Comptes courants d’associés : 6 juin 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 22/03060

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Comptes courants d’associés : 6 juin 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 22/03060

6 juin 2023
Cour d’appel de Poitiers
RG
22/03060

1ère Chambre

ARRÊT N°272

N° RG 22/03060

N° Portalis DBV5-V-B7G-GWBL

[S]

[R]

C/

S.A.R.L. CYPRES FINANCE

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

S.A. MMA IARD

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

1ère Chambre Civile

ARRÊT DU 06 JUIN 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 novembre 2022 rendu par le Tribunal Judiciaire des SABLES D’OLONNE

APPELANTS :

Madame [Y] [S] épouse [R]

née le [Date naissance 4] 1960 à [Localité 8] (33)

[Adresse 5]

Monsieur [G] [R]

né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 9] (44)

[Adresse 5]

ayant tous deux pour avocat postulant Me Henri-noël GALLET de la SCP GALLET-ALLERIT-WAGNER, avocat au barreau de POITIERS

ayant tous deux pour avocat plaidant Me Xavier LEFEUVRE, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉES :

S.A.R.L. CYPRES FINANCE

N° SIRET : 501 458 517

[Adresse 2]

[Localité 7]

S.A. MMA IARD

es qualité d’assureur responsabilité civile professionnelle

de la SARL CYPRES FINANCE

N° SIRET : 440 048 882

[Adresse 3]

[Localité 6]

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

es qualité d’assureur responsabilité civile professionnelle

de la SARL CYPRES FINANCES

N° SIRET : 775 652 126

[Adresse 3]

[Localité 6]

ayant tous pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS

ayant tous pour avocat plaidant Me Nathaëlle GOZLAN, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 24 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre

Madame Anne VERRIER, Conseiller

Monsieur Philippe MAURY, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– Signé par Monsieur Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige

*****

PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par actes d’huissier de justice en date des 8 et 15 juillet 2021, M. [G] [R] et Mme [Y] [S] épouse [R] ont fait assigner la société CYPRES FINANCE, en sa qualité de Conseiller en Gestion de Patrimoine (CGP), et de Conseiller en Investissements Financiers (CIF), ainsi que la société MMA, son assureur en responsabilité civile professionnelle, devant le tribunal judiciaire des SABLES D’OLONNE pour voir engager sa responsabilité civile professionnelle au titre de cinq investissements réalisés par eux les 02 novembre 2014, 23 novembre 2016, 15 février 2017, 07 mars 2017 et 14 juin 2017 dans plusieurs sociétés du groupe [B].

M. et Mme [R] reprochent à la société CYPRES FINANCE un manquement à ses obligations d’information et de conseil, pour leur avoir communiqué des informations inexactes et trompeuses.

Ils sollicitaient alors du tribunal de condamner solidairement la société CYPRES FINANCE et son assureur la société MMA IARD à leur payer les sommes de :

– 193.233 euros correspondant à la perte financière dans le cadre des investissements de Mme [R] dans les sociétés Financière Christiania II et Capitalisation César, et 33.541,59 euros au titre des gains manqués y afférents,

– 182.731 euros correspondant à la perte financière dans le cadre des investissements de M. [R] dans les sociétés Club Deal Privilège Herbes Blanches, Hôtelière Capitalisation Val Cenis et Financière Pic Blanc, et 38.133,17 euros au titre des gains manqués y afférents,

– 2.328 euros correspondant aux frais d’avocat engagés dans le cadre de la restructuration du groupe [B],

– 2.000 euros chacun au titre d’un préjudice moral,

– 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Moyens

Selon conclusions d’incident récapitulatives, la société CYPRES FINANCE et la société MMA IARD ont saisi le juge de la mise en état, pour, vu l’article 122 du code de procédure civile, vu l’article 2224 du code civil, entendre :

-Juger que les demandes formulées par M. [G] [R] s’agissant

de l’investissement réalisé le 2 novembre 2014 sont prescrites,

– Débouter en conséquence M. [G] [R] de l’ensemble de

ses demandes, à l’encontre des sociétés CYPRES FINANCE et MMA IARD au titre de cet investissement,

– Vu l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamner in solidum Mme et M. [R] à payer aux sociétés

CYPRES FINANCE et MMA IARD la somme de 5.000 euros chacune au titre des frais irrépétibles, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance,

– Renvoyer la présente instance à une audience ultérieure pour permettre aux

défenderesses de conclure au fond sur le principe de la responsabilité au titre des quatre autres investissements [B] réalisés.

Par conclusions en réponse sur incident, M. et Mme [R] sollicitaient du juge de la mise en état de :

In limine litis

– Débouter les sociétés CYPRES FINANCE et MMA IARD de leurs demandes visant à faire juger prescrites les demandes formulées par M. [G] [R] au titre de l’investissement souscrit le 2 novembre 2014.

En conséquence :

– Dire les demandes formulées par M. [G] [R] au titre de l’investissement souscrit le 2 novembre 2014 recevables car non prescrites,

– Renvoyer l’affaire à une audience ultérieure pour conclusions sur le fond des

défendeurs,

– Condamner les sociétés CYPRES FINANCE et MMA IARD à payer à M.

[G] [R] la somme de 2.000 euros au titre de ses frais de procédure,

conformément aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamner in solidum, les sociétés CYPRES FINANCE et MMA IARD aux entiers dépens dont distraction à Maître Emmanuelle MARTINEAU en sa qualité d’avocat postulant.

Par ordonnance contradictoire en date du 22/11/2022, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire des SABLES D’OLONNE a statué comme suit :

‘DÉCLARONS irrecevables les demandes formées par M. [G] [R] au titre de l’investissement réalisé le 02 novembre 2014 comme prescrites

REJETONS les demandes d’indemnités formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

RENVOYONS l’affaire à l’audience de mise en état du 06 janvier 2023 à 9 heures pour les conclusions au fond de Maître MICHENAUD ;

CONDAMNONS in solidum M. [G] [R] et Mme [Y] [R] née [S] aux dépens de l’incident’.

Le premier juge a notamment retenu que :

– la fin de non recevoir soulevée par la société CYPRES FINANCE et la société MMA IARD concerne uniquement l’action en ce qu’elle a trait à l’investissement réalisé par M. [R] le 02 novembre 2014.

– cet investissement a consisté en l’acquisition de 44.000 actions de la société en commandite par actions CLUB DEAL PRIVILEGE HERBES BLANCHES moyennant le prix de 44.000 euros, outre le versement de la somme de 56.000

euros au compte courant de cette société, à hauteur un montant total de 100.000

euros, avec promesse de rachat de ses titres par la société [B] au terme du contrat.

– les parties s’opposent dans le cadre du présent incident sur la détermination du

point de départ du délai de prescription quinquennale de l’article 2224 du code civil

– M. et Mme [R] reprochent au CGP d’avoir manqué à son devoir d’information et de conseil à l’occasion de leurs investissements dans des produits financiers mis en place dans le cadre d’une levée de fonds opérée par la société [B]. Cette société a été placée en redressement judiciaire le 22 septembre 2017 par le tribunal de commerce de MARSEILLE, puis en liquidation judiciaire le 27 mars 2019.

– L’ensemble des sociétés objets des investissements des époux [R] ont été également placées en redressement judiciaire entre le 25 octobre 2017 et le 22 novembre 2017.

– le dommage résultant d’un manquement à un devoir d’information, de conseil ou de mise en garde consiste en une perte de chance de ne pas contracter ou de contracter dans de meilleures conditions et se réalise en conséquence en principe à la date de conclusion du contrat objet du litige.

– il appartient à la victime d’un dommage de démontrer qu’à la date de conclusion du contrat litigieux elle pouvait légitimement ignorer le dommage, preuve de nature à repousser le point de départ du délai de prescription quinquennale.

– le CGP est tenu à une obligation de moyen de fournir les informations et conseils appropriés à ses clients lors des investissements projetés ou envisagés.

– en l’espèce, M. [R] était parfaitement en mesure lors de la souscription de son investissement le 02 novembre 2014 d’apprécier l’ensemble des informations qui lui ont été fournies en particulier avec la remise de la note d’information sur l’investissement et les risques en découlant.

Ce point résulte du ‘Rapport Écrit Souscription au Capital de PME [B]’ signé du CGP et de M. [R] le 02 novembre 2014.

A ce paragraphe sont mentionnés expressément au titre des inconvénients de la proposition d’investissement, la possible remise en cause de la promesse de rachat au terme, si le Groupe [B] fait défaut, les risques liés à l’activité de la Société (stratégie d’investissement, fréquentation des hôtels), ainsi que la perte possible partielle ou totale du capital.

– M. [R] était nécessairement en mesure d’apprécier dès le 02 novembre 2014 les risques liés à l’investissement souscrit.

– la procédure collective ouverte en 2017 contre la société [B] constitue un événement très postérieur à l’investissement, survenu durant l’exécution du contrat et les manquements reprochés au titre des devoirs d’information et de conseil du CGP ne présentent d’évidence pas de lien causal avec l’ouverture de la procédure collective.

– le dommage allégué qui ne consiste pas en la perte de capital – risque inhérent à toute opération d’investissement financier- mais dans la perte de chance de ne pas contracter et se réalise dès la conclusion du contrat. En effet, seule la souscription du contrat litigieux crée le dommage et non la réalisation du risque.

– l’assignation porte sur la réparation des préjudices découlant d’une perte de chance de souscrire à  » des opérations véritablement sécurisées conformes aux informations reçues du défendeur « .

– si M. et Mme [R] soutiennent que la date de connaissance de l’ampleur des pertes doit être retenue comme point de départ du délai de prescription, raisonner ainsi reviendrait à faire fi d’une part des engagements pris par la société COLONY CAPITAL en tant que repreneur du groupe [B] et du protocole de sécurisation des investisseurs (pièce 39

demandeurs), et d’autre part, à ne finalement jamais fixer le moindre point

de départ au délai de prescription de l’action, en contradiction avec l’objectif de

sécurité juridique poursuivi avec la réforme sur les prescriptions issue de la loi du 17 juin 2008.

– les demandes de M. [R] au titre de l’investissement réalisé le 02 novembre 2014, sont irrecevables comme prescrites.

LA COUR

Vu l’appel en date du 08/12/2022 interjeté par M. [G] [R] et Mme [Y] [S] épouse [R]

Vu l’article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 07/03/2023, M. [G] [R] et Mme [Y] [S] épouse [R] ont présenté les demandes suivantes :

‘INFIRMER l’ordonnance rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire des Sables d’Olonne, en ce qu’elle a déclaré irrecevables car prescrites, les demandes formées par M. [R] au titre de l’investissement réalisé le 2 novembre 2014.

En conséquence :

‘ JUGER recevables car non prescrites, les demandes formulées par M. [R] à l’encontre des sociétés CYPRES FINANCE, MMA IARD et MMA ASSURANCES MUTUELLES, s’agissant de l’investissement réalisé le 2 novembre 2014.

‘ RENVOYER cette affaire à une audience ultérieure pour conclusions sur le fond des sociétés CYPRES FINANCE, MMA IARD et MMA ASSURANCES MUTUELLES.

En tout état de cause :

‘ CONDAMNER in solidum les sociétés CYPRES FINANCE, MMA IARD et MMA ASSURANCES MUTUELLES à payer à M. [R] la somme de 3.000 € au titre de ses frais de procédure, conformément aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

‘ CONDAMNER in solidum, les sociétés CYPRES FINANCE, MMA IARD et MMA ASSURANCES MUTUELLES aux entiers dépens’.

A l’appui de leurs prétentions, M. [G] [R] et Mme [Y] [S] épouse [R] soutiennent notamment que :

– le cabinet CYPRES FINANCE, en qualité de Conseillers en Investissements Financiers, a commercialisé auprès des appelants des produits financiers mis en place par le groupe [B].

– à compter de septembre 2017, la quasi-totalité des sociétés composant le « groupe [B] » a été placée en redressement judiciaire, et notamment les sociétés objets des investissements de M. et Mme [R].

– Le tribunal de commerce de Marseille a fixé ultérieurement la date de cessation des paiements de la société [B] à mars 2016, soit plusieurs mois avant la souscription par M. et Mme [R] de certaines des opérations conseillées par le cabinet CYPRES FINANCE, entre novembre 2016 et juin 2017.

– à la suite de la défaillance complète du groupe [B] et dans le cadre des opérations de reprise des hôtels gérés par ce groupe, M. et Mme [R] prenaient conscience de la défaillance du cabinet CYPRES FINANCE à ses obligations d’information et de l’étendue de leur perte de chance de ne pas souscrire lors de la souscription des opérations liées à [B].

– des informations trompeuses avaient été communiquées quant à la solidité des investissements proposés par le conseil.

A l’inverse il y a eu un manque d’information de la part du conseil quant à la réalité des risques pris dans le cadre des opérations souscrites.

Les risques particuliers et spécifiques inhérents à ces opérations liées notamment à la liberté totale laissée à la société [B] quant à l’utilisation des fonds des investisseurs, avaient été ignorés,

– M. et Mme [R] apprenaient que certains conseillers patrimoniaux avaient été sanctionnés par l’Autorité des Marchés Financiers

– par jugement en date du 17 octobre 2018, le tribunal de commerce a ordonné la cession des titres et participations de la société [B] au profit du fonds d’investissement Colony Capital Acquisitions LLC, repreneur. Il a été négocié la mise en place d’un mécanisme de remboursement partiel des investisseurs.

Concernant l’investissement visé par une éventuelle prescription, à savoir celui portant sur la détention indirecte du fonds de commerce de l’Hôtel dit Le Mas des Herbes Blanches, il a été précisé que dans le cadre de la vente projetée de cet hôtel, les investisseurs privés ne devraient récupérer que 15% des fonds actuellement investis.

M. [R] ne peut espérer récupérer que 34.266,76 € (sachant que 22.666,78 € ont déjà été récupérés au titre du remboursement partiel de son compte courant, soit une perte sèche de 65.733,24 €.

– sur la prescription, s’agissant du point de départ du délai, à la date de souscription de l’opération contestée, M. [R] ne pouvait avoir conscience de la réalité de ses dommages, la prescription de son action pour cet investissement n’a pu courir à compter de cette date.

Le point de départ du délai de prescription doit être fixé à la date à laquelle M. [R] a été informé par le fonds COLONY qu’il ne récupérerait pas l’intégralité des fonds investis, soit au 27 mars 2019.

– en effet, si le point de départ de la prescription d’une action en responsabilité se situe en principe au jour de la naissance de la créance de responsabilité, par exception à ce principe, le point de départ du délai de prescription est décalé lorsque le dommage n’est pas évident et notamment lorsqu’il a été dissimulé par les manquements mêmes du conseiller.

Le point de départ du délai de prescription peut commencer à la date à laquelle le dommage est révélé à la victime.

– il y a lieu de vérifier si, à la date retenue comme point de départ du délai de prescription, le dommage était ou non apparent pour la victime.

– le débat concernant la question du point de départ du délai de la prescription de l’action de l’Appelant ne porte pas sur la date de réalisation de sa perte de chance, mais bien sur la date de sa révélation de celle-ci à la victime.

– il est tenu compte de la date à laquelle le préjudice est devenu certain en son principe, puisque auparavant, l’investisseur était dans l’impossibilité d’agir avec succès en réparation de pertes seulement latente, et, partant, d’un préjudice hypothétique.

– il y a lieu pour la juridiction saisie de vérifier si, à la date de souscription, l’investisseur était en mesure d’apprécier sa perte de chance, et notamment et si la souscription a été réalisée en toute connaissance de cause des risques pris.

– M. [R] n’a pas été informé de manière explicite des risques de perte de la totalité du capital investi.

Les informations reçues par M. [R] étaient ambiguës et contradictoires puisque son conseiller avait minimisé les risques pris, en indiquant que cette opération constituait un ‘Placement sécurisé’, sans vérifier la réalité des actifs réellement détenus par le groupe [B] et les passifs accumulés.

M. [R] n’a en outre aucunement été informé des risques exceptionnels ou inhabituels de pertes portant sur les opérations mises en place par la société [B] résultant de la liberté complète laissé à cette dernière dans l’usage des fonds des investisseurs.

– l’action en cause est une action en responsabilité qui se fonde sur la perte de chance de ne pas investir des opérations exposant M [R] à des risques et anormaux de pertes en capital, lesdits risques étant dissimulés au concluant en raison des défaillances de son conseiller à ses obligations de conseil et d’informations.

– la société [B] a investi la somme de 26 millions d’euros (en prix d’acquisition et travaux) sur un hôtel qui a été estimé par KPMG 2 ans après la fin de la réalisation des travaux à 13 millions d’euros.

– M. [R] ne pouvait pas anticiper l’existence de tels risques dès lors qu’aucun des éléments à sa disposition au moment des souscriptions n’était de nature à l’en informer.

– M. [R] ne pouvait considérer que dès la date de sa souscription, il avait perdu une chance de ne pas souscrire une opération qui l’exposait à des risques dissimulés ou minimisés en raison de la liberté totale laissé à la société [B] quant à l’utilisation des fonds.

– les investisseurs privés ne s’exposaient pas simplement à des risques liés à la défaillance de [B] ou de simples aléas liés à l’exploitation de l’hôtels, mais à des risques anormaux de pertes en capital.

– l’investisseur n’était pas en mesure d’agir valablement à l’encontre de son conseiller dès la date de souscription et ne pouvait évaluer le dommage résultant de sa perte de chance.

– ce n’est qu’au cours de la procédure collective affectant la société [B] et donc de son groupe, et postérieurement à septembre 2017 que M. [R] a été informé.

– en fixant le point de départ du délai de prescription à la date de souscription, le juge de la mise en état prive M. et Mme [R] de leur droit d’accès au juge.

– en tant que de besoin, le point de départ du délai de prescription ne peut être fixé au plus tôt qu’à la date à laquelle, M. [R] a été informé le 27 mars 2019 des conditions de sortie de l’opération CLUB DEAL PRIVILEGE HERBES BLANCHES.

Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 22/03/2023, la société S.A.R.L. CYPRES FINANCE, la société MMA IARD et la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES ont présenté les demandes suivantes :

‘Vu l’article 122 du code de procédure civile,

Vu l’article 2224 du code civil,

Déclarer Mme et M. [R] mal fondés en leur appel ; les en débouter,

Confirmer l’ordonnance rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire des Sables d’Olonne le 22 novembre 2022 en ce qu’elle a déclaré prescrite l’action de M. [G] [R] s’agissant de son investissement réalisé le 2 novembre 2014,

Débouter en conséquence M. [G] [R] de l’ensemble de ses

demandes, fins et prétentions à l’encontre des sociétés CYPRES FINANCE, MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES au titre de cet investissement,

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

Condamner in solidum Mme et M. [R] à payer aux sociétés

CYPRES FINANCE, MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance’.

A l’appui de leurs prétentions, la société S.A.R.L. CYPRES FINANCE, la société MMA IARD et la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES soutiennent notamment que :

– CYPRES FINANCE exerce une activité de conseil en gestion de patrimoine et est inscrite à l’ORIAS (Registre Unique des Intermédiaires en Assurance, Banque et Finance) en qualité de Conseiller en Investissement Financier depuis le 19 mars 2008.

– à compter du 6 décembre 2011 et jusqu’à 2013, M. et Mme [R] ont effectué divers investissements dans des parts de SCPI.

– dans le cadre de sa volonté de valoriser son épargne et de se constituer des revenus complémentaires, M. [R] a donné pour mission à CYPRES FINANCE, selon lettre du 18 octobre 2014, de lui chercher des solutions de placement répondant à ces objectifs.

– CYPRES FINANCE s’est alors fondée sur la situation patrimoniale qu’il avait

préalablement effectuée, dont il ressortait que le patrimoine brut des époux [R] s’élevait à la somme de 1.568.809 euros,

Dans ces conditions que CYPRES FINANCE a proposé à M. [R] d’investir dans une société du groupe [B], société spécialisée dans l’acquisition et la gestion d’hôtels restaurants et de résidences de tourisme.

– à l’époque des faits, le succès du groupe [B] était unanimement salué par l’ensemble de la presse professionnelle.

Le rapport d’activité pour l’année 2011-2012 faisait par exemple état d’une progression du chiffre d’affaires de 66% en 2012, avec toujours une progression en 2014.

– le cabinet d’audit international KPMG valorisait le groupe [B] à 675.036.000 euros au 31 janvier 2016.

– CYPRES FINANCE a donc proposé à M. [R], aux termes d’un rapport écrit du 2 novembre 2014, de souscrire au capital d’une société du groupe [B] et l’a informé des risques de cet investissement.

– dans ce cadre, CYPRES FINANCE a informé M. [R] des risques de cet investissement.

– M. [R] a souscrit, le 2 novembre 2014, à un investissement de 100.000 euros au sein d’une société du groupe [B], en l’espèce au sein de la SA Club Deal Privilège Herbes Blanches, qui devait financer l’hôtel Mas des Herbes Blanches, dont 44.000 euros en actions de la SA, et 56.000 euros en compte courant d’associé.

-Mme [R] investira ensuite dans les produits « Club Deal » du groupe [B] à partir de 2016. CYPRES FINANCE a remis à Mme [R] une notice d’information portant sur les investissements liés à l’acquisition de l’hôtel Christiania qu’elle a paraphée sur chaque page.

D’autres investissements seront réalisés dans le groupe [B] en 2017.

– Le 17 octobre 2018, le tribunal de commerce a désigné la société Colony Capital (avec l’assistance d’AccorHôtels pour la gestion des hôtels) comme repreneur de l’ensemble des hôtels du groupe [B], pour un montant global de 450.000.000 d’euros.

– les investisseurs peuvent espérer recevoir une quote-part de leur investissement évalué, en décembre 2019, à hauteur de 30 %, au fur et à mesure de la cession des hôtels contributeurs de la collecte non affectée, l’horizon de cession des hôtels étant de 5 ans .

– sur la prescription, il y a lieu à confirmation de l’ordonnance rendue.

Le préjudice résultant d’un manquement à l’obligation d’information précontractuelle, de conseil et de mise en garde, s’analyse en une perte de chance de ne pas contracter ou de contracter à des conditions plus avantageuses.

– repousser le point de départ du délai de prescription quinquennal au moment où les investisseurs ont eu la certitude qu’ils ne pourraient jamais obtenir la rentabilité qu’ils espéraient au moment de la signature du contrat, reviendrait à repousser ce point de départ du délai de prescription à leur bon vouloir, alors que le mécanisme de la prescription extinctive ou libératoire est un principe fondamental du droit qui répond à un impératif de sécurité juridique.

