Comptes courants d’associés : 12 janvier 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 20/00382

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Comptes courants d’associés : 12 janvier 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 20/00382

12 janvier 2023
Cour d’appel de Montpellier
RG
20/00382

4e chambre civile

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 12 JANVIER 2023

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 20/00382 – N° Portalis DBVK-V-B7E-OPQE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 10 JANVIER 2020

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE RODEZ

N° RG 18/00416

APPELANT :

Monsieur [C] [X]

né le 27 Février 1955 à [Localité 6] (PORTUGAL)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représenté par Me Gilles ARGELLIES de la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS – AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et par Me Bastien AUZUECH, avocat au barreau de l’ AVEYRON, avocat plaidant

INTIMES :

Monsieur [M] [L]

né le 19 Janvier 1973 à [Localité 5] (12)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représenté par Me Mathilde SEBASTIAN substituant Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant ayant plaidé pour Me Cécile DIBON-COURTIN, avocat au barreau de l’ AVEYRON

Madame [N] [T] épouse [L]

née le 04 Août 1975 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Mathilde SEBASTIAN substituant Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant ayant plaidé pour Me Cécile DIBON-COURTIN, avocat au barreau de l’ AVEYRON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 OCTOBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M.Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et M. Frédéric DENJEAN, Conseiller, chargé du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Frédéric DENJEAN, Conseiller

Madame Marianne FEBVRE, Conseillère

Greffier Henriane MILOT

ARRET :

– contradictoire ;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, initialement prévu le 24 novembre 2022 et prorogé successivement aux 8 décembre 2022 et 12 janvier 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffier.

Exposé du litige

*

* *

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS

Courant janvier 2002, M. [C] [X], associé et dirigeant et la société générale de construction [X] [C] et Laury V et de la société Entreprise [X], a cédé 24 parts sociales de la société générale de construction [X] [C] et Laury V à M.[M] [L], salarié au sein de cette entreprise depuis 1996.

Suivant acte dressé par Me [O] [U] notaire le 8 octobre 2008, M. [C] [X] a cédé 24 parts sociales de la société générale de construction [X] [C] et Laury V à M.[M] [L] et une part sociale à Mme [N] [T] épouse [L]. La société Entreprise [X] qui détenait également des parts sociales de la société générale de construction [X] [C] et Laury V a, quant à elle, cédé à M. [M] [L] 50 parts sociales.

L’acte notarié précisait que le compte courant d’associé que M. [C] [X] détenait dans la société générale de construction [X] [C] et Laury V avait été rembousé par chèque Bnp du même jour tiré sur le compte de ladite société, et que le compte courant d’associé que la société Entreprise [X] détenait dans cette même société serait remboursé en deux versements de 87 500 euros chacun intervenant au plus tard les 31 octobre 2008 et 30 juin 2009.

A la suite de cette opération, M. [C] [X] a été embauché au sein de la société générale de construction [X] [C] et Laury V en qualité de conducteur de travaux.

Au cours du mois de septembre 2011, la société générale de construction [X] [C] et Laury V a licencié M. [C] [X].

Le 26 décembre 2011, M. [C] [X] a encaissé deux chèques de 50 000 euros datés du 30 novembre 2011 et tirés sur le compte personnel des époux [L].

Par acte d’huissier déposé à l’étude le 7 janvier 2016, les époux [L] ont assigné M. [C] [X] devant le tribunal de commerce de Rodez aux fins de le voir restituer la somme de 100 000 euros.

Par jugement avant dire droit du 21 février 2017, le tribunal de commerce de Rodez a ordonné au cabinet d’expertise-comptable Kpmg de délivrer la copie du grand livre comptable de la société générale de construction [X] [C] et Laury V du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2011.

M. [C] [X] a soulevé l’imconpétence du tribunal de commerce de Rodez, lequel a retenu sa compétence par jugement du 5 septembre 2017, dont il a été interjeté appel.

Par arrêt du 6 février 2018, la cour d’appel de Montpellier a dit le tribunal de commerce de Rodez non compétent pour connaître du litige, et renvoyé l’affaire devant le tribunal de grande instance de Rodez.

Par jugement contradictoire et en premier ressort du 10 janvier 2020, le tribunal judiciaire de Rodez a statué comme suit :

Condamne M. [C] [X] à verser à Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] la somme de 100 000 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 janvier 2016;

Déboute Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] de leur demande tendant à voir écarter les pièces n°6, 13, et 14 produites par M. [C] [X] des débats ;

Déboute Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] de leur demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

Moyens

Déboute Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] de leur demande en remboursement des dépens exposés devant le tribunal de commerce de Rodez et la cour d’appel de Montpellier ;

Déboute M. [C] [X] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Condamne M. [C] [X] à verser à Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute M. [C] [X] de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [C] [X] aux entiers dépens.

En date du 20 janvier 2020, M. [C] [X] a interjeté appel.

Vu les dernières conclusions en date du 20 avril 2020 de M.[C] [X], auxquelles il est expressément référé pour complet exposé des motifs et du dispositif, aux fins de :

vu les articles 1131, 1235, et 1376 du code civil dans leur rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des obligations,

A titre principal,

Réformer le jugement en ce qu’il a :

Condamné M. [C] [X] à verser à Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] la somme de 100 000 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 janvier 2016;

Débouté M. [C] [X] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Condamné M. [C] [X] à verser à Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamné M. [C] [X] aux entiers dépens ;

Confirmer le jugement pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

Débouter Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] de leurs entières demandes,

A titre subsidiaire et reconventionnellement,

Condamner Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] à payer la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 janvier 2016,

Ordonner la compensation des dettes réciproques,

En tout état de cause,

Condamner solidairement Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] à payer la somme de 5 000 euros pour procédure abusive,

Condamner solidairement Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] à payer la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions avec appel incident en date du 20 juillet 2020 de Mme [N] [T] épouse [L] et M.[M] [L], auxquelles il est expréssément référé pour complet exposé des motifs et du dispositif, aux fins d’infirmer le jugement en ce qu’il a :

Débouté Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] de leur demande tendant à voir écarter les pièces n°6, 13, et 14 produites par M. [C] [X] des débats ;

Débouté Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] de leur demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

Débouté Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] de leur demande en remboursement des dépens exposés devant le tribunal de commerce de Rodez et la cour d’appel de Montpellier ;

Confirmer le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Ecarter des débats les pièces n°6, 13, et 14 produites par M.[C] [X], obtenues frauduleusement par ce dernier en violation de la vie privée de M. [M] [L],

Condamner M. [C] [X] à payer à Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de sa résistance abusive,

Condamner M. [C] [X] à payer à titre de préjudice matériel, et subsidiairement, à titre de dépens, tous les dépens exposés par Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] devant le tribunal de commerce de Rodez,

Condamner M. [C] [X] à verser à Mme [N] [T] épouse [L] et M. [M] [L] la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamner M. [C] [X] aux entiers dépens d’appel.

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

Vu l’ordonnance de clôture en date du 14 septembre 2022.

Motivation

MOTIFS

SUR LA DEMANDE D’ECARTER LES PIECES

Aux termes de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Les époux [L] soutiennent que les pièces n°6, 13, et 14 produites par M. [C] [X] ont été obtenues par des moyens illicites, sans toutefois préciser lesquels.

Mais ces pièces produites de façon contradictoire aux débats, ne font que signaler la situation financière de l’entreprise, et il n’est pas démontré qu’elles ont été obtenues de façon illicite auprès de l’expert comptable, lequel n’a fait qu’alerter sur la mise en péril de l’entreprise, ce qui n’était nullement confidentiel dés lors que M.[C] [X], ancien dirigeant, connaissait nécessairement la situation de l’entreprise dont il a été licencié pour motif économique.

De plus ces pièces sont sans conséquence sur le présent litige qui ne concerne nullement ce licenciement.

Le premier juge a donc justement débouté les époux [L] de leur demande de voir ces pièces écartées des débats.

SUR LA DEMANDE DE REMBOURSEMENT

Selon l’article 1131 du code civil applicable à la date des faits, l’obligation sans cause, ou une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet.

L’article 1235 du même code précise que tout paiement suppose une dette : ce qui a été payé sans être dû, est sujet à répition. Le second alinéa de cet article précise que la répétition n’est pas admise à l’égard des obligations naturelles qui ont été volontairement acquittées.

L’article 1376 prévoit que celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s’oblige à le restituer à celui qui l’a indûment reçu.

M. [C] [X] soutient que le 26 décembre 2011, soit trois mois après avoir été licencié, les époux [L] lui ont remis deux chèques d’un montant de 50 000 euros chacun tirés sur leur compte personnel, à titre de gratification et d’indemnité en raison de la violation de leur engagement moral de le conserver au sein de la société en qualité de salarié jusqu’à sa retraite. Il ajoute que le jugement dont appel a inversé la charge de la preuve en retenant l’erreur de paiement à défaut de preuve contraire par M. [X], alors qu’il appartenait aux époux [L] de démontrer l’absence d’intention libérale, qu’aucune dette n’existait et qu’aucun engagement moral n’était démontré.

L’arrêt de la cour d’appel de Montpellier en date du 6 février 2018, statuant sur l’appel du jugement du 5 septembre 2017 du tribunal de commerce de Rodez, indique qu’au mois de novembre 2011, M. [L], gérant de la société Générale Constructions, ne pouvait donc pas ignorer que les comptes-courants d’associés de M.[X] et de la société Entreprise [X] étaient soldés depuis octobre 2008 et janvier 2010, le paiement opéré par M.[L] au profit de M. [X] au moyen de deux chèques tirés sur son compte personnel ne pouvant être rattaché à la cession des parts sociales de la société Générale de construction [X].

Cette affirmation de la cour d’appel suffit à justifier qu’aucune dette n’existait entre les parties relative à cette cession de parts sociales.

M. [C] [X] affirme lui-même en page 12 de ses conclusions que les époux [L] ‘ne pouvaient valablement croire qu’ils s’acquittaient d’une dette’.

Le premier juge a donc valablement signalé que les époux [L] n’avaient aucune dette envers M. [C] [X] lors du versement, et que ledit versement n’a aucun lien avec les opérations de cessions de parts sociales.

Les époux [L] contestent :

– toute existence d’une obligation naturelle liée à un devoir de conscience, d’honneur et de reconnaissance,

– des liens d’amitié,

– un engagement moral,

– une intention libérale.

Le premier juge a indiqué qu’il est constant que la source du versement ne réside pas dans une intention libérale et qu’il ne s’agit aucunement d’un don.

Compte tenu de l’importance du montant des deux versements effectués, faisant suite à des opérations de cessions de parts sociales pour un montant important, avec la présence de comptes courants ayant du être soldés, il ne peut manifestement s’agir que d’une opération financière entre professionnels du bâtiment, toutes les parties étant aguérries concernant les opérations d’argent, ne serait ce que du fait de leur habitude de facturer des prestations et de gérer des flux financiers.

Les relations des parties n’ont donc pu être que des relations d’argent, pour lesquelles aucun devoir de conscience ou reconnaissance, pas plus que d’amitié ou d’engagement moral n’est rapporté comme le précisent les époux [L], tandis que M.[C] [X] n’en rapporte aucun élément probant, le premier juge signalant à bon droit l’absence de démonstration de l’existence d’un engagement moral ou de relations particulières d’amitié que ce dernier entretenait avec les époux [L].

M. [C] [X] se contente d’affirmations, sans aucun fondement probant, dés lors qu’aucune des 26 pièces qu’il verse aux débats ne concernent les relations prétendues particulières qu’il prétend avoir entretenues avec les époux [L], alors même qu’il se contente de produire uniquement des éléments financiers, mais aucun lié à des relations d’intimité.

Le premier juge a donc correctement affirmé qu’aucune cause ne pouvant être décelée, c’est effectivement l’erreur qui doit être retenue, de sorte que le versement apparaît indu.

Par ailleurs, l’existence d’un prétendu préjudice occasionné par le paiement indû n’est nullement rapporté, alors même que la demande de 100 000 euros à titre de dommages-intérêts liée à une prétendue faute inexcusable n’a pas été présentée devant le premier juge. Il ne s’agit pas d’une demande de compensation comme le prétend à tort M. [C] [X], mais bien d’une demande nouvelle en appel de condamnation au paiement. Cette demande n’entre pas dans les cas prévus par l’article 564 du code de procédure civile.

Enfin, la résistance au remboursement par M. [C] [X] qui a diligenté le présent appel, ne constitue pas, bien qu’infondée, une faute dolosive justifiant de l’octroi de dommages-intérêts pour résistance abusive.

Par conséquent, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

L’article 696 du code de procédure civile énonce que la partie perdante est condamnée aux dépens, il conviendra de condamner M. [C] [X] aux entiers dépens d’appel.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Dit irrecevable comme nouvelle en appel la demande de M.[C] [X] de paiement de 100 000 euros à titre de dommages-intérêts,

Déboute les époux [N] et [M] [L] de leur demande de dommages-intérêts pour résistance abusive,

Condamne M. [C] [X] aux entiers dépens d’appel,

Condamne M. [C] [X] à payer en appel la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 

 


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