13 décembre 2022
Cour d’appel de Reims
RG n°
22/01498
1ere Chambre sect.Civile
ARRET N°
du 13 décembre 2022
R.G : N° RG 22/01498 – N° Portalis DBVQ-V-B7G-FGZ2
[W]
c/
[F]
MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D’APPEL DE REIMS
Formule exécutoire le :
à :
la SCP ACG & ASSOCIES
Me Olivier PINCON
COUR D’APPEL DE REIMS
CHAMBRE CIVILE-1° SECTION
ARRET DU 13 DECEMBRE 2022
APPELANT :
d’un jugement rendu le 07 juillet 2022 par le Tribunal de Commerce de REIMS
Monsieur [P] [W]
25 Rue Haute
51520 SARRY
Représenté par Me Gérard CHEMLA de la SCP ACG & ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS
INTIME :
Maître [B] [F] es qualité de Mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SARL COPART RCS 528.079.213,
Désignée à cette fonction par jugement du Tribunal de commerce de CHALONS EN CHAMPAGNE du 07 juillet 2022
34 rue des Moulins
51100 REIMS
Représenté par Me Olivier PINCON, avocat au barreau de REIMS
MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D’APPEL DE REIMS
201 rue des Capucins
51096 REIMS CEDEX/FRANCE
Représentée par Madame Caroline CHOPE, avocat général
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre
Madame Véronique MAUSSIRE, conseiller
Madame Florence MATHIEU, conseillère
GREFFIER :
Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffier lors des débats et du prononcé
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l’affaire a été régulièrement communiquée
DEBATS :
A l’audience publique du 14 novembre 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 13 décembre 2022,
ARRET :
Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 13 décembre 2022 et signé par Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre, et Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
Exposé du litige
* * * * *
Par jugement du 7 avril 2022, le tribunal de commerce de Châlons-en-Champagne a prononcé le redressement judiciaire de la SARL Copart dont l’activité est : négociations et transactions en vue de l’achat, la vente, la location d’immeubles et de fonds de commerce et la gestion immobilière.
Maître [F] ès-qualités de mandataire judiciaire a sollicité la conversion du redressement judiciaire de cette société en liquidation judiciaire.
Par jugement rendu le 7 juillet 2022, le tribunal de commerce de Châlons-en-Champagne a converti le redressement judiciaire de la SARL Copart en liquidation judiciaire, considérant que :
– le montant de l’endettement était a minima constitué à ce jour,
– en l’absence d’activité depuis le 31 janvier 2012 et en l’absence de disponibilités puisque le compte bancaire avait été clôturé depuis le 10 juillet 2019, il n’existait aucune perspective de redressement.
Par déclaration reçue le 28 juillet 2022, M. [W] ès-qualités de gérant de la SARL Copart, a formé appel de cette décision.
Moyens
Par conclusions notifiées le 26 septembre 2022, il demande à la cour de :
– infirmer le jugement déféré,
– constater que la SARL Copart n’a aucun passif au visa de l’article L 631-16 du code de commerce,
– mettre fin à la procédure de redressement judiciaire,
Subsidiairement,
– infirmer la décision déférée et renvoyer l’affaire devant le tribunal de commerce de Châlons-en-Champagne pour statuer en application de l’article L 631-16 du code de commerce,
– statuer ce que de droit sur les dépens.
L’appelant expose qu’il produit aux débats la comptabilité de la société de laquelle il ressort que le passif est constitué exclusivement du compte courant qu’il détient en sa qualité d’unique associé à l’encontre de la société ; qu’il n’entend pas réclamer à la société le montant de son compte courant sauf retour de la société à meilleure fortune ; qu’il demande donc à la cour de constater que la société n’a aucun passif, de sorte qu’il y a lieu de mettre fin à la procédure de redressement judiciaire pour extinction du passif.
Par conclusions notifiées le 14 octobre 2022, Maître [F] ès-qualités demande à la cour de:
– débouter M. [W] de son appel,
– confirmer le jugement,
– dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
L’intimée soutient que :
– sur la demande principale, le jugement de redressement judiciaire est définitif pour n’avoir pas fait l’objet d’un recours et il ne peut donc être mis fin à la procédure de redressement judiciaire,
– sur la demande subsidiaire, la cour est saisie d’un appel réformation et non d’un appel annulation et il ne peut donc y être fait droit,
– en tout état de cause, le redressement de la société est manifestement impossible au regard de l’article L 640-1 du code de commerce.
Par avis du 20 octobre 2022, le procureur général conclut à l’infirmation du jugement et au renvoi de la procédure devant le tribunal de commerce pour la poursuite de la période d’observation.
Il considère que si la décision d’ouverture de redressement judiciaire est définitive et que l’état de cessation des paiements ne peut plus être contesté, il est constant que le mandataire judiciaire n’a reçu aucune déclaration de créance, le passif de la société étant constitué d’un compte courant d’associé pour un montant de 81 284,43 euros; que ce passif n’est pas exigible tant qu’il n’est pas exigé par l’associé, ce qui est le cas en l’espèce; qu’il n’est donc pas justifié que le redressement de la société est manifestement impossible.
Motivation
MOTIFS DE LA DECISION :
La demande formée à titre principal par M. [W] aux fins de mettre fin à la procédure de redressement judiciaire :
Par application de l’article L 631-1 du code de commerce, il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L 631-2 ou L 631-3 qui, dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements.
En l’espèce, il ne peut être mis fin à la procédure de redressement judiciaire.
En effet, ainsi que le relève à juste titre Maître [F] ès-qualités, M. [W] ne peut plus remettre en cause le jugement du 7 avril 2022 qui a placé sa société en redressement judiciaire.
Cette décision, produite par le mandataire liquidateur, constate l’état de cessation des paiements de la SARL Copart fixé au 1er décembre 2020, soit l’impossibilité pour l’entreprise de faire face à son passif exigible avec son actif disponible.
Il n’en a pas formé appel et ce jugement est par conséquent définitif quant à l’état de cessation des paiements de cette société.
La demande formée à titre subsidiaire par M. [W] aux fins de faire application de l’article L 631-16 du code de commerce :
Aux termes de l’article L 631-16 du code de commerce, s’il apparaît, au cours de la période d’observation, que le débiteur dispose des sommes suffisantes pour désintéresser les créanciers et acquitter les frais et les dettes afférents à la procédure, le tribunal peut mettre fin à celle-ci.
L’article L 622-10 du même code dispose qu’à tout moment de la période d’observation, à la demande du débiteur, de l’administrateur, du mandataire judiciaire, du ministère public ou d’office, le tribunal convertit la procédure en un redressement judiciaire, si les conditions de l’article L 631-1 sont réunies ou prononce la liquidation judiciaire, si les conditions de l’article L 640-1 sont réunies.
Enfin, aux termes de l’article L 640-1 du code de commerce, il est institué une procédure de liquidation judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné à l’article L 640-2 en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.
Il a été précédemment jugé que la SARL Copart était en cessation des paiements, cet état n’a pas été contesté par M. [W] qui ne peut donc se prévaloir du fait qu’il abandonnerait maintenant la créance de compte courant d’associé qu’il détient sur la société.
A ce stade de la procédure collective, il n’est possible que de renouveler la période d’observation, d’arrêter un plan de redressement ou de prononcer la liquidation judiciaire de la société.
Il ressort des pièces versées aux débats que la SARL Copart est une « coquille vide » depuis 2012, élément reconnu par M. [W] dans un mail qu’il a adressé à Maître [F] le 27 avril 2022 et qui est repris dans le rapport du mandataire judiciaire puis dans le jugement.
En effet, la société n’a plus aucune activité depuis plus de dix ans, n’a plus de salarié depuis le 31 juillet 2012, n’a plus de compte bancaire depuis le 10 juillet 2019 et n’a plus d’actif depuis la fin de l’année 2019 (voir son bilan pour la période du 1er octobre 2019 au 30 septembre 2020).
Il est par conséquent suffisamment démontré par ces éléments que le redressement de la SARL Copart est manifestement impossible.
La décision ayant converti le redressement judiciaire de la société en liquidation judiciaire sera par conséquent confirmée.
Les dépens :
La décision sera confirmée.
Les dépens de la procédure d’appel seront employés en frais privilégiés de procédure collective.
Dispositif
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement et par arrêt contradictoire ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 7 juillet 2022 par le tribunal de commerce de Châlons-en-Champagne.
Y ajoutant ;
Dit que les dépens d’appel doivent être employés en frais privilégiés de procédure collective.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE