26 janvier 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
20/03023
Pôle 4 – Chambre 10
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 4 – Chambre 10
ARRÊT DU 26 JANVIER 2023
(n° , 5 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/03023 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBO3X
Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Novembre 2019 – Tribunal de Grande Instance de Bobigny – RG n° 19/01146
APPELANT
Monsieur [J] [B]
Né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 7] (Algérie)
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représenté et assisté par Me Thierry VALLAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D0069
INTIMÉ
Monsieur [P] [B]
Né le [Date naissance 2] 1951 à [Localité 6] (Algérie)
[Adresse 8]
[Adresse 8]
[Localité 4]
Représenté et assisté à l’audience de Me Samia Sarah CHERFAOUI, avocat au barreau de PARIS, toque : A360
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été plaidée le 22 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Laurent NAJEM, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Florence PAPIN, Présidente
Madame Valérie MORLET, Conseillère
Monsieur Laurent NAJEM, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mme Marylène BOGAERS
ARRÊT :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Florence PAPIN, Présidente et par Florence GREGORI, greffier, présent lors de la mise à disposition.
Exposé du litige
***
EXPOSE DU LITIGE
Par exploit d’huissier en date du 1er juin 2018, M. [P] [B] a fait assigner M. [J] [B], son neveu, devant le tribunal de grande instance de Bobigny, afin d’obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 53 000 euros que le premier lui aurait prêtée.
Le 26 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Bobigny a :
Déclaré M. [P] [B] recevable et partiellement bien fondé en ses demandes à l’encontre de M. [J] [B]
Condamné M. [J] [B] à payer à M. [P] [B]
1°) la somme principale de 53 000 euros assortie des intérêts de retard calculés au taux légal à compter de la présente décision
2°) la somme de 3 000 euros au titre d’indemnité de procédure sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
Condamné M [J] [B] aux entiers dépens
Ordonné l’exécution provisoire du jugement
Débouté les parties du surplus de leurs prétentions, et notamment M [P] [B] de sa demande de condamnation de M [J] [B] à lui payer la somme de 5 000 Euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et M [J] [B] de sa demande reconventionnelle en condamnation de M. [P] [B] à lui payer une indemnité de procédure sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
M. [J] [B] a interjeté appel de cette décision par déclaration du 9 février 2020.
Moyens
Par ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 13 mai 2020, M. [J] [B] demande à la cour de :
– Déclarer l’appel de M. [J] recevable
– Infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Bobigny du 26 novembre 2019
– Constater l’irrégularité de la reconnaissance de dette faute de mentions requises par la loi.
– Déclarer M. [P] [B] mal fondé en toutes ses demandes, fins et conclusions.
– L’en débouter.
– Condamner M. [P] [B] à payer à M. [J] [B] une somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Le condamner aux entiers dépens.
Il se prévaut d’un arrêt de la Cour de cassation s’agissant de l’obligation de faire figurer le montant de la dette en toutes lettres et en chiffres dans une reconnaissance de dettes, ce qui n’est pas le cas de l’acte produit. Il estime que le tribunal n’a pas tiré les conséquences qui s’imposent de cette constatation.
Il fait valoir qu’il n’existe aucun acte de prêt ; que la reconnaissance n’émane pas du débiteur prétendu ; que la preuve du déblocage des fonds n’est pas rapportée, au visa de l’article 1353 du code civil.
Par ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 10 août 2020, M. [P] [B] demande à la cour de :
– Déclarer M. [B] [P] recevable et bien fondé,
– Confirmer le jugement en date du 26 Novembre 2019 sauf en ce qu’il a rejeté la demande de dommages et intérêts de l’intimé,
– Débouter M. [B] [J] de toutes ses demandes fins et conclusions,
– Le condamner à payer à M. [B] [P] la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi
– Le condamner à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Dire que M. [B] [J] devra prendre en charge tous les frais en application du paragraphe 3-2 de la reconnaissance de dette du 25 Juin 2016,
– Le condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel,
– Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
A titre subsidiaire,
– Dans le cas où la cour estimerait que les preuves rapportées par M. [B] [P] ne sont pas suffisantes,
Ordonner avant-dire droit la production par M. [B] [J] de ses relevés de comptes bancaires relatifs aux périodes d’encaissement des chèques de l’intimé, au besoin sous astreinte
Il fait valoir que la lettre du 2 janvier 2018 exprime clairement la qualité de débiteur de l’intimé envers son oncle. Il rappelle qu’il existait une première reconnaissance de dette en date du 20 novembre 2014 à hauteur de 20 000 euros.
Il considère qu’en l’absence de certaines mentions manuscrites, l’acte peut constituer un commencement de preuve par écrit, complété par des éléments de preuve qu’il énumère, ce qui a été retenu par le tribunal.
Il fait valoir que la somme de 53 000 euros constituait ses économies et a profité à l’appelant pendant 6 années ; qu’il s’est heurté à l’insolvabilité soigneusement organisée de ce dernier ; qu’il est fondé à réclamer des dommages-intérêts.
La clôture a été prononcée le 12 octobre 2022.
Malgré une demande par message électronique du 23 novembre 2022, avec mention d’un délai de rigueur de 8 jours, M. [J] [B] n’a pas fait parvenir son dossier de plaidoirie au greffe.
Motivation
MOTIFS DE L’ARRÊT
Sur la reconnaissance de dette
Aux termes de l’article 1326 du code civil dans sa rédaction applicable au présent litige :
« L’acte juridique par lequel une seule partie s’engage envers une autre à lui payer une somme d’argent ou à lui livrer un bien fongible doit être constaté dans un titre qui comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence, l’acte sous seing privé vaut pour la somme écrite en toutes lettres. »
A l’appui de ses demandes, M. [P] [B] produit les pièces suivantes :
Un acte sous-seing privé du 20 novembre 2014 intitulé « reconnaissance de dette » et dactylographié aux termes duquel M. [J] [B] reconnaît devoir la somme de 20 000 euros. Cet acte comporte sa signature et la mention, quant à elle manuscrite : « Lu et approuvé Bon pour reconnaissance de dette à hauteur de vingt mille euros (20.000 €) ». Le débiteur s’engage à rembourser cette somme dans un délai de 24 mois.
Un second acte sous seing-privé et dactylographié en date du 25 juin 2016 pour la somme de 53 000 euros, avec la mention « Lu et approuvé » et la signature du débiteur, M. [J] [B]. Cet acte reprend le détail de huit chèques remis par le créancier, dont un chèque de 20 000 euros, le 5 février 2014, objet de la première reconnaissance de dette. Un nouveau délai de 24 mois est consenti au débiteur pour rembourser.
Cette seconde reconnaissance qui fonde la demande de M. [P] [B] ne comporte pas, contrairement à la première, la mention en lettres et chiffres de la somme prêtée mais elle est utilement complétée par l’acte du 20 novembre 2014, quant à lui conforme aux dispositions de l’article 1326 du code civil, une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 13 octobre 2017 (présentée le lendemain), les relevés bancaires de l’intimé qui mentionnent les chèques visés (avec numéros correspondants) dans la reconnaissance et leurs numéros.
Dans un courrier du 2 janvier 2018, M. [J] [B] en réponse à une relance du 27 décembre 2007, écrit :
« Vous n’ignorez pas le contexte dans lequel ces différents prêts m’ont été accordés. La procédure collective dont a fait l’objet la société OUMENA est connue par vous-même et toute notre famille.
Mon compte courant d’associé me sera remboursé suivant des procédures non initiées pour le moment. C’est la raison pour laquelle, je vous demande de patienter, il n’est pas exclu qu’il puisse y avoir une cession partielle de parts sociales. Je m’engage à vous régler en premier selon un échéancier dépendant étroitement de la capacité de la société à me rembourser mon compte courant.
On en discutera sitôt la concrétisation de la cession de parts sociales.
J’espère vous avoir répondu dans le respect de la loyauté que je vous dois. » (‘).
Dans ce courrier, l’existence des prêts n’est pas contestée, l’obligation de remboursement qui en résulte, pas davantage.
L’ensemble de ces éléments, ainsi que le premier juge l’a retenu, complète l’acte sous-seing privé en date du 25 juin 2016 qui peut valoir comme commencement de preuve par écrit au sens de l’article 1347 du code civil, et démontre l’existence de la dette de 53 000 euros de M. [J] [B] envers son oncle, M. [P] [B] ainsi que l’obligation de le rembourser.
La décision sera confirmée en ce qu’elle a condamné M. [J] [B] à payer la somme de 53 000 euros avec intérêts de retard à compter de ladite décision.
Sur les dommages et intérêts
M. [P] [B] réclame la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour un préjudice dont il ne définit pas la nature.
Il fait valoir qu’il s’est heurté à l’insolvabilité organisée de l’appelant par la clôture de deux comptes bancaires et la dépréciation des parts sociales de l’appelant dans la société OUMENA créée avec son aide. Il ne justifie de ces deux points par aucune pièce.
Le préjudice ainsi allégué n’est pas suffisamment étayé. La décision sera également confirmée en ce qu’elle a rejeté la demande à ce titre.
Sur les demandes accessoires
Les condamnations prononcées en première instance au titre des dépens et frais irrépétibles seront confirmées. A hauteur d’appel, M. [J] [B] sera condamné à payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
L’intimé sollicite en outre la condamnation de l’appelant à supporter tous autres frais en vertu de l’article 3-2 de la reconnaissance de dettes qui stipule « que tous honoraires d’encaissement, tous honoraires particuliers d’Huissiers, Avocats, Conseils ou autres chargés du recouvrement de la présente créance en principal et accessoires en cas de poursuites, seront supportés par le débiteur ».
Au-delà des dépens et des frais irrépétibles au titre desquels l’appelant est déjà condamné, cette demande apparaît indéterminée en ce qu’elle n’est nullement circonscrite à des frais précis et elle serait de nature à laisser à l’intimé la libre appréciation des sommes en question.
M. [P] [B] en sera débouté.
Dispositif
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe
Confirme la décision déférée en ces dispositions soumises à la cour ;
Y ajoutant
Condamne M. [J] [B] à payer à M. [P] [B] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [J] [B] aux dépens de l’instance d’appel ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE