9 janvier 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
21/04864
Pôle 5 – Chambre 10
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 10
ARRÊT DU 09 JANVIER 2023
(n° , 12 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/04864 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDI7C
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Février 2021 -TJ de PARIS – RG n° 15/07996
APPELANTS
Monsieur [N] [O]
né le [Date naissance 6] 1952 à [Localité 15]
Madame [Y] [C] épouse [O]
née le [Date naissance 4] 1953 à [Localité 14]
Domiciliés ensemble [Adresse 7]
[Localité 11]
Représentée par Me Guillaume DAUCHEL de la SELARL CABINET SEVELLEC DAUCHEL, avocat au barreau de PARIS, toque : W09,
Représentée par Me Bertrand JANSSENS de l’AARPI AMADIO PARLEANI GAZAGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : C0156
INTIMEES
S.A. MMA IARD
S.C. MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES venant aux droits de la société COVEA RISKS,
Ayant son siège social
[Adresse 3]
[Localité 9]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034, Me Leonardo PINTO, avocat au barreau de PARIS
S.A.R.L. MONTRACHET FINANCE ET PATRIMOINE
Ayant son siège social
[Adresse 8]
[Localité 12]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034, Me Leonardo PINTO, avocat au barreau de PARIS
S.A.R.L. FINANCIERE DU CEDRE
Ayant son siège social
[Adresse 2]
[Localité 10]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034, Me Leonardo PINTO, avocat au barreau de PARIS
S.A.S.U. JP OCEAN GESTION
Ayant son siège social
[Adresse 1]
[Localité 5]
N° SIRET : 429 490 923
représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477, Me Madeleine FABRE de la SELAS GINESTIE MAGELLAN PALEY-VINCENT, avocat au barreau de PARIS, toque : R0138
AIG EUROPE SA
Ayant son siège social
[Adresse 16]
[Localité 13]
N° SIRET : 838 136 463
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP SCP REGNIER – BEQUET – MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050, Me Claire-marie QUETTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : B0459
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 24 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Edouard LOOS, Président, chargé du rapport et Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente .
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Edouard LOOS, Président
Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL,Présidente
Madame Sylvie CASTERMANS, Magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MOLLÉ
ARRÊT :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Edouard LOOS, Président et par Sylvie MOLLÉ, Greffier présent lors du prononcé.
Exposé du litige
FAITS ET PROCEDURE
En 2002, M. et Mme [O] ont été contactés par la Sarl Montrachet Finance et Patrimoine et la Sarl JP Océan, lesquelles proposaient des solutions de dé’scalisation dans le cadre de la loi Paul, devenue en juillet 2003 Girardin industriel.
La Sarl JP Océan, qui a une activité de gestion d’investissements était représentée par deux co-gérants, M. [P] [I] et M. [X] [R]. Elle était assurée auprès de la compagnie d’assurances AIG.
M. [X] [R] était également gérant de la société Montrachet Finance et Patrimoine, laquelle avait une activité de conseil en gestion de patrimoine. Cette société était assurée auprès de la société Covéa Risks.
M.[P] [I] était, quant à lui, gérant de la société immobilière Financière du Cèdre, qui a une activité d’agence immobilière et qui était également assurée auprès de la société Covéa Risks.
Enfin, la société JP Océan était associée gérante de plusieurs sociétés en nom collectif, ayant une activité de location et de location bail de biens meubles et immeubles : la SNC Cilaos 30, la SNC Alizes Location 56, et la SNC Alizes Location 57.
Chacune de ces sociétés avait pour objet social « l’acquisition en vue de la location de biens meubles et immeubles équipés ou meublés, de véhicules de plus ou moins 3 tonnes 5, et moins de 14 m3 ; toutes opérations commerciales, financières, mobilières et immobilières, pouvant se rattacher directement ou indirectement à cet objet social et à tous objets similaires ou connexes ; le tout dans les départements et territoires d’Outre-Mer, conformément aux dispositions du code général des impôts, article 163 tervicies ».
