Comptes courants d’associés : 15 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/18237

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Comptes courants d’associés : 15 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/18237

15 février 2023
Cour d’appel de Paris
RG
22/18237

Pôle 1 – Chambre 5

Copies exécutoires République française

délivrées aux parties le : Au nom du peuple français

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 5

ORDONNANCE DU 15 FEVRIER 2023

(n° /2023)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/18237 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGTIU

Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 Août 2022 TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS – RG n° 19/02793

Nature de la décision : Réputée contradictoire

NOUS, Rachel LE COTTY, Conseillère, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assistée de Cécilie MARTEL, Greffière.

Vu l’assignation en référé délivrée à la requête de :

DEMANDEUR

S.A.S. MICAELA

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par Me Pierre-Alain TOUCHARD substituant Me Laurent-Haim BENOUAICH de la SCP BBO, avocat au barreau de PARIS, toque : R057

à

DÉFENDEURS

S.N.C. SPINECAIRE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Ariel GASCON RETORE, avocat au barreau de PARIS, toque : D0254

S.A.S. ISR 26

[Adresse 5]

[Localité 3]

Non comparante ni représentée à l’audience

Et après avoir appelé les parties lors des débats de l’audience publique du 18 Janvier 2023 :

Par jugement du 31 août 2022, le tribunal judiciaire de Paris a, notamment, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, constaté l’acquisition de la clause résolutoire du bail du 1er octobre 2017 liant les sociétés Micaela et Spinecaire à la date du 17 juillet 2021, ordonné l’expulsion de la société Micaela des locaux loués, désigné un expert pour déterminer la valeur locative des lieux loués, fixé le loyer provisionnel à compter du 7 mars 2019 jusqu’au 17 juillet 2021 au montant du loyer contractuel et condamné la société Micaela à payer à la société Spinecaire une indemnité d’occupation provisionnelle égale au montant du loyer provisionnel outre les charges et taxes qui auraient été dus en cas de poursuite du bail.

Le 6 octobre 2022, la société Micaela a interjeté appel de cette décision et, par actes des 7 et 9 novembre 2022, elle a assigné les sociétés Spinecaire et ISR 26 devant le premier président aux fins d’arrêt de l’exécution provisoire.

Moyens

Aux termes de ses conclusions déposées et développées oralement à l’audience du 18 janvier 2023, elle demande à la juridiction du premier président d’arrêter l’exécution provisoire du jugement du 31 août 2022 en ce qu’il :

– constate l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail commercial du 1er octobre 2017, à la date du 17 juillet 2021 ;

– ordonne, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les cinq mois de la signification du jugement, son expulsion des locaux loués, avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d’un serrurier ;

– dit que les meubles et objets meublants se trouvant sur place donneront lieu à l’application des dispositions des articles L. 433-1 et suivants et R. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution.

Elle demande également une indemnité de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et la condamnation de la société Spinecaire aux dépens.

Fondant sa demande sur l’article 524 ancien du code de procédure civile, elle expose que l’exécution provisoire du jugement frappé d’appel aurait des conséquences excessives car elle serait expulsée alors même qu’il existe des incohérences et contradictions dans la décision et qu’elle dispose potentiellement d’une créance de restitution d’un trop-versé de loyer.

Elle ajoute qu’elle exerce son activité de vente en gros dans les locaux loués, qu’elle ne dispose d’aucun autre local, que son activité en ligne était liée à la crise sanitaire et n’a généré qu’un chiffre d’affaires de 2.280 euros depuis 2020, et qu’elle a recherché des locaux mais ne peut faire face aux aménagements et frais qu’ils nécessitent pour un montant total de 153.000 euros.

Elle précise qu’elle doit rembourser son prêt garanti par l’Etat (PGE), ainsi qu’un prêt accordé par la Banque publique d’investissement (BPI) en lien avec la période de crise sanitaire et qu’elle a connu en 2022 une contraction importante de son chiffre d’affaires.

