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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
6e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 09 MAI 2017
R.G. N° 15/04198
AFFAIRE :
SASU ETOP INTERNATIONAL
1ère APPELANTE
C/
[Q] [U]
2ème APPELANT
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Juillet 2015 par le Conseil de prud’hommes – Formation de départage de BOULOGNE BILLANCOURT
Section : Encadrement
N° RG : 12/02138
Copies exécutoires délivrées à :
SELAS CORNILLIER AVOCATS
[Q] [U]
Copies certifiées conformes délivrées à :
SASU ETOP INTERNATIONAL
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE NEUF MAI DEUX MILLE DIX SEPT,
La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant fixé au 02 mai 2017 puis prorogé au 09 mai 2017 dans l’affaire entre :
SASU ETOP INTERNATIONAL
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Alex FERNANDO de la SELAS CORNILLIER AVOCATS, avocat au barreau de PARIS,
1ère APPELANTE
****************
Monsieur [Q] [U]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Comparant en personne
2ème APPELANT
****************
Composition de la cour :
L’affaire a été débattue le 28 Février 2017, en audience publique, devant la cour composée de :
Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, Président,
Madame Sylvie BORREL, Conseiller,
Monsieur Patrice DUSAUSOY, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Mélissa FABRE, greffier en pré-affectation
FAITS ET PROCÉDURE,
M. [U] a été engagé, selon un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 24 avril 2008 par la société ETOP INTERNATIONAL, filiale du groupe EUROGICIEL, en qualité de consultant en management de projet statut cadre position 2.3 coefficient 150 de la convention collective dite SYNTEC.
Son salaire s’élevait en dernier lieu à 4334 €/mois.
Il travaillait dans l’établissement de MALAKOFF composé d’un effectif de 23 salariés.
Entre 2008 et juillet 2010 il était affecté à une missions de management auprès de la société ASLTOM, puis s’est trouvé en période d’inter-contrat.
Par courriel du 13 juin 2010 il réclamait une augmentation de salaire et informait la société qu’il était candidat aux élections de délégué du personnel.
Par courriel du 5 août 2010 il dénonçait un manque d’accompagnement et d’encadrement de la part de son supérieur hiérarchique, s’inquiétait de ses prochaines missions, et demandait à effectuer une formation en chinois dans le cadre du DIF.
Entre septembre et novembre 2010 il refusait plusieurs missions au motif qu’elles étaient sous- dimensionnées ou lointaines.
Le 22 décembre 2010 il était élu délégué du personnel et le 29 mars 2011 élu membre du CHSCT.
Par lettre du 27 février 2012 il dénonçait au directeur d’établissement et au directeur des ressources humaines le manque de moyens mis à sa disposition pour exercer ses mandats syndicaux (local et armoire sans clé, téléphone et ordinateur non opérationnel, absence d’imprimante, absence de confidentialité des courriers), tout en se plaignant d’un climat social dégradé avec un besoin de soutien des salariés.
Le 2 mars 2012 le médecin du travail le déclarait inapte temporairement lors d’une visite effectuée à sa demande; il était placé en arrêt- maladie à compter de ce jour.
Par lettre du 21 novembre 2012 il prenait acte de la rupture de son contrat de travail, invoquant divers manquements de son employeur, soit une absence de revalorisation salariale, une absence de missions, une absence de formation, des heures supplémentaires non payées, une mise à l’écart par des humiliations et des vexations, une absence d’entretien annuel et des entraves à l’exercice de ses mandats.
Saisi par M. [U] le 31 décembre 2012, le conseil de prud’hommes de [Localité 1], statuant en formation de départage par jugement du 3 juillet 2015, dont la société a interjeté appel, a débouté M. [U] de sa demande liée au harcèlement discriminatoire en raison de l’appartenance syndicale, mais estimé que sa prise d’acte, du fait du non respect de l’obligation de sécurité à l’égard d’un salarié protégé, constituait un licenciement nul.
Le conseil a rejeté ses demandes relatives à la revalorisation de son salaire, aux heures supplémentaires, à l’indemnité de travail dissimulé, à la prévoyance, aux congés payés, et à la violation de l’obligation de formation.
La société a été condamnée à payer à M. [U], avec le bénéfice de la capitalisation, les sommes suivantes:
-348,60 € à titre de remboursement de frais professionnels au titre de sa certification,
-14 554 € à titre d’indemnité de préavis, outre les congés payés afférents,
-6621,39 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,
-27 000 € à titre d’indemnité de licenciement nul,
-130 020 € à titre d’indemnité pour violation du statut protecteur,
-5 000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité,
-300 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La société a été condamnée à rembourser à POLE EMPLOI les allocations
versées à hauteur de 2 mois, et à remettre à M. [U] les documents sociaux.
M. [U] a été condamné à rembourser à la société la somme de 236,50 € au titre des frais de transport après compensation avec les sommes dues par la société.
Vu les écritures soutenues oralement à l’audience du 28 février 2017, auxquelles la cour se réfère en application de l’article 455 du code de procédure civile, les parties ont conclu ainsi qu’il suit:
M. [U], reprenant dans l’ensemble ses demandes de première instance tout en modifiant certains montants et ajoutant certaines demandes, sollicite la confirmation du jugement en ce que le conseil a retenu dans leur principe ses demandes au titre de la nullité de son licenciement, au titre de la violation du statut protecteur et au titre du manquement à l’obligation de sécurité, mais à son infirmation pour le surplus quant aux montants accordés et sur ses autres demandes.
Il sollicite son reclassement au coefficient 210 de la grille SYNTEC ingénieur cadre, avec la fixation de son salaire à la somme de 60 000 €/an à compter de la prise d’acte, et la condamnation de la société au paiement des sommes suivantes:
*Au titre de l’exécution de son contrat de travail:
-17 304 € à titre de rattrapage de salaire et de dédommagement de la discrimination , celle de 1730 € au titre des congés payés [G] afférents,
-1394 € au titre de ses frais de formation (certification et DIF),
-512 € au titre du remboursement des frais de transport,
-343 € au titre des heures de DIF,
-50 000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation d’adaptation à son poste de travail,
-76 673 € au titre des heures supplémentaires, outre les congés payés afférents,
-30 000 € à titre d’indemnité de travail dissimulé,
-3 034 € au titre de restitution d’indemnités journalières de prévoyance,
-3 350 € au titre du solde des congés payés,
-10 000 € à titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de prévention, demande nouvelle,
-60 000 € à titre de dommages et intérêts pour les préjudices liés au manquement à l’obligation de sécurité,
-10 034 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice de salaire résultant de l’atteinte à la santé, demande nouvelle,
*Au titre de la rupture du contrat de travail:
Il sollicite principalement la nullité de son licenciement, sa prise d’acte étant consécutive à de graves manquements contractuels, pour la violation de son statut protecteur et le harcèlement discriminatoire, le non respect de l’obligation de sécurité et des salaires dus en fonction de sa qualification réelle; il fait les mêmes demandes à titre subsidiaire au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse :
-15 000 € à titre de l’indemnité de préavis, outre outre les congés payés afférents,
-7 639 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,
– 390 000 € à titre d’indemnité pour licenciement nul, la prise d’acte de rupture étant intervenue à la suite d’un harcèlement moral et de la violation de l’obligation de sécurité,
-150 000 € à titre d’indemnité pour violation du statut protecteur,
-15 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement brusque et vexatoire, demande nouvelle,
– 3000 € d’amende civile pour appel abusif, et 20 000 € à titre de dommages et intérêts pour pour appel dilatoire et abusif, demandes nouvelles,
– 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour arguments calomnieux, demande nouvelle,
– 5 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Il sollicite enfin la remise des documents sociaux conformes à l’arrêt, sous astreinte de 150 € par jour de retard et par document.
La société conclut à l’infirmation du jugement et au débouté de M. [U] en toutes ses demandes, estimant que la prise d’acte de rupture doit être qualifiée de démission, et sollicitant le paiement de l’indemnité de préavis d’un montant de 13 008 €, le remboursement de frais de transport indu pour la somme de 236,30 €, outre le paiement de la somme de 2500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la nullité de la convention de forfait, la prescription et les heures supplémentaires :
Aux termes de l’article L.3121-39 du code du travail «La conclusion de conventions individuelles de forfait, en heures ou en jours, sur l’année est prévue par un accord collectif d’entreprise ou d’établissement, ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche. Cet accord collectif préalable détermine les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait, ainsi que la durée annuelle du travail à partir de laquelle le forfait est établi, et fixe les caractéristiques principales de ces conventions ».
Toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail, ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires, à défaut, toute clause instituant un forfait jours ne satisfaisant pas à ces exigences visant à préserver la santé et la sécurité des salariés est réputée non écrite. Dès lors, les conventions de forfait passées en fonction de cette clause sont nulles, et le salarié est soumis à la durée légale du travail, de 35 heures hebdomadiares.
En l’espèce, le contrat de travail de M. [U] ne mentionne pas expressément qu’il était soumis à une convention de forfait annuel en jours, mais indique seulement: “En ce qui concerne l’organisation du travail dans le cadre de vos fonctions vous bénéficiez des modalités définies dans notre convention collective en matière de réduction du temps de travail”. Cette mention, qui ne vise même pas le terme “convention de forfait” ni le nombre de jours du forfait, est donc insuffisante pour établir l’existence d’une convention individuelle de forfait.
Au surplus, l’accord collectif SYNTEC du 22 juin 1999 a été invalidé par la Cour de Cassation par arrêt du 24 juin 2013, en raison de l’insuffisance des garanties destinées à assurer la protection de la santé et la sécurité des salariés, comme cela est bien le cas au sein de la société.
En effet, M. [U] reproche à son ex-employeur de n’avoir pas mis en place de mécanisme de contrôle de la charge de travail, avec une comptabilisation des heures de travail par jour, car seules les journées ou demi- journées étaient comptabilisées.
M. [U] réclame le paiement de ses heures de travail au delà de 35h depuis avril 2008, date de son embauche, tout en faisant valoir que la société a dissimulé aux salariés des informations sur les temps de travail réels, en ne faisant saisir les temps de présence qu’en jour et non en heures, en ne précisant pas la durée du travail dans les contrats de travail, tout en mentionnant la durée mensuelle de 166,82h sur les bulletins de salaire, sans que cela corresponde à la réalité du temps de travail.
Il produit le procès- verbal de la réunion du comité d’entreprise en date du 8 mars 2011 (étant précisé que M. [U] n’en faisait par partie) au cours de laquelle les manquements de la société ont été mis à jour et expliqués par ledit comité, notamment le fait que, à l’instar de M. [U], les salariés de la société n’ont pas signé de convention de forfait, de sorte qu’il [G] avait lieu de leur appliquer la modalité 1 standard de la convention collective (35h) et non la modalité 2 (38h30 ou 38,5h), ce qui justifiait des demandes de rappel de salaire pour tous les salariés concernés, que les réprésentants syndicaux s’engageaient à soutenir [G] compris dans le cadre d’actions judiciaires, information qui avait été diffusée par un tract syndical avant la réunion du comité.
La direction admettait au cours de cette réunion qu’il n'[G] avait pas de convention de forfait au sens juridique du terme, tout en indiquant que les salariés savent qu’ils ont un temps de travail de 38,5 h car c’est indiqué sur leurs bulletins de paie.
Il [G] a donc lieu de prendre en compte les horaires de travail de M. [U] à raison de 35h par semaine (soit 7h par jour) pour toute la période considérée, vu le constat de l’absence de convention de forfait jours, et la mention de 38h30 de travail hebdomadaire sur les bulletins de salaire, qui vaut jusqu’à preuve contraire.
Comme le soutient à tort la société, il n'[G] a pas lieu d’exclure d’emblée la période d’inter- contrat, en posant comme une évidence que le salarié en inter- contrat ne travaille pas plus de 35h, car il appartient à la société, sur laquelle repose la charge de la preuve que le salarié travaillait moins de 38h30, de rapporter cette preuve, ce qu’elle ne fait pas.
