Comptes courants d’associés : 13 avril 2023 Cour d’appel de Caen RG n° 22/01600

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Comptes courants d’associés : 13 avril 2023 Cour d’appel de Caen RG n° 22/01600

13 avril 2023
Cour d’appel de Caen
RG
22/01600

2ème Chambre civile

AFFAIRE :N° RG 22/01600 –

N° Portalis DBVC-V-B7G-HAJX

 

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : DECISION en date du 17 Juin 2022 du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO,

JCP de COUTANCES – RG n° 21/01242

COUR D’APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 13 AVRIL 2023

APPELANT :

Monsieur [U] [G] [O] [Z]

né le [Date naissance 3] 1975 à [Localité 6]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté et assisté de Me Marie LE BRET, substituée par Me BRIERE, avocats au barreau de CAEN

INTIMES :

Maître [S] [L] mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de l’EARL DES LEGUMES BIO

[Adresse 5]

[Adresse 5]

représenté et assisté de Me Gaël BALAVOINE, substitué par Me REICHLING, avocats au barreau de CAEN

Madame [R] [M] épouse [Z]

née le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 6]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

non représentée, bien que régulièrement assignée

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme EMILY, Président de Chambre,

Mme COURTADE, Conseillère,

M. GOUARIN, Conseiller,

DÉBATS : A l’audience publique du 09 février 2023

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l’affaire a été régulièrement communiquée.

GREFFIER : Mme LE GALL, greffier

ARRÊT prononcé publiquement le 13 avril 2023 à 14h00 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Madame EMILY, président, et Mme LE GALL, greffier

Exposé du litige

* * *

EXPOSE DES FAITS, DE LA PROCEDURE ET DES PRETENTIONS

Le 4 août 2008, l’EARL Des légumes bio, ayant pour activité la production et la commercialisation de cultures maraîchères, a été constituée par M. [U] [Z] et Mme [R] [M], épouse [Z], désignés co-gérants et détenant chacun 380 parts sociales.

Le 16 janvier 2014, une procédure de règlement amiable a été ouverte à l’égard de l’EARL Des légumes bio, qui connaissait des difficultés de trésorerie.

Par jugement du 3 février 2016, le tribunal de grande instance de Coutances, sur assignation de la MSA, a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de l’EARL Des légumes bio.

Suivant jugement du 25 juillet 2017, cette juridiction a arrêté un plan de redressement judiciaire au profit de l’EARL Des légumes bio, sur une période de 14 ans, désignant Me [Y] [L] comme commissaire à l’exécution du plan.

Par jugement du 23 décembre 2020, la résolution de ce plan de redressement judiciaire a été prononcée et il a été ordonné la liquidation judiciaire de l’EARL Des légumes bio, Me [L] étant désigné mandataire liquidateur.

Selon jugement du 21 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Coutances a reporté la date de cessation des paiements de l’EARL Des légumes bio au 23 juin 2019.

Suivant acte d’huissier du 19 octobre 2021, Me [L], ès qualités, a fait assigner les époux [Z] devant le tribunal judiciaire de Coutances aux fins, notamment, de voir prononcer une mesure de faillite personnelle à leur encontre ou, à titre subsidiaire, une interdiction de gérer.

Par jugement du 17 juin 2022, le tribunal judiciaire de Coutances a :

– prononcé à l’égard de Mme [M], épouse [Z], une mesure de faillite personnelle d’une durée de 5 ans,

– prononcé à l’égard de M. [Z] une mesure de faillite personnelle d’une durée de 5 ans,

– dit que sa décision sera signifiée dans les 15 jours à la diligence du greffe aux personnes sanctionnées,

– dit que, indépendamment des mentions portées au casier judiciaire, le jugement fera l’objet des publicités prévues à l’article R. 621-8 du code de commerce et sera adressé aux personnes mentionnées à l’article R. 621-7 du même code,

– ordonné l’exécution provisoire,

– condamné solidairement les époux [Z] à payer à Me [L], ès qualités, la somme de 3.000 euros à titre d’indemnité de procédure ainsi qu’aux entiers dépens.

Selon déclaration du 24 juin 2022, M. [Z] a interjeté appel de cette décision.

Moyens

Par dernières conclusions du 31 janvier 2023, l’appelant demande à la cour d’infirmer le jugement attaqué sauf en ce qu’il a prononcé une mesure de faillite personnelle à l’égard de Mme [M], épouse [Z], statuant à nouveau, de débouter Me [L], ès qualités, de toutes ses prétentions à son encontre et de condamner ce dernier à lui verser la somme de 3.000 euros à titre d’indemnité de procédure ainsi qu’aux entiers dépens.

Par dernières conclusions du 31 janvier 2023, Me [L], ès qualités, demande à la cour de rejeter l’appel relevé par M. [Z], de confirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions et, y ajoutant, de condamner M. [Z] au paiement de la somme de 3.000 euros à titre d’indemnité de procédure ainsi qu’aux entiers dépens.

Le dossier a été communiqué au ministère public, lequel a, le 31 août 2022, indiqué s’en rapporter.

Mme [M], épouse [Z], n’a pas constitué avocat, la déclaration d’appel lui ayant été signifiée le 2 septembre 2022 à étude.

La mise en état a été clôturée le 1er février 2023.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens, il est référé aux dernières écritures des parties.

Motivation

MOTIFS DE LA DECISION

1. Sur la mesure de faillite personnelle

L’article L. 653-1 du code de commerce dans sa version applicable au litige dispose :

I. – Lorsqu’une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les dispositions du présent chapitre sont applicables :

1° Aux personnes physiques exerçant une activité commerciale ou artisanale, aux agriculteurs et à toute autre personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ;

2° Aux personnes physiques, dirigeants de droit ou de fait de personnes morales ;

3° Aux personnes physiques, représentants permanents de personnes morales, dirigeants des personnes morales définies au 2°.

Ces mêmes dispositions ne sont pas applicables aux personnes physiques ou dirigeants de personne morale, exerçant une activité professionnelle indépendante et, à ce titre, soumises à des règles disciplinaires.

II. – Les actions prévues par le présent chapitre se prescrivent par trois ans à compter du jugement qui prononce l’ouverture de la procédure mentionnée au I.

Selon l’article L. 653-2, la faillite personnelle emporte interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole ou toute entreprise ayant toute autre activité indépendante et toute personne morale.

Selon l’article L. 653-4, le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de tout dirigeant, de droit ou de fait, d’une personne morale, contre lequel a été relevé l’un des faits ci-après :

1° Avoir disposé des biens de la personne morale comme des siens propres ;

2° Sous le couvert de la personne morale masquant ses agissements, avoir fait des actes de commerce dans un intérêt personnel ;

3° Avoir fait des biens ou du crédit de la personne morale un usage contraire à l’intérêt de celle-ci à des fins prsonnelles ou pour favoriser une autre personne morale ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement ;

4° Avoir poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu’à la cessation des paiements de la personne morale ;

5° Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l’actif ou frauduleusement augmenté le passif de la personne morale.

L’article L. 653-5 dispose :

Le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de toute personne mentionnée à l’article L. 653-1 contre laquelle a été relevé l’un des faits ci-après :

1° Avoir exercé une activité commerciale, artisanale ou agricole ou une fonction de direction ou d’dministration d’une personne morale contrairement à une interdiction prévue par la loi ;

2° Avoir, dans l’intention d’éviter ou de retarder l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, fait des achats en vue d’une revente au-dessous du cours ou employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds ;

3° Avoir souscrit, pour le compte d’autrui, sans contrepartie, des engagements jugés trop importants au moment de leur conclusion, eu égard à la situation de l’entreprise ou de la personne morale ;

4° Avoir payé ou fait payer, après cessation des paiements et en connaissance de cause de celle-di, un créancier au préjudice des autres créanciers ;

5° Avoir, en s’abstenant volontairement de coopérer avec les organes de la procédure, fait obstacle à son bon déroulement ;

6° Avoir fait disparaître des documents comptables, ne pas avoir tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation, ou avoir tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables ;

7° Avoir déclaré sciemment, au nom d’un créancier, une créance supposé.

Selon l’article L. 653-8, dans les cas prévus aux articles L. 653-3 à L. 653-6, le tribunal peut prononcer, à la place de la faillite personnelle, l’interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci.

L’interdiction mentionnée au premier alinéa peut également être prononcée à l’encontre de toute personne mentionnée à l’article L. 653-1 qui, de mauvaise foi, n’aura pas remis au mandataire judiciaire à l’administrateur ou au liquidateur les renseignements qu’il est tenu de lui communiquer en application de l’article L. 622-6 dans le mois suivant le jugement d’ouverture ou qui aura, sciemment, manqué à l’obligation d’information prévue par le second alinéa de l’article L. 622-22.

Elle peut également être prononcée à l’encontre de toute personne mentionnée à l’article L. 653-1 qui a omis sciemment de demander l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements, sans avoir, par ailleurs, demandé l’ouverture d’une procédure de conciliation.

1.1 Sur la disposition des biens de la personne morale comme des siens propres

Pour prononcer la faillite personnelle de M. [Z] pour une durée de 5 ans, le tribunal a d’abord retenu qu’il avait disposé des biens de l’EARL Des légumes bio comme les siens propres en disposant d’un compte courant d’associé débiteur de 38.823,67 euros, en ayant une créance personnelle envers la société d’un montant de 218.567,42 euros. À cet égard, le tribunal a relevé que, si certaines sommes prélevées sur le compte courant d’associé correspondaient à des salaires et que ces sommes ont été remboursées lors de la perception des aides de l’État, un prélèvement de 10.000 euros a été effectué pour abonder le compte bancaire commun personnel des époux [Z] et le compte courant d’associé de l’appelant était déjà débiteur de 21.941 euros au début de la période, et que la créance personnelle de M. [Z] d’un montant de 218.567,42 euros existait dès 2019, soit avant la crise sanitaire.

L’appelant soutient que son compte courant d’associé mentionnait le montant de sa rémunération jusqu’à l’exercice clos le 31 décembre 2019 mais qu’en raison d’une omission de la société Cerfrance, cabinet comptable de la société agissant sous l’égide du liquidateur judiciaire, cette rémunération n’a plus été portée au crédit de son compte courant d’associé pour les exercices clos les 31 décembre 2020 et 2021 alors qu’il était dessaisi suite à la liquidation judiciaire de la société, ce qui explique la position débitrice de ce compte, celui-ci étant encore créditeur au 31 décembre 2018.

En outre, M. [Z] met en doute l’inscription au 1er janvier 2020 d’une somme de 20.000 euros au débit de son compte courant d’associé, conteste que les co-gérants aient bénéficié d’aides de l’État pour un montant de 21.000 euros qui n’auraient pas été déclarées ainsi que le virement d’une somme de 10.000 euros sur leur compte personnel le 31 décembre 2020, à une date à laquelle ils se trouvaient dessaisis.

Enfin, concernant la dette de 218.567,42 euros due par la société envers M. [Z], celui-ci reproche au liquidateur de ne pas en justifier la cause et produit une attestation de la société Cerfrance, comptable de la société, selon laquelle cette somme inscrite dans un compte 46 ‘débiteurs et créditeurs divers’ correspond aux dettes dues par l’EARL Des légumes bio à M. [Z] au titre de son exploitation agricole conventionnelle en entreprise individuelle antérieure à l’activité en bio entre la création de la société en 2008 et le 31 décembre 2013, la société ayant bénéficié du matériel et de la main-d »uvre de M. [Z] ainsi que du paiement des fermages par ce dernier.

Le liquidateur judiciaire réplique d’abord que si le prononcé de la liquidation judiciaire de la société a dessaisi M. [Z], il résulte des articles L. 641-3, L. 641-9 du code de commerce et 1844-7 7° du code civil que, jusqu’à la clôture des opérations de liquidation, la tenue de la comptabilité et les déclarations fiscales continuent d’incomber au gérant, ce qui est confirmé par une attestation de la société Cerfrance, comptable de la société, selon laquelle les comptes annuels ont été établis à partir des éléments transmis par les dirigeants de la société.

Il expose ensuite que, contrairement à ce que soutient l’appelant, le compte courant d’associé de M. [Z] tient compte de sa rémunération en tant que gérant, inscrite au crédit de ce compte, mais également d’un prélèvement supérieur au montant de la rémunération fixé par l’assemblée générale ordinaire, inscrit au débit de ce compte.

Enfin, cet intimé fait valoir que le compte 46 au nom de M. [Z] débiteur d’une somme de 218.567,42 euros existait déjà dans la comptabilité pour les années 2018 et 2019, que les comptes pour l’année 2020 et 2021 ont été établis par le comptable sur les indications des gérants et non du liquidateur.