Aux termes de ses conclusions déposées et développées oralement à l’audience, la société Spinecaire sollicite le rejet des demandes de la société Micaela et sa condamnation à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir, pour l’essentiel, que l’expulsion ne constitue pas, par elle-même, une conséquence manifestement excessive et qu’en l’espèce, la société Micaela exerce la vente en ligne et ne démontre pas l’impossibilité de redéployer son activité dans d’autres locaux. Elle ajoute que, contrairement à ce que la demanderesse soutient, eu égard à la nature de son activité, les locaux ne nécessitent pas d’aménagements spécifiques et coûteux et que les frais liés à la location d’un nouveau local ne peuvent être considérés comme des conséquences manifestement excessives.

Elle soutient encore que les documents financiers produits par la société Micaela n’attestent pas d’une situation financière difficile et, au contraire, démontrent qu’elle dispose d’une trésorerie de 174.593 euros, le compte courant d’associé ne devant pas être déduit, contrairement à la présentation faite par l’expert-comptable.

Enfin, elle fait valoir que la société Micaela est irrecevable à fonder sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire sur les prétendues erreurs et contradictions du jugement, le bien fondé de la décision ne relevant pas de l’examen du premier président saisi en application de l’article 524 ancien du code de procédure civile.

A l’audience, les conseils des parties ont été entendus en leurs observations au soutien de leurs écritures.

Motivation

SUR CE,

Sur la demande d’arrêt de l’exécution provisoire

L’assignation devant le tribunal judiciaire de Paris ayant été délivrée en février et mars 2019, soit avant le 1er janvier 2020, la demande d’arrêt de l’exécution provisoire est soumise aux dispositions de l’article 524, 2°, du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, ainsi que l’exposent les parties.

Il résulte de ce texte que, lorsque l’exécution provisoire a été ordonnée, le premier président statuant en référé peut l’arrêter si elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.

Les conséquences manifestement excessives s’apprécient, en ce qui concerne les condamnations pécuniaires, par rapport aux facultés de paiement du débiteur et aux facultés de remboursement de la partie adverse en cas d’infirmation de la décision assortie de l’exécution provisoire.

Le risque de conséquences manifestement excessives suppose un préjudice irréparable et une situation irréversible en cas d’infirmation.

Il est rappelé que la présente juridiction n’est pas juge d’appel de la décision rendue en première instance et n’a donc aucunement à apprécier si la décision frappée d’appel comporte des erreurs de droit ou de fait ni à apprécier les chances de réformation.

La société Micaela fait état des conséquences excessives liées à son expulsion des locaux loués, mais l’expulsion ne constitue pas en elle-même une conséquence manifestement excessive et, en l’espèce, il résulte des pièces produites qu’elle a pu identifier un local à proximité immédiate du sien, [Adresse 1], dont le loyer mensuel, de 4.000 euros HT/HC, est inférieur à l’indemnité d’occupation qu’elle doit actuellement régler à la société Spinecaire.

Les honoraires et frais liés au déménagement (48.000 euros de caution bancaire et 15.000 euros de frais d’agence) n’excèdent pas les capacités financières de la société Micaela, au regard des documents comptables qu’elle produit, puisqu’elle dispose a minima d’une trésorerie nette de 94.002,37 euros, après déduction d’un compte courant d’associé de 80.591 euros.

Ainsi, après déduction des échéances d’emprunt au titre du PGE et du crédit consenti par la BPI, sa trésorerie disponible à un an est encore de 55.938 euros.

Elle soutient devoir réaliser des travaux dans ce nouveau local, à hauteur de 90.000 euros, mais cette nécessité n’est pas établie, encore moins l’urgence à mettre à neuf ce local avant tout emménagement.

Les pièces comptables produites ne démontrent pas de difficultés financières réelles ni d’endettement.

En conséquence, faute de rapporter la preuve de l’existence de conséquences manifestement excessives liées à l’exécution de la décision d’expulsion, la société Micaela sera déboutée de sa demande.

Sur les frais et dépens

La société Micaela sera tenue aux dépens de la présente instance et condamnée à indemniser la société Spinecaire des frais qu’elle a été contrainte d’exposer, à hauteur de la somme de 1.000 euros, sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

Rejetons la demande d’arrêt de l’exécution provisoire formée par la société Micaela ;

Condamnons la société Micaela aux dépens de la présente instance ;

La condamnons à payer à la société Spinecaire la somme de 1.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

ORDONNANCE rendue par Mme Rachel LE COTTY, Conseillère, assistée de Mme Cécilie MARTEL, greffière présente lors de la mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

La Greffière, La Conseillère

 

 


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