Dans ce cadre, et après avoir donné mandats de recherche d’investissement à la société Financière de Cèdre pour les réaliser, M. [O] a procédé aux investissements suivants :
– il a souscrit 99 des 100 parts de la SNC Cilaos 30, au prix de 99 euros, cette société ayant été constituée le 4 octobre 2002 et a versé en compte courant d’associé la somme de 102 628,67 euros, correspondant à 34 % de l’investissement total d’un montant de 301 849 euros ;
– il a souscrit 99 des 100 parts de la SNC Alizes 56, qui a été constituées le 10 novembre 2003, au prix de 99 euros, et a versé en compte courant d’associé la somme de 106.920 euros, correspondant à 36 % de l’investissement total d’un montant de 297 000 euros ;
– il a souscrit 99 des 100 parts de la SNC Alizes 57, qui a été constituée le 10 novembre 2003, au prix de 99 euros, et a versé en compte courant d’associé la somme de 106 920 euros, correspondant à 36 % de l’investissement total d°un montant de 297 000 euros.
Après avoir reçu le 4 février 2005, puis le 15 mars 2005, une demande de précisions concernant leurs investissements réalisés dans les Dom-Tom par l’administration fiscale, il était notifié aux époux [O] une proposition de rectification pour les exercices 2002 et 2003.
L’administration fiscale remettait en cause les réductions d’impôts dont les époux [O] s’étaient prévalus au titre des années d’imposition 2002 et 2003, relevant que les investissements réalisés par les SNC Cilaos 30, Alizes 56, et Alizes 57 ne répondaient par aux conditions édictées par le code général des impôts.
Les époux [O] formaient une contestation, par l’intermédiaire des sociétés JP Océan et Financière du Cèdre.
Néanmoins, l’administration fiscale leur notifiait par courrier daté du 1er décembre 2005, reçu le 12 décembre 2005, une réponse à leurs observations maintenant l’intégralité des rectifications proposées.
Finalement le 31 mai 2006, l’administration fiscale leur adressait un avis de mise en recouvrement.
Par suite, les époux [O] adressaient à l’administration fiscale, par l’intermédiaire de l’avocat mandaté par la société JP Océan, une première réclamation contentieuse le 7 juillet 2006.
A la suite de cette réclamation, l’administration fiscale a, le 11 juillet 2006, demandé aux époux [O] la mise en place de deux garanties pour un montant global de 697 183 euros.
Ces derniers formaient une seconde réclamation contentieuse en juin 2008, et par courrier en date du 24 décembre 2008, l’administration fiscale les informait qu’elle acceptait partiellement leur réclamation, ne modifiant par son appréciation des faits, mais abandonnant la majoration de 40 % prévue à l’article 1729 du code général des impôts pour manquement délibéré. Elle prononçait le dégrèvement correspondant.
Dans ces conditions, M. et Mme [O] ont introduit une action en contestation de ces rectifications fiscales devant le tribunal administratif de Versailles le 21 janvier 2009.
Le 8 avril 2014, le tribunal administratif de Versailles a jugé que l’ensemble des griefs formulés par l’administration fiscale était fondé, et que M. et Mme [O] étaient dès lors redevables des rectifications fiscales dont ils avaient fait l’objet au titre des années 2002 et 2003.
Ce jugement a été confirmé par la cour administrative d’appel dans son arrêt en date du 10 mai 2016. L’affaire est actuellement pendante devant le Conseil d’État.
Parallèlement, par acte d’huissier de justice en date des 15, 18 et 29 mai 2015, M. et Mme [O] ont fait assigner devant le tribunal judiciaire de Paris la Sarl JP Océan, la Sarl Montrachet Finance et Patrimoine, la Sarl Financière du Cèdre, la compagnie d’assurance AIG, et la compagnie d’assurance Covéa Risks, sur le fondement des articles 1134 et 1147 du code civil, ainsi que L. 124-3 du code des assurances, afin de voir juger les Sarl JP Océan, Montrachet Finance et Patrimoine et Financière du Cèdre responsables de leur préjudice financier d’un montant de 476 310 euros, et les garanties des compagnies AIG et Covéa Risks acquises, pour les voir condamner solidairement à les indemniser de cette somme.
* * *
Vu le jugement prononcé le 15 février 2021 par le tribunal judiciaire de Paris qui a statué comme suit :
– Déclare M. [N] [O] et Mme [Y] [C] épouse [O] irrecevables en leurs demandes pour être prescrites ;
– Déboute la société JP Océan de sa demande reconventionnelle ;
– Condamne in solidum M. [N] [O] et Mme [Y] [C] épouse [O] aux entiers dépens ;
– Accorde le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile à Maître Madeleine Fabre et dit qu’elle pourra recouvrer directement ceux des dépens dont elle aurait fait l’avance sans avoir reçu provision suffisante ;
– Dit n’y avoir lieu à prononcer l’exécution provisoire.
Vu l’appel déclaré le 11 mars 2021 par M. [N] [O] et Mme [Y] [C] épouse [O],
Moyens
Vu les dernières conclusions signifiées le 14 octobre 2022 par Monsieur [N] [O] et Madame [Y] [C] épouse [O],
Vu les dernières conclusions signifiées le 14 octobre 2022 par la société JP Océan Gestion,
Vu les dernières conclusions signifiées le 7 octobre 2022 par les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles venant aux droits de la société Covéa Risks, la société Montrachet Finance et Patrimoine et la société Financière du Cèdre,
Vu les dernières conclusions signifiées le 4 octobre 2022 par la société AIG Europe venant aux droits de la société AIG Europe Limited,
Monsieur [N] [O] et Madame [Y] [C] épouse [O], demandent à la cour de statuer comme suit :
I) Dire Monsieur et Madame [O] recevables et bien fondés en leur appel,
Y faisant droit,
– Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté la société JP Océan Gestion de ses demandes reconventionnelles à l’encontre des concluants,
Et statuant à nouveau,
1) Vu les articles 2224, 2234 et 2240 du code civil,
Juger que l’action en responsabilité engagée par les époux [O] n’est pas prescrite, et que les appelants sont recevables en leurs demandes,
2) Vu les articles 1134 et 1147 du code civil dans leur version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, Vu l’article L. 124-3 du code des Assurances,
– Juger que la Sas JP Océan Gestion, la Sarl Montrachet Finance et Patrimoine et la Sarl Financière du Cèdre, ont commis une faute à l’égard de Monsieur et Madame [N] [O], engageant leur responsabilité civile professionnelle,
– Juger que Monsieur et Madame [N] [O] sont bien fondés à attraire dans la cause les assureurs de responsabilité civile des Sas JP Océan Gestion, Montrachet Finance et Patrimoine et Financière du Cèdre, respectivement les compagnies MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, venant aux droits de la société Covéa Risks, et la compagnie AIG Europe SA,
– Condamner solidairement la Sas JP Océan Gestion, la Sarl Montrachet Finance et Patrimoine, la Sarl Financière du Cèdre, les compagnies MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, venant aux droits de la société Covéa Risks, et la compagnie AIG Europe SA, à payer à Monsieur et Madame [N] [O]
A titre principal, la somme de 326 465 euros en réparation du préjudice subi, correspondant au montant des redressements fiscaux relatifs aux années 2002 et 2003 (soit respectivement 150 925 euros + 144 030 euros) et aux intérêts de retard mis à leur charge (soit respectivement 24 983 euros + 6 527 euros) ;
A titre subsidiaire, la somme de 570 284,67 euros en réparation du préjudice subi, correspondant au montant des sommes investies en perte (soit 613 765,67 euros), aux intérêts perdus (2004 à 2021) sur ces sommes qui auraient été investies sur d’autres supports (soit 222 369 euros) et au coût des intérêts de retard supportés par les époux [O] (soit 31 510 euros),
A titre infiniment subsidiaire, la somme de 412 354 euros en réparation du préjudice subi, correspondant à la perte de chance de réaliser le gain fiscal escompté (soit 380 844 euros) et au coût des intérêts de retard supportés par les époux [O] (soit 31 510 euros),
– Juger que cette somme produira intérêt de droit à compter de l’assignation délivrée le 29 mai 2015, avec capitalisation des intérêts dans les termes de l’article 1154 ancien du code civil également à compter de la date de l’assignation,
– Condamner solidairement la Sas JP Océan Gestion, la Sarl Montrachet Finance et Patrimoine, la Sarl Financière du Cèdre, les compagnies MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, venant aux droits de la société Covéa Risks, et la compagnie AIG Europe SA, à payer à Monsieur et Madame [N] [O] la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice moral subi,
– Débouter la Sas JP Océan Gestion, la Sarl Montrachet Finance et Patrimoine, la Sarl Financière du Cèdre, les compagnies MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, venant aux droits de la société Covéa Risks, et la compagnie AIG Europe SA, de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
II) Débouter la Sas JP Océan Gestion de son appel incident à l’encontre du jugement entrepris, et Confirmer le jugement entrepris sur ce point,
III) Condamner solidairement la Sas JP Océan Gestion, la Sarl Montrachet Finance et Patrimoine, la Sarl Financière du Cèdre, les compagnies MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, venant aux droits de la société Covéa Risks, et la compagnie AIG Europe SA, à payer à Monsieur et Madame [N] [O] la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens, et dire que Maître Guillaume Dauchel ‘ Selarl Cabinet Sevellec – Dauchel, Avocat, bénéficiera des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
La société JP Océan Gestion demande à la cour de statuer comme suit :
Vu l’article 122 du code de procédure civile, les articles 1147 et 2224 du code civil, l’article 26 II de la loi du 17 juin 2008,
– Déclarer recevable mais mal fondé l’appel formé par les consorts [O].
– Déclarer recevable et fondé l’appel incident formé par la Sas JP Océan Gestion.
A titre principal,
– Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris en date du 15 février 2021, en ce qu’il a jugé prescrite depuis le 19 juin 2013 l’action des consorts [O] et condamné les consorts [O] aux entiers dépens.
– Infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris en date du 15 février 2021, en ce qu’il a débouté la société JP Océan de sa demande reconventionnelle.
Et statuant à nouveau du chef infirmé,
– Condamner les consorts [O] à payer à la Sas JP Océan Gestion la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral qu’elle a subi.
A titre subsidiaire,
– Constater que la Sas JP Océan n’a commis aucune faute dans l’exécution de ses obligations et n’a pas engagé sa responsabilité professionnelle.
– Débouter les consorts [O] de leurs demandes, fins et conclusions.
En tout état de cause :
– Condamner les consorts [O] à payer la Sas JP Océan Gestion la somme de 15 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamner Monsieur et Madame [O] aux entiers dépens de l’instance conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile dont distraction au profit de Maître Boccon-Gibod.
Les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles venant aux droits de la société Covéa Risks, la société Montrachet Finance et Patrimoine et la société Financière du Cèdre demandent à la cour de statuer comme suit :
Vu l’article 2224 du code civil, l’article 122 code de procédure civile, l’article 1231-1 et 2224 du code civil, l’article 26 II de la loi du 17 juin 2008,
– Donner acte aux sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles de ce qu’elles viennent aux droits de la compagnie Covéa Risks ;
A titre principal :
– Constater que le point de départ du délai de prescription de l’action des époux [O] dirigée à l’encontre des sociétés Montrachet Finance et Patrimoine, Financière du Cèdre, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles est déterminé par leur connaissance des faits leur permettant d’agir ;
– Constater que cette connaissance était acquise au 31 mai 2006, date de l’avis de mise en recouvrement de l’impôt rappelé par l’administration fiscale, ou, en tout état de cause, au plus tard le 24 décembre 2008, date du rejet de la réclamation contentieuse adressée à l’administration fiscale ;
– Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 15 janvier 2021 du tribunal judiciaire de Paris, et notamment en ce qu’il a déclaré l’action des époux [O] irrecevable pour cause de prescription ;
A titre subsidiaire :
– Constater que les sociétés Montrachet Finance et Patrimoine et Financière du Cèdre n’ont pas commis de faute dans l’exécution de leurs obligations ;
En conséquence,
– Débouter Monsieur et Madame [O] de l’ensemble de leurs prétentions à l’encontre des sociétés Montrachet Finance et Patrimoine, Financière du Cèdre et des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles ;
A titre encore plus subsidiaire :
– Constater que les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles assurent la responsabilité civile professionnelle des sociétés Montrachet Finance et Patrimoine et Financière du Cèdre au titre du contrat d’assurance souscrit par les sociétés Montrachet Finance et Patrimoine et Financière du Cèdre auprès de les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles en date du 1er avril 2005 et que toute garantie de responsabilité civile au titre de ce contrat serait exclue, dans le cas où la cour devait relever une faute intentionnelle ou dolosive des sociétés Montrachet Finance et Patrimoine et Financière du Cèdre ;
– Constater qu’une franchise d’un montant de 15 000 euros est stipulée dans le contrat d’assurance souscrit par la société Montrachet Finance et Patrimoine au profit des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles et que la somme correspondant à la franchise restant à la charge de la société Montrachet Finance et Patrimoine doit être déduite du montant de la condamnation éventuellement prononcée à l’encontre des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles dans le cas où la cour devait retenir la responsabilité de la société Montrachet Finance et Patrimoine ;
– Constater qu’une franchise d’un montant de 15 000 euros est stipulée dans le contrat d’assurance souscrit par la société Financière du Cèdre au profit des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles et que la somme correspondant à la franchise restant à la charge de la société Financière du Cèdre doit être déduite du montant de la condamnation éventuellement prononcée à l’encontre des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles dans le cas où la cour devait retenir la responsabilité de la société Financière du Cèdre ;
– Déclarer que la franchise stipulée dans le contrat d’assurance de responsabilité civile professionnelle des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, s’applique respectivement pour chaque assuré dans le cas où la garantie devait trouver application ;
En tout état de cause :
– Condamner Monsieur et Madame [O] à payer aux sociétés Montrachet Finance et Patrimoine et Financière du Cèdre et aux sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamner Monsieur et Madame [O] aux entiers dépens de l’instance.
La société AIG Europe demande à la cour de statuer comme suit :
– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :
* Déclaré M. [N] [O] Mme [Y] [C] épouse [O] irrecevables en leurs demandes pour être prescrites ;
* Condamné in solidum M. [N] [O] et Mme [Y] [C] épouse [O] aux entiers dépens ;
– Déclarer l’action directe des époux [O] irrecevable à l’encontre des sociétés AIG
Europe SA et JP Océan, celle-ci étant prescrite ;
En conséquence,
– Débouter les époux [O] de leurs demandes dirigées à l’encontre d’AIG Europe
SA ;
– Rejeter toutes demandes dirigées à l’encontre d’AIG Europe SA ;
A titre subsidiaire :
– Constater que JP Océan avait connaissance du fait dommageable à la date d’effet du contrat le 1 er avril 2006 et a fortiori, lors de la souscription de la police d’assurance le 20 avril 2006;
– Constater qu’AIG Europe Limited, aux droits de laquelle vient désormais AIG Europe SA n’est pas l’assureur susceptible de mobiliser ses garanties en l’espèce ;
En conséquence,
– Débouter les époux [O] de leurs demandes dirigées à l’encontre d’AIG Europe
SA ;
– Rejeter toutes demandes dirigées à l’encontre d’AIG Europe SA ;
A titre très subsidiaire :
– Constater que les demandes fondées sur l’exécution de la garantie fiscale accordée
contractuellement par JP Océan ne saurait rentrer dans le champ des garanties de la police
d’assurance de responsabilité civile professionnelle souscrite par JP Océan auprès d’AIG
Europe ;
– Constater que certaines fautes alléguées par les époux [O] sont exclues des garanties ;
En conséquence,
– Débouter les époux [O] de leurs demandes dirigées à l’encontre d’AIG Europe
SA ;
– Rejeter toutes demandes dirigées à l’encontre d’AIG Europe SA ;
A titre infiniment subsidiaire :
– Juger irrecevables les nouvelles demandes formées par les époux [O] dans le cadre de leurs conclusions d’appelants n°2, soit plus précisément celles tendant à solliciter l’indemnisation des « sommes investies en perte », des « intérêts perdus », ainsi que de « la perte de chance de réaliser le gain fiscal escompté » ;
– Constater que les époux [O] ne rapportent pas la preuve d’un préjudice indemnisable en lien de causalité avec les fautes qu’ils allèguent à l’encontre de la société
JP Océan ;
En conséquence,
– Débouter les époux [O] de leurs demandes dirigées à l’encontre d’AIG Europe
Limited, aux droits de laquelle vient désormais AIG Europe SA ;
– Rejeter toutes demandes dirigées à l’encontre d’AIG Europe Limited, aux droits de laquelle vient désormais AIG Europe SA ;
A défaut,
– Déduire du montant de toute condamnation prononcée à l’encontre d’AIG Europe SA la
franchise contractuelle restant à la charge de la société JP Océan à hauteur de 50.000 euros.
En tout état de cause,
– Condamner tout succombant à verser la somme de 7.000 € à AIG Europe Limited, aux
droits de laquelle vient désormais AIG Europe SA, au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Condamner tout succombant aux entiers dépens.