Il ressort des productions, notamment des bilans comptables 2019 et 2020 ainsi que du grand livre 2020 établis par le comptable de la société à partir des éléments fournis par les époux [Z], co-gérants chargés de la tenue de la comptabilité de la société jusqu’à la clôture de la liquidation judiciaire, que M. [Z] a disposé des biens de l’EARL Des légumes bio comme des siens propres au sens de l’article L. 653-4 1° du code de commerce en détenant un compte courant d’associé débiteur et en prélevant une rémunération d’un montant supérieur à celui fixé par l’assemblée générale ordinaire et ce, en 2019 et 2020, avant l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.

L’existence d’un compte 46 débiteur au nom de M. [Z] ne saurait être retenue comme un motif de faillite personnelle, dès lors que le comptable de la société a justifié des mouvements de ce compte, destiné à recenser les opérations intervenues entre la société et un tiers ne rentrant pas dans une autre classe de compte, lesquels correspondent au transfert progressif de l’activité agricole conventionnelle exploitée par M. [Z] à l’EARL Des légumes bio.

1.2 Sur la poursuite abusive de l’exploitation déficitaire de la société

Le tribunal a considéré que M. [Z] avait poursuivi abusivement, dans son intérêt personnel caractérisé par les prélèvements personnels et le compte courant d’associé débiteur, l’exploitation déficitaire de l’EARL Des légumes bio, qui ne pouvait conduire qu’à la cessation des paiements de celle-ci, en ce qu’en sa qualité de gérant de droit il avait connaissance de la situation matérielle et financière de la société, bénéficiaire d’un plan de redressement depuis juillet 2017 et pour laquelle un bilan comptable était établi annuellement, que la situation financière de la société était assainie en 2017 avec une trésorerie positive et des résultats bénéficiaires ainsi que des résultats prévisionnels favorables, que dès 2018 les résultats sont devenus déficitaires, le compte bancaire de la société présentant un solde créditeur de seulement 2.221 euros et ce, avant même la survenance de la crise sanitaire, que si les deux premières annuités du plan de redressement ont été réglées, les cotisations MSA n’ont pas été payées à hauteur de 74.149 euros en 2017, 88.705 euros en 2018, 15.617 euros en 2019 et 77.120 euros en 2020, que les causes de la condamnation prononcée par le conseil des prud’hommes de Coutances le 13 décembre 2018 n’ont pas été payées aux salariés concernés, que certaines dépenses courantes n’ont pas été réglées, notamment les fermages, ce qui a provoqué la résolution du plan de redressement et sa conversion en liquidation judiciaire et justifié le report de la date de cessation des paiements au 23 juin 2019, le passif créé postérieurement à l’adoption du plan de redressement en juillet 2017 s’élevant à 419.236,07 euros, s’ajoutant au passif admis pour former un passif total de 2.133.805 euros.

L’appelant soutient, d’une part, que la cessation des paiements de l’EARL Des légumes bio a pour origine exclusive la conjoncture économique, d’autre part, qu’il a effectué des démarches et fourni des efforts importants pour rétablir la situation de la société avant que soit constaté l’état de cessation des paiements.

Il fait valoir qu’il a, dès 2014, pris l’initiative de solliciter une procédure de règlement amiable et qu’au cours des périodes d’observation de la procédure de redressement judiciaire, entre le 3 février 2016 et le 15 mai 2017, la société dégageait un résultat bénéficiaire, la trésorerie s’élevant à 182.649 euros au 30 juin 2017, et que la cessation des paiements de la société est exclusivement due à la crise sanitaire débutée au dernier trimestre 2019 caractérisée par un manque de main-d »uvre saisonnière, une baisse des ventes et des difficultés de recouvrement de ses créances, aggravée par les difficultés personnelles du couple de co-gérants se traduisant par un arrêt de son activité en raison d’une opération du genou et des carences de Mme [M], épouse [Z], dans le traitement de la comptabilité.

Enfin, M. [Z] affirme qu’aucune faute de gestion caractérisée ne lui est imputable, seules des erreurs constitutives de simples négligences pouvant tout au plus être retenues à son encontre.

Le liquidateur judiciaire réplique que M. [Z] a poursuivi une activité déficitaire dès avant le 23 juin 2019, date de fixation de la cessation des paiements, caractérisée par des capitaux propres négatifs de 115.754 euros en 2018, 116.610 euros en 2019 et 438.853 euros en 2020 alors que le capital social est de 7.600 euros ainsi que par une trésorerie nette globale hors comptes courants et un fonds de roulement hors comptes courants négatifs respectivement de 756.704 euros en 2019, 878.382 euros en 2020 et de 224.005 euros en 2019 et 590.246 euros en 2020, sans que cette situation soit imputable à la crise sanitaire survenue postérieurement à la cessation des paiements et sans que le gérant ne démontre avoir pris des mesures propres à remédier à cette situation, un endettement important ayant été créé après l’adoption du plan de redressement résultant notamment du non-paiement des cotisations sociales auprès de la MSA, d’une condamnation prud’homale, des fermages et de factures.

La date de cessation des paiements a été reportée au 23 juin 2018 par jugement du tribunal judiciaire de Coutances du 21 septembre 2021.

Il ressort des productions, notamment des bilans comptables 2019 et 2020 ainsi que du grand livre 2020 et des résultats économiques et financiers 2019 et 2020 établis par le comptable de la société à partir des éléments fournis par les dirigeants de la société, qu’en sa qualité de co-gérant M. [Z] a sciemment poursuivi une activité déficitaire, caractérisée par des capitaux propres et des fonds de roulement hors comptes courants négatifs, un résultat déficitaire en 2019 et 2020, en procédant au paiement de seulement certaines créanciers à l’exclusion de créances dont le règlement était pourtant essentiel à la poursuite de l’activité de la société telles que les fermages et les cotisations sociales à hauteur de 74.149 euros en 2017, 88.705 euros en 2018, 15.617 euros en 2019 et 77.120 euros en 2020, ce qui a conduit à l’aggravation du passif, à la cessation des paiements et a provoqué la conversion du redressement en liquidation judiciaire et ce, dans son intérêt personnel, caractérisé par le maintien de sa rémunération et la détention dans la comptabilité de la société d’un compte courant d’associé et d’un compte divers débiteurs.

Contrairement à ce que soutient l’appelant, l’activité déficitaire a débuté avant la survenance de la crise sanitaire, la cessation des paiements ayant été fixée au 23 juin 2019, si bien que cette crise ne saurait être invoquée comme cause exclusive de cette exploitation déficitaire.

M. [Z] ne démontre pas davantage avoir pris des mesures propres à remédier à la situation financière de la société.

En effet, aucun apport de fonds propres n’a été réalisé et aucune mesure de restructuration n’a été prise, les comptes débiteurs au profit de M. [Z] étant au contraire préservés.

À cet égard, il est relevé que l’adoption d’un plan de redressement n’est pas exclusive d’une poursuite abusive d’exploitation déficitaire.

Au regard de la gravité des fautes imputables à M. [Z] et de la situation personnelle de celui-ci, l’intéressé étant toujours associé de la SNC [Z] même mise en sommeil et ayant créé en 2021 une nouvelle société dénommée Légumes bio dont il est l’associé unique et dont il assurait la présidence jusqu’à sa transmission à son fils à compter du 31 décembre 2022, le prononcé d’une mesure de faillite personnelle pour une durée de cinq ans sera confirmé.

2. Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement entrepris relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance, fondées sur une exacte appréciation, seront confirmées.

M. [Z], qui succombe, sera condamné aux dépens d’appel, débouté de sa demande d’indemnité de procédure et condamné à payer à Me [L], ès qualités, la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt par défaut mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement entrepris en ses dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant,

Condamne M. [U] [Z] aux dépens d’appel et à payer à Me [L], ès qualités, la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette la demande d’indemnité de procédure formée par M. [U] [Z] ;

Dit que le présent arrêt sera signifié dans les 15 jours à la diligence du ministère public aux personnes sanctionnées ;

Dit que, conformément à l’article R. 653-3 du code de commerce, indépendamment des mentions portées au casier judiciaire en application de l’article 768 5° du code de procédure pénale, le présent arrêt fera l’objet des publicités prévues à l’article R.621-8 du code de commerce et sera adressé aux personnes mentionnées à l’article R.621-7 du code de commerce ;

Dit que les mesures prononcées par le présent arrêt seront inscrites au fichier national des interdits de gérer à la diligence du ministère public dans les conditions des articles R. 128-1 et suivants du code de commerce.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

N. LE GALL F. EMILY

 

 


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