6 avril 2023
Cour d’appel de Rouen
RG n°
21/03968
Ch. civile et commerciale
N° RG 21/03968 – N° Portalis DBV2-V-B7F-I44V
COUR D’APPEL DE ROUEN
CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
ARRET DU 6 AVRIL 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
18/03697
TJ A COMPETENCE COMMERCIALE D’EVREUX du 27 Août 2021
APPELANTE :
Madame [D] [Y]
née le [Date naissance 1] 1977 à [Localité 7] ([Localité 7])
[Adresse 4]
[Localité 6]
représentée et assistée de Me Béatrice OTTAVIANI, avocat au barreau de ROUEN
INTIMES :
Monsieur [R] [W]
né le [Date naissance 3] 1971 à [Localité 7] ([Localité 7])
[Adresse 2]
[Localité 5]
Société EARL [R] [W]
[Adresse 2]
[Localité 5]
représentés et assistés de Me Pierre DELANNAY de la SCP BARON COSSE ANDRE, avocat au barreau de L’EURE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 18 Janvier 2023 sans opposition des avocats devant M. URBANO, Conseiller, rapporteur,
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :
Mme FOUCHER-GROS, Présidente
M. URBANO, Conseiller
Mme MENARD-GOGIBU, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme DEVELET, Greffière
DEBATS :
A l’audience publique du 18 janvier 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 30 mars 2023 puis prorogée au 6 avril 2023
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Rendu publiquement le 6 avril 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
signé par Mme Foucher-Gros, Présidente et par Mme Riffault, Greffière lors de la mise à disposition.
Exposé du litige
*
* *
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Mme [Y] et M. [W] ont vécu ensemble durant plusieurs années et ont eu deux enfants nés respectivement en 1997 et 2002.
Le 31 décembre 2007, le GAEC [R] [W] a été transformé en EARL [R] [W] dont M. [W] est l’associé unique, cette société exploitant la ferme familiale.
Par acte du 3 décembre 2010, M. [W] a démembré la propriété de 2499 parts sociales de l’EARL représentant 49,98% du capital total et en a transféré à Mme [Y] l’usufruit temporaire pour une durée de 10 ans à compter du 31 décembre 2010.
Mme [Y] et M. [W] se sont séparés au cours de l’année 2017.
Affirmant que M. [W] avait méconnu l’usufruit temporaire qu’il lui avait consenti et avait abusé de la majorité qu’il détient dans l’EARL [R] [W] en ne procédant à aucune distribution des résultats de la société et en prélevant des sommes indues sur son compte courant d’associé pour son profit personnel, Mme [Y] a initialement fait assigner l’EARL [W] par acte d’huissier du 11 octobre 2018 devant le tribunal de grande instance d’Evreux afin que le gérant soit révoqué, qu’un mandataire ad’hoc soit désigné et que l’EARL soit condamnée au paiement de 219 372 euros au titre des résultats devant lui revenir en application de son droit d’usufruit.
En cours de procédure et M. [W] étant intervenu volontairement à l’instance, les parties ont modifié leurs demandes, Mme [Y] ayant sollicité l’annulation de divers actes et délibérations ainsi que le paiement de diverses sommes et, par jugement du 27 août 2021, le tribunal judiciaire d’Evreux a :
– déclaré irrecevable l’action en nullité de Madame [D] [Y] à l’encontre de la délibération prise en assemblée générale du 11 janvier 2017 ;
– déclaré irrecevable l’action reconventionnelle en nullité de M. [R] [W] et l’EARL [R] [W] de l’acte de cession temporaire des parts sociales en usufruit du 3 décembre 2010 ;
– débouté Madame [D] [Y] de sa demande en condamnation solidaire au paiement de la somme de 137 427,58 euros ;
– condamné solidairement M. [R] [W] et l’EARL [R] [W] à régler à Madame [D] [Y] la somme de 6 500 euros HT ;
– débouté Madame [D] [Y] de sa demande en condamnation au remboursement de son compte courant d’associé de 54 031 euros ;
– débouté M. [R] [W] et l’EARL [R] [W] de leur demande au titre des documents d’assurance ;
– dit n’y avoir lieu au prononcé d’une condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné les parties au paiement de leurs propres dépens, dont distraction au profit de Maître Michel Baron, avocat au barreau de l’Eure, après répartition de droit.
Par déclaration du 14 octobre 2021, Mme [Y] a interjeté appel de cette décision.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 10 janvier 2023.
