Comptes courants d’associés : 13 décembre 2022 Cour d’appel de Besançon RG n° 21/00082

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Comptes courants d’associés : 13 décembre 2022 Cour d’appel de Besançon RG n° 21/00082

13 décembre 2022
Cour d’appel de Besançon
RG
21/00082

1ère Chambre

ARRÊT N°

JFL/LZ

COUR D’APPEL DE BESANÇON

– 172 501 116 00013 –

ARRÊT DU 13 DECEMBRE 2022

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

Contradictoire

Audience publique du 11 octobre 2022

N° de rôle : N° RG 21/00082 – N° Portalis DBVG-V-B7F-EKOH

S/appel d’une décision du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LONS-LE-SAUNIER en date du 19 décembre 2018 [RG N° 16/00258]

Code affaire : 63C Demande en réparation des dommages causés par l’activité d’un expert en diagnostic, un commissaire aux comptes, un commissaire aux apports, un commissaire à la fusion ou un expert-comptable

[W] [P], [F] [P] C/ [T] [P]

PARTIES EN CAUSE :

Monsieur [W] [P]

né le [Date naissance 3] 1947 à [Localité 13]

demeurant [Adresse 7]

Représenté par Me Dominique PEYRONEL, avocat au barreau de JURA

Monsieur [F] [P]

né le [Date naissance 2] 1976 à [Localité 15]

demeurant [Adresse 6]

Représenté par Me Dominique PEYRONEL, avocat au barreau de JURA

APPELANTS

ET :

Monsieur [T] [P]

né le [Date naissance 5] 1965 à [Localité 16]

demeurant [Adresse 9]

Représenté par Me Stéphane BILLAUDEL de la SELARL FAVOULET – BILLAUDEL – DODANE, avocat au barreau de JURA

INTIMÉ

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre.

ASSESSEURS : Monsieur Jean-François LEVEQUE, conseiller et MONSIEUR Dominique Rubey, vice-président placé

GREFFIER : Madame Leila Zait, Greffier

Lors du délibéré :

PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre

ASSESSEURS : Monsieur Jean-François LEVEQUE, conseiller et MONSIEUR Dominique Rubey, vice-président placé

L’affaire, plaidée à l’audience du 11 octobre 2022 a été mise en délibéré au 13 décembre 2022. Les parties ont été avisées qu’à cette date l’arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

Exposé du litige

**************

Exposé du litige

[H] [G] [V], divorcée de son second mari M. [W] [P] condamné à lui payer une prestation compensatoire de 30 000 euros, non réglée, est décédée le [Date décès 4] 2021, laissant pour héritiers son fils issu d’un premier mariage M. [T] [P] et son second fils issu du second mariage M. [F] [P].

En l’absence d’accord sur le règlement tant du régime matrimonial des époux communs en biens divorcés que sur la succession de la défunte, M. [T] [P], par acte du 9 mars 2016, a fait assigner son père adoptif [W] [P] et son frère [F] [P] aux fins de partage judiciaire de la succession et du régime matrimonial, avec licitation d’un immeuble sis [Adresse 11] (39 200), et le tribunal de grande instance de Lons-le-Saunier, par jugement du 19 décembre 2018, a :

– ordonné l’ouverture du partage tant de la succession que de la communauté ;

– ordonné la licitation de l’immeuble dépendant de la succession ‘en prenant en considération le dispositif du présent jugement’ ;

– désigné un notaire pour ‘liquider la communauté’ ;

– désigné un juge pour surveiller les opérations de partage ;

– renvoyé les parties devant le notaire chargé de la succession ;

– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– rejeté toute autre demande ;

– dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de succession.

Pour statuer ainsi, le premier juge a retenu que la créance de prestation compensatoire impayée était ‘une charge’ de la succession ; que l’immeuble de [Localité 14], non partageable commodément au sens de l’article 1686 du code civil, devait être vendu aux enchères sur mise à prix de 64 000 euros ; que cette mise à prix résultait d’une estimation notariale à 80 000 euros, qui devait être retenue en tenant compte du fait que [W] [P] avait seul bénéficié de la jouissance du bien indivis, sans qu’il soit établi que les dégradations affectant le bien soient dues à son seul fait ; qu’il devait être tenu compte des provisions versées et du montant séquestré provenant du solde de la vente de deux maisons sur saisie ; que les parties s’accordaient pour évaluer à 3 000 euros diverses parcelles de prés et de bois à [Localité 17] ; que les parties s’accordaient pour intégrer au partage, pour une valeur de 6 621,12 euros sous réserve d’actualisation de la valeur du bien, la moitié de la récompense résultant de l’achat d’un bâtiment industriel par [W] [P] au moyen des fonds provenant d’une soulte successorale reçue par Mme [V] ; qu’il reviendrait au notaire d’actualiser l’inventaire des meubles réalisé le 6 juin 2005 à l’époque du divorce ; que les parties s’accordaient sur le montant des avoirs bancaires ; que [W] [P] devra rétablir au compte de l’indivision post-communautaire la somme de 10 026,51 euros au titre du solde d’un compte courant d’associé dont il a disposé en prélevant 1 500 euros et en abandonnant le reste à la société ; que le notaire devait vérifier et intégrer les sommes perçues par [W] [P] au titre de la location des maisons de [Localité 14] avant leur saisie ; qu’une indemnité d’occupation de l’immeuble de [Localité 14] était due ‘à la succession’ par [W] [P] à compter du 9 mars 2011, l’antériorité étant prescrite.

MM. [W] et [F] [P] ont interjeté appel de cette décision par déclaration parvenue au greffe le 15 janvier 2021. L’appel critique le jugement en ce qu’il aurait :

– dit qu’il fallait intégrer la créance de compte courant d’associé de la SARL [P] et Fils dans le partage,

– dit qu’il fallait intégrer les loyers perçus sur la location des deux maisons sises aux [Adresse 10] ;

– dit qu’une créance d’indemnité d’occupation depuis le 9 mars 2011 à la charge de [W] [P] devait être intégrée dans les opérations de compte.

Moyens

Par conclusions transmises le 14 avril 2021, les appelants, au visa des articles 815 et suivants du code civil et 1359 et suivants du code de procédure civile, notamment 1364, 1377 et 1378, demandent à la cour de :

– ‘infirmer partiellement le jugement déféré’, sans plus de précisions ;

– dire qu’il n’y a pas lieu à ‘réintégration’ dans le partage de la communauté, par [W] [P], de la somme de 10 026,51 euros abandonnée au titre du compte d’associé de la SARL [P] et Fils ;

– ordonner à [T] [P] de fournir les justificatifs de règlement des loyers et charges ‘à toutes fins’reconstituer avec exactitude un compte de gestion de l’indivision post-communautaire et ‘à toutes fins utiles’ d’examiner s’il existe un actif net résultant de cette gestion ‘aux fins d’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession et de la communauté’ ;

– dire qu’il n’y a pas lieu à réintégration d’une créance d’indemnité d’occupation car prescrite ;

– confirmer pour le surplus le jugement déféré ;

– rejeter toute demande pour frais irrépétibles et dire que les dépens passeront en frais privilégiés.

Les appelants soutiennent :

– que l’abandon du solde créditeur du compte courant d’associé, en date du 16 mai 2005, d’un montant de 10 026,51 euros, n’a pas à être réintégré dans l’actif de la communauté dès lors qu’il a servi à soutenir l’entreprise en difficulté, qui était un bien commun, et n’a été perdu qu’en raison du prononcé de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif ;

– qu’il n’a perçu les loyers que pour une seule des deux maisons, l’autre étant occupée par [T] [P] qui n’acquittait ni loyer ni charges ;

– qu’il a en revanche exposé d’importantes charges de sorte qu’il n’est pas acquis qu’un ‘actif net’ résulte de la gestion de ces biens ;

– qu’en conséquence [T] [P] devra justifier des ses règlements de loyers et charges ;

– que [W] [P] avait quitté le domicile conjugal le 1er mars 2007 et n’en a pas ensuite conservé la jouissance exclusive, de sorte qu’aucune indemnité n’est due pour la période postérieure ;

– que la demande est en outre irrecevable en application de la prescription quinquennale prévue à l’article 815-10 du code civil dont le délai a couru à compter du jour où le jugement de divorce a acquis force de chose jugée ou de l’arrêt confirmatif du divorce.

Les intimés, par conclusions transmises le 12 juillet 2021 portant appel incident, et au visa des mêmes textes que l’appelant, sauf l’article 1378, demandent à la cour de :

– infirmer le jugement en ce qu’il a limité la mission du notaire au partage de la communauté ;

– désigner le même notaire aux fins de liquider en outre la succession de Mme [V] ;

– confirmer le surplus ;

– dire qu’il sera fait masse des dépens avec distraction au profit des avocats constitués.

MM [W] et [F] [P] soutiennent :

– que le compte courant d’associé de [W] [P], qui détenait la moitié des parts de la société, était ‘composé de fonds de la communauté’ et a été abandonné unilatéralement à un tiers ;

– que ni la volonté de sauver l’entreprise ni le prononcé de la liquidation judiciaire ne légitiment cette perte pour la communauté et qu’en conséquence [W] [P] est débiteur de la moitié de cette somme à la succession ;

– que [W] [P] a géré les deux immeubles locatifs pendant les quatre années écoulées entre l’ordonnance de non-conciliation qui lui confiait cette gestion et la saisie des deux immeubles, de sorte que la succession est créancière de la moitié de l’actif net de cette gestion, qui reste effectivement à déterminer  ;

– que [W] [P] a occupé l’ancien domicile conjugal après le divorce et jusqu’à une date non établie, n’apportant pas la preuve qu’après le divorce il n’en bénéficiait plus, ni qu’il avait remis les clés aux autres indivisaires ;

– que l’action est recevable dès lors que la prescription a commencé à courir du jour où le jugement de divorce est passé en force de chose jugée, soit pour Mme [V] le 21 novembre 2010, un mois après la signification de l’arrêt ;

– que la désignation d’un notaire pour liquider la succession est nécessaire en application de l’article 1364 du code civil en raison de la complexité des opération ;

– que devra être désignée Me Nargaud ou son successeur, l’étude se trouvant ‘sous administration’.

Il est renvoyé aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs moyens de fait et de droit, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

L’instruction a été clôturée le 20 septembre 2022. L’affaire a été appelée à l’audience du 11 octobre 2022 et mise en délibéré au 13 décembre 2022.

Motivation

Motifs de la décision

Sur l’effet dévolutif de la déclaration d’appel

L’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s’opérant pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible, ainsi que le prévoit l’article 562 du code de procédure civile.

En l’espèce, la déclaration d’appel critique des chefs de jugement inexistants, le premier juge n’ayant pas statué, par omission, sur les chefs de litige qui auraient pu le conduire à dire, comme le lui reproche l’appelant, d’une part qu’il fallait intégrer la créance de compte courant d’associé de la SARL [P] et Fils dans le partage, d’autre part qu’il fallait intégrer les loyers perçus sur la location des deux maisons sises aux [Adresse 10], et enfin qu’une créance d’indemnité d’occupation depuis le 9 mars 2011 à la charge de [W] [P] devait être intégrée dans les opérations de compte.

En revanche, l’appel ne critique aucun des chefs de jugement existants.

La question se posant dès lors de savoir quels chefs de jugement ont pu être dévolus à la cour, la réouverture de débats sera ordonnée et l’affaire renvoyée à la mise en état.

Sur la médiation

La complexité du litige, son caractère familial, et l’aléa judiciaire, lequel résulte de l’éventualité que la cour estime n’être saisie d’aucun chef de litige et que les parties doivent alors envisager de saisir le premier juge d’une requête en omission de statuer et de faire éventuellement appel du nouveau jugement qui serait rendu sur cette requête, ce qui reporterait grandement l’issue du litige, la cour estime opportun de proposer sans attendre aux parties de résoudre leur différend par la médiation judiciaire.

A cette fin, la cour les invitera à rencontrer un médiateur qui leur présentera le processus de médiation et qui sera désigné par avance pour réaliser cette mesure si les parties l’acceptent.

Dispositif

Par ces motifs

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Rouvre les débats ;

Renvoie l’affaire à la mise en état ;

Désigne pour y procéder M. Jean-François Lévêque, conseiller ;

Invite les parties à conclure sur la question de savoir quels chefs de jugement ont été dévolus à la cour ;

Vu l’article’22-1’de la loi du 8 février 1995 modifié par la loi du 23 mars 2019, suivant lequel «’en tout état de la procédure, y compris en référé, lorsqu’il estime qu’une résolution amiable du litige est possible, le juge peut, s’il n’a pas recueilli l’accord des parties, leur enjoindre de rencontrer un médiateur qu’il désigne. Celui-ci informe les parties sur l’objet et le déroulement d’une mesure de médiation.» ;

Vu les articles’3 de la’loi n°’2019-222 du 23 mars 2019’de programmation’2018-2022 et de réforme pour la justice, 22-1 de la loi n°’95-125 du 8 février 1995, 131-1 et s. du code de procédure civile’;

Enjoint aux parties de rencontrer un médiateur ;

Désigne à cet effet M. [Y] [N], médiateur ([Adresse 8], [Courriel 12], [XXXXXXXX01]) ;

Donne mission au médiateur :

– d’expliquer aux parties le principe, le but et les modalités d’une mesure de médiation’;

– de recueillir par écrit leur consentement ou leur refus de cette mesure ;

Dit que dans l’hypothèse où au moins l’une des parties refuserait le principe de la médiation, le médiateur transmettra au tribunal les décisions écrites prises par chacune d’elles sur la proposition de médiation et cessera ses opérations, sans défraiement’;

Dit que dans l’hypothèse où les parties donneraient leur accord à la médiation ainsi proposée, le médiateur aura pour mission d’entendre les parties et de confronter leurs points de vue pour leur permettre de trouver une solution au conflit qui les oppose et pourra commencer, dès la consignation de la provision ci-après fixée, les opérations de médiation’;

Dit que la médiation devra alors être réalisée dans un délai de trois mois à compter de la première réunion plénière de médiation’; que ce délai pourra, le cas échéant, être renouvelé pour une période de trois mois à la demande du médiateur’;

Fixons à la somme de 1 401 euros le montant de la provision à valoir sur la rémunération du médiateur qui devra être consignée, par virement ou par chèque par chacune des parties, à parts égales, entre les mains du médiateur dans le délai d’un mois à compter de la présente décision, à peine de caducité de la désignation du médiateur’;

Dit que le médiateur devra informer la juridiction saisie de la date de la première réunion plénière, dès que celle-ci aura été arrêtée’;

Dit que dans le cas d’une médiation excédant la durée prévue ou de frais élevés (voyage, location de salle ou de matériel, par exemple) le médiateur pourra, avec l’accord des parties, aussitôt qu’elle apparaîtra justifiée, soumettre à la présente juridiction une demande tendant à la fixation d’un complément de consignation’;

Dit que le complément de consignation ainsi fixé sera versé directement dans les mains du médiateur’;

Dit que la partie éventuellement bénéficiaire de l’aide juridictionnelle sera dispensée de ce règlement par application de l’article’22, alinéa’3 de la loi du 8 février 1995, étant rappelé que la rétribution du médiateur relevant de l’aide juridictionnelle est fixée par le magistrat taxateur dans les conditions et plafonds fixés par l’art. 118-9 et suivants du décret n°’91-1266 du 19 décembre 1991, modifié par le décret n°’2016-1876 du 27 décembre 2016 ‘ art. 18 ;

Dit que le médiateur informera la juridiction saisie de tout incident affectant le bon déroulement de la médiation, dans le respect de la confidentialité de rigueur en la matière ;

Dit que le médiateur informera sans délai la juridiction saisie de l’issue de la médiation ;

Dit que l’affaire sera réexaminée par le conseiller de la mise en état à première demande et en tout cas à l’issue du délai de médiation ;

Dit que le présent arrêt sera notifié par le greffe au médiateur.

Ledit arrêt a été signé par M. Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Mme Leila Zait, greffier.

La greffière Le président de chambre

 

 


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