Motivation
SUR CE, LA COUR
La cour,
a) Sur la prescription
Selon les époux [O], en matière de redressement fiscal, le point de départ de la prescription ne court qu’à l’isssue de la décision définitive dans le cadre de la procédure juridictionnelle avec l’administration puisque le préjudice demeure éventuel tant qu’une décision définitive n’a pas été rendue . Ils exposent que le point de départ de la prescription doit se situer au plus tôt le 8 avril 2014, date de la décision du tribunal administratif de Versailles ayant rejeté leur recours et en réalité à compter du 10 avril 2016, date à laquelle la cour administrative d’appel a confirmé le jugement du 8 avril 2014.
Selon la société JP Océan Gestion le point de départ de la prescription doit se situer à la date de notification de l’avis de mise en recouvrement .
Les sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, Montrachet Finance et Patrimoine et Financière du Cèdre etv la société AIG Europe demandent à la cour de fixer le point de départ de la prescription au jour de la connaissance par les investisseurs des faits leur permettant d’agir soit le 31 mai 2006 date de l’AMR et en toute hypothèse le 24 décembre 2008, date du rejet de la réclamation contentieuse .
Ceci étant exposé, l’article 2224 du code civil est ainsi rédigé :
‘Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où
le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.’
Cet article est applicable au litige.
Dans la présente espèce, les époux [O] invoquent un préjudice fiscal pour avoir investis en 2002 et 2003 dans des produits présentés comme étant défiscalisés ayant fait l’objet de contestations par l’administration fiscale ayant abouti à des redressements confirmés à l’issue des procédures contentieuses qui ont suivi. Les procédures contentieuses seraient toujours en cours puisque l’arrêt de la cour administrative d’appel de Versailles du 10 mai 2016 ayant confirmé le jugement du tribunal administratif de Versailles du 8 avril 2014 ayant rejeté les contestations des époux [O] ferait l’objet d’un recours actuellement pendant devant le Conseil d’Etat .
Si la proposition de rectification adressée aux époux [O] le 13 juillet 2005 ne peut pas constituer le point de départ du délai de prescription puisqu’il ouvre une période de contestation relevant des articles L.57 et suivants du livre des procédures fiscales, l’avis de mise en recouvrement daté du 31 mai 2006 constitue selon les termes de l’article L. 252 A du même code un titre exécutoire qui a permis aux époux [O] d’avoir une parfaite connaissance des motifs de la rectification et du rejet de leurs contestations. Les époux [O] ot ainsi connu à cette date les faits leur permettant d’exercer leur action au sens de l’article 2224 du code civil dont le contenu a été ci dessus rappelé.
Contrairement à ce que soutiennent les époux [O], l’issue des litiges qui ont suivi ne constitue pas le point de départ de leur action puisqu’elle ne modifie pas le périmètre des faits dont ils avaient été informés dés le 31 mai 2006.
Ainsi que justement relevé par les premiers juges si la juridiction saisie estimait utile de connaître le montant définitif du redressement fiscal des époux [O] à l’issue des procédures contentieuses, il lui était possible d’ordonner un sursis à statuer .
La demande des appelants tendant à fixer le point de départ de la prescription au 8 avril 2014, date de la décision du tribunal administratif de Versailles ayant rejeté leur recours ou au 10 avril 2016, date à laquelle la cour administrative d’appel a confirmé le jugement du 8 avril 2014 doit être rejetée
Par de justes motifs que la cour adopte , les premiers juges ont fixé le point de départ de la prescription au 31 mai 2006, date de notification de l’avis de mise en recouvrement et en ont déduit que la procédure introduite les 15, 18 et 29 mai 2015 était prescrite .
Le jugement déféré doit être confirmé .
b) Sur l’article 700 du code de procédure civile
La cour n’estime pas devoir condamner les appelants condamnés aux dépens à devoir supporter une indemnisation sur ce fondement.
Dispositif
PAR CES MOTIFS
La cour,
CONFIRME le jugement déféré ;
CONDAMNE solidairement Monsieur [N] [O] et Madame [Y] [C] épouse [O] aux dépens et accorde à maître Boccon-Gibod, avocat, le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
REJETTE toutes autres demandes .
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
S.MOLLÉ E.LOOS