23 mars 2023
Cour d’appel de Bourges
RG n°
22/01012
1ère Chambre
SM/MC
COPIE OFFICIEUSE
à :
– PROCUREUR GéNéRAL
LE : 23 MARS 2023
Notifications parties le 23.03.2023
COUR D’APPEL DE BOURGES
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 23 MARS 2023
N° 140 – 6 Pages
N° RG 22/01012 – N° Portalis DBVD-V-B7G-DPXE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du tribunal de commerce de NEVERS en date du 19 Septembre 2022
PARTIES EN CAUSE :
I – M. PROCUREUR GENERAL, près la Cour d’Appel de BOURGES
[Adresse 7]
[Localité 2]
Représenté par M. BONNEFOY, Avocat Général
APPELANT suivant déclaration du 28/09/2022
II – S.E.L.A.R.L. J.S.A, prise en la personne de Me [T] [X], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social :
[Adresse 1]
[Localité 6]
non représentée
à laquelle la déclaration d’appel et les conclusions ont été signifiés suivant actes d’huissier des 06 décembre et 16 décembre 2022 remis à personne habilitée.
INTIMÉE
III – S.A.R.L. ACQUA E LUCE, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social :
[Adresse 4]
[Localité 5]
non représentée
à laquelle la déclaration d’appel et les conclusions ont été signifiés suivant actes d’huissier des 01 décembre et 03 décembre 2022 remis à personne habilitée
INTIMÉE
23 MARS 2023
N° 140 /2
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 Mars 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. TESSIER-FLOHIC, Président chargé du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. TESSIER-FLOHIC Président de Chambre
M. PERINETTI Conseiller
Mme CIABRINI Conseillère
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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme MAGIS
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ARRÊT : RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Exposé du litige
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EXPOSÉ DU LITIGE
Moyens
La société d’exercice libéral à responsabilité limitée ORAL CONCEPT située à [Localité 11], dont le seul associé est [U] [N] chirurgien-dentiste installé depuis 1991 et ayant constitué cette société en 2001, a sollicité l’ouverture d’une procédure de sauvegarde le 6 avril 2022.
Cette société rencontrait des difficultés depuis 2 ans en raison du premier confinement qui a conduit à des retards de paiement de cotisations URSSAF et de caisse de retraite, mais aussi à des difficultés de paiement des remboursements d’investissements de matériels neufs.
[U] [N] rappelait avoir été victime d’un grave accident ayant entraîné un arrêt de travail de 6 mois et l’obligation de rechercher un remplaçant qui ne travaillait cependant que pendant 35 heures par semaine réduisant ainsi le chiffre d’affaires antérieur.
Le dentiste exposait en outre qu’il avait fait l’objet d’investissements malheureux au cours de ces 3 dernières années, par l’achat de 250’000 € de bitcoins, dont la valeur n’avait cessé de baisser et par l’achat d’une maison en Corse affectée de vices cachés, ces deux investissements malheureux donnant lieu à des procédures judiciaires.
C’est dans ces conditions que par jugement en date du 2 juin 2022, le tribunal judiciaire de Nevers ouvrait au bénéfice de la SELARL ORAL CONCEPT une procédure de redressement judiciaire fixant provisoirement la date de cessation des paiements au 6 avril 2022 et ouvrant une période d’observation pendant 6 mois avec poursuite d’activité et désignation de la SELARL JSA en qualité de mandataire judiciaire avec désignation de l’un des membres de la juridiction en qualité de juge commissaire.
Par jugement du 1er septembre 2022, la procédure de redressement judiciaire était étendue à [U] [N] le tribunal constatant l’existence d’un compte courant associé de 357’926,49 € et un transfert des actifs de la société vers le patrimoine personnel de ce dernier.
Il était :
– ordonné la jonction de cette procédure avec celle déjà ouverte au bénéfice de la SELARL ORAL CONCEPT,
– constaté la confusion des patrimoines et des passifs entre la personne morale et la personne physique,
– ordonné l’extension de la procédure de redressement judiciaire ouvert au bénéfice de la société à [U] [N].
Par déclaration au greffe de la chambre commerciale de la cour d’appel du 28 septembre 2022, le parquet de Nevers interjetait appel contre cette dernière décision.
Il était sollicité la signification de cet appel à la société ACQUA e LUCE prise en la personne de son gérant ainsi qu’à la SELARL JSA prise en la personne de [T] [X].
L’appel portait sur la désignation du mandataire judiciaire dans le cadre d’un souci de cohérence et de bonne administration de la justice, le parquet estimant qu’il convenait de désigner en lieu et place de Maître [T] [X] mandataire judiciaire au sein de la SELARL JSA, Maître [S] [Y], qui exerce la même profession au sein de la même société.
Le parquet général expose que la gérante de la société ACQUA E LUCE, qui est la société propriétaire de la maison de Corse pour laquelle la gérante, [Z] [P] ép. [N] possède 49 % des actions du capital de la société tandis que [U] [N] en possède 50 % et que ce dernier est en outre gérant de 4 autres sociétés dont la SELARL ORAL CONCEPT pour laquelle le mandataire judiciaire est Maître [S] [Y].
Le parquet général estime agir dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice afin d’éviter que deux mandataires judiciaires différents aient à connaître concurremment d’une procédure.
En effet, il résulte du rapport de Maître [T] [X] du 8 novembre 2022 que le passif de la société ACQUA e LUCE serait de 884’000 €, et serait constitué pour partie du compte courant d’associé des époux [N] et d’une créance de la société ORAL CONCEPT.
Il justifiait ainsi la nécessité d’une désignation d’un seul et unique mandataire judiciaire pour permettre de mieux vérifier les flux existants entre les personnes physiques et morales.
En conséquence, il sollicitait la réformation du jugement du 19 septembre 2022 afin de désigner en qualité de mandataire judiciaire de la société ACQUA E LUCE la SELARL JSA prise cette fois en la personne de Maître [S] [Y] en lieu et place de Maître [T] [X].
Le mandataire judiciaire Monsieur [T] [X] ne s’oppose pas à ce que pour des raisons de cohérence l’ensemble des procédures soient suivies par le même associé au sein de la SELARL JSA, même si actuellement, il est estimé qu’il existe une cohérence suffisante au sein du même cabinet pour connaître de ces 2 procédures.
L’affaire suivant la procédure rapide en application des dispositions de l’article 905 du code de procédure civile a été appelée à l’audience du 8 mars 2023 et le délibéré a été mis à disposition des parties le 23 mars 2023.
Motivation
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il ressort des premiers éléments du rapport sur la procédure de redressement judiciaire de la SELARL ORAL CONCEPT que celle-ci est constituée d’un capital social réparti en une part au bénéfice de [U] [N] gérant, et 1819 par au bénéfice de la SCFPL CARPE DIEM immatriculé à Nevers en mars 2016 et dans laquelle [U] [N] dispose aussi de parts.
Ce dernier est en outre gérant des sociétés SCM AESCULAP et SCI IRIS.
Actuellement, le passif de la SELARL ORAL CONCEPT s’élève hors contestation à la somme de 205’159,14 €.
L’entreprise n’est propriétaire d’aucun actif incorporel, les matériels étant actuellement acquis dans le cadre de contrats de location avec option d’achat. La SELARL exerce au sein des locaux de la SCI IRIS dont [U] [N] est cogérant avec Monsieur [I]. Les loyers sont payés par la SCM AESCULAP dont les cogérants sont aussi [U] [N] et M. [I].
La SELARL est locataire auprès de la société Medilease de l’ensemble du matériel professionnel.
Les premières perspectives posées par le mandataire judiciaire font état de charges d’exploitation supérieures au chiffre d’affaires actuel au 2 août 2022.
Les éléments relatifs à la SARL ACQUA E LUCE en charge de location de logement dont Madame [Z] [P]-[N] actuelle gérante détient 50 % -1 action de la société et [U] [N] 50 % plus une action, montrent que le compte courant d’associé serait créditeur d’une somme de 172’331,56 €.
La société est propriétaire de deux biens immobiliers à savoir :
– une maison de 4 pièces située sur la commune de [Localité 10] ([Adresse 3]) acquise au moyen d’un emprunt de 75’000 € et donné à bail pour un loyer mensuel de 550 €.
– Une maison d’habitation d’un étage sur rez-de-chaussée avec 5 pièces principales, terrain et piscine bien situé à [Localité 8] (au [Adresse 9]) intégralement financée par un emprunt de 670’000 €à usage de résidence secondaire. Des désordres rendant l’immeuble impropre à son usage (entrées d’eau par le toit) ont généré une action devant le tribunal judiciaire d’Ajaccio et l’abondement par les associés, de fonds à cette société sans cependant qu’elle ne règle les emprunts ayant servi à financer l’immeuble et ce, depuis décembre 2021.
La société ACQUA E LUCE est débitrice d’une somme de 49’026,95 € au 30 juin 2021 envers la SELARL ORAL CONCEPT et un compte courant créditeur au 31 décembre 2021 sur [U] [N] et [Z] [P]-[N] d’un montant de 172’000 €.
Il existe donc dans le cadre d’une bonne administration de la justice une nécessaire coordination dans la connaissance et la gestion éventuelle du suivi de la SARL ACQUA E LUCE avec la SELARL ORAL CONCEPT, qui passe outre par la désignation d’un mandataire judiciaire identique dans le cadre du suivi de ces deux entités.
Il convient en conséquence de réformer le jugement du tribunal judiciaire de Nevers en date du 19 septembre 2022 mais seulement en ce qu’il désigne en qualité de mandataire judiciaire la SELARL JSA prise en la personne de Me [S] [Y] en lieu et place de Me [T] [X].
Pour le surplus la décision doit être confirmée
Dispositif
PAR CES MOTIFS
La cour,
– Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il désigne Me [T] [X] mandataire judiciaire de la SELARL JSA et désigne en ses lieu et place Me [S] [Y], sans changement de mission.
– Laisse les dépens de l’instance à la charge du Trésor Public.
L’arrêt a été signé par M. TESSIER-FLOHIC, Président, et par Mme MAGIS, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président
S. MAGIS A. TESSIER-FLOHIC