Comptes courants d’associés : 24 janvier 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/05527

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Comptes courants d’associés : 24 janvier 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/05527

24 janvier 2023
Cour d’appel de Versailles
RG
21/05527

13e chambre

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 38A

13e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 24 JANVIER 2023

N° RG 21/05527

N° Portalis DBV3-V-B7F-UXDR

AFFAIRE :

[O] [H]

C/

S.A.R.L. HOTEL MODERNE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Juin 2021 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2020F01606

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Julie BARRERE

Me Pierre-Antoine CALS

TC NANTERRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT QUATRE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur [O] [H]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Julie BARRERE, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 638

Représentant : Me Damien CHEVRIER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0920

APPELANT

****************

S.A.R.L. HOTEL MODERNE

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Pierre-Antoine CALS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 719

Représentant : Me Barthélémy LEMIALE de l’AARPI VALMY AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0386

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 29 Novembre 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Véronique MULLER, magistrat honoraire chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

Madame Véronique MULLER, magistrat honoraire,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine NOLIN,

Le 17 novembre 2015, la SARL Hôtel Moderne et M. [N] [X] ont constitué, à parts égales (50 parts sociales chacun), la SARL KJ ayant une activité de restauration rapide.

Le 12 juillet 2016, M. [X] et la société Hôtel Moderne ont cédé à M. [O] [H] 90 parts sociales de la société KJ (pour un prix total de 900 euros), la société Hôtel Moderne conservant 10 parts.

Le même jour, la société Hôtel Moderne a cédé à M. [H] la créance qu’elle détenait sur la société KJ, au titre de son compte courant associé, pour un montant de 184 890,48 euros. Cette cession de créance a été consentie pour un montant de 50 000 euros dont M. [H] devait s’acquitter auprès de la société Hôtel Moderne moyennant 36 mensualités successives de 1410,41 euros intérêts compris, la première échéance devant intervenir le 1er août 2016 et la dernière échéance le 1er juillet 2019.

M. [H] ne s’est acquitté d’aucune de ces échéances, malgré une mise en demeure du 12 juillet 2017.

Le tribunal de commerce de Nanterre, par jugement réputé contradictoire du 7 mars 2018, a condamné M. [H] au paiement de la somme de 50 774,76 euros intérêts compris au profit de la société Hôtel Moderne, lequel jugement est devenu non avenu, faute d’avoir été signifié à M. [H] dans les délais requis.

Par jugement du 3 septembre 2019, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé l’ouverture de la liquidation judiciaire de la société KJ.

Par acte d’huissier du 2 novembre 2020, la société Hôtel Moderne a assigné M. [H] devant le tribunal de commerce de Nanterre, lequel, par jugement contradictoire assorti de l’exécution provisoire du 24 juin 2021 a :

– déclaré recevable l’instance engagée par la société Hôtel Moderne ;

– débouté M. [H] de ses demandes de nullité de l’acte de cession de créance ;

– condamné M. [H] à payer à la société Hôtel Moderne la somme de 50 776,76 euros en deniers ou quittance, majorée des intérêts au taux de 1% majorée de trois points à compter du l2 juillet 2017 ;

– débouté la société Hôtel Moderne de sa demande de dommages et intérêts ;

– débouté M. [H] de sa demande de remboursement de la somme de 3 000 euros et de sa demande de mainlevée du gage du véhicule ;

– condamné M. [H] à payer à la société Hôtel Moderne la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné M. [H] aux entiers dépens.

Par déclaration du 2 septembre 2021, M. [H] a interjeté appel du jugement.

Moyens

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 26 novembre 2021, il demande à la cour de :

– infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;

En conséquence,

– dire et juger nul et de nul effet le contrat de cession de créance du 12 juillet 2016, et prononcer sa résolution pure et simple vu son absence de cause et le vice du consentement ;

– débouter la société Hôtel Moderne de l’ensemble de ses demandes ;

– condamner la société Hôtel Moderne au paiement d’une somme de 3 000 euros sauf à parfaire et à procéder aux formalités de mainlevée de la mesure de gage de son véhicule sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ;

– condamner la société Hôtel Moderne au paiement de la somme de 2 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’en tous les dépens que maître Damien Chevrier, avocat à la cour de Paris, pourra recouvrer directement en application de l’article 699 du même code.

La société Hôtel Moderne, dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 23 février 2022, demande à la cour de :

A titre principal,

– confirmer le jugement en ce qu’il a notamment condamné M. [H] à lui payer la somme de 50 774,76 euros ;

En conséquence

– rejeter toutes les demandes formées par M. [H] ;

– constater l’acquisition de la déchéance du terme du contrat de cession de créance du 12 juillet 2016 ;

– condamner M. [H] au paiement de la somme de 50 774,76 euros à son égard conformément aux stipulations du contrat de cession de créance du 12 juillet 2016, laquelle somme portera intérêts au taux de 1% majoré de trois points à compter de la sommation de payer du 12 juillet 2017, capitalisés au jour de la demande ;

A titre incident,

– infirmer le jugement en ce qu’il l’a débouté de sa demande de dommages et intérêts à l’encontre de M. [H] ;

En conséquence,

– condamner M. [H] au paiement de la somme de 5 000 euros à son égard à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice en raison de la résistance abusive au paiement ;

Et, en tout état de cause,

– condamner M. [H] à payer une somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 20 octobre 2022.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

Motivation

SUR CE,

Pour s’opposer à la demande en paiement formée à son encontre sur le fondement de la cession de créance, M. [H] sollicite la nullité de cette dernière. Il convient de répondre en premier lieu sur ce point, avant éventuellement de statuer sur la demande en paiement.

1 – sur l’action en nullité de la cession de créance

M. [H] soulève la nullité de la cession de créance pour défaut d’objet et de cause, au motif que la société Hôtel Moderne ne justifie d’aucune créance sur la société KJ, contestant l’existence du compte courant d’associé qu’elle invoque. Il soutient que la seule attestation de l’expert comptable est insuffisante à démontrer l’existence de ce compte courant d’associé, alors que la société Hôtel Moderne ne produit aucune pièce comptable. Il soulève également la nullité de la cession pour erreur et dol, en ce que la société Hôtel Moderne l’a sciemment trompé en lui faisant croire à l’existence d’un compte courant inexistant.

La société Hôtel Moderne soutient que sa créance sur la société KJ est parfaitement justifiée, l’attestation de l’expert-comptable étant annexée à l’acte de cession de créance, de sorte qu’il n’y a pas lieu à nullité de la cession.

Il résulte des articles 1109 et suivants du code civil, dans leur version applicable au présent litige, qu’il n’y a point de consentement valable si le consentement n’a été donné que par erreur ou s’il a été extorqué par violence ou surpris par dol. L’erreur n’est une cause de nullité de la convention que lorsqu’elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l’objet. Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manoeuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé.

L’article 1131 du même code dispose que l’obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet.

Il appartient à M. [H] qui invoque tantôt un défaut de cause, tantôt l’existence d’une erreur ou d’un dol, d’en rapporter la preuve. Ces différents moyens invoqués par M. [H] reposent tous sur l’inexistence de la créance qu’il a cependant accepté d’acquérir pour un prix de 50 000 euros.

L’acte de cession de créance daté du 12 juillet 2016, enregistré le 18 juillet 2016 à la direction des finances publiques, rappelle la création de la société KJ, et le fait que la société Hôtel Moderne est titulaire, dans les comptes de cette dernière, d’un compte courant d’associé à hauteur de 184 890,48 euros, étant ajouté : ‘ainsi qu’il résulte de l’attestation de la société VL Expertise Comptable annexée au présent acte.’ Il est ensuite précisé que la société Hôtel Moderne cède à M. [H] cette créance de 184 890,48 euros, ‘la cession étant consentie pour un prix forfaitaire, définitif et non révisable de 50.000 euros’.

Le jour de la cession, M. [H] était ainsi en possession de l’attestation de l’expert comptable selon laquelle la société KJ était débitrice d’une somme de 184 890,48 euros envers la société Hôtel Moderne, au titre de son compte courant d’associé. M. [H] n’a alors sollicité aucun document complémentaire, notamment comptable, ce qui tend à démontrer que cette attestation lui paraissait suffisante pour justifier de cette créance. M. [H] ne remet d’ailleurs pas en cause ce document qu’il ne critique en aucune manière, et ne précise pas en quoi il aurait été induit en erreur, ni en quoi consisterait le dol éventuel.

Si l’on devait, pour les seuls besoins du raisonnement, considérer comme M. [H] que la créance en compte courant est inexistante, ce dernier n’aurait alors pas manqué de le découvrir rapidement après la prise de contrôle de la société KJ et vérification de la comptabilité. Force est toutefois de constater que M. [H] ne produit lui-même aucun élément comptable permetttant de mettre en doute l’existence de la créance, et qu’il n’a jamais invoqué cette inexistence auprès du cédant, de sorte que ce moyen ne repose sur aucun fondement sérieux.

C’est ainsi en toute connaissance de cause, au vu d’une attestation non contestée d’un professionnel de la comptabilité, que M. [H] a accepté la cession de créance. Il n’est dès lors pas fondé à invoquer l’inexistence de cette créance, ni l’absence de cause de l’obligation souscrite.

M. [H] ne justifiant pas davantage d’une erreur ou d’un dol, le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande en nullité de la cession de créance.

Le jugement sera également confirmé en ce qu’il a débouté M. [H] de ses demandes relatives à l’exécution du premier jugement de mars 2018 (demandes de restitution d’une somme de 3.000 euros, et de mainlevée du gage du véhicule).

2 – sur la demande en paiement

M. [H] n’oppose aucun moyen, autre que ceux qui viennent d’être rejetés, en réponse à la demande en paiement formée par la société Hôtel Moderne.

En application des dispositions contractuelles, M. [H] est donc redevable de la somme de 50 774,76 euros (36 échéances de 1 410,41 euros). Par suite d’une erreur de calcul, le premier juge a toutefois condamné M. [H] au paiement de la somme de 50 776,76 euros, de sorte que le jugement sera infirmé sur le quantum de la condamnation. Cette somme portera intérêt au taux contractuel de 1% majoré de trois points à compter de la sommation de payer du 12 juillet 2017, outre capitalisation des intérêts.

La société Hôtel Moderne forme un appel incident sur le rejet, par le premier juge, de sa demande indemnitaire, invoquant un important préjudice dans la mesure où elle n’a pu bénéficier de son patrimoine. La société Hôtel Moderne ne justifie toutefois d’aucun préjudice distinct du simple retard de paiement déjà indemnisé par l’octroi d’intérêts moratoires, de sorte que sa demande à ce titre sera rejetée, le jugement étant confirmé de ce chef.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 24 juin 2021 sur le quantum de la condamnation prononcée à l’encontre de M. [O] [H],

Et statuant à nouveau de ce chef,

Condamne M. [O] [H] à payer à la société Hôtel Moderne la somme de 50 774,76 euros, outre intérêts au taux de 1% majoré de 3 points à compter du 12 juillet 2017, avec capitalisation des intérêts,

Confirme le jugement pour le surplus,

Et y ajoutant,

Condamne M. [O] [H] à payer à la société Hôtel Moderne la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [O] [H] aux dépens de la procédure d’appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller faisant fonction de Président, et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le conseiller faisant fonction de président,

 

 


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