29 mars 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
21/07265
Pôle 3 – Chambre 1
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 3 – Chambre 1
ARRET DU 29 MARS 2023
(n° 2023/ , 18 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/07265 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDP52
Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Mars 2021 – Juge aux affaires familiales d’AUXERRE – RG n° 18/00103
APPELANT
Monsieur [V], [W], [N] [Y]
né le 14 Mars 1949 à [Localité 14] (MAROC)
[Adresse 4]
[Localité 7]
représenté par Me Carole DURIF de la SELARL C. DURIF AVOCATS, avocat au barreau de SENS
INTIMEE
Madame [R], [A] [T] divorcée [Y]
née le 18 Mars 1953 à [Localité 12]
[Adresse 6]
[Localité 8]
représentée par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 01 Février 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Patricia GRASSO, Président
Mme Sophie RODRIGUES, Conseiller
Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseiller
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Mme Sophie RODRIGUES dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
Greffier lors des débats : Mme Emilie POMPON
ARRET :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Mme Patricia GRASSO, Président, et par Mme Emilie POMPON, Greffier
Exposé du litige
***
EXPOSE DU LITIGE
Mme [R] [T] et M. [V] [Y] se sont mariés le 16 juin 1984 devant l’officier d’état civil d'[Localité 8] (89) sans contrat de mariage préalable de sorte qu’ils étaient soumis au régime matrimonial légal de la communauté réduite aux acquêts.
Après une ordonnance de non-conciliation du 28 février 2000, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance d’Auxerre a prononcé le divorce des époux par jugement du 17 mai 2004, et a notamment ordonné la liquidation et le partage des droits patrimoniaux des époux et commis à cette fin le président de la chambre des notaires de l’Yonne ou son délégataire.
Me [Z] [P] a été désigné en cette qualité par le président de la chambre des notaires de l’Yonne.
Me [M] [O] lui a succédé. Elle a dressé le 1er août 2016 un procès-verbal de difficultés déposé au tribunal le 20 mars 2017.
Par acte d’huissier du 15 janvier 2018, Mme [T] a assigné M. [Y] aux fins d’ouverture des opérations de liquidation du régime matrimonial.
Par jugement du 16 mars 2021, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire d’Auxerre a notamment :
– dit n’y avoir lieu à ordonner de nouveau l’ouverture des opérations de liquidation et partage judiciaire de l’indivision existant entre Mme [T] et M. [Y],
– dit n’y avoir lieu à désigner de nouveau un notaire en vue de procéder à ces opérations,
– dit que M. [Y] est redevable envers la communauté d’une récompense de 50 000 euros, en raison de l’amélioration de son bien propre situé [Adresse 2] à [Localité 8],
– dit que M. [Y] est redevable envers la communauté d’une récompense de 97 273,70 euros, en raison de l’amélioration de son bien propre situé [Adresse 5] à [Localité 8],
– dit que ces récompenses porteront intérêts au jour de la liquidation,
– débouté M. [Y] de sa demande de récompense relative aux loyers perçus par la communauté pour la location du bien situé au [Adresse 2] à [Localité 8],
– débouté Mme [T] de sa demande de récompense relative aux loyers perçus à compter du mois d’avril 2000 par M. [Y] pour la location du bien situé [Adresse 2] à [Localité 8],
– débouté Mme [T] de sa demande de production de pièces,
– fixé à la somme de 21 855,61 euros le montant de la créance de M. [Y] sur l’indivision post-communautaire,
– fixé à la somme de 6 851,61 euros le montant de la créance de Mme [T] sur l’indivision post-communautaire,
– dit qu’il n’y a pas lieu de porter à l’actif de la masse à partager la somme de 41 922,50 euros au titre de la valeur des parts sociales de la société Aux’air Service ainsi que la somme de 16 007 euros correspondant à la valeur sur le compte courant d’associé,
– débouté Mme [T] de sa demande d’indemnité pour jouissance privative du bien situé [Adresse 3] à [Localité 9],
– débouté Mme [T] de sa demande aux fins de voir porter à l’actif de la masse à partager la somme de 45 700 euros, au titre de la valeur de l’immeuble situé [Adresse 3] à [Localité 9],
– constaté que M. [Y] ne forme aucune demande s’agissant du bien indivis situé au [Adresse 1] à [Localité 8],
– débouté M. [Y] de ses demandes relatives aux véhicules Renault R19 et Renault Safrane,
– dit, en conséquence, que la valeur des véhicules Renault R19 et Renault Safrane doit être inscrite à l’actif de la masse à partager à hauteur de 3 000 euros et 5 575 euros,
– dit n’y avoir lieu à statuer sur la demande d’attribution de la moitié du mobilier,
– débouté Mme [T] de sa demande en dommages et intérêts,
– renvoyé les parties devant Me [M] [O], notaire à [Localité 11], aux fins de poursuite des opérations de liquidation et partage,
– débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 15 avril 2021, M. [Y] a interjeté appel de ce jugement en ce qu’il :
– a dit qu’il est redevable envers la communauté d’une récompense de 50 000 euros, en raison de l’amélioration de son bien propre situé [Adresse 2] à [Localité 8],
– a dit qu’il est redevable envers la communauté d’une récompense de 97 273,7 euros, en raison de l’amélioration de son bien propre situé [Adresse 5] à [Localité 8],
– a dit que ces récompenses porteront intérêts du jour de la liquidation,
– l’a débouté de sa demande de récompense relative aux loyers perçus par la communauté pour la location du bien situé au [Adresse 2] à à [Localité 8],
– a fixé à la somme de 21 855,61 euros le montant de sa créance sur l’indivision post-communautaire,
– a constaté qu’il n’a formé aucune demande s’agissant du bien indivis situé au [Adresse 1] à [Localité 8],
– l’a débouté de ses demandes relatives aux véhicules Renault R19 et Renault Safrane,
– a dit, en conséquence, que la valeur des véhicules Renault R19 et Renault Safrane doit être inscrite à l’actif de la masse à partager à hauteur de 3 000 euros et 5 575 euros,
– a débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– a dit que chaque partie conserve la charge de ses propres dépens.
Moyens
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 6 janvier 2023, l’appelant demande à la cour de :
– débouter Mme [T] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'[Localité 8] le 16 mars 2021 en ce qu’il a :
* dit que M. [Y] est redevable envers la communauté d’une récompense de 50 000 euros, en raison de l’amélioration de son bien propre situé [Adresse 2] à [Localité 8],
* dit que M. [Y] est redevable envers la communauté d’une récompense de 97 273,7 euros, en raison de l’amélioration de son bien propre situé [Adresse 5] à [Localité 8],
* dit que ces récompenses porteront intérêts du jour de la liquidation,
* débouté M. [Y] de sa demande de récompense relative aux loyers perçus par la communauté pour la location du bien situé au [Adresse 2] à [Localité 8],
* fixé à la somme de 21 855,61 euros le montant de la créance de M. [Y] sur l’indivision post-communautaire,
* constaté que M. [Y] ne forme aucune demande s’agissant du bien indivis situé au [Adresse 1] à [Localité 8],
* débouté M. [Y] de ses demandes relatives aux véhicules Renault R19 et Renault Safrane,
* dit, en conséquence, que la valeur des véhicules Renault R19 et Renault Safrane doit être inscrite à l’actif de la masse à partager à hauteur de 3 000 euros et 5 575 euros,
* débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
* dit que chaque partie conserve la charge de ses propres dépens,
juger à nouveau :
– désigner tel nouveau notaire qu’il plaira afin de procéder aux opérations de liquidation du régime matrimonial ayant existé entre Mme [T] et M. [Y],
– dire et juger qu’il lui appartiendra de chiffrer l’éventuel compte de récompenses dues par M. [Y] à la communauté en prenant en considération pour l’immeuble [Localité 10], la date de son aliénation, et pour l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 8], son état au mois de novembre 2005,
– dire et juger que la communauté devra rapporter des loyers encaissés pour l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 8] évalués à la somme de 56 633,13 euros,
– dire et juger que les comptes d’indivision de M. [Y] et de Mme [T] devront être revus en considération des observations formulées dans les écritures de M. [Y],
– dire et juger que s’agissant de l’immeuble sis [Adresse 1], il devra être pris en considération le prix de cession séquestré entre les mains du notaire pour la somme de 50 000 euros, afin de fixer les droits des parties,
– dire et juger qu’il en sera de même s’agissant de la masse active à partager et plus particulièrement le véhicule Renault Safrane, le véhicule Renault R19, le local commercial sis [Adresse 1], et la maison de [Localité 9],
– confirmer en tant que de besoin qu’il n’y a pas lieu de porter à l’actif de la masse à partager la valeur des parts de la Société Aux’air Service et le compte d’associé de M. [Y],
– condamner Mme [T] à payer à M. [Y] la somme de 3 000 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en première instance, puis à la somme de 3 000 euros au stade de l’appel, outre les entiers dépens de l’instance, qui seront recouvrés par la SELARL C. Durif Avocats par application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 21 janvier 2023, Mme [T], intimée, demande à la cour de :
– débouter M. [Y] de son appel et de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– confirmer les dispositions du jugement entrepris en ce qu’il a :
* dit n’y avoir lieu à ordonner de nouveau les opérations de liquidation et partage judiciaire de l’indivision existant entre M. [Y] et Mme [T]
* dit n’y avoir lieu à désigner de nouveau un notaire en vue de procéder à ces opérations
* dit que M. [Y] est redevable envers la communauté d’une récompense de 50 000 euros, en raison de l’amélioration de son bien propre [Adresse 2] à [Localité 8],
* dit que M. [Y] est redevable envers la communauté d’une récompense de 97 273,70 euros, en raison de l’amélioration de son bien propre situé [Adresse 5] à [Localité 8],
* débouté M. [Y] de ses demandes relatives aux véhicules Renault R19 et Renault Safrane,
* dit en conséquence, que la valeur des véhicules Renault R 19 et Renault Safrane doit être inscrite à l’actif de la masse à partager à hauteur de 3 000 euros et 5 575 euros,
1/ – faire droit à l’appel incident formé par Mme [T] sur les loyers perçus par la communauté [Adresse 2], infirmant le jugement de ce chef et statuant à nouveau,
– déclarer la prescription acquise et donc irrecevable la demande de M. [Y].
à titre subsidiaire,
– confirmer la décision entreprise,
2/ – faire droit à l’appel incident formé par Mme [T] sur le compte d’indivision de M. [Y], infirmant le jugement de ce chef et statuant à nouveau,
– déclarer la prescription acquise sur les échéances du prêt BPB concernant la maison de sise à [Localité 9], et déclarer partiellement acquise la prescription sur les taxes foncières et primes d’assurances des biens indivis ([Localité 13] et [Localité 9]), et dire irrecevables les demandes sur les échéances du prêt et des taxes foncières et primes d’assurance,
– fixer la dette de l’indivision due à M. [Y] à la somme de 6 478 euros,
à titre subsidiaire,
– confirmer la décision entreprise,
3/ – faire droit à l’appel incident de Mme [T] concernant son compte d’indivision, infirmant le jugement de ce chef et statuant à nouveau,
– fixer à la somme de 24 958 euros le montant de la créance de Mme [T] sur l’indivision post-communautaire,
4/ – faire droit à l’appel incident formé par Mme [T] du chef de l’actif de communauté et infirmant le jugement et statuant à nouveau :
– porter à l’actif de la communauté les sommes de 41 922,50 euros et celle de 16 007 euros correspondant à la valeur des parts sociales de la société Aux’air Service et du compte d’associé y seront portées,
5/ – faire droit à l’appel incident formé par Mme [T] s’agissant du bien sis à [Localité 9], infirmant le jugement de ce chef et statuant à nouveau,
– fixer d’une part une indemnité d’occupation due à l’indivision post-communautaire par M. [Y] du fait de la jouissance exclusive du bien jusqu’à l’aliénation du bien en juillet 2020, d’autre part au visa des dispositions de l’article 815-13 du code civil porter à l’actif de la communauté la valeur de l’immeuble pour un montant de 45 700 euros, M. [Y] ayant volontairement laissé se dégrader ce bien,
6/ – faire droit à l’appel incident formé par Mme [T] sur la demande de dommages et intérêts, infirmant le jugement de ce chef et statuant à nouveau,
– condamner M. [Y] à payer la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1240 du code civil,
en tout état de cause :
– condamner M. [Y] au versement d’une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, de même qu’aux entiers dépens d’instance et d’appel.
Pour un plus ample exposé des moyens développés par les parties au soutien de leurs prétentions, il sera renvoyé à leurs écritures susvisées conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 24 janvier 2023.
L’affaire a été appelée à l’audience du 1er février 2023.
Motivation
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il sera rappelé que les parties étaient soumises au régime matrimonial légal de la communauté réduite aux acquêts.
Sur la désignation d’un nouveau notaire
En vertu de l’article 562 du code de procédure civile, l’appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent.
Dès lors, eu égard aux termes circonscrits de la déclaration d’appel, l’effet dévolutif n’a pas opéré pour le chef de dispositif du jugement entrepris ayant dit n’y avoir lieu à désigner de nouveau un notaire en vue de procéder aux opérations de liquidation des intérêts patrimoniaux de M. [Y] et Mme [T].
Aussi ce chef de dispositif ne peut-il être infirmé pour, le cas échéant, faire droit à la demande de l’appelant tendant à la désignation d’un nouveau notaire.
Au surplus, M. [Y] expose qu’il forme cette demande « afin de pouvoir obtenir un nouveau regard sur ce dossier ».
Outre qu’un tel motif, s’il n’est adossé à aucun grief présenté à l’encontre du notaire ayant déjà acquis la connaissance du dossier, n’est pas de nature à justifier le surcoût de temps et d’argent qu’implique le changement demandé, ne serait-ce qu’en raison de la transmission matérielle du dossier, l’intimée relève à juste titre qu’en l’espèce, Me [O] a succédé à Me [P] initialement désigné par le président de la chambre des notaires de l’Yonne de sorte qu’un autre notaire a déjà pu porter un « nouveau regard » sur la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux.