– s’agissant d’une obligation d’information et de conseil, elle est exigible au plus tard au moment de la signature du contrat, puisque la possibilité de ne pas contracter disparaît au moment ou le contrat est conclu. C’est dans les jours ou semaines précédant cette signature que l’exécution de l’obligation s’apprécie.

– tout conseiller en gestion de patrimoine est tenu d’une obligation de moyen consistant à fournir une information et un conseil approprié à ses clients.

– ce n’est que lorsque la victime, sur qui pèse la charge de la preuve d’une telle ignorance, parvient à démontrer qu’elle n’avait pas connaissance du dommage, consistant en la perte de chance de ne pas contracter, que le point de départ du délai de prescription pourra être repoussé.

– c’est souverainement que les juges apprécient le moment où la victime avait pris conscience ou devait prendre conscience de la réalisation du dommage.

– en l’espèce, la perte de chance de ne pas contracter s’est donc ici manifestée au plus tard le jour de la signature des bulletins de souscription des investissements [B], soit le 2 novembre 2014, le délai expirant le 2 novembre 2019 alors que les assignations ont été délivrées les 8 et 15 juillet 2021.

– le point de départ du délai de prescription doit être fixé au moment où l’investisseur est en mesure d’appréhender sa perte de chance de ne pas contracter, à savoir à la date de conclusion du contrat, sauf circonstances exceptionnelles dont la preuve est à la charge de M. [R], cette preuve n’étant pas rapportée.

En effet, CYPRES FINANCE a informé M. [R] des risques de perte en capital et du risque de défaillance de la société [B] qui pouvait remettre en cause l’exécution de la promesse de rachat.

– s’il est mentionné dans le rapport que les actifs du groupe [B] pouvaient servir à garantir les investisseurs dans le sens où l’investissement reposait sur un sous-jacent hôtelier valorisable, M. [R] était en revanche informé qu’il pouvait perdre l’intégralité des sommes investies dans le groupe [B] en cas de défaillance de [B]. Il n’ignorait pas que la solidité et la rentabilité de son investissement reposait sur la capacité de la société [B] à honorer sa promesse de rachat.

– s’agissant de l’information relative à l’existence de risques exceptionnels, liés au détournement d’affectation des fonds, le conseiller n’a pas l’obligation de détection de risques anormaux, tels que des fraudes.

– il n’était pas nécessaire, à la date de souscription du contrat, de connaître l’ampleur de la perte en capital pour engager l’action dès lors que l’existence du risque était connue

– la date de connaissance de l’ampleur des pertes de M. [R] ne peut être retenue comme point de départ de la prescription.

– le protocole d’accord de sécurisation des investisseurs concernant le pôle historique offre, s’agissant du traitement des créances en compte-courant d’associé, deux options aux investisseurs du sous pôle Le Mas des Herbes Blanches, et dans le cadre de l’option longue, M. [R] peut espérer percevoir 100 % du montant de sa créance en compte-courant d’associé.

– la manifestation du principe du dommage ne doit pas être comprise en termes de certitude, mais d’origine, ce qui est logique puisqu’il ne s’agit pas, en l’espèce, de démontrer l’existence d’un dommage certain – qui relève des conditions de succès d’une action en responsabilité civile – mais d’apporter la preuve de la manifestation du principe du dommage qui se situe, dans notre cas présent, à la date de conclusion.

– le droit d’accès au juge est respecté, dès lors que M. [R] n’a jamais été dans l’impossibilité de savoir qu’il pouvait perdre une chance de ne pas contracter compte tenu des avertissements donnés et n’a donc pas été privé de son droit d’agir. Il n’a juste pas agi dans les délais à compter de la réalisation de son dommage.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

Vu l’ordonnance de clôture en date du 23/02/2023.

La 31/03/2023, M. [G] [R] et Mme [Y] [S] épouse [R] ont signifié des conclusions postérieurement à cette clôture, sollicitant son rabat.

Motivation

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la révocation de l’ordonnance de clôture :

L’article 16 du code de procédure civile dispose :

‘Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement.

Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.’

L’article 15 du même code prévoie que les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu’elles produisent et les moyens de droit qu’elles invoquent, afin que chacune soit à même d’organiser sa défense.

L’article 802 du code de procédure civile dispose que : ‘Après l’ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office’.

L’article 803 du même code précise que ‘l’ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s’il se révèle un motif grave depuis qu’elle a été rendue…

L’ordonnance de clôture peut être révoquée, d’office ou à la demande des parties, soit par ordonnance motivée du juge de la mise en état, soit après l’ouverture des débats, par décision du tribunal’.

La cour constate que la clôture est intervenue le 27 mars 2023 après un calendrier de procédure ayant permis aux parties de conclurent largement, la dernière fois s’agissant des appelants le 07/03/2023 et le 22/03/2023 pour les intimées.

Il n’y pas lieu, faute de motifs graves, d’ordonner la révocation de l’ordonnance de clôture en date du 02/11/2018 et les conclusions déposées tardivement par M. et Mme [R] le 31/03/2023 doivent être déclarées irrecevables.

Sur la recevabilité de l’action engagée en ce qu’elle a trait à l’investissement réalisé par M. [R] le 02 novembre 2014:

L’article 122 du code de procédure civile dispose que ‘constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ‘.

L’article 2224 du code civil dispose que ‘les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par 5 ans à compter du jour ou le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer’.

L’article 2234 du code civil précise que ‘la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l’impossibilité d’agir par suite d’un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure’.

En l’espèce, le 2 novembre 2014, M. [G] [R] a fait l’acquisition de 44.000 actions de la société en commandite par actions CLUB DEAL PRIVILEGE HERBES BLANCHES, pour un prix de 44.000 €.

Dans le cadre de cette opération, M. [G] [R] a versé en outre, la

somme de 56.000 € au compte courant de cette société, soit un investissement total de 100.000 €.

L’opération souscrite devait être considérée comme une opération dite CLUB DEAL VIP ou CLUB DEAL PRIVILEGE, l’investisseur disposant d’une promesse de rachat de ses titres par la société [B].

M. et Mme [R] soutiennent qu’à compter de septembre 2017, la quasi-totalité des sociétés composant le « groupe [B] » a été placée en redressement judiciaire, et notamment les sociétés objets de leurs investissements dont celui de M. [R] réalisé le 2 novembre 2014.

Ils indiquent qu’ils ne prenaient conscience qu’à ce moment de la défaillance du cabinet CYPRES FINANCE dans la réalisation de ses obligations de conseil et d’information et de l’étendue de leur perte de chance de ne pas souscrire lors de la souscription des opérations liées à [B], dès lors que des informations trompeuses avaient été communiquées quant à la solidité desinvestissements proposés et qu’ils ont subi les conséquences d’un manque d’information de la part du leur conseil la S.A.R.L. CYPRES FINANCE quant à la réalité des risques pris dans le cadre des opérations souscrites.

Les risques particuliers et spécifiques inhérents à ces opérations liées notamment à la liberté totale laissée à la société [B] quant à l’utilisation des fonds des investisseurs auraient été ignorés.

Par application des dispositions de l’article 2224 du code civil, le point de départ de la prescription d’une action en responsabilité se situe en principe au jour de la naissance de la créance de responsabilité, c’est-à-dire à la date du fait générateur du dommage, soit l’acte de souscription de l’opération contestée.

Le préjudice résultant d’un manquement à l’obligation d’information précontractuelle, de conseil et de mise en garde, s’analyse en effet en une perte de chance et, s’agissant plus précisément de la responsabilité d’un intermédiaire dans le cadre d’un investissement, le préjudice s’analyse en une perte de chance de ne pas souscrire à l’investissement litigieux ou une perte de chance de mieux investir des capitaux.

Le dommage ne consiste donc pas en la perte du capital qui est un risque inhérent aux opérations d’investissement financier, mais dans la perte de chance de ne pas contracter ou de ne pas l’avoir fait à des conditions plus avantageuses. Ce dommage se réalise dès la conclusion du contrat d’investissement, sauf pour la victime à démontrer qu’elle pouvait légitimement l’ignorer à cette date.

Dans ce cadre et préalablement à la conclusion du contrat d’investissement, le conseiller en gestion de patrimoine, tel que la société S.A.R.L. CYPRES FINANCE est tenu à une obligation de moyen consistant à fournir une information et un conseil approprié à ses clients à l’occasion des investissements envisagés, étant précisé que les conditions et la qualité de mise en oeuvre de l’obligation du conseiller s’apprécient nécessairement, s’agissant de sa prestation intellectuelle, antérieurement à la souscription de l’investissement.

Au surplus, la S.A.R.L. CYPRES FINANCE n’est pas tenue d’une obligation de résultat quant à l’issue de l’investissement et n’est garant ni de la rentabilité du produit conseillé ni de la stratégie patrimoniale adoptée

Ainsi, si le point de départ du délai de prescription court en principe à compter de la réalisation du dommage de perte de chance, soit au jour de la souscription de l’investissement conseillé, il appartient à M. [R] de démontrer qu’à la date de conclusion du contrat le 2 novembre 2014, il n’avait pas connaissance du dommage et pouvait légitimement l’ignorer, de sorte que le point de départ du délai de prescription devrait être repoussé.

En l’espèce, il résulte du rapport écrit en date du 2 novembre 2014, rédigé spécifiquement par la S.A.R.L. CYPRES FINANCE à l’intention de son client M. [R], que l’attention de ce dernier était précisément attirée sur les risques de perte en capital du risque de défaillance de la société [B] qui pouvait donc remettre en cause l’exécution de la promesse de rachat :

‘- Fluctuation à la hausse comme à la baisse des comptes de résultat. La baisse serait due aux aléas de la conjoncture économique ;

– La promesse de rachat au terme peut être remise en cause si le Groupe [B] fait défaut ;

– Perte possible, partielle ou totale du capital investi ;

– Risque lié à l’activité de la Société (stratégie d’investissement, fréquentation des hôtels) ;

– Risque lié à la situation de contrôle de la Société par l’associé commandité;

– Risque financier en cas d’augmentation des taux d’intérêts d’emprunt ‘.

Il apparaît ainsi qu’aux termes de ce document, l’attention de M. [R] était attirée par son conseiller sur le risque de perte du capital investi et celui qu’impliquerait le défaut de la société [B], sans qu’il en résulte que des informations trompeuses auraient été transmises.

La plaquette rassurante éditée par le groupe [B] en 2012 et versée aux débats ne pouvait contredire utilement le courrier circonstancié spécifiquement adressé à M. [R] par la société S.A.R.L. CYPRES FINANCE.

Ainsi, M. [R] ne pouvait ignorer légitimement, à réception de ce courrier, qu’il perdait une chance d’investir dans un contrat ne présentant pas de risques ou en présentant moins, la perte de chance étant indépendante de la réalisation effective du risque.

Il ne peut faire reproche à la société S.A.R.L. CYPRES FINANCE d’avoir évoqué des placements sécurisés au regard des actifs financiers du groupe [B] en 2014, ce point n’étant pas utilement contredit, étant relevé que le tribunal de commerce a désigné la société Colony Capital comme repreneur de l’ensemble des hôtels du groupe [B], pour un montant global de 450.000.000 d’euros.

De même, M. [R] ne peut reprocher à son conseiller de ne pas l’avoir averti, dans le cadre de son obligation de moyen, de la possibilité que des risques anormaux puissent survenir, notamment par le biais de détournement des fonds investis, dès lors qu’il ne s’agit pas de risques inhérents à l’investissement lui-même.

Il résulte de ces éléments que M. [R] échoue à démontrer qu’à la date de conclusion du contrat le 2 novembre 2014, il n’avait pas connaissance du dommage, soit sa perte de chance, et qu’il pouvait légitimement l’ignorer, de sorte que le point de départ du délai de prescription devrait être repoussé.

En conséquence, le point de départ du délai de prescription quinquennal doit être fixé au 2 novembre 2014, date de la souscription de l’investissement par M. [R].

Les assignations ayant été délivrées les 8 et 15 juillet 2021, l’ordonnance entreprise doit être confirmée en ce qu’elle a déclarée irrecevables comme prescrites les demandes formées par M [G] [R] au titre de l’investissement réalisé le 02 novembre 2014, celui-ci n’ayant pas agit dans le délai prescrit au titre de son préjudice spécifique de perte de chance.

Sur les dépens et l’application de l’article 699 du code de procédure civile:

Il résulte de l’article 696 du code de procédure civile que ‘ La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. (…).’

Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d’appel seront fixés à la charge in solidum de M. [G] [R] et de Mme [Y] [S] épouse [R].

Sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile :

Il est équitable de condamner in solidum M. [G] [R] et Mme [Y] [S] épouse [R] à payer à la société S.A.R.L. CYPRES FINANCE, la société MMA IARD et la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES la somme unique fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

La somme allouée au titre des frais de première instance a été justement appréciée, le jugement entrepris devant être confirmé sur ce point.

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et en dernier ressort,

DIT n’y a avoir lieu à révocation de l’ordonnance de clôture.

DÉCLARE irrecevables les conclusions de M. et Mme [R] signifiées le 31 mars 2023.

CONFIRME l’ordonnance entreprise.

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires.

CONDAMNE in solidum M. [G] [R] et Mme [Y] [S] épouse [R] à payer à la société S.A.R.L. CYPRES FINANCE, la société MMA IARD et la société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES la somme unique de 3000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

CONDAMNE in solidum M. [G] [R] et Mme [Y] [S] épouse [R] aux dépens d’appel, étant rappelé que les dépens de première instance restent répartis ainsi que décidé par le premier juge.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 

 


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