29 mars 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
21/12280
Pôle 5 – Chambre 6
Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 6
ARRET DU 29 MARS 2023
(n° , pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/12280 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CD65Q
Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Juin 2021 -Tribunal de Commerce d’EVRY – RG n° 2020F00207
APPELANT
Monsieur [T] [H]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représenté par Me Vincent RIBAUT de la SCP SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
INTIMEE
S.A. CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL
immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 542 016 381,
agissant poursuites et diligences de son Directeur Général domicilié en cette qualité audit siège.
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Samuel GUEDJ de la SELARL CABINET D’AVOCATS GUEDJ HAAS-B IRI, avocat au barreau d’ESSONNE, toque : L 233
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant MME Pascale SAPPEY-GUESDON et M. Vincent BRAUD, Président.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
M.Marc BAILLY, Président de chambre,
M.Vincent BRAUD, Président, chargé du rapport
MME Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère,
Greffier, lors des débats : Madame Anaïs DECEBAL
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par M.Vincent BRAUD, Président,et par Anaïs DECEBAL,Greffier, présent lors de la mise à disposition.
*
* *
[T] [H], président de la société par actions simplifiée LJF [H], a ouvert un compte bancaire no [XXXXXXXXXX02] au Crédit industriel et commercial (CIC) le 19 novembre 2016 au profit de la société.
Par acte sous seing privé du 19 novembre 2016, le Crédit industriel et commercial consentait à la société LJF [H] un prêt no [XXXXXXXXXX02] 0900202 de 60 000 euros, moyennant l’application d’un taux d’intérêts de 1,800 % l’an, remboursable selon 72 mensualités de 900,77 euros, destiné à la création d’un restaurant de type rapide sous l’enseigne Takos, sans pas de porte ni rachat de fonds de commerce, seuls les travaux et frais de création étant à prévoir (pièce no 2 du CIC).
Par acte sous seing privé du 22 février 2017, le Crédit industriel et commercial consentait à la société LJF [H] un prêt no [XXXXXXXXXX02] 0900203 de 40 000 euros, moyennant l’application d’un taux d’intérêts de 1,80 % l’an, remboursable selon 72 mensualités de 600,51 euros, destiné à la création d’un restaurant de type rapide sous l’enseigne Takos, sans pas de porte ni rachat de fonds de commerce, uniquement agencement du restaurant avec l’ameublement et l’acquisition du matériel de cuisine, complément du crédit de 60 000 euros déjà consenti (pièce no 3 du CIC)
[T] [H] s’est engagé en qualité de caution solidaire « tous engagements » par acte sous seing privé du 1er mars 2017 à concurrence de 24 000 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas, échéant des pénalités ou intérêts de retard, et ce, pour une durée de 5 ans (pièce no 5 du CIC).
[T] [H] s’engageait derechef en qualité de caution solidaire par acte du 30 avril 2019 à hauteur de la somme de 24 000 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas, échéant des pénalités ou intérêts de retard, et ce, pour une durée de 3 ans (pièce no 4 du CIC).
La société LJF [H] a été placée en liquidation judiciaire le 30 septembre 2019.
Le Crédit industriel et commercial a déclaré sa créance auprès de la société MMJ par courrier le 22 octobre 2019.
Par exploit en date du 20 mai 2020, le Crédit industriel et commercial a assigné [T] [H] devant le tribunal de commerce d’Évry pour obtenir sa condamnation en sa qualité de caution à payer les sommes de :
‘ 13 501,50 euros outre intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 2019 au titre du compte courant no [XXXXXXXXXX02],
‘ 24 000,00 euros outre intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 2019 au titre des prêts nos [XXXXXXXXXX02] 0900202 et [XXXXXXXXXX02] 0900203.
Par jugement réputé contradictoire en date du 1er juin 2021, le tribunal de commerce d’Évry a :
‘ Condamné [T] [H] à payer la somme de :
‘ 13 501,50 euros outre intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 2019 et jusqu’à complet paiement au titre du compte courant no [XXXXXXXXXX02],
‘ 24 000,00 euros outre intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 2019 et jusqu’à complet paiement au titre :
Du prêt no [XXXXXXXXXX02] 0900202 d’un montant de 60 000,00 euros
Du prêt no [XXXXXXXXXX02] 0900203 d’un montant dc 40 000,00 euros ;
‘ Ordonné la capitalisation des intérêts ;
‘ Condamné [T] [H] à payer la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et l’a débouté du surplus de sa demande ;
‘ Dit n’y avoir lieu à prononcer l’exécution provisoire de la présente décision, celle-ci étant de droit ;
‘ Condamné [T] [H] aux dépens, en ce compris les frais de greffe liquidés à la somme de 63,36 euros toutes taxes comprises.
