20 décembre 2022
Cour d’appel de Caen
RG n°
22/00071
Référés
N° RG 22/00071 – N° Portalis DBVC-V-B7G-HDDQ
COUR D’APPEL DE CAEN
Minute n° 2022/78
PREMIÈRE PRÉSIDENCE
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU 20 DECEMBRE 2022
DEMANDEUR AU RÉFÉRÉ :
Monsieur [K] [E] [Z] [U]
[Adresse 2]
[Localité 3]
comparant assisté de Me Bruno HECKMANN, avocat au barreau de PARIS et
assisté de Me Laurence MARTIN, avocat postulant au barreau de CAEN
DÉFENDEURS AU RÉFÉRÉ :
Monsieur [B] [M]
en qualité d’associé et de gérant des sociétés CEVEMO et MOCEVE
[Adresse 5]
[Localité 1]
non comparant représenté par Me Alain LANIECE, avocat au barreau de CAEN
Madame [P] [M]
[Adresse 4]
[Localité 3]
non comparante représentée par Me Alain LANIECE, avocat au barreau de CAEN
COMPOSITION LORS DES DÉBATS :
PRÉSIDENT
Monsieur Dominique GARET
GREFFIERE
Madame Estelle FLEURY
DÉBATS
L’affaire a été appelée à l’audience publique du 15 Novembre 2022 au cours de laquelle elle a été débattue.
ORDONNANCE
Rendue publiquement le 20 Décembre 2022 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, et signée par Monsieur Dominique GARET, president de chambre délégué aux fonctions de premier président à la cour d’appel de Caen et par Madame Estelle FLEURY, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Exposé du litige
FAITS ET PROCEDURE
[K] [U] et Mme [P] [M] ont été mariés.
Ils étaient alors tous deux associés de deux sociétés civiles immobilières.
Par suite de leur divorce, un acte de liquidation-partage a été signé le 16 juillet 1998, qui prévoyait l’attribution de l’ensemble des parts sociales de M. [U] à Mme [M].
Suivant actes des 15 février et 7 avril 2003, Mme [M] a elle-même cédé une partie de ses parts à son frère, M. [B] [M].
Par acte du 26 février 2021, M. [K] [U], qui se prétend toujours titulaire de ses parts sociales, a fait assigner M. et Mme [M] devant le tribunal judiciaire de Caen afin d’être autorisé à les céder de même qu’à obtenir le remboursement d’un compte courant d’associé.
Par jugement du 14 juin 2022, le tribunal a :
– déclare l’action relative à la cession de parts sociales prescrite’;
– débouté M. [U] de sa demande relative au remboursement du compte courant;
– condamné M. [U] à payer à M. [M], en remboursement d’un prêt consenti par celui-ci, une somme de 105.700 € avec intérêts au taux contractuel de 2,36 % à compter du 25 juillet 2017;
– condamné M. [U] à payer à Mme [M], en remboursement de prêts consentis par celle-ci, les sommes de 60.000 € et 240.000 € avec intérêts au taux légal à compter du jugement;
– condamné M. [U] à payer à M. [M] une somme de 1.000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive;
– condamné M. [U] à payer à Mme [M] une somme de 1.000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive;
– condamné M. [U] à payer à M. [M] ainsi qu’à Mme [M] une somme de 1.000 € chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;
– condamné M. [U] aux dépens;
– ordonné l’exécution provisoire de la décision.
M. [U] a interjeté appel de ce jugement.
Par actes des 17 et 27 octobre 2022, M. [U] a fait assigner M. et Mme [M] devant le premier président de la cour d’appel de Caen, statuant en référé sur le fondement de l’article 514-3 du code de procédure civile, aux fins d’arrêt de l’exécution provisoire et de condamnation des intimés au paiement d’une somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
M. [U] soutient en substance qu’il existe des moyens sérieux de réformation du jugement en ce qu’il a déclaré prescrite son action relative à la cession de parts sociales, de même qu’en ce qu’il l’a débouté de ses demandes de dommages-intérêts et de remboursement de son compte courant d’associé.
Moyens
En outre, M. [U] invoque les conséquences manifestement excessives qu’entraînerait pour lui l’exécution provisoire du jugement, dès lors qu’il ne dispose que d’une pension mensuelle de retraite de 1.800 € et qu’aucune banque ne lui apporterait son concours pour financer cette exécution. A contrario, il redoute les difficultés auxquelles il serait confronté pour recouvrer les fonds dont il se serait inutilement dessaisi dans l’hypothèse où la cour réformerait le jugement.
Au contraire, M. et Mme [M] s’opposent à tout arrêt de l’exécution provisoire et réclament la condamnation de M. [U] à leur payer, à chacun, une somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Ils font d’abord observer que les condamnations prononcées à l’encontre de M. [U] sont aujourd’hui définitives puisque celui-ci a limité son appel et que, dès lors, l’appelant n’est pas recevable à solliciter l’arrêt de l’exécution provisoire relativement aux condamnations mises à sa charge.
Par ailleurs, ils font observer que M. [U] n’a pas présenté d’observations en première instance au sujet de l’exécution provisoire du jugement à intervenir, si ce n’est qu’il a même sollicité qu’elle soit prononcée.
Dès lors et en l’absence de circonstances, révélées postérieurement au jugement, qui lui feraient encourir des conséquences manifestement excessives en cas d’exécution provisoire de la décision, ils estiment que M. [U] n’est pas recevable à solliciter qu’elle soit arrêtée.
Motivation
SUR CE,
Il résulte des dispositions de l’article 514-3 du code de procédure civile, qu’en cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.
Contrairement à ce que les intimés soutiennent, et en dépit d’un appel improprement qualifié de «’limité’», il résulte de la déclaration d’appel que M. [U] a bien saisi la cour d’un appel à l’encontre de l’ensemble des dispositions du jugement déféré, notamment en ce qu’il l’a condamné:
– à payer à M. [M] une somme de 105.700 € avec intérêts au taux contractuel de 2,36 % à compter du 25 juillet 2017, pour solde d’un prêt;
– à payer à Mme [M] les sommes de 60.000 € et 240.000 € avec intérêts au taux légal à compter du jugement, pour solde de deux prêts;
– à payer à M. [M] une somme de 1.000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive;
– à payer à Mme [M] une somme de 1.000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive;
– aux dépens de l’instance;
– et à payer à M. [M] ainsi qu’à Mme [M] une somme de 1.000 € chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour étant saisie d’un appel relatif à ces différentes condamnations, M. [U] demeure donc recevable, à tout le moins au regard de l’effet dévolutif de l’appel, à solliciter l’arrêt de l’exécution provisoire y afférente.
Encore faut-il que les deux conditions principales en soient réunies, soit :
– d’une part qu’il existe des moyens sérieux de réformation du jugement,
– d’autre part que l’exécution provisoire soit de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives.
Ces deux conditions étant cumulatives, la seule absence de l’une d’entre elles interdit d’arrêter l’exécution provisoire dont il faut rappeler qu’elle est désormais la règle.
Or, il n’existe pas de moyens sérieux de réformation du jugement, du moins en ce qu’il a condamné M. [U] à payer à M. [M] la somme de 105.700 € et à Mme [M] les sommes de 60.000 € et 240.000 €, étant en effet rappelé :
– que ces condamnations correspondent à des soldes de prêts dont, jusqu’à ce jour, M. [U] n’a jamais contesté ni la réalité, ni la validité, pas plus qu’il n’a jamais soutenu qu’il les aurait déjà remboursés;
– que M. [U] s’abstient d’ailleurs de toute discussion quant à ces condamnations, se bornant à persister dans ses demandes relatives à la cession de parts sociales, au remboursement de son prétendu compte courant d’associé, ou encore dans sa demande de dommages-intérêts, toutes demandes dont le tribunal l’a débouté, certes à charge d’appel;
– qu’ainsi, sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire ne concerne en réalité que des condamnations dont il ne conteste pas le bien-fondé, quand bien même il a interjeté appel du jugement dans son intégralité;
– que dans ces conditions, et alors que l’intéressé ne peut pas s’exonérer de ses propres obligations, à savoir le remboursement de dettes qu’il ne conteste pas, il ne saurait utilement réclamer l’arrêt de l’exécution provisoire y afférente.
Il convient enfin d’observer que M. [U] ne remplit pas non plus les conditions d’une compensation entre ces dettes, non contestées dans leur principe comme dans leur montant, et les créances dont il se prévaut, lesquelles ne sont en effet ni certaines, ni liquides, encore moins exigibles.
D’ailleurs, il n’apparaît pas qu’il en ait sollicité le bénéfice devant le tribunal.
Ainsi, il résulte de ce qui précède que les conditions d’un arrêt de l’exécution provisoire ne sont pas réunies,. M. [U] sera donc débouté de sa demande tendant à ce qu’il soit ordonné.
Partie perdante, M. [U] sera condamné à payer à chacun des intimés une somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
De même, M. [U] supportera les dépens du présent référé.
Dispositif
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, et par ordonnance contradictoire :
– déboutons M. [K] [U] de sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire;
– condamnons M. [K] [U] à payer à M. [B] [M] une somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile;
– condamnons M. [K] [U] à payer à Mme [P] [M] une somme de 1.000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile;
– condamnons M. [K] [U] aux dépens.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE DELEGUE
Estelle FLEURY Dominique GARET