Sur l’actif à partager
Sur les parts sociales de la société Aux’air Service et du compte d’associé
Le premier juge a exposé que la société Aux’air Service était une SARL créée le 1er décembre 1986, au cours de la vie commune des époux, et que son capital social était divisé en 500 parts dont 250, au nom de M. [Y], relevaient de la communauté. Mme [T] précise, et justifie par le procès-verbal d’assemblée générale ordinaire du 25 juin 1999, que les autres parts étaient détenues par sa propre fille, Mme [C] [G], née d’une précédente union.
L’activité de cette société portait sur des prestations de service et de fourniture d’outillage en lien avec l’air comprimé.
M. [Y] était le gérant de cette société qui a fait l’objet d’une liquidation judiciaire.
Le premier juge a dit qu’il n’y a pas lieu de porter à l’actif de la masse à partager la somme de 41 922,50 euros au titre de la valeur des parts sociales de la société Aux’air Service ainsi que la somme de 16 007 euros correspondant à la valeur sur le compte courant d’associé, en soulignant que Mme [T] fondait alors sa demande sur l’article 815-13 du code civil, applicable aux biens indivis et non à la communauté, et que le jugement de liquidation judiciaire a fixé la date de cessation des paiements de la société au 30 mars 2000, soit à une date antérieure à la date des effets du divorce dans les rapports patrimoniaux entre époux fixée d’un commun accord au 13 avril 2000, de sorte que la dépréciation de la société ne pouvait être imputée à la gestion de M. [Y] postérieure à cette date.
L’appelant sollicite la confirmation de la décision entreprise sur ce point quand Mme [T], dans le cadre de son appel incident, réitère en cause d’appel sa demande de voir porter à l’actif de communauté la somme totale de 57 930 euros, en visant cette fois l’article 1421 du code civil.
Elle soutient qu’alors qu’à la fin de l’exercice 1998, la société Aux’air Service affichait un bénéfice de 3 551 euros et que l’expertise du bilan clos le 31 décembre 1999 ne faisait pas apparaître de difficulté financière, M. [Y] a, par intention de nuire à la communauté, fait bénéficier son nouvel employeur, la société NMA, créée spécialement à cet effet, de la clientèle de la société Aux’air Service, ainsi vidée de sa substance.
En vertu de l’article 1421 du code civil, chacun des époux a le pouvoir d’administrer seul les biens communs et d’en disposer, sauf à répondre des fautes qu’il aurait commises dans sa gestion ; les actes accomplis sans fraude par un conjoint sont opposables à l’autre.
Il appartient donc à Mme [T] de rapporter la preuve d’une faute de gestion commise par M. [Y] ayant nuit aux biens communs que constituaient les parts sociales de la SARL Aux’air Service.
Il résulte du jugement du tribunal de commerce d’Auxerre en date du 3 juillet 2000 que le placement en liquidation judiciaire de la société Aux’air Service, qui ne date donc pas de l’année 2001 comme le prétend Mme [T], que la date de cessation des paiement a été provisoirement fixée au 1er mars 2000 ; il apparaît donc qu’à cette date au plus tard, les difficultés financières de la société étaient déjà avérées.
Mme [T] produit, pour justifier de la situation antérieure, le courrier adressé le 10 août 2000 par un expert-comptable à Mme [C] [G], alors associée de la société Aux’air Service évaluant les parts sociales de cette SARL, sur les bases du bilan clos au 31 décembre 1999 à 544 788 francs, dont 351 976 francs au titre des capitaux propres et 192 813 francs au titre du fonds de commerce, arrondi à 550 000 francs, soit une valeur de 1 100 francs la part. L’expert-comptable affirme qu’au vu du bilan clos au 31 décembre 1999, « rien ne pouvait laisser présager des difficultés financières » en détaillant le montant du fonds de roulement (443 000 francs dont 105 000 francs en compte courant d’associé), suffisant pour faire face aux besoins, et celui du poste client (511 000 francs), sans doute mobilisable selon lui en cas de tension de trésorerie, alors que les dettes, notamment auprès des fournisseurs dépassaient à peine le montant du poste client (519 000 francs).
Pour caractériser la faute de M. [Y], Mme [T] se fonde sur une attestation de sa fille, Mme [C] [G], laquelle déclare avoir appris en contactant d’anciens clients de la société Aux’air Service que son beau-père, s’étant rapproché de la société Sudac Air Service fin avril 1999, a ensuite informé par courrier tous les clients de la société Aux’air Service que son activité de maintenance était reprise par la société Sudac Air Service à laquelle ils devaient donc désormais passer commande. Toutefois, le caractère indirect de la connaissance par le témoin des man’uvres décrites et le lien de filiation qui l’unit à l’intimée, appelante incidente, affecte la valeur probante de cette attestation à défaut d’élément extérieur objectif produit pour la corroborer. En effet, si Mme [T] affirme que M. [Y] a commencé à travailler pour la société NMA « dès le début de l’année 2000 », aucune des pièces qu’elle verse aux débats ne vient étayer cette affirmation. De même, elle ne démontre pas que la société NMA de Montesson, qui est au demeurant une personne morale distincte de la société Sudac Air Service citée par Mme [C] [G], ait repris l’activité de la société Aux’air Service ; la modification d’activité du 25 avril 2000 figurant sur la fiche produite en pièce n°20 par l’intimée est insuffisante à caractériser, au-delà d’une activité commune, la reprise de clientèle alléguée.
Au surplus, M. [Y] verse quant à lui aux débats deux attestations de l’expert-comptable de la société Aux’air Service dont il résulte que la situation établie pour la période du 1er janvier au 30 juin 1999 faisait déjà ressortir un résultat net comptable déficitaire de 236 467 francs ayant conduit à un amoindrissement des capitaux propres de la société. Si, au vu de l’attestation du 26 janvier 2000, le déficit était finalement moindre au 31 décembre 1999, de 91 384,43 francs, l’analyse comparée par l’expert-comptable des résultats des deux branches de l’activité de la société montre qu’en 1999 a été enregistrée une forte diminution du taux de marge brute sur l’outillage, alors que les man’uvres imputées à M. [Y], et non démontrées, auraient porté, en 2000, sur la branche prestation air comprimé.
Par conséquent, Mme [T] échouant à établir que la perte de valeur des parts sociales communes découle d’une faute de M. [Y], il convient de confirmer le jugement entrepris qui a rejeté sa demande d’intégrer à l’actif communautaire la valeur estimée de ces parts avant les difficultés ayant mené à la liquidation judiciaire de la société.
Sur la valeur des biens immobiliers situés [Adresse 1] à [Localité 8], et de [Adresse 3] à [Localité 9]
Ces deux biens ont été acquis en communauté.
Le premier juge a constaté que M. [Y] ne formait aucune demande s’agissant du bien situé au [Adresse 1] à [Localité 8], et a débouté Mme [T] de sa demande aux fins de voir porter à l’actif de la masse à partager la somme de 45 700 euros au titre de la valeur de l’immeuble situé [Adresse 3] à [Localité 9].
L’appelant entend voir « dire et juger que s’agissant de l’immeuble sis [Adresse 1], il devra être pris en considération le prix de cession séquestré entre les mains du notaire pour la somme de 50 000 euros, afin de fixer les droits des parties » et « dire et juger qu’il en sera de même s’agissant de la masse active à partager et plus particulièrement [‘] le local commercial sis [Adresse 1], et la maison de [Localité 9] ».
L’intimée demande, « au visa des dispositions de l’article 815-13 du code civil », que soit porté « à l’actif de la communauté » la valeur de l’immeuble de [Localité 9] pour un montant de 45 700 euros correspondant à son évaluation et non à son prix de vente en soutenant que la baisse de valeur enregistrée est imputable à M. [Y] qui aurait volontairement laissé se dégrader ce bien.
Il est constant que le local commercial situé [Adresse 1] à [Localité 8] a été vendu au prix de 50 000 euros et que la maison de [Localité 9] a été vendue au prix de 16 000 euros en juillet 2020.
Par conséquent, et à défaut de prétention contraire figurant au dispositif des conclusions de l’intimée, bien qu’elle indique dans sa discussion que le local de la [Adresse 1] a été vendu à un prix dérisoire alors qu’il avait une valeur de 77 000 euros, il convient de faire droit à la demande de l’appelant tendant à voir dire que le local commercial situé [Adresse 1] à [Localité 8] sera valorisé à hauteur de 50 000 euros dans la liquidation.
S’agissant du bien de [Localité 9], l’article 815-13 du code civil, qui porte sur la prise en compte de l’amélioration ou de la dégradation d’un bien indivis, ne saurait utilement fonder une demande portant sur l’actif de la communauté.
En outre, ce texte conduit le cas échéant à la fixation d’une indemnité, qui en l’espèce ne pourrait réparer qu’une éventuelle perte de chance de vendre l’immeuble à un meilleur prix, et non à la prise en compte d’une valeur estimée en lieu et place de la valeur vénale réelle d’un bien.
En conséquence, et sans qu’il soit utile de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de Mme [T] concernant ce bien.
Sur les véhicules
La cour constate que la rédaction de la prétention de M. [Y] devant la cour est exactement identique à celle de première instance figurant dans l’exposé du litige du jugement entrepris, à savoir « dire et juger qu’il en sera de même s’agissant de la masse active à partager et plus particulièrement le véhicule Renault Safrane, le véhicule Renault R19 […] ».
Cependant, une telle formulation renvoie à la prétention présentée immédiatement avant dans le dispositif de ses conclusions, qui diffère selon le degré de juridiction.
Devant le juge aux affaires familiales, ce renvoi conduisait à considérer que M. [Y] demandait que la masse active à partager, s’agissant en particulier de la valeur des véhicules, soit « revu[e] en considération des observations formulées dans les écritures de M. [Y] ».
Devant la cour, le renvoi à la prétention tendant à voir « dire et juger que s’agissant de l’immeuble sis [Adresse 1], il devra être pris en considération le prix de cession séquestré entre les mains du notaire pour la somme de 50 000 euros, afin de fixer les droits des parties » ne permet pas d’identifier précisément la demande sur laquelle la cour est appelée à statuer en application du troisième alinéa de l’article 954 du code de procédure civile.
Certes, il ressort de la partie discussion des conclusions de l’appelant qu’il conteste les valeurs respectives de 3 000 euros et de 5 575 euros retenues pour le véhicule Renault R19 et le véhicule Renault Safrane mais, tout en poursuivant l’infirmation du jugement frappé d’appel sur ce point, il y a lieu de constater qu’il ne forme pas valablement de demande contraire. Le jugement entrepris sera donc confirmé puisque Mme [T], qui évoque quant à elle, dans la partie de ses écritures consacrée à la discussion, une moto en sus des deux véhicules automobiles de marque Renault mentionnés au jugement frappé d’appel, ne forme aucune prétention à ce sujet au dispositif de ses conclusions et demande la confirmation du jugement entrepris s’agissant des deux voitures.
Au surplus, les pièces produites par l’appelant sont inefficaces à établir la valeur des véhicules concernés, ni les procès-verbaux de contrôle technique ni les certificats d’immatriculation ne fournissant de chiffrage.
Sur les récompenses
Les récompenses sont des créances compensant des mouvements de valeurs entre la communauté et le patrimoine propre d’un époux, dont il est résulte l’enrichissement de la communauté et l’appauvrissement corrélatif du patrimoine propre de l’époux ou inversement.
Les récompenses dues par la communauté trouvent leur principe énoncé à l’article 1433 du code civil qui dispose que la communauté doit récompense à l’époux propriétaire toutes les fois qu’elle a tire profit de biens propres.
Les récompenses dues à la communauté trouvent leur principe dans l’article 1437 du code civil qui dispose que toutes les fois que l’un des deux époux a tiré un profit personnel des biens de la communauté, il en doit récompense.
Les récompenses ne peuvent être revendiquées que dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial. Elles donnent lieu à règlement lors du partage.
Les règles présidant à l’évaluation des récompenses résultent de l’article 1469 du code civil:
« La récompense est, en général, égale à la plus faible des deux sommes que représentent la dépense faite et le profit subsistant.
Elle ne peut, toutefois, être moindre que la dépense faite quand celle-ci était nécessaire.
Elle ne peut être moindre que le profit subsistant, quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien qui se retrouve, au jour de la liquidation de la communauté, dans le patrimoine emprunteur. Si le bien acquis, conservé ou amélioré a été aliéné avant la liquidation, le profit est évalué au jour de l’aliénation ; si un nouveau bien a été subrogé au bien aliéné, le profit est évalué sur ce nouveau bien. »
Les récompenses constituent les éléments actifs ou passifs d’un compte unique et indivisible dont le solde, positif ou négatif pour l’époux concerne, est seul à considérer pour la liquidation de la communauté.
L’excédent des comptes de récompense des époux en faveur de la communauté fait partie de la masse active indivise.
L’excédent des comptes de récompense des époux en leur faveur fait partie de la masse passive indivise.
L’article 1468 du code civil précise qu’il est établi au nom de chaque époux un compte des récompenses que la communauté doit, et des récompenses qu’il doit à la communauté.
Les créances et les dettes de chacun des époux envers la communauté se compensent donc dans un compte dont seul importe le solde au jour de la liquidation.
Sur les récompenses dont M. [Y] serait débiteur
* Concernant l’immeuble situé [Adresse 2] à [Localité 8]
Il est constant que ce bien a été acquis par M. [Y] le 22 janvier 1982, soit avant le mariage, et qu’il s’agissait donc d’un bien propre de l’époux. Au vu de l’attestation notariée produite, il a été vendu le 28 août 2013 au prix de 87 000 euros.
Mme [T] soutenant que la communauté a exposé diverses dépenses afférentes à ce bien, par le remboursement de prêts, le financement de travaux, et le paiement des taxes foncières et des assurances, elle sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a dit que M. [Y] est redevable envers la communauté d’une récompense de 50 000 euros, en raison de l’amélioration de son bien propre [Adresse 2] à [Localité 8], sur le fondement des articles 1437, 1469 alinéa 1 et 1401 du code civil.
M. [Y], sans contester le principe d’une dette de récompense, critique le montant des travaux retenus par le notaire commis dans son projet d’état liquidatif en se fondant sur les justificatifs versés aux débats par Mme [T] et la valeur de l’immeuble avec travaux retenue par le notaire comme étant la valeur vénale contemporaine de son état liquidatif alors que le bien a été vendu au prix de 87 000 euros. Il en conclut que « le profit subsistant ne peut être de 100 000 euros » mais, sans le chiffrer, se contente de demander au dispositif de ses conclusions qu’il soit dit qu’il appartiendra au notaire commis de chiffrer l’éventuel compte de récompenses qu’il doit à la communauté « en prenant en considération pour l’immeuble [Localité 10], la date de son aliénation ».
L’appelant ne présente d’ailleurs aucune critique du jugement entrepris en ce qu’il a retenu, à bon droit, d’une part que, dès lors que la récompense ne peut être inférieure au profit subsistant par application de l’alinéa 3 de l’article 1469 du code civil précité, et que M. [Y] ne conteste donc pas l’engagement de dépenses par la communauté ni la valeur de 37 000 euros prise en compte par le notaire commis au titre de la valeur actualisée de l’immeuble si ces dépenses n’avaient pas été exposées, il est inopérant de discuter du montant des dépenses effectivement exposées par la communauté, et d’autre part qu’il se déduit du même texte que le profit subsistant est évalué au jour de l’aliénation du bien en considération du prix de vente.
Par conséquent, les deux termes de la soustraction permettant de déterminer le profit subsistant étant connus, il n’y a pas lieu de renvoyer ce calcul au notaire commis, et le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il dit que M. [Y] est redevable envers la communauté d’une récompense de 50 000 euros (87 000 – 37 000), pour les dépenses faites par la communauté pour l’amélioration du bien propre de l’époux situé [Adresse 2] à [Localité 8].
* Concernant l’immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 8]
Il est constant que ce bien était également un propre de M. [Y] et qu’il a abrité le domicile conjugal provisoirement attribué à Mme [T] dans le cadre de la procédure de divorce.
Le premier juge a exposé que le notaire commis a retenu une récompense en considération de travaux financés par la communauté sur ce bien et que M. [Y] a démenti pour la première fois dans le cadre de l’instance judiciaire devant lui le principe même d’une récompense en contestant que les deux prêts souscrits auprès du Crédit Lyonnais respectivement les 12 février 1985 (en réalité 1er février 1985) et 13 mars 1993, et les deux prêts souscrits auprès du Crédit Universel respectivement les 16 octobre 1992 et 5 janvier 1997 aient eu pour destination le financement de travaux relatifs au bien situé [Adresse 5] à [Localité 8]. Le premier a constaté que le prêt souscrit auprès du Crédit Lyonnais le 1er février 1985, d’un montant en francs équivalent à 11 917,12 euros, par M. [Y] et Mme [T] en qualité de co-emprunteurs, mentionne expressément comme objet du contrat : « des travaux d’aménagement dans la maison individuelle sise [Adresse 5] à [Localité 8], résidence principale » de sorte que le principe d’une récompense était établi mais que, pour les trois autres prêts retenus par le notaire, soit le contrat n’était pas produit soit l’objet n’en était pas précisé de sorte qu’il n’était pas démontré qu’ils aient également eu pour finalité le financement de travaux sur ce bien.
L’appelant reprend devant la cour la position soutenue en première instance, sans même s’expliquer sur l’objet mentionné dans le contrat de prêt du Crédit Lyonnais en date du 1er février 1985, d’un montant équivalent à 11 917,12 euros.
L’intimée maintient quant à elle sa demande de récompense en évoquant d’abord le prêt du Crédit Lyonnais en date du 1er février 1985, un prêt personnel que M. [Y] a contracté auprès de la Caisse d’Epargne pour l’achat du bien puis remboursé par la communauté jusqu’à son solde soit jusqu’en novembre 1993, et un prêt de 50 000 euros consenti par sa propre mère, Mme [L] [T], puis « un prêt Crédit Lyonnais, deux prêts Crédit Universel puis celui de Mme [L] [T] ».
La cour constate, comme le premier juge, que la mention de l’objet sur le contrat de prêt du Crédit Lyonnais en date du 1er février 1985 rapporte la preuve contraire aux allégations de M. [Y] pour ce prêt d’un montant équivalent à 11 917,12 euros, expressément affecté au financement de travaux sur le bien situé [Adresse 5] à [Localité 8], et que le relevé de compte produit par l’intimée en pièce n°43 établit que les échéances de remboursement de ce prêt ont été prélevées sur le compte joint ouvert aux noms des deux époux.
Pour le surplus, outre les discordances entre ces deux listes de prêts censés avoir servi au paiement de travaux sur le bien situé [Adresse 5] à [Localité 8], la cour constate que les lettres du Crédit Universel en date des 28 octobre 1992 et 2 décembre 1996, qui établissent l’existence de prêts souscrits auprès de cette société, ne justifient pas de l’affectation des fonds empruntés, pas plus que les contrats résultant de l’offre de prêt « Budget » signée le 9 octobre 1992 et de l’offre de prêt personnel signée le 23 novembre 1996, qui ne comportent aucune mention quant à leur utilisation. De même, le relevé de compte faisant apparaître deux virements de « Mme [T] », l’un d’un montant de 1 104,14 francs (et non euros) en date du 5 décembre 1986, et l’autre d’un montant de 1 100 francs (et non euros) en date du 5 janvier 1987, au titre d’un virement permanent, ne suffisent pas à établir l’existence d’un prêt consenti par la mère de Mme [T] pour financer des travaux sur le bien situé [Adresse 5] à [Localité 8].
La copie de la première page et d’une page intérieure du livret d’Epargne Logement de M. [Y] ne permet pas d’identifier le prêt personnel que M. [Y] aurait contracté auprès de la Caisse d’Epargne pour l’achat du bien et ne démontre pas que ce prêt a été remboursé par la communauté jusqu’en novembre 1993 comme le prétend l’intimée.
Enfin, Mme [T] ne justifie pas que les factures qu’elle produit et dont elle affirme qu’elles correspondent à des travaux sur le bien situé [Adresse 5] à [Localité 8] ont été réglés avec des fonds communs.
Par conséquent, comme le premier juge, la cour retient que la créance de récompense de la communauté découle seulement du prêt souscrit auprès du Crédit Lyonnais le 1er février 1985, d’un montant en francs équivalent à 11 917,12 euros.
En application de l’alinéa 3 de l’article 1469 du code civil précité, la récompense ne peut être inférieure au profit subsistant.
Comme le premier juge, la cour constate qu’aucune des parties ne conteste la valeur de 43 000 euros prise en compte par le notaire comme étant celle que le bien aurait eu sans les travaux.
Pour l’appréciation de la valeur actuelle du bien, le vente de l’immeuble intervenue le 7 novembre 2022 au prix de 85 000 euros exclut que soit retenue la valeur de 150 000 euros prise en compte par le premier juge à la suite du notaire commis, sur la base de l’annonce immobilière publiée en vue de la cession du bien dont se prévalait Mme [T].
M. [Y] soutient que cette valeur actuelle du bien intègre des travaux de reprise de désordres qu’il aurait financés ou réalisés seul après le départ de Mme [T], laquelle aurait laissé « un immeuble totalement vandalisé » à l’issue de sa période de jouissance provisoire exclusive. Il entend alors voir évaluer le bien sans tenir compte de ces travaux de remise en état, sur la base de l’évaluation du 3 novembre 2006 qu’il produit, qui mentionne une valeur vénale avant rénovation de 40 000 euros.