Exposé du litige
****
Par déclaration du 1er juillet 2021, [T] [H] a interjeté appel du jugement.
Moyens
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 22 septembre 2021, [T] [H] demande à la cour de :
– INFIRMER en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce d’Evry-Courcouronnes en date du 1er juin 2021 ;
– CONSTATER la défaillance et les manquements contractuels de la banque, Le Crédit Industriel et Commercial (CIC), dans la conclusion des contrats de cautionnement ;
– RECONNAITRE la nullité des cautionnements en raison de leur caractère disproportionné;
– DEBOUTER la banque, Le Crédit Industriel et Commercial, de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions comme étant mal fondées ;
En conséquence et statuant à nouveau,
A titre principal de :
– DIRE ET JUGER que la banque, Le Crédit Industriel et Commercial, a commis plusieurs manquements contractuels (défaut de devoir de conseil, cautionnement disproportionné, manquement à son obligation de renseignement) au regard des cautionnements souscrits par le défendeur ;
– RECONNAITRE la responsabilité contractuelle de la banque Le Crédit Industriel et Commercial en raison du manquement à son devoir d’information et de conseil et du caractère disproportionné du cautionnement ;
– RECONNAITRE que Monsieur [T] [H] a subi des préjudices ouvrant droit à réparation du fait des négligences et fautes contractuelles commises par la banque Le Crédit Industriel et Commercial ;
– CONSTATER que les cautionnements souscrits par Monsieur [T] [H] ne respectent pas les formalité
s prévues par les articles L. 341-2 et L. 341-3 ancien du Code de la consommation ;
– CONSTATER que les cautionnements souscrits par Monsieur [T] [H] ne respectent pas les exigences de l’article L. 332-1 du Code de la consommation en raison de leur caractère disproportionné ;
– ORDONNER la nullité des cautionnements souscrits par Monsieur [T] [H] au profit de la banque, Le Crédit Industriel et Commercial (CIC) ;
– DEBOUTER Le Crédit Industriel et Commercial de sa demande de condamnation de Monsieur [T] [H] à verser une somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– DEBOUTER intégralement Le Crédit Industriel et Commercial (CIC) dans sa demande tendant à obtenir le versement du solde des prêts sur le fondement des actes de caution souscrits par Monsieur [T] [H] ;
A titre subsidiaire :
Si par extraordinaire la Cour d’appel de Paris devait confirmer la décision de première instance de :
– ORDONNER que Monsieur [T] [H] pourra payer les sommes auxquelles il aura été condamnées, en 24 mensualités en vertu de l’article 1343-5 du Code civil.
A titre reconventionnel :
– CONSTATER les manquements contractuels commis par la banque, Le Crédit Industriel et Commercial, à l’encontre de Monsieur [T] [H] ;
– CONDAMNER la banque, Le Crédit Industriel et Commercial, à verser la somme de 3.000 euros à Monsieur [T] [H] à titre de dommages intérêts compte tenu des nombreux manquements contractuels commis sur le fondement de l’article 1231 du Code civil ;
– CONDAMNER la société la banque, Le Crédit Industriel et Commercial, à verser la somme de 4.000 euros à Monsieur [T] [H] en application de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 17 décembre 2021, la société anonyme Crédit industriel et commercial demande à la cour de :
‘ Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 1 er juin 2021 du Tribunal de Commerce d’EVRY-COURCOURONNES
‘ Débouter Monsieur [H] de l’ensemble de ses demandes
‘ Condamner Monsieur [H] à verser au CIC la somme de 4 000 € sur le fondement de l’article 700 du CPC, outre les entiers dépens dont distraction au profit de Me Samuel Guedj enapplication de l’article 699 du CPC.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux dernières conclusions écrites déposées en application de l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 15 novembre 2022 et l’audience fixée au 13 février 2023.
CELA EXPOSÉ,
Sur la validité des cautionnements :
Sur la nullité des cautionnements :
Motivation
L’appelant demande à la cour de constater que les cautionnements souscrits ne respectent pas les formalités prévues par les articles L. 341-2 et L. 341-3 anciens du code de la consommation, et d’ordonner la nullité desdits cautionnements.
L’article 954, alinéa 3, du code de procédure civile dispose toutefois que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion. Or, l’appelant n’invoque pas dans sa discussion, au soutien de sa demande de nullité, le moyen pris de l’irrégularité de la mention manuscrite au regard des textes cités dans le dispositif de ses écritures.
Sur la disproportion des cautionnements :
En application des dispositions de l’article L. 341-4 ancien du code de la consommation devenu l’article L. 332-1 du même code, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
Il appartient à la caution qui entend opposer au créancier les dispositions des textes précités du code de la consommation, de rapporter la preuve du caractère disproportionné de son engagement par rapport à ses biens et revenus. La disproportion manifeste du cautionnement aux biens et revenus de la caution au jour où il a été souscrit suppose que la caution se trouve, lorsqu’elle le souscrit, dans l’impossibilité manifeste de faire face à un tel engagement avec ses biens et revenus (Com., 28 fév. 2018, no 16-24.841). Cette disproportion s’apprécie lors de la conclusion de l’engagement, au regard du montant de l’engagement, de l’endettement global, des biens et revenus déclarés par la caution, dont le créancier, en l’absence d’anomalies apparentes, n’a pas à vérifier l’exactitude.
En l’occurrence, [T] [H] fait valoir que :
‘ il ne disposait au 1er mars 2017 que d’un revenu de 1 169, 75 euros par mois au titre de son activité de restauration rapide ;
‘ il ne disposait d’aucun bien propre ;
‘ à cette même date, il était célibataire avec deux enfants, et devait payer des charges d’au minimum 1 187,32 euros par mois ;
‘ sa situation était identique le 30 avril 2019, voire pire dans la mesure où il ne disposait plus que de 603 euros de revenus par mois avec des charges au moins identiques, l’activité de sa société périclitant ;
‘ lorsque les deux cautions ont été appelées par la banque, [T] [H] ne disposait toujours pas de patrimoine et ses revenus étaient encore plus faibles que lors de la souscription des cautionnements.
Le Crédit industriel et commercial produit en premier lieu la fiche patrimoniale signée par [T] [H] le 1er mars 2017 où celui-ci déclare :
‘ Être célibataire, avec deux enfants à charge ;
‘ Percevoir de Pôle Emploi un revenu mensuel net de 1 800 euros, annuel de 21 600 euros ;
‘ Acquitter un loyer mensuel de 574 euros ;
‘ N’avoir aucun crédit ni cautionnement en cours.
Ces déclarations ne sont entachées d’aucune anomalie apparente, si bien que la banque pouvait légitimement s’y fier.
Il apparaît en outre que :
‘ [T] [H] est associé majoritaire de la société par actions simplifiée LJF [H], dont il détient 2 400 des 3 000 actions (pièces nos 11 et 12 du CIC) ;
‘ au moment de la création de la société, qui précède de quelques mois l’engagement litigieux, [T] [H] a ainsi apporté la somme de 2 400 euros au capital social (pièce no 12 du CIC) ;
‘ les prêts octroyés à hauteur de 100 000 euros ont servi à financer en partie l’acquisition d’un commerce de restauration, pour un montant total de 150 000 euros (pièce no 3 du CIC) ;
‘ le prêt du 19 novembre 2016 indique un « apport de 40 % hors frais du gérant » (pièce no 2 du CIC).
L’intimé est ainsi fondé à rappeler que les parts sociales, comme la créance inscrite en compte courant d’associé, dont est titulaire la caution au sein de la société cautionnée font partie du patrimoine devant être pris en considération pour l’appréciation de ses biens et revenus à la date de la souscription de son engagement (Com., 26 janv. 2016, no 13-28.378).
Au regard de ces éléments, l’engagement souscrit par [T] [H] le 1er mars 2017 à concurrence de 24 000 euros n’était pas, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus déclarés.
Le Crédit industriel et commercial produit en second lieu la fiche patrimoniale signée par [T] [H] le 30 avril 2019 où celui-ci déclare :
‘ Être célibataire, avec une personne à charge ;
‘ Percevoir un salaire mensuel de 1 200 euros ;
‘ Acquitter un loyer mensuel de 543 euros ;
‘ Avoir deux crédits à la consommation en cours, représentant des charges annuelles de 5 558,88 euros et de 4 056 euros.
Ces déclarations ne sont entachées d’aucune anomalie apparente, si bien que la banque pouvait légitimement s’y fier.
Au regard de ces déclarations, du premier engagement de caution, et de la détention des actions de la société LJF [H], pour lesquelles l’appelant ne propose aucune valorisation sans s’expliquer davantage sur le financement du fonds de commerce, l’engagement souscrit par [T] [H] le 30 avril 2019 à concurrence de 24 000 euros n’était pas, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus déclarés. Le Crédit industriel et commercial est par suite fondé à s’en prévaloir.
Sur l’obligation de [T] [H] :
L’appelant n’invoque dans sa discussion aucun moyen contre les chefs du jugement le condamnant en sa qualité de caution à payer au Crédit industriel et commercial les sommes de 13 501,50 euros au titre du compte courant no [XXXXXXXXXX02] et de 24 000,00 euros au titre des prêts no [XXXXXXXXXX02] 0900202 et no [XXXXXXXXXX02] 0900203,outre intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 2019 et jusqu’à complet paiement, capitalisés conformément à l’article 1343-2 du code civil. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef, étant toutefois rappelé que la caution ne saurait être tenue que dans la limite de ses engagements.
