10 janvier 2023
Cour d’appel de Poitiers
RG n°
21/02013
2ème Chambre
ARRET N°10
N° RG 21/02013 – N° Portalis DBV5-V-B7F-GJ3L
J.P.F / V.D
S.A.R.L. NANFER
S.A.R.L. ANTALEX FINANCE
C/
S.A.R.L. JOP HOLDING
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 10 JANVIER 2023
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/02013 – N° Portalis DBV5-V-B7F-GJ3L
Décision déférée à la Cour : jugement du 31 mai 2021 rendu(e) par le Tribunal de Commerce de POITIERS.
APPELANTES :
S.A.R.L. NANFER
[Adresse 10]
[Localité 3]
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
ayant pour avocat postulant de Me Anne DE CAMBOURG de la SCP DUFLOS-CAMBOURG, avocat au barreau de POITIERS
ayant pour avocat plaidant Me Fernando SILVA, de la SAS DELTA AVOCAT, avocat au barreau de BORDEAUX
S.A.R.L. ANTALEX FINANCE
[Adresse 1]
[Localité 4]
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
ayant pour avocat postulant de Me Anne DE CAMBOURG de la SCP DUFLOS-CAMBOURG, avocat au barreau de POITIERS
ayant pour avocat plaidant Me Fernando SILVA, de la SAS DELTA AVOCAT, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMEE :
S.A.R.L. JOP HOLDING
[Adresse 2]
[Localité 8]
représentée par ses co-gérants en exercice
ayant pour avocat plaidant Me Alexis BAUDOUIN de la SCP TEN FRANCE, avocat au barreau de POITIERS
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 02 Novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président
Monsieur Claude PASCOT, Président
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
qui en ont délibéré
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
– Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Exposé du litige
************
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par acte sous seing privé en date du 31 mars 2016, la SARL JOP Holding, qui exerce une activité de holding animatrice, a cédé à la société Antalex Finance, pour un prix de 1 004 119 euros, l’intégralité des parts sociales composant le capital social de la SARL NANFER, qui exploite un restaurant sous l’enseigne «Fernand» dans des locaux situés [Adresse 6] et [Adresse 5] à [Localité 9].
Cette cession avait été précédée de la signature d’une lettre d’intention adressée par M. [G], gérant de la société ANTALEX à M. [I] [C], co-gérant de la société Hop Holding, acceptée le 18 janvier 2016, puis d’un protocole d accord de cession de parts, conclu le 15 mars 2016, sous diverses conditions suspensives, et notamment celle liée à la résiliation de la convention d’intégration fiscale qui avait été signée le 2 avril 2013 entre la société Jop Holding et la société NANFER.
Aux termes de cette convention, la société NANFER devait verser à la société Jop Holding une contribution au paiement de l’impôt sur les sociétés de groupe, égale au montant de l’impôt qui aurait grevé son résultat si elle était imposable distinctement.
En revanche, en cas de déficit ou de moins value nette à long terme, la société NANFER devait recevoir à titre définitif de la société Jop Holding une subvention égale à l’économie d impôt sur les sociétés procurée à cette dernière par la prise en compte de ce déficit ou de sa moins value.
Par acte distinct en date du 31 mars 2016, les parties ont conclu une convention de garantie d’actif et de passif au bénéfice de la société ANTALEX Finance.
Les comptes de référence sont ceux arrêtés par la société Jop Holding au 31 mars 2016.
A la suite de l’examen de ces comptes, la société ANTALEX Finance a, par lettres recommandées avec accusé de réception en date du 20 juin 2016, puis du 27 novembre 2017, mis en demeure la société Jop Holding de s’expliquer sur l’ absence de reversement à la société NANFER, sous forme de subventions, de la contre-valeur des économies d’ impôts sur les sociétés réalisées par la holding, en exécution de la convention d’ intégration fiscale, du 1ermai 2013 au 31 mars 2016, en réclamant ainsi le paiement de la somme de 105 510 euros.
En outre, la société ANTALEX Finance a sollicité, au titre de la garantie d’actif et de passif souscrite entre les sociétés Jop Holding et ANTALEX Finance, la prise en compte d’une dépense de 22 937,62 euros résultant de la nécessité de remplacer le mobilier destiné à l’aménagement de la terrasse, qui s’était avéré totalement usé.
Par acte signifié en date du 6 avril 2018, les sociétés NANFER et ANTALEX Finance ont assigné la société Jop Holding devant le tribunal de commerce de Bordeaux en paiement de ces sommes.
Par jugement en date du 28 février 2019, le tribunal de commerce de Bordeaux s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Poitiers.
Par jugement en date du 31 mai 2021, le tribunal de commerce de Poitiers a:
– débouté les sociétés NANFER et ANTALEX Finance de toutes leurs demandes ;
-dit que le montant de 74 262 euros devra être payé par la société NANFER à la société Jop Holding au titre du remboursement des avances faites en compte courant d’associé, avec intérêt au taux légal à compter du 30 avril 2016,
-dit que cette condamnation est assortie de l’exécution provisoire, nonobstant appel et sans caution ;
-condamné solidairement les sociétés NANFER et ANTALEX Finance, qui succombent à l’instance pour toutes leurs demandes, à verser la somme de 8 000 euros à la société Jop Holding, au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
-condamné solidairement les sociétés NANFER et ANTALEX Finance aux entiers dépens de l’instance, dont les frais de greffe liquidés à la somme de 94.36 euros TTC.
Par déclaration en date du 30 juin 2021, la société NANFER et la société ANTALEX Finance ont relevé appel de cette décision en visant les chefs expressément critiqués.
Moyens
Par dernières conclusions transmises par voie électronique le 25 mai 2022, les sociétés NANFER et ANTALEX Finance demandent à la cour de :
Vu les articles 1134 et 1147 anciens du code civil,
Vu l article 1353, 1604 et suivants du code civil,
Vu l’article 700 du code de procédure civile,
Recevoir les sociétés NANFER et ANTALEX Finance en leur appel et les déclarer bien fondées ;
Infirmer le jugement rendu le 31 mai 2021 par le tribunal de commerce de Poitiers en toutes ses dispositions ;
En conséquence,
Statuant de nouveau,
En premier lieu,
Condamner la société Jop Holding à régler à la société NANFER la somme de 105 510 euros au titre des subventions dues sur l’économie d’impôt réalisée au cours de la période d’ intégration fiscale, majorée des intérêts de retard au taux conventionnel de 2 %;
En second lieu,
Condamner la société Jop Holding à régler la somme totale de 19 114,68 euros HT à la société ANTALEX Finance;
En tout état de cause,
Débouter la société Jop Holding de l ensemble de ses demandes, fins et prétentions, toutes aussi infondées qu injustifiées;
Condamner la société Jop Holding à régler aux sociétés NANFER et ANTALEX Finance la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
Par dernières conclusions transmises par voie électronique le 28 février 2022, la société Jop Holding demande à la cour, en formant appel incident:
-de dire et juger que les conclusions de la société Jop Holding sont recevables et bien fondées ;
Y faisant droit, et rejetant toutes demandes, fins et conclusions contraires,
-de confirmer la décision rendue par les premiers juges en ce que :
-Les sociétés NANFER et ANTALEX Finance ont été déboutées de leurs demandes ;
-La société NANFER a été déboutée de sa demande d’un montant de 96 314 euros correspondant au versement à son profit du montant des économies d’impôts procurées à la société Jop Holding au titre de la période d’application de la convention d’intégration fiscale;
La société ANTALEX Finance a été déboutée de sa demande de règlement de la somme de 22 937,62 euros au titre de la garantie d’actif et de passif ou de l’obligation de délivrance conforme de la chose vendue ;
En ce que la société NANFER a été condamnée à payer à la société Jop Holding la somme de 74 262 euros au titre du remboursement des avances faites en compte courant d’associé et que les intérêts au taux légal à compter du 30 avril 2016 devront être appliqués ;
En ce que les sociétés NANFER et ANTALEX Finance ont été condamnées solidairement à verser la somme de 8 000 euros à la société Jop Holding au titre de l’article 700 du code de procédure civile en première instance ;
-d’infirmer en ce que la société ANTALEX Finance n’a pas été condamnée solidairement avec la société NANFER pour le remboursement des avances en compte courant dues à la société Jop Holding.