Cependant, si M. [Y] fait grief au premier juge d’avoir considéré qu’il avait failli dans l’administration de la preuve de l’imputabilité à Mme [T] d’un état dégradé du bien, la cour constate elle aussi que, si les pièces qu’il verse aux débats (photographies, au demeurant non datées, états des lieux de sortie, voire factures ou même devis susceptibles de justifier de l’opportunité de travaux de réfection) sont de nature à démontrer que la maison située [Adresse 5] à [Localité 8] a subi des dommages, elles n’établissent nullement que ceux-ci aient été du fait de Mme [T]. Si la lettre de l’expert mandaté par l’assureur de M. [Y] datée du 31 mars 2005 indique que l’origine des dégâts « provient plus d’une négligence de l’occupante et non pas d’un caractère accidentel » (sic), il a identifié des causes « multiples » tenant notamment à des infiltrations au travers de la toiture, en pourtour de la paillasse de la cuisine et au travers de l’évier fendu, et sous la porte fenêtre fermée d’une chambre, ainsi qu’à une fuite de canalisation, qui mettent en évidence des désordres que Mme [T] aurait certes pu signaler mais dont il n’est pas établi qu’ils soient apparus au cours de sa période de jouissance privative, faute d’éléments de comparaison concernant l’état de la maison au départ de M. [Y] lors de la séparation conjugale, ni surtout, que son occupation soit la cause de leur survenance, et non l’ancienneté ou un défaut des toiture, paillasse, évier, canalisation et porte cités.
Néanmoins, le premier juge a jugé que les travaux que M. [Y] a justifié avoir réalisés après le départ des lieux de Mme [T] ont nécessairement contribué à la valorisation du bien et n’ont pas à bénéficier à la communauté au titre de la récompense. Il a retenu comme seuls justifiés les travaux de réparation d’une fuite affectant l’immeuble correspondant à une facture du 25 juin 2006 d’un montant de 1 192,15 euros.
En effet, le récapitulatif produit en pièce n°83 par l’appelant, censé détaillé le coût des travaux de rénovation pour un montant total de 23 897,33 euros, est dépourvu de toute valeur probante. Alors que ce récapitulatif fait état de deux factures, en précisant leurs références, seule celle de la SARL Dury en date du 25 juin 2006, produite en pièce n°66 par l’appelant, est citée par le jugement entrepris. La cour constate que M. [Y] produit également à hauteur d’appel la facture de la SARL Id’ées 89 du 28 février 2005 d’un montant de 1 119,36 euros pour le remplacement d’une porte fenêtre en pièce n°187. En revanche, les pièces produites sous les n°189 et 190 ne sont pas des factures, contrairement aux intitulés figurant sur le bordereau de communication de pièces mais des devis. Or les multiples devis produits par M. [Y] ne rapportent pas la preuve de travaux effectués, et, les factures de fournitures versées aux débats n’établissent pas que ces fournitures aient été affectées au bien situé [Adresse 5] à [Localité 8].
Il convient donc de retenir que M. [Y] justifie de travaux financés par lui seul et ayant contribué à la valeur actuelle du bien à hauteur de 2 311,51 euros (1 192,15 + 1 119,36).
Ainsi, l’ensemble des dépenses relatives au bien propre de M. [Y] retenues comme justifiées s’élève à la somme de 14 228,63 euros, engagées à hauteur de 11 917,12 euros, soit 83,75 % du total, par la communauté, et à hauteur de 2 311,51 euros, soit 16,25 %, par M. [Y] après la dissolution de la communauté.
Par conséquent, sur le profit subsistant de 42 000 euros (85 000 – 43 000), la part correspondant aux dépenses engagées par la communauté s’élève à 35 175 euros.
La récompense due à la communauté par M. [Y] pour les travaux sur son bien propre situé [Adresse 5] à [Localité 8] qu’elle a financés sera fixée à ce montant, par infirmation du jugement entrepris en ce qu’il a retenu une somme de 97 273,7 euros à ce titre.
Sur la récompense réclamée par M. [Y]
L’appelant expose que la communauté a encaissé les fruits de la location du bien situé [Adresse 2] à [Localité 8] pour un montant total de 56 633,13 euros et affirme que la communauté en est alors « redevable ». Il formule à cet égard au dispositif de ses conclusions une prétention tendant à voir « dire et juger que la communauté devra rapporter des loyers encaissés pour l’immeuble sis [Adresse 2] à [Localité 8] évalués à la somme de 56 633,13 euros » au titre d’une « récompense » selon l’intitulé de la discussion dédiée.
L’intimée soulève, pour la première fois devant la cour, la prescription de cette prétention en application des articles 122 du code de procédure civile et 2224 du code civil. Elle se prévaut, à titre subsidiaire, des dispositions de l’article 1401 du code civil pour solliciter la confirmation du jugement entrepris ayant, sur ce fondement, débouté M. [Y] de sa demande de récompense.
Sur la prescription, l’appelant souligne que Mme [T] n’avait pas soulevé ce moyen devant le juge de première instance et en déduit « qu’elle ne pourra en conséquence pas être accueillie ».
Or la prescription constitue, selon l’article 122 du code de procédure civile, une fin de non-recevoir, laquelle peut être proposée en tout état de cause en vertu de l’article suivant.
Aux termes de l’article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
L’article 2236 du même code dispose qu’elle ne court pas ou est suspendue entre époux.
Le divorce des parties a été prononcé par jugement du 17 mai 2004.
Le procès-verbal de dires daté des 19 et 27 novembre 2007 dressé par Me [P] ne porte mention d’aucune demande de M. [Y] au titre des loyers perçus par la communauté.
M. [Y] ne fait état d’aucune demande à ce titre avant la présente instance, étant précisé qu’aucune des parties ne produit le procès-verbal de difficultés dressé par Me [M] [O] le 1er août 2016, évoqué par le premier juge.
Quoi qu’il en soit, une éventuelle demande formée à l’occasion de l’établissement de ce procès-verbal de difficultés aurait déjà été prescrite.
Par conséquent, il y a lieu, infirmant le jugement entrepris malgré la pertinence de sa motivation, de déclarer prescrite la demande de M. [Y] au titre des loyers de son bien propre situé [Adresse 2] à [Localité 8] perçus par la communauté.
Sur les comptes d’indivision
En vertu de l’article 815-13 du code civil, lorsqu’un indivisaire a amélioré à ses frais l’état d’un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l’équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l’aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu’il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu’elles ne les aient point améliorés.
Il est admis que les remboursements d’emprunts et le paiement des taxes et primes d’assurance afférents à un bien indivis notamment constituent des dépenses nécessaires à sa conservation.
Sur les créances alléguées de M. [Y]
Le premier juge a fixé à la somme de 21 855,61 euros le montant de la créance de M. [Y] sur l’indivision post-communautaire, à l’issue d’une analyse des pièces versées aux débats en regard des chefs de créance listées par le notaire commis.
S’agissant des demandes de l’appelant concernant son compte d’indivision, le dispositif des conclusions de l’intimée est rédigé comme suit :
« – faire droit à l’appel incident formé par Mme [T] sur le compte d’indivision de M. [Y], infirmant le jugement de ce chef et statuant à nouveau,
– déclarer la prescription acquise sur les échéances du prêt BPB concernant la maison de sise à [Localité 9], et déclarer partiellement acquise la prescription sur les taxes foncières et primes d’assurances des biens indivis ([Localité 13] et [Localité 9]), et dire irrecevables les demandes sur les échéances du prêt et des taxes foncières et primes d’assurance,
– fixer la dette de l’indivision due à M. [Y] à la somme de 6 478 euros,
à titre subsidiaire,
– confirmer la décision entreprise ».
Cependant, dans la partie de ses écritures consacrée à la discussion, Mme [T] souligne à juste titre que si, aux termes de ses conclusions d’appelant, M. [Y] conteste le montant de la créance d’indivision fixée à son profit, il se contente, au dispositif de ses écritures, de demander à la cour de « dire et juger que les comptes d’indivision de M. [Y] et de Mme [T] devront être revus en considération des observations formulées dans les écritures de M. [Y] ».
Il y a lieu de constater qu’une telle demande ne constitue pas une prétention au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile, puisqu’en procédant par renvoi à la partie des conclusions de l’appelant consacrée à la discussion, nonobstant les prescriptions du deuxième alinéa de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne tend pas à conférer un droit identifiable à la partie qui l’énonce.
La cour n’est dès lors pas tenue de statuer sur les demandes chiffrées présentées par M. [Y] dans la discussion de ses écritures.
Dans le cadre de son appel incident, l’intimée soulève désormais la prescription partielle des demandes formées par M. [Y] au titre de son compte d’indivision.
Etant rappelé qu’en vertu de l’article 123 du code de procédure civile, la fin de non-recevoir relative à la prescription peut être proposée en tout état de cause, il y a lieu de constater que les demandes de M. [Y] portant sur une dépense exposée à une date antérieure de plus de cinq ans au procès-verbal de difficultés établi par le notaire commis le 1er août 2016 sont prescrites en application des articles 122 du code de procédure civile et 2224 du code civil.
Or la seule taxe d’habitation mise en compte porte sur l’année 2000 et il est constant que la dernière échéance de remboursement du prêt immobilier concernant la maison de [Localité 9] a été réglée le 24 mars 2011.
Par ailleurs, le premier juge a retenu à juste titre que les dépenses concernant les biens propres de M. [Y] ne sauraient lui ouvrir droit à créance contre l’indivision post-communautaire et que la facture de la société Lamy Bourgogne concernant une prestation d’estimation d’un bien indivis ne porte ni sur une dépense d’amélioration ni sur une dépense de conservation de sorte que son paiement n’entre pas dans le champ de l’article 815-13 du code civil précité.
Seules seront donc retenues au crédit du compte d’indivision de M. [Y] les sommes qu’il justifie avoir payées depuis le 1er août 2011, au vu des avis établis à son seul nom :
– au titre des cotisations d’assurances pour la maison située [Adresse 1] à [Localité 8], à hauteur de 1 873,33 euros (210,08 + 221,63 + 233,87 + 252,10 + 269,46 + 288,59 + 319,26 + 333,60 – 255,26),
– au titre des cotisations d’assurances pour la maison de [Localité 9], à hauteur de 2 143,03 euros ([163,95 x 3/12] + 182,33 + 190,37 + 203,10 + 218,49 + 233,27 + 247,50 + 263,74 + 275,53 + 287,71),
– au titre des taxes foncières pour la maison située [Adresse 1] à [Localité 8], à hauteur de 6 083 euros ([756×5/12] + 756 + 789 + 794 + 803 + 839 + 876 + 911),
– au titre des taxes foncières pour la maison de [Localité 9], à hauteur de 1 548 euros ([164 x 5 /12] + 171 + 176 + 179 + 186 + 186 + 190 + 193 + 199).
Par conséquent, infirmant le jugement entrepris en ce qu’il a fixé à la somme de 21 855,61 euros le montant de la créance de M. [Y] sur l’indivision post-communautaire, ce montant sera, sur l’appel incident, limité à 11 647,36 euros.
Sur les créances alléguées de Mme [T]
Le premier juge a exposé que le notaire commis a retenu que Mme [T] a réglé pour l’indivision des emprunts à la consommation pour les montants suivants :
– 1 599,57 euros relatifs à la carte Cora,
– 4 730,99 euros relatifs à un contrat Franfinance,
– 1 315,47 euros relatifs à un contrat Finaref Kangourou,
– 2 473,57 euros relatifs à un contrat Finaref Mistral,
– 995,71 euros relatifs à un contrat Finaref Espace,
– 3 476,90 euros relatifs à un contrat Finaref,
– 5 817,14 euros relatifs à un prêt de la Banque Parisienne de Crédit,
– 459,45 euros relatifs au solde d’un compte débiteur auprès de Fortis Banque.
Il a écarté les montants mis en compte au titre des contrats Franfinance, Finaref Mistral et Finaref Espace conclus à son seul nom à défaut d’élément venant étayer ses dires quant à un usage dans l’intérêt du ménage, et rejeté le montant correspondant au prêt de la Banque Parisienne de Crédit au motif que, si les deux époux apparaissaient en qualité de co-emprunteurs, Mme [T] ne démontrait pas en avoir seule supporté le remboursement. Au vu de ses corrections, il a fixé à la somme de 6 851,61 euros le montant de la créance de Mme [T] sur l’indivision post-communautaire.
Mme [T] fait valoir une créance de 24 985 euros pour les contrats et prêts d’un montant total de 20 869 euros listés par le notaire commis, auquel elle ajoute un autre contrat Finaref pour un montant de 4 116,12 euros, outre l’ensemble des frais qu’elle a exposés pour les sommations et frais d’huissier relatifs à ces facilités de paiement, pour un montant total de 645,69 euros.
M. [Y] conteste que ces différentes sommes aient servi à la communauté.
Il résulte des pièces produites que seul le prêt souscrit auprès de la Banque Parisienne de Crédit a été signé par les deux époux.
Si les factures de biens électroménagers acquis pendant la vie commune au moyen de la carte Cora confirment que le crédit adossé à cette carte a été utilisé pour les besoins du ménage, les relevés produits par Mme [T] concernant le contrat Franfinance et les différents contrats Finaref, qui la mentionnent comme seule destinataire, ne permettent pas de connaître l’usage des fonds empruntés de sorte qu’elle échoue à rapporter la preuve qu’ils ont servi, comme elle l’affirme, à l’achat de biens courants pour les besoins du ménage.
Comme le premier juge a écarté de ce fait les sommes relatives aux contrats Franfinance, Finaref Mistral et Finaref Espace de la créance d’indivision de Mme [T], il y a lieu en conséquence d’écarter également les sommes relatives aux autres contrats Finaref.
S’agissant du prêt de la Banque Parisienne de Crédit, M. [Y] indique sans être contredit que le prêt souscrit auprès de la Banque Parisienne de Crédit a servi à financer la réparation du véhicule Renault R5 de Mme [T] accidenté par le fils né d’une précédente union de celle-ci, Mme [T] se contentant de faire état de travaux de réparation « d’un véhicule R5 accidenté ». Il n’en demeure pas moins qu’il ne conteste pas avoir signé le contrat de prêt en qualité de co-emprunteur le 26 mai 1999, du temps du mariage.
Mme [T] produit le tableau d’amortissement relatif à ce prêt souscrit conjointement, qui est établi à son seul nom et mentionne une dernière échéance au 30 mai 2003, et un relevé Fortis Banque concernant un compte ouvert à son seul nom portant trace du remboursement de ce prêt, dont la référence est précisée et est identique à celle du contrat, s’agissant de la seule échéance du 30 juillet 2002. Elle justifie donc qu’elle a poursuivi seule le remboursement de ce prêt après la dissolution de la communauté que les parties fixent, comme le notaire commis, au 13 avril 2000.
Il convient donc d’ajouter la somme de 5 817,14 euros à la créance d’indivision de Mme [T] comprenant déjà la somme de 1 599,57 euros relative à la carte Cora.
Infirmant le jugement entrepris, le montant de la créance de Mme [T] sur l’indivision post-communautaire sera fixé à la somme de 7 416,71 euros et non 6 851,61 euros.
Sur l’indemnité d’occupation sollicitée par Mme [T] concernant le bien de [Localité 9]
En vertu de l’article 815-9 alinéa 2 du code civil, l’indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d’une indemnité.
L’intimée, appelante incidente, soutient que M. [Y] a fait changer les serrures de la maison de [Localité 9] à la fin de l’année 2000 et en a seul conservé les clés, ce qui justifie que soit fixée au profit de l’indivision post-communautaire (même si elle évoque par erreur une créance de la communauté dans le corps de ses écritures) une indemnité d’occupation « qu’il conviendra de chiffrer » pour la jouissance exclusive de ce bien jusqu’à son aliénation en juillet 2020.
Le premier juge a rejeté sa demande au motif qu’elle ne démontrait pas un usage privatif du bien par son ancien époux puisqu’il ne pouvait se déduire de la lettre du 31 octobre 2005, où elle demande à M. [Y] de transmettre un jeu de clés de cette maison de [Localité 9] au notaire, qu’elle-même ne disposait pas de telles clés, et qu’il résultait de ses propres pièces que Mme [T] avait fait temporairement ré-expédier à l’adresse de [Localité 9] du courrier à son nom et à celui de sa fille.
Devant la cour, Mme [T] fait surtout valoir que M. [Y] reconnaît lui-même avoir eu la jouissance exclusive du bien dans sa propre pièce n°40.
Dans cette lettre qu’il a adressée le 28 mai 2005 à Me Anne-Laure Catherinot, avocate à Limoges, il met effectivement en exergue, en gras et souligné, le fait qu’il est seul détenteur des clés et explique qu’il « refuse catégoriquement de lui confier le double des clés » par crainte de nouvelles dégradations du bien.
Cependant, il résulte des contenus respectifs de cette lettre et de celle du 31 octobre 2005 dont Mme [T] est l’auteur comme des écritures respectives des parties que cette maison était destinée à être vendue, le désaccord des parties portant sur les conditions de son évaluation par une agence immobilière.
La seule détention des clés par un coïndivisaire dans ce contexte ne suffit pas à caractériser une jouissance ou une occupation privative dont la matérialité n’est d’ailleurs pas même alléguée par Mme [T].
Pour ces motifs qui remplacent ceux du premier juge, le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté Mme [T] de sa demande d’indemnité pour jouissance privative du bien situé [Adresse 3] à [Localité 9] par M. [Y].
Sur la demande de dommages et intérêts
L’intimée, appelante incidente, reproche à M. [Y] d’avoir tenté de retarder les opérations de liquidation, en refusant la mise en vente amiable des biens communs, aggravant d’autant leur dégradation, en allant pas chercher les lettres recommandées adressées par le notaire et en sollicitant encore un changement du notaire commis.
Le premier juge a retenu que Mme [T] ne démontrait pas une attitude déloyale ou dilatoire de la part de M. [Y] durant la phase de liquidation et partage des intérêts patrimoniaux des ex-époux puisqu’il avait toujours répondu aux convocations du notaire chargé des opérations de liquidation et partage lorsqu’il en avait été avisé et qu’il avait systématiquement fait connaître ses désaccords, consignés dans les deux procès-verbaux de difficultés établis. Il a ajouté qu’aucune faute ne se déduisait du fait que ce soit Mme [T], et non M. [Y], qui ait engagé la procédure de partage judiciaire quatorze ans après le jugement de divorce.
Outre ces justes motifs que la cour adopte, il y a lieu de constater que Mme [T] ne démontre pas davantage que M. [Y] ait refusé la vente de biens communs ou indivis ni que leur dégradation lui soit imputable.
Enfin, la demande de désignation d’un nouveau notaire commis, même si elle est rejetée comme étant infondée, ne caractérise pas un abus du droit d’ester en justice.
Par conséquent, le jugement entrepris sera également confirmé en ce qu’il a débouté Mme [T] de sa demande de dommages et intérêts.
Sur les frais et dépens
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
Il convient, eu égard à la nature du litige, de dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage et supportés par les parties à proportion de leurs droits dans le partage.
Il n’y a pas lieu de remettre en cause l’appréciation du premier juge qui a laissé à chaque partie la charge de ses dépens de première instance au regard de l’issue du litige et du caractère familial de la procédure.
A défaut de condamnation d’une partie aux dépens, il ne saurait être fait application de l’article 699 du code de procédure civile.
Pour le même motif, il ne saurait être fait application de l’article 700 du même code pour la procédure d’appel et le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes respectives fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.
Dispositif
PAR CES MOTIFS
Constate que l’effet dévolutif n’a pas opéré pour le chef de dispositif du jugement entrepris ayant dit n’y avoir lieu à désigner de nouveau un notaire en vue de procéder aux opérations de liquidation des intérêts patrimoniaux de M. [V] [Y] et Mme [R] [T] ;
Infirme le jugement prononcé le 16 mars 2021 par le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire d’Auxerre en ce qu’il a :
– dit que M. [V] [Y] est redevable envers la communauté d’une récompense de 97 273,7 euros, en raison de l’amélioration de son bien propre situé [Adresse 5] à [Localité 8],
– fixé à la somme de 21 855,61 euros le montant de la créance de M. [V] [Y] sur l’indivision post-communautaire,
– fixé à la somme de 6 851,61 euros le montant de la créance de Mme [R] [T] sur l’indivision post-communautaire ;
Statuant à nouveau,
Dit que M. [V] [Y] est redevable à la communauté, pour l’amélioration de son bien propre situé [Adresse 5] à [Localité 8], d’une récompense de 35 175 euros ;
Fixe à la somme de 11 647,36 euros le montant de la créance de M. [V] [Y] sur l’indivision post-communautaire ;
Fixe à la somme de 7 416,71 euros le montant de la créance de Mme [R] [T] sur l’indivision post-communautaire ;
Confirme le jugement prononcé le 16 mars 2021 par le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire d’Auxerre en tous ses autres chefs de dispositif dévolus à la cour ;
Dit que les dépens d’appel seront employés en frais privilégiés de partage et supportés par les parties à proportion de leurs droits dans le partage ;
Rejette la demande de distraction des dépens au profit de la SELARL C. Durif Avocats formée par M. [V] [Y] ;
Rejette la demande de M. [V] [Y] au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rejette la demande de Mme [R] [T] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,