Sur la responsabilité contractuelle du Crédit industriel et commercial :
[T] [H] sollicite à titre reconventionnel l’octroi d’une somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts, en réparation des manquements contractuels qu’il impute au Crédit industriel et commercial, à savoir (a) la souscription de cautionnements disproportionnés, (b) un manquement à son obligation de renseignement, (c) un défaut de devoir de conseil et de mise en garde.
a) Il a été précédemment jugé que les cautionnements n’étaient pas manifestement disproportionnés.
b) [T] [H] reproche à l’établissement de crédit d’avoir failli à son obligation de se renseigner sur les capacités financières et patrimoniales de la caution. Outre que le grief manque en fait, puisque le Crédit industriel et commercial verse aux débats les fiches patrimoniales qu’il a fait remplir par la caution avant de recueillir chacun de ses engagements, il sera rappelé que si l’article L. 341-4 ancien, devenu L. 332-1, du code de la consommation interdit à un créancier professionnel de se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation, ce texte ne lui impose pas de vérifier la situation financière de la caution lors de son engagement, laquelle supporte, lorsqu’elle l’invoque, la charge de la preuve de démontrer que son engagement de caution était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus (Com., 13 sept. 2017, no 15-20.294).
c) Aux termes de l’article 1147 ancien du code civil, dans sa rédaction applicable à l’espèce, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Il résulte de ce texte que la banque est tenue lors de la conclusion du contrat, à l’égard d’une caution dont elle n’a pas constaté le caractère averti, d’un devoir de mise en garde à raison des capacités financières de la caution et des risques d’endettement né de l’octroi du prêt en cas de mise en ‘uvre de son engagement (1re Civ., 14 oct. 2015, no 14-14.531).
L’appelant fait grief à l’établissement de crédit de ne pas avoir attiré son attention sur les risques de l’opération envisagée, ni vérifié que les engagements que prenait [T] [H] fussent compatibles avec ses capacités financières.
En l’espèce, [T] [H], né le [Date naissance 1] 1983, était âgé de 33 ans au jour de son engagement. Le Crédit industriel et commercial fait valoir sans être contredit que [T] [H] était président associé de la société LJF [H] depuis quatre mois, après avoir occupé un poste de responsable administratif et commercial au sein de la société à responsabilité limitée DRK, puis les fonctions de président de la société Takos.
Il ressort de ces éléments que [T] [H] n’est pas une caution profane et connaissait la situation financière de la société qu’il avait décidé de cautionner (Com., 17 fév. 2009, no 07-20.935). Dans ces circonstances, le Crédit industriel et commercial n’était tenu à son égard d’aucun devoir de mise en garde.
Sur la demande de délais de payement :
[T] [H] souhaite s’acquitter du payement de sa condamnation en 24 mensualités. Il expose que :
‘ la société LJF [H] a été placée en liquidation judiciaire ;
‘ [T] [H] a retrouvé un emploi depuis le 1er septembre 2020, qui lui procure un salaire modeste ne lui permettant pas de payer l’intégralité de la somme en une seule fois.
L’article 1343-5 du code civil dispose :
« Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
« Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s’imputeront d’abord sur le capital.
« Il peut subordonner ces mesures à l’accomplissement par le débiteur d’actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.
« La décision du juge suspend les procédures d’exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d’intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.
« Toute stipulation contraire est réputée non écrite.
« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d’aliment. »
Au regard du défaut de justificatif de la situation présente du débiteur, de l’absence de perspective d’apurement de la dette par la caution, et du délai de trois ans et demi dont [T] [H] a bénéficié de facto depuis la mise en demeure du 23 octobre 2019, il n’y a pas lieu de faire droit à sa demande.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Aux termes de l’article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. L’appelant en supportera donc la charge.
En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :
1o À l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2o Et, le cas échéant, à l’avocat du bénéficiaire de l’aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l’aide aurait exposés s’il n’avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l’article 37 de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991 .
Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.
Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu’elles demandent.
La somme allouée au titre du secundo ne peut être inférieure à la part contributive de l’État majorée de 50 %.
Sur ce fondement, [T] [H] sera condamné à payer au Crédit industriel et commercial la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.
LA COUR,
Dispositif
PAR CES MOTIFS,
CONFIRME le jugement, étant précisé que [T] [H] est condamné dans la limite totale de 48 000 euros ;
Y ajoutant,
DÉBOUTE [T] [H] de sa demande de nullité des cautionnements, de sa demande de dommages et intérêts et de sa demande de délai de payement ;
CONDAMNE [T] [H] à payer au Crédit industriel et commercial la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE [T] [H] aux entiers dépens, dont distraction au profit de maître Samuel Guedj en application de l’article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT