Conclusions tardives pour panne informatique : quels recours ?

·

·

Conclusions tardives pour panne informatique : quels recours ?
Ce point juridique est utile ?

La survenance d’une panne informatique peut justifier la recevabilité de conclusions tardives (Cass. Com. 18 mai 2016 n°14-17.909). Toutefois, la réalité de ces dysfonctionnements doit être établie de façon certaine.

Les échanges informatiques des conclusions entre avocats sont très strictement encadrés par les délais et notamment, par le délai d’un mois fixé par l’article 905-2 du code de procédure civile.

Il résulte des dispositions de l’article 748-7 du code de procédure civile que par dérogation aux dispositions relatives à la communication par voie électronique, lorsqu’il est prévu qu’un avis, une convocation ou un récépissé est adressé par le greffe à une partie par tous moyens, par lettre simple, par lettre recommandée sans avis de réception, il peut lui être envoyé par voie électronique sur le “Portail du justiciable” du ministère de la justice, à la condition que la partie y ait préalablement consenti.

La déclaration par laquelle une partie consent à l’utilisation de la voie électronique mentionne ses adresse électronique et n° de téléphone portable, à charge pour elle de signaler toute modification de ceux-ci.

La partie est alertée de toute nouvelle communication par un avis de mise à disposition envoyé à l’adresse électronique indiquée par elle qui indique la date et, le cas échéant, l’heure de celle-ci.

Les procédés techniques utilisés doivent garantir, dans des conditions fixées par arrêté du garde des Sceaux, ministre de la justice, la fiabilité de l’identification des parties à la communication électronique, l’intégrité des documents adressés, la sécurité et la confidentialité des échanges, la conservation des transmissions opérées et permettre d’établir de manière certaine la date d’envoi.

Par ailleurs, il résulte des dispositions de l’article 930-1 du même code qu’à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique.

Lorsqu’un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l’accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe ou lui est adressé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

Les avis, avertissements ou convocations sont remis aux avocats des parties par voie électronique, sauf impossibilité pour cause étrangère à l’expéditeur.

La cause étrangère s’entend d’un événement imprévisible et insurmontable.

Résumé de l’affaire : Une partie doit déclarer son adresse électronique et son numéro de téléphone portable pour consentir à l’utilisation de la voie électronique, en s’engageant à signaler toute modification. Les communications sont notifiées par un avis envoyé à l’adresse électronique fournie, précisant la date et éventuellement l’heure. Les procédés techniques utilisés doivent assurer la fiabilité de l’identification des parties, l’intégrité des documents, la sécurité et la confidentialité des échanges, ainsi que la conservation des transmissions et la date d’envoi. Selon l’article 930-1, les actes de procédure doivent être remis par voie électronique, sous peine d’irrecevabilité. Si un acte ne peut être transmis électroniquement pour des raisons extérieures à l’expéditeur, il doit être établi sur support papier et remis au greffe ou envoyé par lettre recommandée. Les avis et convocations sont également remis par voie électronique aux avocats, sauf impossibilité due à une cause étrangère, définie comme un événement imprévisible et insurmontable. En conséquence, les conclusions de la SNC BPA du 18 juillet 2024 sont déclarées irrecevables pour avoir été déposées après le délai d’un mois. Il n’y a pas lieu à dépens.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

16 octobre 2024
Cour d’appel de Bourges
RG n°
24/00453
COPIE EXÉCUTOIRE

à

– SCP AVOCATS BUSINESS CONSEILS

– SCP AVOCATS CENTRE

– SELARL CREALEX

LE : 16 OCTOBRE 2024

COUR D’APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

O R D O N N A N C E

DU CONSEILLER DE LA MISE EN ETAT

DU 16 OCTOBRE 2024

N° – Pages

N° RG 24/00453 – N° Portalis DBVD-V-B7I-DUTG

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé du tribunal de commerce de BOURGES en date du 09 Avril 2024

Audience tenue par M. TESSIER-FLOHIC, Conseiller de la mise en état, assisté de Mme MAGIS, Greffier, le 2 octobre 2024, date à laquelle le délibéré de l’ordonnance a été renvoyé au 16 octobre 2024.

PARTIES EN CAUSE :

I – S.A.R.L. PARC MAINTENANCE, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 4]

[Adresse 4]

N° SIRET : 384 953 634

Représentée et plaidant par la SCP AVOCATS BUSINESS CONSEILS, avocat au barreau de BOURGES

timbre fiscal acquitté

APPELANTE suivant déclaration du 17/05/2024

INCIDEMMENT INTIMÉE

II – S.N.C. BPA, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 353 216 039

Représentée et plaidant par la SCP AVOCATS CENTRE, avocat au barreau de BOURGES

timbre fiscal acquitté

INTIMÉE

DEMANDEUR A L’INCIDENT

III – S.A.S. ETA, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 3]

[Adresse 3]

N° SIRET : 892 490 368

Représentée par la SELARL CREALEX, avocat au barreau de BOURGES

Plaidant par la SELARL FLOYD & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

timbre fiscal acquitté

INTIMÉE

INCIDEMMENT APPELANTE

IV – S.A.S. LACOUR COLOR’TECH, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 417 803 475

non représentée

à laquelle la déclaration d’appel et les conclusions ont été signifiés suivant actes d’huissier des 23/05/2024, 26/06/2024 et 25/07/2024 remis à personne habilitée

INTIMÉE

Nous, M. TESSIER-FLOHIC, Conseiller de la mise en état, assisté de Mme MAGIS, Greffier, avons rendu ce jour l’ordonnance dont la teneur suit :

Vu la déclaration d’appel en date du 17 mai 2024 de la S.A.R.L. PARC MAINTENANCE à l’encontre de la SNC BPA, de la SAS ETA, et de la SAS LACOUR COLOR’TECH à l’encontre d’une ordonnance de référé du tribunal de commerce de Bourges en date du 12 mars 2024 rejetant l’ensemble des réclamations des sociétés ETA et PARC MAINTENANCE et les condamnant in solidum, à régler une somme de 2000 € chacune, à la société BPA au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre, dans les mêmes conditions de la somme de 74,63€ au titre des dépens taxés et liquidés.

Vu l’incident soulevé à la diligence de la SNC BPA suite à l’avis d’irrecevabilité de ses conclusions adressées le 23 juillet 2024, rendu le 5 août 2024.

Attendu qu’il est soutenu que c’est bien à tort qu’il a été établi un avis d’irrecevabilité sur ses conclusions, régulièrement échangées le 18 juillet 2024, alors que le délai maximal été fixé au 11 juillet 2024, au motif que le conseil en charge de la défense des intérêts de la société en nom collectif BPA faisait valoir une cause extérieure non imputable qui avait retardé de sept jours le dépôt de ses écritures ; qu’il est soutenu qu’il a été procédé à la scission du cabinet du conseil et que celle-ci à générer une division du système informatique entre le 28 juin et le 15 juillet 2024, de telle sorte, que le système informatique n’a pas été opérationnel et qu’il a été découvert que la signification des conclusions effectuée le 8 juillet 2024, n’avait pu être pris en compte par le système informatique et que ce n’est que le 18 juillet que le secrétariat découvrait qu’il n’y avait pas eu de retour de signification.

Attendu que la SAS ETA soutient au contraire que les délais posés par les dispositions des articles 905-2 ancien et 748-7 du code de procédure civile, constituent des délais impératifs, qui ne peuvent céder que devant une cause extérieure au titre de laquelle ne figure pas les dysfonctionnements du réseau privé virtuel justice ;qu’il est soutenu que la migration d’un système informatique ne constitue pas une cause étrangère car il appartenait, au conseil de l’appelant de procéder éventuellement à partir d’un autre poste informatique, toujours en utilisant la clé USB d’identification du cabinet.

Attendu que la S.A.R.L. PARC MAINTENANCE s’associe aux écritures de la SAS ETA et soutient aussi l’irrecevabilité des conclusions notifiées hors délai.

Attendu en droit qu’il résulte des dispositions de l’article 748-7 du code de procédure civile que par dérogation aux dispositions relatives à la communication par voie électronique, lorsqu’il est prévu qu’un avis, une convocation ou un récépissé est adressé par le greffe à une partie par tous moyens, par lettre simple, par lettre recommandée sans avis de réception, il peut lui être envoyé par voie électronique sur le “Portail du justiciable” du ministère de la justice, à la condition que la partie y ait préalablement consenti.

Que la déclaration par laquelle une partie consent à l’utilisation de la voie électronique mentionne ses adresse électronique et n° de téléphone portable, à charge pour elle de signaler toute modification de ceux-ci.

Que la partie est alertée de toute nouvelle communication par un avis de mise à disposition envoyé à l’adresse électronique indiquée par elle qui indique la date et, le cas échéant, l’heure de celle-ci.

Que les procédés techniques utilisés doivent garantir, dans des conditions fixées par arrêté du garde des Sceaux, ministre de la justice, la fiabilité de l’identification des parties à la communication électronique, l’intégrité des documents adressés, la sécurité et la confidentialité des échanges, la conservation des transmissions opérées et permettre d’établir de manière certaine la date d’envoi.

Attendu encore qu’il résulte des dispositions de l’article 930-1 du même code qu’à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique.

Que lorsqu’un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l’accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe ou lui est adressé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

[…] que les avis, avertissements ou convocations sont remis aux avocats des parties par voie électronique, sauf impossibilité pour cause étrangère à l’expéditeur.

Que la cause étrangère s’entend d’un événement imprévisible et insurmontable.

Attendu que la survenance d’une panne informatique peut justifier la recevabilité de conclusions tardives (Cass. Com. 18 mai 2016 n°14-17.909) ;

Attendu que les échanges informatiques des conclusions entre avocats sont très strictement encadrés par les délais et notamment, par le délai d’un mois fixé par l’article 905-2 du code de procédure civile ;

Qu’en l’espèce ce délai d’un mois à compter du 11 juin 2024 donnait à la SNC BPA un mois pour conclure soit jusqu’au 11 juillet 2024 qui n’était ni un dimanche, ni un jour férié ou chômé ; que ses écritures ont été déposées le 18 juillet 2024 à 15h ;

Attendu que l’examen des propriétés du document transmis au format PDF valant conclusions montre qu’elles ont été créées le 25 juin 2024 et modifiées le 9 juillet 2024, soit dans le délai d’un mois, par le cabinet plaidant ;

Qu’il est soutenu que le conseil a fait face à des circonstances extérieures à savoir un dysfonctionnement de son système informatique lié à la scission de son cabinet à la date du 1er juillet 2024 ; que pour en rapporter la preuve il verse la copie du devis d’intervention du 28 juin 2024, portant reconfiguration du profil des utilisateurs, reparamétrage du logiciel, séparation de la base de données avec migration de celles-ci et reprise de fichiers ;

Que cependant, ce document constitue un devis et ne précise pas la date d’intervention et encore moins ne démontre que le système informatique aurait présenté des défaillances à la suite de la scission et des reprises de données;

Que n’est pas versée d’attestation ou de courrier de l’entreprise informatique confirmant l’existence d’un bugg ou de difficultés liées à ces opérations ou en découlant.

Qu’en l’espèce le retard mis dans le dépôt de ces conclusions est de 7 jours ; que le conseil disposait toujours de la faculté de déposer les conclusions sous forme papier pendant la période de reprises de données.

Attendu qu’en conséquence, en l’absence de cause étrangère, imprévisible et irrésistible, les conclusions de la SNC BPA en date du 18 juillet 2024 ne peuvent qu’être déclarées irrecevables.

Qu’il n’y a lieu à dépens.

PAR CES MOTIFS

– Constatons l’irrecevabilité des conclusions de la SNC BPA en date du 18 juillet 2024, pour avoir été déposées au delà du délai d’un mois pour conclure.

– Disons n’y avoir lieu à dépens.

Le Greffier, Le Conseiller de la mise en état,

Mme MAGIS M. TESSIER-FLOHIC


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x