En conséquence:
Sur les demandes de la société NANFER au titre de la convention d intégration fiscale :
Dire et juger que le montant des subventions que la société Jop Holding aurait dû verser à la société NANFER en exécution de la convention d’intégration fiscale s élève à 76 307 euros pour la période du 1er mai 2013 au 31 décembre 2015 ;
Dire et juger que la société NANFER devait reverser ce même montant à la société Jop Holding consécutivement à sa sortie du groupe d’intégration fiscale ;
Dire et juger qu’une compensation a été opérée entre ces «créances intra-groupe» de sorte que les société Jop Holding et NANFER ne se doivent plus respectivement aucune somme en exécution de la convention d’intégration fiscale;
Par conséquent,
Débouter la société NANFER de ses demandes à ce titre;
Sur les demandes de la société ANTALEX Finance au titre de la garantie d’actif et de passif et de l’obligation de délivrance conforme :
Dire et juger qu il n existe pas de situation comptable contradictoire pour servir de base à la garantie d’actif et de passif ;
Dire et juger que la garantie d’actif et de passif n a pas été mise en ‘uvre par la société ANTALEX Finance s’agissant des frais qu’elle indique avoir engagés pour renouveler son mobilier extérieur ;
Dire et juger que la société ANTALEX Finance est déchue de la garantie d’actif et de passif à défaut de l’avoir mobilisée dans les délais et conditions prévues au contrat ;
Dire et juger que les conditions de la garantie d’actif et de passif ne sont pas réunies à défaut pour la société ANTALEX Finance de justifier d’un élément qui aurait été « révélé postérieurement » à la cession ;
Par ailleurs,
Dire et juger que les protestations formulées par la société ANTALEX Finance sur le mobilier utilisé par la société NANFER ne sont pas de nature à remettre en cause la délivrance conforme des parts sociales vendues de la société NANFER ;
Par conséquent,
Débouter la société ANTALEX Finance de ses demandes à ce titre,
À titre subsidiaire,
Dire et juger que le chiffrage de la demande de la société ANTALEX Finance est mal fondé,
Par conséquent,
L’en débouter,
Sur la demande reconventionnelle de la société Jop Holding :
Condamner solidairement les sociétés NANFER et ANTALEX Finance à rembourser à la société Jop Holding la somme de 74 262 euros au titre du solde en compte courant d’associé, avec intérêts au taux légal à compter du 30 avril 2016, échéance pour laquelle elles s’étaient engagées à rembourser ce compte courant :
En tous les cas :
Condamner solidairement les sociétés NANFER et ANTALEX Finance à rembourser à la société Jop Holding la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d appel ;
Condamner solidairement les sociétés NANFER et ANTALEX Finance aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
L’ ordonnance de clôture a été rendue le 2 novembre 2022 avant les plaidoiries.
Motivation
MOTIFS DE LA DECISION:
Concernant la demande relative à la convention d’intégration fiscale:
1- L’ article 1 de la convention d’intégration fiscale intitulé «Objet» stipule:
«La société NANFER versera à la société Jop Holding, à titre de contribution au paiement de l’impôt sur les sociétés du groupe et quel que soit le montant effectif dudit impôt, une somme égale à l’impôt qui aurait grevé son résultat et/ou sa plus-value nette à long terme de l’exercice si elle était imposable distinctement, déduction faite par conséquent de l’ensemble des droits à imputation dont la société NANFER aurait bénéficié en l’absence d intégration.
En cas déficit ou de moins-value nette à long terme, la société NANFER recevra à titre définitif de la société Jop Holding une subvention égale à l’économie d’ impôt sur les sociétés, immédiate ou virtuelle, procurée à cette dernière par la prise en compte de ce déficit ou de cette moins-value nette ; en conséquence la société NANFER sera privée du report de son déficit ou de sa moins-value pour la détermination ultérieure de sa charge contributive définie à l’alinéa précédent.
Pour le calcul de la contribution et de la subvention définies au 1er alinéa du présent article, les tarifs de l’impôt sur les sociétés sont, suivant la nature des produits, le taux normal et le taux réduit des plus-values à long terme. »
L’article 2 stipule que la société Jop Holding versera les subventions qu’elle soit à la société NANFER en application de l’article 1er ci-dessus 30 jours au plus tard après la date limite qui lui est impartie pour le versement du solde de l’impôt du groupe.
L’article 9 de la convention d’intégration fiscale intitulé « sortie du groupe » stipule :
« En cas de sortie de la société NANFER du groupe d’intégration, quelle que soit la cause de cette sortie, la société Jop Holding se réserve d’exiger le reversement par la société NANFER des subventions, visées aux articles 1er et ci-dessus, qu’elle lui aura accordées au titre d’un exercice clos depuis moins de cinq ans. Elle ne sera fondée à le faire que dans la limite du gain net qu’aura procuré à la société NANFER, depuis le début de sa période d’intégration, l’ obtention des subventions susvisées, ce gain net étant apprécié en tenant compte, s il y a lieu, du désavantage que subit la société NANFER en étant dépossédée de l’usage des déficits subis par elle pendant la période d’intégration (…)’
2- Au visa des premiers articles précités, les appelantes sollicitent l’infirmation du jugement, et la condamnation de la société JOP Holding la somme de 105 510 euros avec intérêt au taux de 2 %, au titre des subventions qu’elle aurait dû percevoir, au titre de l’économie d’impôt réalisée entre le 1er mai 2013 et la 31 mars 2016.
Elles soulignent que le transfert des déficits de la société NANFER a procuré un avantage à la société Jop Holding, au titre de son imposition à l’impôt sur les sociétés, et ceci de manière irrémédiable, sans aucune contrepartie de la part de la société NANFER, laquelle a perdu en revanche la possibilité de bénéficier de ces déficits sur les exercices ultérieurs, ce qui serait contraire à l’objet et à l’esprit de la convention d’intégration fiscale, guidée par le principe de neutralisation des créances intra-groupes.
3- L’intimé réplique d’abord que les appelantes ont commis des erreurs dans le calcul des subventions qui auraient dû être payées à la société NANFER, ainsi que sur le taux d’imposition applicable, et sur le principe de l’application de la convention pour l’exercice 2916, d’une durée de trois mois seulement, de sorte que seule une somme de 76307 euros (et non 105510 euros) aurait dû être versée à la société NANFER en exécution de la convention d’intégration fiscale.
Elle ajoute que la volonté des parties doit s’interpréter à travers la rédaction de l’article 9 de la convention, plutôt qu’au visa de l’article 1er et de la mention d’un versement des subventions « à titre définitif ».
Elle souligne en outre que la lettre d’intention, comme le protocole de cession de l’intégralité des parts sociales, révèlent la commune intention des parties de procéder à la résiliation de la convention d’intégration fiscale, sans aucune conséquence pécuniaire pour la société NANFER, dans le cadre d’une neutralisation des créances intra- groupe.
4- Il est constant que durant la période d’exécution de la convention d’intégration fiscale, la société NANFER n’a pas reçu de la société JOP Holding de subventions égales aux économies d’impôts procurées à cette dernière, qui doivent être chiffrées à 76 307 euros, conformément au calcul rectifié réalisé par la société JOB Holding, en application des dispositions de l’article 223 A du CGI, et qui tient compte à la fois des véritables résultats fiscaux négatifs de la société NANFER, au vu de ses liasses fiscales des exercices 2013 à 2015, du taux réduit de l’impôt sur les société sur la première tranche de bénéfices de 38120 euros (15%), et de l’impossibilité d’appliquer la convention d’intégration sur l’exercice 2016 (la société mère n’ayant pas détenu 95 % au moins du capital social de la société fille manière continue au cours de cet exercice).
5- La société JOP Holding souligne toutefois que la sortie du groupe de la société NANFER avant la fin du délai de 5 ans remettait en cause le principe même de la convention, en application de l’article 223 A III alinéa 2 du CGI, de sorte qu’elle n’aurait pas manqué d’exiger le reversement immédiat des subventions, si celles-ci lui avaient été réclamées par la société NANFER à la date de sa sortie.
6- Il convient de relever que la demande de reversement ne pouvait être formée par la société JOP Holding que dans la limite du gain net qu’aurait procuré à la société NANFER, depuis le début de sa période d’intégration, l’obtention des subventions susvisées, ce gain net étant apprécié en tenant compte, s’il y a lieu, du désavantage que subit la société NANFER en étant dépossédée de l’usage des déficits subis par elle pendant la période d’intégration.
7- En l’espèce, dès lors que la société NANFER n’a enregistré que des résultats négatifs durant la période d’intégration, sans pouvoir les imputer sur des bénéfices, il n’existait aucun désavantage du fait de la dépossession des déficits, susceptible de venir en déduction du gain net procuré par l’obtention des subventions; étant précisé que ce désavantage devait nécessairement s’apprécier à la date de sortie du groupe, sans qu’il puisse être tenu compte du désavantage purement hypothétique de ne pouvoir imputer les déficits reportables sur l’un des exercices bénéficiaires ultérieurs, dont il n’est d’ailleurs nullement justifié devant la cour.
8- Il en résulte que la société JOP Holding était en droit de demander la restitution immédiate des subventions dans l’hypothèse d’une demande faite de ce chef par la société NANFER lors de sa sortie du groupe.
Les parties ont tenu compte de cette situation en convenant d’une neutralisation des créances intra-groupes pour la fixation du prix de vente des parts sociales.
9- Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté la demande formée à ce titre par la société NANFER, celle-ci ne justifiant pas d’une créance certaine.
Concernant la demande au titre de la garantie d’actif et de passif:
10- Au soutien de sa demande en paiement de la somme de 19114,68 euros HT, la société ANTALEX Finance fait valoir que lors de sa prise de possession des lieux, le mobilier destiné à l’aménagement de la terrasse était totalement usé, et ne pouvait être utilisé sans risquer de porter atteinte à l’image de l’établissement, en contradiction avec les déclarations dans l’acte de cession et de la comptabilité ayant permis les valorisations.
Elle conteste toute déchéance de la garantie d’actif et de passif, au titre d’une mobilisation tardive de cette garantie, dès lors que la société JOP Holding ne lui a pas notifié sa nouvelle adresse avant février 2017.
11- Mais, comme le fait valoir à juste titre la société JOP Holding, la société ANTALEX Finance n’a pas respecté le délai de notification de sa réclamation prévue à la convention d’actif et de passif, soit un mois à compter de la connaissance qu’elle avait de l’évènement en cause.
En effet, alors qu’elle a eu connaissance de l’état du mobilier de terrasse (selon elle vétuste et survalorisé) au plus tard le 1er avril 2016, soit lors de la prise de possession des lieux, la société ANTALEX Finance n’a adressé sa lettre recommandée avec accusé de réception à la société JOP Holding que le 20 juin 2016.
12- Le société ANTALEX Finance ne peut utilement arguer d’une connaissance tardive qu’elle aurait eue de la nouvelle adresse de la société JOP Finance, dès lors que les notifications au titre de la garantie d’actif et de passif devaient se faire au siège social de ladite société, soit [Adresse 7] à [Localité 9], ce qui a été fait en l’espèce, mais à une date tardive.
13- Par ailleurs, la société ANTALEX Finance ne peut obtenir indemnisation sur le fondement de la garantie de délivrance conforme prévue par les articles 1604 du code civil, dès lors, d’une part, que la cession ne portait pas sur du mobilier, mais sur des parts sociales, qui ont bien été délivrées.
14- Le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté cette demande.
Concernant la demande de remboursement de compte courant:
15- La société JOP Finance sollicite l’infirmation partielle du jugement, en ce qu’il a condamné uniquement la société NANFER à lui rembourser son compte courant d’associé, pour un montant de 74262 euros.
15- La cour relève que la société ANTALEX Finance s’est engagée expressément dans l’acte de cession de parts sociales à rembourser au cédant « à la date de ce jour tout compte courant d’associé et des sociétés liées qui subsisterait dans les conditions ci-dessus ».
Contrairement à ce que soutient la société ANTALEX, l’obligation de remboursement du compte courant ne pesait pas uniquement sur la société NANFER, au profit de son ancien associé, dans le délai d’un mois à compter de la conclusion du contrat comme convenu en page 18 de l’acte de cession, mais également sur la société ANTALEX Finance qui avait souscrit à ce titre une obligation personnelle.
16- Il convient dès lors d’infirmer le jugement de ce chef et de condamner solidairement les sociétés NANFER et ANTALEX Finance à rembourser à la société JOP Holding la somme de 74 262 euros, au titre du solde de son compte courant d’associé.
Sur les demandes accessoires:
17- Il est équitable d’allouer à la société JOP Holding une indemnité de 5000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Échouant en leurs prétentions devant la cour, les sociétés ANTALEX Finance et NANFER supporteront les dépens d’appel et leurs frais irrépétibles.
Dispositif
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Infirme le jugement, en ce qu’il a:
-dit que le montant de 74 262 euros devra être payé par la société NANFER à la société Jop Holding au titre du remboursement des avances faites en compte courant d’associé, avec intérêt au taux légal à compter du 30 avril 2016,
Statuant à nouveau de ce seul chef,
Condamne solidairement la société NANFER et la société ANTALEX Finance à payer à la société JOP Holding la somme de 74262 euros, au titre du remboursement des avances faites en compte courant d’associé, avec intérêt au taux légal à compter du 30 avril 2016,
Confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne in solidum la société NANFER et la société ANTALEX Finance à payer à la société JOP Holding la somme de 5000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Rejette les autres demandes,
Condamne in solidum la société NANFER et la société ANTALEX Finance aux dépens d’appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,