EXPOSE DES PRETENTIONS
Moyens
Vu les conclusions du 6 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens et arguments de Mme [Y] qui demande à la cour de :
– réformer le jugement entrepris en ce qu’il a :
* déclaré irrecevable l’action en nullité de Madame [D] [Y] à l’encontre de la délibération prise en assemblée générale du 11 janvier 2017 ;
* débouté Madame [D] [Y] de sa demande en condamnation solidaire au paiement de la somme de 137.427,58 euros ;
* débouté Madame [D] [Y] de sa demande en condamnation au remboursement de son compte courant d’associé de 54.031 euros ;
* dit n’y avoir lieu au prononcé d’une condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
* condamné les parties au paiement de leurs propres dépens, dont distraction au profit de Maître Michel Baron, avocat au barreau de l’Eure, après répartition de droit.
Statuant à nouveau,
– Condamner l’EARL [R] [W] et Monsieur [R] [W] solidairement au paiement à titre de dommages et intérêt au profit de Madame [Y] de la somme de 50.000 € ;
A défaut, ordonner l’inscription au crédit du compte courant de Madame [Y] de la somme de 50.000 € ;
– Prononcer la nullité des résolutions 5, 6 et 7 de l’assemblée générale du 11 février 2020 ;
– Condamner l’EARL [R] [W] et Monsieur [R] [W] solidairement en réparation du préjudice subi par Madame [Y] pour non-distribution de sa quote-part des bénéfices au titre des années 2016-2017-2018-2019 au paiement de la somme de 137.427,58 € (6.616,57 € + 58.948,59 € + 167.595,59 € + 167.595,59 € + 41.805 € = 274.965,16 € x 49,98 % = 137.427,58 €) ;
– Ordonner le remboursement par l’EARL [R] [W] du compte courant d’associé de Madame [Y] dans les 8 jours de l’arrêt à intervenir sous astreinte de 500 € par jour de retard, soit la somme de 52.031 € (conclusions adverses du 31.12.20, page 8) ; outre la somme de 50.000 € ;
– Débouter Monsieur [W] et l’EARL [R] [W] de toutes leurs demandes, fins et conclusions contraires ;
– Confirmer le jugement en ce qu’il a condamné Monsieur [W] et l’EARL [R] [W] au paiement de la somme de 6.500 € au profit de Mme [Y] ;
– Confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré irrecevable l’action reconventionnelle de Monsieur [W] et l’EARL [R] [W] en nullité de l’acte de cession temporaire d’usufruit du 3 décembre 2010 ;
– Condamner l’EARL [R] [W] au paiement de la somme de 3.000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile.
Mme [Y] soutient que :
– M. [W], seul associé et gérant de l’EARL [R] [W] a abusé de sa majorité en organisant des règles statutaires ne permettant pas à Mme [Y] de participer à la vie sociale ; elle n’a jamais été convoquée à aucune assemblée générale et ce en méconnaissance des statuts ; aucune information sur l’EARL [R] [W] ne lui a été délivrée ; il ne lui a pas indiqué que des sommes se trouvaient sur son compte courant d’associé et qu’elle pouvait les réclamer ; n’étant pas associée et vivant avec M. [W], elle était en outre dans l’impossibilité morale de s’opposer à lui ;
– M. [W] a méconnu le contrat d’usufruit qui a été souscrit au profit de Mme [Y] en profitant de sa qualité de seul associé de l’EARL [R] [W] pour le vider de son objet et a commis une faute contractuelle à son égard ;
– les décisions de blocage des bénéfices de 2011 à 2015, la non-affectation des bénéfices de 2015 à 2020, le prélèvement de 50 000 euros sur le compte courant de Mme [Y] au profit de M. [W] ainsi que le prélèvement de 6 500 euros sur le compte courant de Mme [Y] sont contraires à l’intérêt social ; ces décisions n’ont été motivées que par la volonté de priver Mme [Y] de ses droits d’usufruitière et ne sont justifiées par aucune nécessité économique de l’EARL [R] [W] dont les résultats sont excellents ; aucun investissement, aucune décision de travaux n’ont justifié le blocage et la non-affectation des bénéfices et les devis et contrats produits par M. [W] et l’EARL [R] [W] ne sont pas probants ; M. [W] a vidé son compte courant d’associé le 31 mars 2019 le faisant passer de 112 613,75 euros à – 2183,95 euros ce qui démontre que la société n’a nul besoin d’avoir des réserves aussi importantes représentant près de cinq fois le montant du capital social ; ces décisions ont favorisé M. [W] au détriment de Mme [Y] alors en outre qu’elle a assumé la fiscalité applicable aux sommes qu’elle n’a jamais perçues ;
– si M. [W] affirme que la constitution de l’usufruit était destinée à protéger Mme [Y] en cas de décès de son compagnon et de lui permettre de subvenir aux besoins des enfants communs, cette allégation est nouvelle en cause d’appel, est contradictoire par rapport à celle soutenue devant le premier juge et est inexacte alors que c’est elle qui entretenait le ménage ;
– le transfert de la somme de 50 000 euros se trouvant sur le compte courant d’associé de Mme [Y] au profit du compte courant d’associé de M. [W] selon délibération du 11 janvier 2017 doit être annulé, M. [W] ayant commis une faute personnelle étrangère à ses fonctions de gérant dont il s’est servi dans son intérêt propre ; si la prescription de trois ans s’applique aux actions en nullité des délibérations sociales, seule la prescription de cinq ans de l’article 2224 du code civil s’applique à l’action en responsabilité à l’encontre de l’associé majoritaire et de la même manière, il n’existe pas de prescription acquise s’agissant de l’inscription en compte courant d’associé ;
– malgré la reconnaissance de dette de l’EARL [R] [W] et de M. [W] portant sur la somme de 54 031 euros au profit de Mme [Y] au titre de son compte courant d’associé, le règlement n’est pas intervenu alors qu’un compte courant est remboursable à première demande ;
– le prélèvement de 6 500 euros du compte courant d’associé de Mme [Y] en remboursement d’une mise à disposition de l’intéressée d’un véhicule est irrégulier, aucune dette n’étant née à la charge de Mme [Y] à ce titre.
– la demande formée par M. [W] tendant à annuler la constitution d’usufruit est prescrite et est infondée, M. [W] ne démontrant pas le caractère dérisoire du prix stipulé.
Vu les conclusions du 30 décembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens et arguments de l’EARL [R] [W] et de M. [W] qui demandent à la cour de :
Vu l’article 1591 et 1844-14 du code civil,
Sur l’appel principal
– confirmer le jugement rendu le 27 août 2021 par le tribunal judiciaire d’Evreux en ce qu’il a
* Déclaré irrecevable l’action en nullité de Madame [D] [Y] à l’encontre de la délibération prise en assemblée générale du 11 janvier 2017 ;
* Débouté Madame [D] [Y] de sa demande en condamnation solidaire au paiement de la somme de 137.427,58 euros ;
* Débouté Madame [D] [Y] de sa demande en condamnation au remboursement de son compte courant d’associé de 54.031 euros ;
Par conséquent,
– débouter Madame [D] [Y] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
– débouter Madame [D] [Y] de sa demande de condamnation solidaire à l’encontre de Monsieur [W] et de l’EARL [R] [W] au paiement de la somme de 137.427,58 euros en réparation du préjudice subi du fait de la non-distribution de sa quote-part de bénéfices pour les exercices 2016-2017-2018-2019 ;
– débouter Madame [D] [Y] de sa demande de condamnation solidaire à l’encontre de Monsieur [W] et de l’EARL [R] [W] au paiement de la somme (complémentaire ou additionnelle) de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi ;
– juger que la demande en nullité de la délibération du 11 janvier 2017 est irrecevable comme prescrite ;
– juger que le montant du compte-courant d’associée détenu par Madame [D] [Y] dans les livres de l’EARL [R] [W] est d’un montant de 47 531,30 euros ;
– juger que, compte tenu des versements effectués par l’EARL [R] [W] d’un montant de 6.500 euros et d’un montant de 2.000 euros, le solde du compte-courant d’associé détenue par Madame [D] [Y] dans les livres de l’EARL [R] [W] effectivement dû est donc désormais de 39.031,30 euros (47.531,30 ‘ avance de 6.500 euros ‘ avance de 2.000 euros) ;
– débouter Madame [D] [Y] de sa demande de remboursement du compte-courant d’associée sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
Sur l’appel incident
– réformer le jugement rendu le 27 août 2021 par le tribunal judiciaire d’Evreux en ce qu’il a :
* Déclaré irrecevable l’action reconventionnelle en nullité de Monsieur [R] [W] et l’EARL [R] [W] de l’acte de cession temporaire des parts sociales en usufruit du 3 décembre 2010 ;
* Condamné solidairement Monsieur [R] [W] et l’EARL [R] [W] à régler à Madame [D] [Y] la somme de 6.500 euros HT ;
* Débouté Monsieur [R] [W] et l’EARL [R] [W] de leur demande au titre des documents d’assurance ;
Par conséquent,
– constater que la cession du 30 décembre 2010 est nulle comme étant intervenue à vil prix ;
– autoriser l’EARL [R] [W] à retenir sur le montant du compte courant d’associée de Madame [D] [Y] la somme de 6.500 € correspondant à l’achat d’un véhicule terrestre à moteur à son usage exclusif ;
-juger que le solde du compte-courant d’associée détenue par Madame [D] [Y] dans les livres de l’EARL [R] [W] est donc d’un montant de 47 531,30 euros (54 031,30 € – 6 500 €) ;
– juger que, compte tenu des versements effectués par l’EARL [R] [W] d’un montant de 6.500 euros et d’un montant de 2.000 euros, le solde du compte-courant d’associé détenu par Madame [D] [Y] dans les livres de l’EARL [R] [W] effectivement dû est donc désormais de 39.031,30 euros (47.531,30 ‘ avance de 6.500 euros ‘ avance de 2.000 euros) ;
– enjoindre à Madame [D] [Y] de produire les attestations d’assurance du véhicule Peugeot ;
En toute hypothèse
– condamner Madame [D] [Y] à la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– condamner Madame [D] [Y] aux entiers dépens dont distraction conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;
– débouter Madame [D] [Y] de ses demandes au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et des dépens.
L’EARL [R] [W] et M. [W] soutiennent que :
– l’action en nullité contre la délibération du 11 janvier 2017 est prescrite par application de l’article 1844-14 du code civil, le procès-verbal signé par Mme [Y] étant du 11 janvier 2017 et la demande ayant été formée plus de trois ans après, le 4 septembre
2020 ;
– ayant signé le procès-verbal du 11 janvier 2017, elle en a accepté les conséquences et ne peut solliciter sa nullité ;
– la mise temporaire des bénéfices en réserve ne peut constituer un abus de majorité alors que des épisodes successifs de sécheresse ont eu lieu ayant entraîné la nécessité de creuser pour créer un puits, qu’un nouveau tracteur est à acquérir, que l’un des enfants communs entend reprendre l’exploitation familiale, que M. [W] a subi des opérations chirurgicales et que la guerre en Ukraine déstabilise les marchés de sorte que des réserves devaient être prudemment constituées ;
– Mme [Y] n’étant pas associée, elle ne peut être victime d’un abus de majorité ;
– les statuts de l’EARL [R] [W] ont été établis antérieurement à la constitution de l’usufruit, qui a été consenti à l’ininitiative par M. [W], et n’ont pas été organisés pour spolier Mme [Y] ;
– Mme [Y] n’a jamais demandé le remboursement de son compte courant d’associé ;
– la mise en réserve n’a porté que sur quatre années de bénéfices ;
– aucune faute de l’EARL [R] [W] n’est démontrée et Mme [Y] ne justifie d’aucun préjudice ;
– les fondements légaux soulevés par Mme [Y] sont sans lien avec ses demandes ;
– Mme [Y] ne peut réclamer la condamnation solidaire de l’EARL [R] [W] s’agissant d’un abus des fonctions de gérant qu’elle impute à M. [W] ;
– tant qu’une décision d’attribution des bénéfices n’a été prise par la société, ceux-ci restent dans son patrimoine de sorte que le droit de l’usufruitier ne nait pas ;
– par assemblée générale du 11 février 2020, des affectations de bénéfices ont été opérées au profit de Mme [Y] et ont été portées au crédit de son compte courant ;
– par ailleurs, un véhicule Peugeot appartenant à l’EARL [R] [W] a été mis à la disposition de Mme [Y], véhicule d’une valeur de 6 500 euros ;
– en tenant compte de ces éléments et des sommes déjà versées, le compte courant de Mme [Y] présente une solde de 39 031 euros ;
– la constitution d’usufruit a été faite à vil prix et doit être annulée par voie d’exception ;
– la condamnation prononcée par le premier juge pour la somme de 6 500 euros au titre de la valeur du véhicule est infondée.
Motivation
MOTIFS DE LA DECISION
A titre liminaire, l’article 9.5 des statuts de l’EARL [R] [W], reprenant la règle établie par l’article 1844 alinéa 3 du code civil, stipule que si une part est grevée d’un usufruit, le nu-propriétaire et l’usufruitier ont le droit de participer aux décisions collectives, toutefois, le droit de vote appartient au nu-propriétaire, sauf pour les décisions concernant l’affectation des bénéfices..
Dès lors que l’usufruitier a le pouvoir de voter aux assemblées générales décidant de l’affectation des bénéfices et que son usufruit ne porte que sur une minorité des parts sociales, les règles sanctionnant l’abus de majorité sont applicables à sa situation quand bien même il n’a pas la qualité d’associé.
Sur la nullité de la cession d’usufruit du 3 décembre 2010 :
Il résulte des dispositions de l’article 2224 du code civil que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
M. [W] soutient que l’acte de constitution d’usufruit est nul comme ayant été consenti pour un prix dérisoire que Mme [Y] n’aurait jamais réglé.
L’exception de nullité n’est perpétuelle qu’à la condition que l’acte n’ait pas été exécuté. Auquel cas l’exception est enfermée dans le délai quinquennal de l’article 2224 du code civil.
Il résulte des propres écritures de M. [W] que le 11 février 2020, l’assemblée générale de l’EARL [R] [W] a décidé d’attribuer à Mme [Y] la somme de 164 747,30 euros au titre des bénéfices de la société auxquels elle avait droit en sa qualité d’usufruitière et que cette somme a été créditée sur son compte courant. Il s’ensuit que l’usufruit aujourd’hui contesté par M. [W] a reçu exécution.
La prétendue vileté du prix étant connue de M. [W] depuis l’acte du 3 décembre 2010, il avait jusqu’au 3 décembre 2015 pour agir en annulation. Sa demande ayant été présentée postérieurement à l’acte introductif d’instance du 11 octobre 2018, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a déclaré irrecevable cette demande.
Sur le moyen soutenu par Mme [Y] selon lequel M. [W] aurait méconnu le « contrat d’usufruit » :
Par acte du 3 décembre 2010, M. [W] a cédé à Mme [Y] pour le prix de
8621,55 euros l’usufruit du 31 décembre 2010 au 31 décembre 2020 de 2499 parts de l’EARL [R] [W] et M. [W] a subrogé Mme [Y] « en tous droits et actions vis à vis de la société afférents aux droits présentement cédés ». Par ailleurs, il a été stipulé que « les droits du cédant résultent uniquement de la loi régissant les sociétés civiles, des statuts et du présent acte ».
Selon l’article 9.5 des statuts de l’EARL [R] [W], il a été stipulé que le droit de vote qui appartient pour ces parts grevés d’un usufruit à M. [W] serait toutefois exercé par Mme [Y] pour les décisions concernant l’affectation des bénéfices.
Mme [Y] affirme qu’aucun bénéfice n’a jamais été distribué par l’EARL [R] [W], que les comptes courants d’associés ont été crédités de ces bénéfices pendant des années, que M. [W] a « profité de son mandat de gérant et de sa qualité d’associé majoritaire pour vider le contrat de cession temporaire d’usufruit de son objet » qui est « de procurer des revenus à son titulaire », qu’il a commis une faute contractuelle et qu’il lui suffit de démontrer l’existence d’une intention de nuire ou d’une déloyauté sans avoir à justifier d’un abus de majorité.
Outre le fait que Mme [Y] ne développe pas autrement ce moyen, il se déduit de ses écritures que l’acte de cession sur lequel elle fonde sa demande ne peut être fictivement séparé du comportement qu’elle impute à M. [W] ès-qualités de gérant de l’EARL [R] [W] et d’associé unique de cette société qui aurait consisté à détourner les règles spécifiques du droit des sociétés afin de méconnaître l’usufruit qu’il lui avait précédemment consenti.
Eu égard à ce caractère indissociable entre l’acte de constitution de l’usufruit et la prétendue méconnaissance par l’associé unique de l’EARL [R] [W] des droits de Mme [Y], c’est en vain que cette dernière soutient qu’il ne lui serait pas nécessaire de démontrer l’existence d’un abus de majorité imputable à M. [W].
Sur la somme de 50 000 euros :
Sur la délibération du 11 janvier 2017 :
Il résulte des dispositions de l’article 1844-14 du code civil que les actions en nullité de la société ou d’actes et délibérations postérieurs à sa constitution se prescrivent par trois ans à compter du jour où la nullité est encourue.
Par délibération de l’assemblée générale de l’EARL [R] [W] du 11 janvier 2017 dont le procès-verbal, établi le même jour, a été contresigné par Mme [Y], la somme de 50 000 euros se trouvant sur le compte courant au nom de Mme [Y] dans les livres de l’EARL [R] [W] a été transférée sur le compte courant de M. [W] afin de rétablir le « déséquilibre dans l’affectation des dépenses du couple ».
Outre qu’il ne ressort nullement de la lecture du procès-verbal que Mme [Y] se soit opposée à la mesure qui a fait l’objet de la délibération, Mme [Y] n’ayant contesté la régularité de cette assemblée générale que le 4 septembre 2020, c’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a déclaré irrecevable cette demande et son jugement sera confirmé sur ce point.
Sur l’action en responsabilité :
La seule prescription applicable aux actions en responsabilité dirigées contre l’associé majoritaire à qui est imputé un abus de majorité est celle de l’article 2224 du code civil à l’exclusion de celle de l’article 1844-14 du code civil.
Toutefois, pour solliciter l’indemnisation que lui aurait causé l’abus de majorité considéré l’ayant privée de la somme de 50 000 euros, il appartient à Mme [Y] de démontrer, à tout le moins, qu’elle s’est opposée au transfert de cette somme entre son compte courant et celui de M. [W] et que, malgré cette opposition, M. [W] y a tout de même procédé.
