oshibori Concept.

Elle en conclut qu’en faisant usage d’un nom de domaine très similaire afin de commercialiser des produits identiques, la société CAB Impression a nécessairement souhaité se placer dans le sillage de la société Oshibori Concept et tirer profit du risque de confusion nécessairement créé dans l’esprit du client, même professionnel.

Elle ajoute que la société CAB Impression a en outre profité de ses investissements promotionnels à l’occasion du salon Equiphôtel qui s’est tenu du 6 au 10 novembre 2022 à [Localité 3], s’étant trouvée référencée dans le catalogue des exposants, grâce à son nom de domaine similaire à celui de la société Oshibori Concept, dans un encadré situé juste en dessous de celui de cette dernière qui avait acquitté une redevance de 4.749 euros HT pour être référencée de manière visible.

La cour relève, à l’exposé de ces faits, que la société Oshibori Concept International connaissait l’intention de la société CAB Impression de commercialiser des oshibori depuis sa prise de contact par mail du 9 juillet 2014, cette dernière s’y présentant comme une société spécialisée dans le négoce de consommables non périssables dans le secteur de la restauration et indiquant clairement chercher un fournisseur d’oshibori afin d’ajouter ce produit à son catalogue. La société CAB Impression a finalement renoncé à acheter les produits de la société Oshibori Concept International pour se tourner vers un fournisseur japonais, et il est constant que le site www.oshibori.eu par lequel la société CAB Impression commercialise ses oshibori est actif depuis février 2019. En outre, l’intimée justifie par sa pièce 15 avoir proposé à la société Oshibori Concept International, par mail du 15 mai 2018, de collaborer avec la société CAB Impression, laquelle recherchait des distributeurs pour ses produits (oshibori haut de gamme importés du Japon et machine fabriquée par elle permettant de fabriquer des oshibori).

Il ressort de ces éléments que la société Oshibori Concept International était informée depuis février 2019 de l’activité concurrente de la société CAB Impression et de la nature des produits qu’elle commercialisait en ligne via un site au nom de domaine ressemblant au sien, le témoignage qu’elle a reçu en 2022 de deux de ses clients ne venant que conforter des éléments déjà connus d’elle, à savoir un risque de confusion avec ses propres produits.

Il en résulte que si les faits de concurrence déloyale dénoncés sont suffisamment crédibles au vu de la similitude des noms des deux sites internet de la société CAB Impression avec celui de la société Oshibori Concept International et de la confusion qui en est résulté dans l’esprit des deux clients de cette dernière, en revanche, l’utilité de la mesure n’apparaît pas caractérisée.

En effet, tant dans sa requête que dans ses conclusions la société Oshibori Concept International présente les faits de concurrence déloyale et parasitaire comme étant déjà établis par les éléments qu’elle développe. « De tels faits caractérisent sans l’ombre d’un doute des actes de concurrence déloyale et parasitaire que la société requérante ne saurait tolérer davantage », écrit-elle dans sa requête. Elle y affirme aussi que les mesures sollicitées apparaissent être le préalable nécessaire et incontournable avant tout procès au fond, sans toutefois l’expliciter, et qu’elle n’a d’autre choix que de faire constater par commissaire de justice l’ampleur des agissements déloyaux, sans davantage étayer cette affirmation. Dans ses conclusions d’appel, elle expose que les éléments qui ont été appréhendés sont susceptibles de corroborer la migration de ses clients vers sa concurrente, mais elle ne prétend ni dans sa requête ni dans ses conclusions avoir perdu un ou plusieurs clients au profit de la société CAB Impression, alors que ce fait pouvait être établi par ses propres documents internes. Elle indique aussi que les tarifs distributeur proposés par la société CAB Impression constituent des informations de nature à révéler de plus fort les actes de concurrence déloyale et parasitaire puisqu’un client achètera plus facilement les produits proposés pas CAB Impression s’ils sont vendus à un prix inférieur à ceux de Oshibori Concept, mais elle ne prétend pas n’avoir pu avoir accès aux tarifs de sa concurrente via ses sites de commercialisation en ligne.

La nécessité de déroger au principe de la contradiction n’apparaît pas non plus caractérisée, au regard des données concrètes du litige, par la simple nature du procès en germe et le caractère volatile des données informatiques recherchées qui exigeraient de ménager un effet de surprise comme le soutient la requérante. Il a en effet été précédemment démontré que la société CAB Impression n’a jamais cherché à dissimuler à la société Oshibori Concept son activité concurrente, ce qui ressort de sa prise de contact en 2014, de sa proposition de collaboration commerciale en 2018 et de la création de son site de distribution en ligne (en février 2019) portant le nom de domaine www.oshibori.eu, les deux sociétés participant en outre aux mêmes salons. Les faits de concurrence tels que dénoncés par l’appelante sont donc connus des deux parties depuis 2019, la nécessité de ménager un effet de surprise n’est pas établie.

L’ordonnance de référé entreprise sera par conséquent confirmée en ce qu’elle a rétracté l’ordonnance sur requête ayant fait droit à la mesure d’instruction in futurum, et en ce qu’elle a annulé les opérations diligentées par le commissaire de justice et ordonné à celui-ci de restituer l’ensemble des pièces et documents appréhendés.

La décision de première instance sera également confirmée en ses dispositions relatives aux dépens et à l’application de l’article 700 du code de procédure civile, dont elle a fait une juste appréciation.

Perdant en appel, la société Oshibori Concept International sera condamnée aux entiers dépens de la présente instance et à payer à la société CAB Impression la somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles qu’elle a exposés en appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme en toutes ses dispositions l’ordonnance entreprise,

Y ajoutant,

Condamne la société Oshibori Concept International aux entiers dépens de la présente instance,

La condamne à payer à la société CAB Impression la somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles que l’intimée a exposés en appel,

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


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