Il ressort du procès verbal du 11 janvier 2017 signé de Mme [Y] qu’elle était présente à l’assemblée générale bien que n’étant pas associée. La délibération de transfert d’une somme de 50 000 € se borne à faire état du déséquilibre dans l’affectation des dépenses du couple. Il ne ressort pas du procès verbal que Mme [Y] a exprimé une opposition.
Dès lors que Mme [Y] ne démontre pas que cette décision, qui n’a pas été prise à son insu, l’a été malgré son désaccord, elle ne peut soutenir que M. [W] aurait abusé de ses droits d’associé majoritaire à son détriment.
La demande d’indemnisation formée par Mme [Y] à hauteur de 50 000 euros sera rejetée.
Sur la demande d’annulation des délibérations n° 5, 6 et 7 de l’assemblée générale du 11 février 2020 :
Il appartient à Mme [Y] de démontrer qu’elle a été victime d’un abus de majorité imputable à M. [W], cet abus se caractérisant par une décision prise contrairement à l’intérêt général de la société et dans l’unique dessein de favoriser les associés majoritaires au détriment des associés minoritaires.
Le fait pour une société de systématiquement thésauriser sans avoir à faire face à un investissement ou à un risque économique et financier déterminé est susceptible de caractériser un abus de majorité, lorsqu’elle a pour effet de priver les actionnaires minoritaires de leur droit aux dividendes. Le but poursuivi par une société ayant une activité agricole est, en principe, de procurer un revenu périodique aux associés. Sur ce point, Mme [Y] qui bénéficie d’un usufruit a vocation, comme un associé, à bénéficier d’un revenu périodique.
Il ressort du procès-verbal de l’assemblée générale du 11 février 2020 que M. [W], associé unique de l’EARL [R] [W] disposant de la majorité des parts sociales, a voté pour :
– le report à nouveau des bénéfices des exercices clos les 31 mars 2016, 2017 et 2018 (5ème délibération) ;
– le report à nouveau des bénéfices de l’exercice clos le 31 mars 2019 (6ème délibération) ;
– la prise d’acte de l’évolution des comptes courants au nom de M. [W] et de Mme [Y] et l’approbation de leurs soldes (7ème délibération).
Mme [Y] a voté contre chacune de ces délibérations. Elle a également voté contre la délibération n°4 (approbation de l’attribution des bénéfices des exercices clos en 2011 jusqu’en 2015 inclus sur les comptes courants au nom de M. [W] et de Mme [Y]) mais elle ne sollicite pas l’annulation de cette décision.
Alors que Mme [Y] soutient que cette thésaurisation systématique n’est justifiée par aucune considération économique ou financière ni aucune politique d’investissement, M. [W] et l’EARL [R] [W] versent aux débats :
– deux devis émanant d’une SARL Lecoq établi le 9 septembre 2020 s’agissant du forage d’un puits pour la somme de 24 951,60 euros et de 64 143,62 euros.
– un devis émanant d’une SARL Ets Dantan établi le 6 mars 2019 s’agissant de l’achat d’un engin agricole au prix de 150 000 euros.
– un devis manuscrit émanant de M. [L] établi à une date indéterminée s’agissant de l’achat d’un engin agricole au prix de 39 500 euros.
Il ne ressort pas de ces devis qu’ils ont été acceptés par l’EARL [R] [W] et aucune facture n’est produite par les intimés justifiant de la réalisation à ce jour de l’opération et des achats qui en sont l’objet.
– un contrat d’apprentissage établi par l’EARL [R] [W] à effet du 18 janvier 2021 au nom de M. [F] [W] qui est l’un des enfants communs de Mme [Y] et de M. [W] pour une durée de 18 mois selon une rémunération brute mensuelle de 901,66 euros.
– un certificat médical établi le 29 janvier 2021 par M. [Z] aux termes duquel M. [W] a subi une intervention chirurgicale du rachis en 2005 ainsi qu’en 2017.
Il ne ressort pas de ces éléments que l’EARL [R] [W] a mené une quelconque politique d’investissements ou qu’elle se soit trouvée dans la nécessité d’épargner pour faire face à des achats ou à des dépenses ponctuelles ou récurrentes d’importance. Par ailleurs, les intimés ne peuvent prétendre sérieusement que les mises en réserves des bénéfices et les décisions de report à nouveaux intervenues en février 2020 ont pu être motivées par les circonstances internationales actuelles et notamment le conflit en Ukraine, celui-ci n’ayant débuté qu’au mois de février 2022.
Il est constant que pour les exercices 2011 à 2015 les bénéfices ont été portés sur les comptes courant d’associés et que l’endettement de la société est faible alors que ses capitaux propres représentent près de cinq fois le montant de son capital social.
Il ressort du procès verbal d’assemblée générale du 11 février 2020 que la thésaurisation décidée par M. [W] a été systématique, et ceci bien que tous les exercices aient été bénéficiaires, le bénéfice le plus faible étant de 6 616,57 euros en 2016 et le plus élevé étant de 167 595,59 euros en 2018
En mettant en réserves les bénéfices, en décidant de leur report à nouveau à compter de l’exercice 2011 ou en décidant de créditer les comptes courants d’associés de ces sommes, M. [W], unique associé de l’EARL [R] [W] a privé Mme [Y] du bénéfice des sommes qui auraient dû lui revenir au titre de l’usufruit temporaire s’achevant le 31 décembre 2020 qu’il lui avait concédé alors qu’aucune assemblée générale n’a été convoquée avant le 11 janvier 2017 et que dans le même temps, M. [W] a décidé de prélever la somme de 112 613,75 euros (pièce 15 de Mme [Y] ) de son compte courant d’associé qui est devenu débiteur de 2 183,95 euros le 31 mars 2019, tandis que Mme [Y] n’a pas obtenu jusqu’à ce jour le remboursement de son propre compte.
Enfin, la mise en réserve des bénéfices pour les années 2016 à 2019 sans que les sommes soient inscrites au crédit des comptes courants de M. [W] et de Mme [Y] a totalement privé Mme [Y] de la possibilité de tirer profit des sommes considérées dont le sort ne dépend plus désormais que de la seule volonté de M. [W] en sa qualité d’associé unique.
Il résulte de tout ceci que les décisions votées lors de l’assemblée générale du 11 février 2020 n’avaient pour finalité que de favoriser M. [W] au détriment de Mme [Y]. Elles constituent ainsi un abus de majorité. Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a rejeté sa demande tendant à annuler les résolutions n° 5, 6 et 7 de cette assemblée générale et cette annulation sera prononcée.
Sur la demande de Mme [Y] en paiement de la somme de 137 427,58 euros :
Il résulte des dispositions de l’article 1217 du code civil que la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut demander réparation des conséquences de l’inexécution.
L’article 1382 du code civil devenu l’article 1240 dispose que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Il est constant entre les parties que les dividendes qui ont été allouées à Mme [Y] se sont élevés à 164 747,30 euros alors sa quote-part dans les bénéfices retirés de l’EARL [R] [W] depuis l’année 2010 s’est élevée à 302 175,18 euros.
Les délibérations numéros 5, 6 et 7 de l’assemblée générale du 11 février 2020 ont eu pour effet de priver abusivement Mme [Y] des dividendes auxquels elle avait droit. Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a rejeté la demande en paiement de Mme [Y]. Son préjudice sera indemnisé par le paiement d’une somme égale à celle dont elle a été privée soit 137 427,58 euros. M. [W] et l’EARL [W] seront condamnés solidairement à ce paiement.
Sur la demande de de Mme [Y] en remboursement de son compte courant :
Le compte courant d’associé auquel est assimilable le compte courant au nom de Mme [Y] dans l’EARL [R] [W] est remboursable à première demande à défaut de stipulations différentes dans les statuts de la société.
Aucune des dispositions du Titre V des statuts de l’EARL [R] [W] ne prévoyant de modalité quant au remboursement du compte courant d’associé, il s’ensuit que celui-ci est remboursable par l’EARL [R] [W] à première demande.
Selon la 7ème résolution votée par M. [W] le 11 février 2020, le compte courant au nom de Mme [Y] était créditeur de 54 031,30 euros à cette date, montant confirmé par le grand livre de l’EARL [R] [W] pour l’exercice arrêté au 31 mars 2019 (pièce n°12 des intimés).
Il n’existe aucune autre écriture comptable justifiant d’une somme moindre au crédit de ce compte courant au nom de Mme [Y]. Toutefois, Mme [Y] indiquant avoir reçu un acompte de 2000 euros le 7 juin 2022, il y a lieu de le déduire de la somme de 54 031,30 euros soit un solde de 52 031,30 euros.
Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a rejeté cette demande et il y sera fait droit pour la somme de de 52 031,30 euros à la charge de l’EARL [R] [W] qui seule est débitrice de ce compte courant.
Aucune circonstance particulière ne justifie que cette condamnation soit assortie d’une astreinte. Cette demande sera rejetée.
Sur la somme de 6 500 euros réclamée par Mme [Y] à M. [W] et l’EARL [R] [W] relative à la mise à disposition d’un véhicule :
Les parties ne contestent pas que la somme de 6 500 euros a été prélevée par M. [W] sur le compte courant d’associé de Mme [Y].
Selon les intimés, ce prélèvement est motivé par l’achat par l’EARL [R] [W] d’un véhicule qui a été mis à la seule disposition de Mme [Y] laquelle en était la conductrice principale.
C’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge, en se fondant sur les dispositions de l’article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure au 1er octobre 2016, a considéré qu’il n’existait aucune convention de mise à disposition entre l’EARL [R] [W] et Mme [Y], que le fait que Mme [Y] soit déclarée conductrice principale de ce véhicule auprès de l’assureur ne permettait pas de démontrer qu’elle en était la conductrice exclusive et qu’il n’existait aucun élément établissant que Mme [Y] était débitrice à ce titre à l’égard de la société.
Dès lors que M. [W] a pris la décision irrégulière et ne relevant pas de ses pouvoirs de gérant assurant la gestion courante, de procéder à un prélèvement indu de la somme de 6 500 euros sur le compte courant d’associé de Mme [Y], le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a condamné solidairement M. [W] et l’EARL [R] [W] à rembourser cette somme à Mme [Y].
Sur la production de documents d’assurance relatifs au véhicule dont Mme [Y] aurait la disposition exclusive :
C’est également par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a considéré que les mêmes motifs que ci-dessus devaient entraîner le rejet de cette demande alors, en outre, que M. [W] et l’EARL [R] [W] pouvaient souscrire toute assurance qu’ils estimeraient nécessaires.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a débouté M. [W] et l’EARL [R] [W] de cette demande.
Sur les sommes de 6500 euros et de 7700 euros qui devraient être déduites du compte courant d’associé de Mme [Y] selon M. [W] et l’EARL [R] [W] :
Les intimés affirment que ces deux sommes ont été versées directement à Mme [Y] pour régler ses impôts sur le revenu 2012 et 2013 (page 24 de leurs écritures) et qu’elles doivent être déduites du compte courant d’associé au nom de cette dernière.
A l’appui de leur demande, les intimés produisent un extrait du grand livre de l’EARL [R] [W] des exercices arrêtés aux 31 mars 2014 et 2015 mentionnant :
– le 17 octobre 2013, un débit de 6 500 euros dont la nature est « JM [Y] » et le tiers est « [W] [R] »;
– le 14 septembre 2014, un débit de 4 300 euros dont la nature est « REMBT Impôts » et le tiers est « Web [Y] »;
– le 18 février 2015, un débit de 3 400 euros dont la nature est « VT Impôts » et le tiers est « Web [Y] ».
Toutefois, ces écritures comptables qui ne sont confirmées par la production d’aucun ordre de paiement ni d’aucun relevé bancaire correspondant sont insuffisantes à démontrer que ces sommes ont été remises à Mme [Y], qu’elles l’ont été pour le règlement d’impôts dus par Mme [Y] au titre des bénéfices de l’EARL [R] [W] et que, d’une façon générale, elles correspondraient à des sommes avancées à Mme [Y] que celle-ci devrait restituer en moins-prenant sur son compte courant.
Cette demande sera rejetée.
Dispositif
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant par arrêt contradictoire;
Confirme le jugement du tribunal judiciaire d’Evreux du 27 août 2021 en ce qu’il a :
– déclaré irrecevable l’action en nullité de Madame [D] [Y] à l’encontre de la délibération prise en assemblée générale du 11 janvier 2017 ;
– déclaré irrecevable l’action reconventionnelle en nullité de M. [R] [W] et l’EARL
[R] [W] de l’acte de cession temporaire des parts sociales en usufruit du 3 décembre 2010 ;
– condamné solidairement M. [R] [W] et l’EARL [R] [W] à régler à Madame [D] [Y] la somme de 6 500 euros HT ;
– débouté M. [R] [W] et l’EARL [R] [W] de leur demande au titre des documents d’assurance ;
L’infirme pour le surplus :
Statuant à nouveau :
Annule les délibérations n° 5, 6 et 7 de l’assemblée générale du 11 février 2020 ;
Condamne solidairement M. [W] et l’EARL [R] [W] à payer à Mme [Y] la somme de 137 427,58 euros. Au titre de sa quote-part des bénéfices dans l’EARL [R] [W] pour les années 2016 à 2019 ;
Condamne l’EARL [R] [W] à payer à Mme [Y] la somme de de 52 031,30 euros au titre du remboursement de son compte courant ;
Y ajoutant :
Déboute Mme [Y] de sa demande d’indemnisation à hauteur de 50 000 euros de dommages et intérêts;
Déboute Mme [Y] de sa demande d’astreinte ;
Déboute M. [W] et l’EARL [R] [W] de leur demande tendant à ce que le solde du compte courant de Mme [Y] soit diminué des sommes de 6 500 euros et de 7 700 euros
Condamne solidairement M. [W] et l’EARL [R] [W] aux dépens de première instance et d’appel ;
Condamne l’EARL [R] [W] à payer à Mme [Y] la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel.
La greffière, La présidente,