Selon l’article L.3245-1 du code du travail, issu de la loi du 14 juin 2013, l’action en paiement de rappel de salaire se prescrit par trois ans, à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou à compter de la rupture du contrat de travail.
Avant cette loi la prescription était quinquennale.
Il est constant que M. [U] a saisi le conseil avant la loi du 14 juin 2013, ce qui permet de faire application de la prescription quinquennale issue des dispositions de la loi du 17 juin 2008 , bien que sa demande en rappel de salaire ait été formée seulement par conclusions du 17 février 2014; en effet, toutes les demandes relatives au contrat de travail faites pendant l’instance suivent le même régime de prescription du fait du principe de l’unicité de l’instance; c’est ainsi que, contrairement à ce que soutient la société, les demandes sont recevables pour la période de 5 ans avant la saisine du conseil par M. [U], le 31 décembre 2012 (date de réception de ses demandes), soit du 24 avril 2008 (date de commencement de son travail) au 21 novembre 2012, date de la rupture du contrat de travail.
Les arguments développés par M. [U] au sujet de l’impact sur la prescription de la dissimulation aux salariés des informations sur leurs temps de travail réels n’ont donc pas lieu d’être examinés.
Pour l’ensemble de la période contractuelle du 24 avril 2008 au 21 novembre 2012, M. [U] produit les pièces suivantes:
– un fichier informatisé de suivi des heures travaillées reconstitué, avec le détail par jour,
– un décompte, mois par mois des heures travaillées, corroboré par la copie de son agenda électronique, de novembre 2009 à août 2010, où sont indiqués ses horaires de début et fin de travail outre les réunions, les déplacements et les personnes rencontrées, éléments établis au fur et à mesure des jours de travail,
– le relevé des courriels professionnels (objet indiqué le confirmant) envoyés à des heures tardives, entre 19h et 1h25, soit 60 courriels entre le 13 mai 2008 et le 4 mai 2010, période de la mission ALSTOM, la plupart des courriels étant envoyés entre 20h et 23h.
Face à ces éléments de preuve circonstanciés, la société ne fait qu’affirmer que, pendant la mission ALSTOM, M. [U] ne travaillait pas au delà de 38h30 par semaine, et que pendant sa période d’inter- contrat il ne travaillait que 35h, de sorte que la cour estime que M. [U] rapporte la preuve d’avoir effectué des HS pendant la mission ALSTOM au delà de 35h et même de 38h30, et d’avoir effectué 38h30 par la suite comme indiqué sur ses bulletins de paie et le fichier informatisé de suivi des heures travaillées reconstitué.
M. [U] retient dans ses calculs d’heures supplémentaires, deux périodes:
– la période de sa mission ALSTOM où il totalise 1665 heures d’avril 2008 à août 2010,
– la période d’inter- contrat, de septembre 2010 à février 2012 (car il sera en arrêt maladie à partir de mars 2012), où il totalise 196 heures entre 35 et 38h30 sur 18 mois.
Il prend comme base le coût horaire de travail la somme de 33 €, en partant de 5000 € de salaire brut, alors qu’il convient de retenir le salaire horaire contractuel, soit la somme de 25,98 € brut, correspondant à la somme de 4334 € (salaire brut sur ses bulletins de paie de 2008 à 2012) : 166,82 (forfait horaire mensuel).
Le salaire horaire majoré est de 25% x 25,98, soit 32,47 €, ce qui donne les calculs suivants:
– 1665 x 32,47 = 54 062,55 €,
– 196 x 32,47 = 6 364,12 €,
soit un total de 60 426,67 €, outre 6042,66 € au titre des congés payés afférents.
La société devra donc lui payer ces sommes, avec intérêts au taux légal à compter du 17 février 2014, date de la demande, la cour infirmant ainsi le jugement.
En revanche, la demande au titre du travail dissimulé est rejetée, la preuve de l’intention de la société de dissimuler les heures supplémentaires n’étant pas rapportée, la société étant persuadée, certes à tort, d’être en règle avec la législation (au vu de sa réponse au comité d’entreprise en mars) et n’ayant pas reçu de réclamation chiffrée de la part de M. [U] avant la fin de la relation contractuelle.
La cour confirmera de ce chef le jugement.
Sur la prise d’acte de rupture et la demande de nullité du licenciement pour harcèlement moral et non respect de l’obligation de sécurité:
La prise d’acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l’employeur empêchant la poursuite du contrat de travail.
Il convient en l’espèce de vérifier si les griefs invoqués par le salarié à l’encontre de l’employeur, [G] compris ceux non contenus dans la lettre de prise d’acte, trouvent leur origine dans un différend antérieur ou contemporain à la rupture, sans qu’il [G] ait besoin d’une mise en demeure préalable adressée par le salarié à l’employeur; cependant, il faut que le salarié ait fait état auprès de son employeur des manquements de ce dernier, soit avant sa démission soit de manière concomitante.
Sur le harcèlement moral avant et pendant le mandat syndical:
Selon l’article L 1152-1 et 2 du code du travail, aucun salarié ne soit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Selon l’article L 1152-3 du code du travail toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des articles L 1152-1 et 2 du code du travail,est nulle.
Selon l’article L 1154-1 du code du travail, il appartient au salarié de rapporter la preuve des faits qui permettent de présumer le harcèlement, et l’employeur doit rapporter ensuite la preuve que ces faits ne constituent pas du harcèlement.
Dans sa lettre de prise d’acte de rupture en date du 21 novembre 2012, M. [U] reproche à la société les faits suivants, soit chronologiquement et principalement:
– avant son élection comme délégué du personnel en décembre 2010, le manque de soutien et de reconnaissance de la société pendant et après la mission ALASTOM, le fait de ne pas lui avoir octroyé d’augmentation de salaire malgré la grande satisfaction de ce client, contrairement aux promesses faites par son supérieur hiérarchique, d’avoir un salaire inférieur aux autres salariés du groupe à poste équivalent, de ne pas lui avoir fourni de mission valorisante et conforme à ses qualifications et de ne lui avoir pas permis d’effectuer de formation pendant sa période d’inter-contrat à partir de septembre 2010 (apprentissage du chinois, actualisation de sa certification en management de projet),
– après cette élection, le fait d’avoir renforcé sa mise à l’écart, en lui proposant en février 2012 une mission dévalorisante, en ne lui accordant pas d’entretien d’évaluation, en refusant les formations, en ne lui payant pas ses frais de transport puis en les lui payant de manière partielle; en lien avec ses mandats de représentant du personnel, il reproche à la direction les nombreuses entraves à ses missions de délégué du personnel (DP)au sein du comité d’entreprise (CE) et de représentant du personnel élu au CHSCT, telles que l’absence de local syndical (CE, CHSCT et DP), la non attribution de badge d’accès pour lui permettre de circuler dans l’entreprise, l’impossibilité d’être contacté par les salariés, le retard dans l’accès à la formation de membre du CHSCT, l’absence de réunion de DP et CHSCT pendant 5 mois, l’absence de réponses de la direction aux questions des DP, le refus de la direction de recevoir le cabinet mandaté par le CHSCT pour réaliser une expertise sur les risques psycho- sociaux, les attaques personnelles répétées de la direction dans le cadre de ses mandats syndicaux, ces entraves ayant donné lieu à un procès- verbal d’entrave dressé le 17 février 2012 par l’inspecteur du travail.
Les griefs invoqués à l’appui de cette prise d’acte ont été tous exposés par M. [U] à son employeur, entre juillet 2010 et février 2012 antérieurement à son arrêt- maladie et à sa prise d’acte.
La société soutient que toute situation de tension dans l’entreprise en peut recevoir la qualification de harcèlement moral, et estime qu’à compter de la fin de sa mission chez ALSTOM M. [U] n’a cessé de se “victimiser” et de contester toute action de sa hiérarchie, qu’il s’agisse de nouvelles missions ou de toute décision le concernant, notamment concernant sa rémunération.
Concernant l’entrave à l’exercice des mandats syndicaux, la société considère que les incidents (cloison dégradée dans un bureau, horaire d’avion inadaptés pour se rendre au CHSCT à [Localité 2]) déplorés par M. [U] étaient exagérés pour faire croire à la défaillance de la société. En outre, elle note que les manquements invoqués sont bien antérieurs à la prise d’acte.
Elle conteste avoir tenu des propos dénigrants ou insultants à son égard en lien ou non avec ses fonctions de représentant du personnel.
*
– sur l’absence de reconnaissance et l’absence de missions adaptées aux compétences de M. [U]:
Il n’est pas contesté que M. [U] s’est fortement impliqué dans la mission ALSTOM pendant plus de 2 ans, que son travail a été particulièrement apprécié, et que c’est le client qui finalement n’a pas souhaité poursuivre cette mission à temps plein pour des raisons de coûts.
M. [U] soutient cependant que le client ALSTOM aurait préféré poursuivre sa mission, ne serait-ce qu’à temps partiel (avec pour M. [U] un complément de travail au titre de ses heures de délégation syndicale en perspective), jusqu’en janvier 2011, comme initialement prévu; cela est effectivement confirmé par l’ordre de mission en date du 1er février 2010 signé par M. [L] directeur du développement et supérieur hiérarchique de M. [U], et indiquant que la mission de M. [U] se déroulait du 1er février 2010 au 31 janvier 2011 (pièce 3 de l’appelant).
Par ailleurs, comme l’indique son collègue M. [I] (travaillant en binôme avec lui chez ALSTOM) dans son attestation, tous deux n’ont pas été soutenus par l’interlocuteur projet de la société, qui se déplaçait rarement et avait annulé à plusieurs reprises les rendez- vous avec eux et le client, ce qui n’est pas contesté par la société; en outre, tous les deux ont dû, en raison d’une mauvaise organisation de la société, écouler en une semaine une centaine de tickets restaurants avant qu’ils ne périment.
Il confirme aussi qu’ils n’avaient reçu aucune instruction de la société sur la date effective et les conditions de fin de leur mission chez ALSTOM, précisant que lui et M. [U] ressentaient pour l’ensemble de ces raisons un manque de considération de la part de leur employeur.
Comme M. [U], M. [I] indique avoir reçu une promesse d’augmentation la première année, promesse partiellement tenue en ce qui le concerne.
Il résulte de ces éléments que M. [U] a souffert d’un manque de soutien et de considération de la part de la société courant 2010, aggravé par un entretien annuel tardif et tronqué réalisé en novembre 2010, comme développé ci- après.
C’est dans ce contexte de relations de travail dégradées et imputables à la société, que cette dernière établit avoir proposé à M. [U] plusieurs missions entre septembre et fin novembre 2010, que ce dernier a refusées, comme cela ressort notamment de la fiche d’entretien du 30 novembre 2010:
– en septembre: une mission pour la société Astrium poste PMO Ariane, que M. [U] a estimé un peu lointaine géographiquement, que le client a finalement retiré en novembre, privilégiant le recrutement d’un salarié;
– le 1er octobre: une mission IT PMO chez ING FRANCE, pour faire de la planification des livraisons du département informatique, l’organisation et le pilotage des réunions de ce département, poste correspondant à ses qualifications, bien qu’en dessous de ses capacités, mais qu’il refusait, en invoquant une rétrogradation qui nuirait à son employabilité (pièce 24), alors qu’au vu de la fiche de poste il s’agissait d’une mission dépassant le simple planning puisqu’elle incluait un accompagnement de projets, en lien justement avec le management de projet;
– le 28 octobre: étude puis mission proposées par M. [F] (pièce 25) sans fiche de poste ou précisions, qu’il a pu valablement refuser, faute de détails et au regard de la distance par rapport à son domicile, invoquant aussi une inadaptation à ses compétences;
– en novembre: une mission à Air France (support sur une application et administration réseau) que M. [U] a jugé sous- dimensionnée par rapport à ses compétences, puis
une autre mission à Air France ( AMOA rédaction cahier des charges) que M. [U] a jugé encore sous- dimensionnée, outre que ses trajets allaient être de 4h/jour (pièce 8), alors qu’il aurait pu demander une compensation financière à ce titre et un aménagement de son temps de travail en tant que cadre.
M. [U] soutient qu’il s’agit de la même mission, point sur lequel il est difficile de trancher faute de précisions de part et d’autre.
Parmi les trois missions précises proposées, qui rentraient dans les compétences de M. [U] deux étaient à l’évidence sous- dimensionnées, mais une ne l’était pas, celle chez le client ING.
M. [U] ne peut donc invoquer, pour la période de septembre 2010 à décembre 2010, une absence totale de missions adaptées à ses compétences qui constituerait un traitement vexatoire, ni la lier à l’annonce en juin 2010 de sa candidature aux élections, alors que sa mission ALSTOM n’était pas encore terminée à cette époque (elle se terminera fin juillet).
Il est utile de préciser qu’en octobre 2010, au vu du courriel du 3 octobre 2010, M. [U] n’avait pas refusé néanmoins d’assurer le coaching d’un collègue, ce qui démontre qu’il n’était pas dans un refus systématique d’accepter un travail, comme le soutient la société.
Face aux refus réitérés de M. [U] d’accepter les missions proposées, la société a envisagé de proposer une rupture conventionnelle à M. [U], comme cela ressort du courriel de M. [F] en date du 28 octobre 2010.
En effet, à ce stade, tant le salarié que l’employeur n’étaient pas satisfaits de l’évolution de la relation contractuelle, l’employeur étant toutefois largement à l’origine de cette dégradation, comme indiqué plus haut.
Par la suite, il n’est pas contesté par la société qu’elle n’a proposé aucune mission à M. [U] pendant 14 mois, de janvier 2011 à février 2012.
Le 22 février 2012, soit quelques jours après le procès- verbal d’entrave à l’exercice des missions des représentants du personnel dressé par l’inspecteur du travail le 17 février 2012, une dernière mission, soit disant à haute valeur ajoutée, lui a été proposée par la société, qui même de l’avis d’un de ses collègues M. [V] (au vu de son courriel du 1er mars 2012) était largement dévalorisante, puisqu’elle convenait, selon le client ASTRIUM, à un débutant ou un salarié avec une première expérience, ce que la société ne dément pas dans ses conclusions.
Le fait de ne proposer aucune mission à M. [U] pendant une période aussi longue, puis de lui proposer une mission pour débutant, alors qu’il avait de nombreuses années d’expérience en management de projet, constitue une “mise au placard” et des faits répétés caractérisant du harcèlement moral.
C’est à la suite de cette proposition de mission, inacceptable pour M. [U], et à la suite des difficultés rencontrées dans l’exercice de ses mandats syndicaux, que ce dernier a d’ailleurs été placé en arrêt- maladie à compter du 2 mars 2012 pour de longs mois.
– sur l’absence de revalorisation de salaire et d’entretien annuel:
M. [U], qui ne bénéficiait pas d’une rémunération variable contractuellement, n’établit pas qu’une promesse de revalorisation de son salaire lui avait été faite par M. [L] son supérieur hiérarchique.
Or la société indique que la promesse portait sur une prime d’objectifs de 3000 € suivant des objectifs collectifs, alors que M. [U] réclamait des objectifs individuels que la société ne souhaitait pas accorder.
Ce point de vue de la société ressort effectivement des courriels échangés entre M. [U] et sa hiérarchie en pièces 20 à 22 de la société.
Il existait bien un désaccord sur les conditions de la prime d’objectifs, mais aucun engagement écrit n’avait été exprimé par la société concernant l’augmentation du salaire fixe, ni dans le contrat de travail ni par courriel.
Dès lors, l’argumentation de M. [U] n’est pas pertinente faute de preuve.
La société établit que des entretiens annuels (pièces 8 et 23) ont eu lieu en novembre 2010 et décembre 2011, que M. [U] a refusé un entretien en 2009 (au vu des courriels échangés avec M. [U] en pièce 20) et que l’entretien n’a pas eu lieu en 2012, en raison de son arrêt- maladie de mars à novembre 2012 et de son départ fin 2012.
Toutefois la teneur des compte- rendus d’évaluation est particulièrement pauvre car:
– En novembre 2010, il [G] a juste la mention “TB satisfaction du client” concernant la mission ALSTOM de plus de 2 ans, et la mention de propositions d’autres missions refusées par le salarié, sans aucune mention des qualités de M. [U] dans l’exécution de la mission longue chez ALSTOM, le tout sur une demi-page; ce manque de développement s’explique en partie par l’absence de son supérieur hiérarchique lors de l’entretien de fin de mission avec le client, ce dont M. [U] s’est plaint; on ne peut donc pas considérer qu’il s’agit d’un véritable entretien d’évaluation mais plus un point de situation en période d’intercontrat.
– En décembre 2011 le compte- rendu de 2 pages est limité à la reproduction des souhaits (notamment de formation et d’évolution)et constats de M. [U] sur des points négatifs dans la relation contractuelle (absence d’augmentation de salaire, d’objectifs individuels, de formation, vexations…), sans précision de sa hiérarchie sur ses points forts, les points à améliorer, sans aucune fixation d’objectifs; il n’est pas possible de distinguer dans ce compte- rendu ce que conclut le supérieur hiérarchique sur les qualités de M. [U]; à la demande de ce dernier, qui déplorait ne pas avoir été évalué sur cette mission ALSTOM, il est fait état des remarques, positives et négatives de ce dernier sur le déroulement de la mission ALSTOM qui était difficile mais qui a été exécutée de manière très satisfaisante.
Il est donc manifeste que les deux seuls entretiens annuels effectués en plus de 4 ans de relation contractuelle sont superficiels, ne remplissent pas leur rôle et n’ont pas été de nature à le motiver et le dynamiser pour qu’il accepte de se positionner sur d’autres missions. Ces manquements de l’employeur ont contribué à bloquer la situation.
Il peut donc être reproché à la société d’avoir contribué à la démobilisation du salarié, en n’effectuant pas de véritables entretiens d’évaluation de manière régulière.
– sur l’absence d’outils de travail et les changements de bureau contribuant à son isolement:
M. [U] soutient ne pas avoir eu d’adresse de messagerie au sein de la société au retour de sa mission ALSTOM, malgré ses demandes.
Il ressort effectivement des pièces produites (courriels échangés entre M. [U] de la messagerie Alstom et l’assistante de gestion de la société entre juillet et octobre 2008) que pendant sa mission à Alstom il ne bénéficiait pas d’adresse de messagerie de la société.
Par la suite, par courriel de janvier 2009 il s’étonnait que ce problème ne soit pas résolu, alors qu’il avait déjà fait la demande d’ouverture de compte en 2008 à 2 reprises; c’est alors qu’il refusait de refaire cette demande fin janvier 2009, alors que son supérieur hiérarchique lui expliquait dans un courriel qu’il manquait des renseignements sur les accès qu’il venait de rajouter, reconnaissant son erreur.
C’est ainsi que la situation était bloquée jusqu’à fin 2010, M. [U] refusant par principe de remplir une nouvelle demande.
Cette difficulté pouvait donc être réglée si M. [U] avait fait preuve d’un peu de souplesse, bien qu’il ne soit pas à l’origine de l’erreur.
Ce fait ne constitue pas du harcèlement moral, mais a certainement compliqué la communication entre lui, la société et les salariés, en particulier dans le cadre de ses mandats syndicaux.
Le fait que M. [U] ne disposait pas d’un ordinateur professionnel n’est pas contesté par la société; il se servait donc de son ordinateur personnel qu’il amenait chaque jour.
M. [U] soutient encore qu’il était mis à l’écart, toujours isolé seul, notamment dans un bureau de l’aile de la direction.
Il ressort de sa lettre en date du 11 novembre 2010 adressée à M. [F] que fin octobre 2010, suite à des travaux dans la salle où M. [U] était installé, ce dernier a été transféré dans un bureau de l’aile des consultants, ce qui lui convenait; cependant M. [F] a demandé à ce que M. [U] soit installé dans l’aile de la direction, seul dans un bureau de passage, ce qu’il a ressenti comme une sanction.
Par lettre du 29 mars 2011 adressée à M. [J], son nouveau supérieur hiérarchique, M. [U] indique qu’il allait s’installer dans le local des consultants en inter-contrats, quand M. [J] l’a invité à s’installer dans un bureau vide à côté du sien, contribuant encore à l’isoler.
La société, sans s’expliquer sur la première période concernée d’octobre/novembre 2010 et le changement de bureau imposé sans raison par M. [F], rétorque que M. [U] a disposé à son retour de congé (le 21 février 2011) d’un grand bureau d’un manager commercial en congé maternité, dont on ne sait s’il s’agit du bureau situé dans l’aile de la direction, car son bureau était occupé entre-temps par des salariés en inter-contrat, ce qui reste à démontrer.
Vu l’absence de précisions dans l’argumentation de la société et de réponses données à ces deux lettres au sujet de son changement de bureau, la cour retiendra les faits tels que relatés par M. [U] à l’époque dans ses deux lettres, à savoir le fait qu’un changement de bureau lui a été imposé à plusieurs reprises, sans véritable raison, et qu’il s’est de ce fait retrouvé isolé.
Ces différents changements de bureau, non préparés, non discutés préalablement ni expliqués rationnellement, sont des faits établis, au sujet desquels la société s’explique de manière insuffisante, et qui ont contribué à l’isolement de M. [U].
– sur le DIF et le refus d’une formation, sur la mise à jour de sa certification, condition du maintien de son employabilité:
La société a refusé la demande de formation de M. [U] en chinois, adressée à 2 reprises par ce dernier à la direction en septembre 2010 et mai 2011 au titre du DIF, invoquant le fait qu’il s’était rendu en Chine lors de sa mission ALSTOM et que le groupe EUROGICIEL était présent en Chine; faute de réponse de la société, M. [U] a effectué cette formation, comme le prévoit la législation, hors de son temps de travail et l’a personnellement financée à hauteur de 702 €.
La société indique que des formations en anglais, allemand et espagnol sont proposées dans le cadre du plan de formation de l’entreprise, et plus conformes au développement du groupe à l’international.
Or la formation en chinois, si elle n’est pas inintéressante, n’apparaît pas de nature à développer l’employabilité de M. [U] dans le groupe; ce dernier aurait pu demander une des formations prévues par le plan de formation, ce qu’il n’a pas fait.
Concernant la non prise en charge de la mise à jour de la certification PMP (management de projet) de M. [U], la société invoque le fait que ce dernier n’en a pas fait la demande écrite dans un délai suffisant lui permettant de répondre.
Or, il ressort d’un courriel de M. [U] en date du 20 novembre 2008 que ce dernier avait depuis 2008 interpellé la société sur cette mise à jour, mais la société n’a jamais remboursé le salarié de ses frais de formation, laquelle était indispensable pour le maintien de ses compétences; au vu des pièces produites (117, 118) les frais de certification non remboursés par la société au titre des années 2008 et 2011 s’établissent à la somme de 348,87 € (176,57 + 172,30); un erreur de centimes ayant été commise par le conseil, ce dernier sera infirmé de ce chef.
La société sera condamnée au paiement de cette somme de 348,87 € au titre des frais de renouvellement de certification PMP.
Les droits à des heures de formation acquis au 31 décembre 2014 au titre du droit individuel à la formation (DIF) obéissent désormais au régime applicable aux heures inscrites sur le compte personnel de formation en vigueur au 1er janvier 2015, mais toutes les dispositions anciennes n’ont pas été reprises.
Selon l’article L.6323-17 du code du travail, qui reprend les dispositions anciennes sur le DIF, les formations financées dans le cadre du compte personnel de formation ne sont pas soumises à l’accord de l’employeur lorsqu’elles sont suivies en dehors du temps de travail, ce qui a été le cas pour M. [U] en 2011.
Cependant la prise en charge des frais de formation est soumise à certaines conditions, comme auparavant.
En effet, selon l’article L.6323-8 ancien du code du travail, des priorités peuvent être définies pour les actions de formation mises en ‘uvre dans le cadre du DIF par convention ou accord collectif de branche; à défaut les actions de formation sont des actions de promotion mentionnées à l’article L.6313-1 ancien du code du travail et les actions de qualification mentionnées à l’article L.6314-1.
Or, aucun élément n’est fourni sur l’existence d’un accord d’entreprise à ce sujet et M. [U] ne rapporte pas la preuve que ces cours de chinois font partie des formations sanctionnées par une certification et/ou mentionnées sur la liste des formations éligibles au DIF selon les articles précités.
M. [U] n’établit donc pas qu’il remplit les conditions de prise en charge par l’employeur de ses cours de chinois à l’Institut Confucius (au vu de la facture en date du 9 septembre 2011).
Il sera donc débouté de sa demande de remboursement de la somme de 702 € au titre de ses cours dans le cadre du DIF, comme l’a jugé le conseil qui sera confirmé de ce chef.
– Sur les violences verbales de M. [J] :
M. [U] soutient que son supérieur hiérarchique d’alors, M. [J] à deux reprises, les 24 février et 4 juillet 2011, l’a insulté, en lui disant le 24 février qu’il était un grand malade mental puis le 4 juillet “coucouche panier” devant Mme [G], tout en lui interdisant le 4 juillet le même jour de s’entretenir, au titre de son mandat syndical, avec une autre salariée qui parlait avec lui dans son bureau.
Dans une lettre du 29 mars 2011, il relate les faits du 24 février, mais aussi ceux du 3 mars 2011, similaire à ceux du 4 juillet; en effet, il indique que le 3 mars M. [J] lui a interdit de parler avec un jeune embauché qui l’avait sollicité pour un renseignement sur ses droits.
Il produit une attestation d’une autre salariée, Mme [G], qui confirme ses dires au sujet des faits du 4 juillet.
Or, la société n’a jamais répondu à la lettre de M. [U] à l’époque et conteste l’ensemble de ces faits, sans produire aucun élément, se contentant de critiquer la valeur probante de l’attestation, qui est dactylographiée et émane d’une salariée qui a perdu son procès relatif à son licenciement, mais qui est très circonstanciée et que la société n’a pas attaqué pour faux.
En conséquence, ces faits d’insultes et d’entrave à l’exercice du mandat syndical, sont établis.
– sur les frais de transport:
M. [U] réclame le remboursement de 100% de son abonnement mensuel NAVIGO, alors qu’il ne justifie pas pouvoir en bénéficier du fait qu’il est en inter- contrat sur la période considérée de septembre 2010 à mars 2012 (tableau page 77 de ses conclusions).
Au vu de son tableau, il n’est pas contestable que la société, qui devait lui rembourser 50% de ses frais de transport, soit environ 714 € (addition de la colonne frais de transport : 2), lui a remboursé la somme d’environ 917 € (colonne remboursé), certes avec retard car les versements ne s’effectuaient pas mensuellement mais au bout de 5 mois en février 2011 puis de 4 mois en juillet 2011, avec un rattrapage final en novembre 2011.
Le salarié ne pouvait donc se plaindre d’une absence de remboursement, mais seulement d’un retard et d’un irrégularité dans le remboursement.
Sa demande au titre des frais de transport sera rejetée, au vu du solde en sa faveur.
En revanche, vu les retards dans le remboursement, qui ne sont pas contestés, il convient de ne pas faire droit à la demande en paiement de la société, au titre du solde de 236,50 € en sa faveur, qui est en réalité de 203 € (917 moins 914), ce solde étant compensé par l’allocation de dommages et intérêts pour le même montant au titre du préjudice de M. [U] résultant du retard de paiement.
Le jugement sera donc infirmé de ce chef.
M. [U] produit des certificats médicaux d’arrêt- maladie sur les périodes suivantes: du 23 au 28 juillet, du 6 au 12 septembre, du 20 au 22 octobre, du 29 octobre au 9 novembre, du 10 au 12 novembre 2010, du 9 au 12 mars 2011, du 5 au 10 mai, du 8 au 10 juillet, du 25 au 27 juillet, du 2 au 4 novembre 2011, du 27 janvier au 3 février 2012 sans mention des causes; c’est à partir du certificat médical du 2 mars 2012, prescrivant un arrêt maladie du 2 au 9 mars puis des arrêts jusqu’à sa prise d’acte de novembre 2012 et au delà jusqu’au 26 juillet 2013, que le médecin mentionne que M. [U] souffre d’un état anxio-dépressif.
Dans un courrier du 2 mars 2012 le médecin du travail indique à un confrère avoir constaté l’effondrement psychique de M. [U], qui semble en lien avec une situation de travail très dégradée, précisant qu’il est très investi dans son mandat pour lequel il n’a pas de soutien, et le déclarant inapte temporairement, avec nécessité d’un soutien thérapeutique.
C’est ainsi que M. [U] a été suivi depuis avril 2012 par un psychiatre spécialisé dans la souffrance au travail, au vu du certificat médical de ce dernier en date du 30 novembre 2016.
Selon un autre certificat médical en date du 1er août 2013, le psychiatre indique que M. [U] souffre d’un syndrome dépressif marqué avec des éléments de syndrome de stress post- traumatiques, alors que le patient est sans antécédent.
En conclusion, la cour, après avoir examiné l’essentiel des manquements de la société dont M. [U] se plaint, juge que ce dernier a effectivement subi des faits répétés constitutifs de harcèlement moral ayant dégradé ses conditions de travail et sa santé, au vu de la chronologie des arrêt- maladie et des suivis médicaux susvisés en lien avec une souffrance au travail, à savoir: un manque de considération dans le cadre de la mission ALSTOM, un manque d’entretiens d’évaluation consistants, des changements de bureau intempestifs et non expliqués, un défaut de prise en charge d’une formation/certification PMP, une absence de proposition de missions pendant 14 mois, une absence de fourniture d’un ordinateur, un manque de réponses à ses différents courriers, des dénigrements et des insultes d’un membre de sa hiérarchie, un retard dans le remboursement de frais de transport, tous ces faits s’égrenant sur une période longue de septembre 2010 à novembre 2012, avant sa prise d’acte.
Cette prise d’acte étant justifiée par le harcèlement moral subi, elle sera requalifiée en rupture du contrat de travail aux torts de la société le 21 novembre 2012, avec les effets d’un licenciement nul, de sorte que le jugement sera infirmé concernant le harcèlement moral.
En application de l’article L. 1235-5 du code du travail, la société sera condamnée à rembourser à Pôle Emploi les allocations chômage versées le cas échéant à M. [U] à hauteur de 2 mois, comme l’a jugé le conseil.
Sur le salaire de référence pour le calcul des indemnités:
Faute d’explication sur la manière dont M. [U] calcule ce salaire, qu’il porte à 5000 € , il [G] a lieu de retenir le salaire brut des 12 derniers mois complets, d’octobre 2011 à octobre 2012, soit 4334 €, auquel il sera ajouté le prorata d’heures supplémentaires, calculé comme suit:
– période des heures supplémentaires: d’octobre 2011 à février 2012, soit 5 mois,
– 6 364,12 € x 5 :18 mois = 1767,81€
– 1767,81 : 12 mois = 147,31 €.
D’où un salaire de référence de 4 481,31 €.
En conséquence, M. [U] percevra l’indemnité de préavis et l’indemnité de licenciement suivants:
– 13 443,93 € brut à titre d’indemnité de préavis de 3 mois, outre la somme de 1344,39 € au titre des congés payés afférents,
– 6 841,46 brut à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement, soit 1/3 de mois par année de présence (4481,31 x 1/3 x 4,58 années),
avec intérêts au taux légal à compter du 5 janvier 2013, date de réception par la société de sa convocation en bureau de conciliation.
Enfin, il percevra une indemnité de licenciement nul fixée à la somme de 30 000 €, au regard du salaire, du préjudice et de l’ancienneté du salarié limitée à 4 ans 7 mois.
La cour infirmera donc le jugement sur le montant des indemnités.
La solution adoptée par la cour rend sans objet la demande reconventionnelle de la société en paiement de l’indemnité de préavis.
La demande en dommages et intérêts de 15 000 € pour licenciement brusque et vexatoire est rejetée, puisque c’est M. [U] qui a pris l’initiative de la rupture de la relation contractuelle en faisant une prise d’acte.
Sur le non respect de l’obligation de sécurité et de santé au travail, et de l’obligation de prévention associée:
En application de l’article L.4121-1 du code du travail, l’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, en faisant des actions de prévention des risques professionnels, des actions de formation et d’information et en mettant en place une organisation et des moyens adaptés.
En plus des faits répétés constitutifs de harcèlement moral déjà retenus , la société n’a pris aucune mesure pour la prévention tant du harcèlement moral que de la dégradation des conditions de travail de M. [U] qui en résultaient, faits dont elle avait connaissance; en effet, malgré les lettres de ce dernier en 2011 et début 2012, auxquelles elle répondait rarement, et malgré l’alerte du médecin du travail en date du 2 mars 2012, la société n’a engagé aucune démarche de prévention des risques psycho sociaux, ni proposé de missions à M. [U] pendant 14 mois, lequel se trouvait dévalorisé et mise à l’écart dans un bureau, comme précisé plus haut.
Sur le site de Malakoff où travaillait M. [U] il n'[G] avait pas en 2011 et jusque mi-2012 de document unique faisant une évaluation des risques professionnels ni de tenue d’un registre de sécurité concernant la sécurité incendie, malgré les demandes de M. [U] à la direction par courriel du 23 mai 2011 après la visite du CHSCT du 14 avril 2011 constatant de nombreuses non conformités affectant la sécurité des locaux.
Lors cette visite le CHSCT relevait dans son compte- rendu que la direction exprimait des moqueries sur les constats du CHSCT, ce qui fait écho au manque de considération de la société pour les fonctions des représentants du personnel, comme M. [U], lequel avait été en outre empêché de communiquer à au moins deux reprises avec des salariés (cf le comportement de M. [J] au titre du harcèlement moral).
Ce n’est que lors de sa réunion du 12 octobre 2012 que le CHSCT a pu examiner l’initialisation du plan de prévention des risques professionnels, jusqu’alors inexistant.
Par ailleurs, indépendamment de la situation individuelle de M. [U], il existait au sein de la société un climat délétère, caractérisé par une augmentation du taux d’absentéisme pour maladie en 2011 et par un “turn- over” important des salariés sans plan social, dont le CHSCT s’était inquiété lors de sa réunion du 28 mars 2012.
La société sera donc condamnée, sur le fondement du non respect de l’obligation de sécurité et de santé au travail de septembre 2010 à novembre 2012 et du manquement à l’obligation de prévention des risques professionnels, à payer à M. [U] à titre de dommages et intérêts la somme globale de 10 000 € pour réparer son préjudice moral.
Sur la violation du statut protecteur du fait de l’entrave à ses mandats syndicaux :
Comme exposé plus haut, il est établi que M. [U], élu délégué du personnel en décembre 2010 puis comme représentant du personnel au CHSCT en mars 2011, alors qu’il avait déjà plus de 2 ans d’ancienneté et un salaire déjà plutôt bas par rapport à ses fonctions et son expérience, n’a par la suite jamais obtenu d’augmentation de salaire en 2 ans, sans que la société s’en explique.
L’entrave aux mandats syndicaux de M. [U] est suffisamment constituée, au vu des éléments déjà établis au titre du harcèlement moral, tels que le fait de l’empêcher de communiquer à au moins deux reprises avec des salariés, de ne pas lui faire bénéficier d’augmentation de salaire, de lui faire changer de bureau de manière inopinée dans le but de le mettre à l’écart des autres salariés, et de ne pas lui proposer de mission pendant 14 mois.
La société, par ses atermoiements, retardait M. [U] et ses deux autres collègues, représentants du personnel élus au CHSCT, dans le suivi de leur formation obligatoire, comme cela ressort des échanges de courriers et courriels en avril/mai 2011, ce qui amenait l’inspectrice du travail à faire un rappel à la société pat lettre du 6 mai 2011.
Par ailleurs, l’inspectrice du travail, après un contrôle effectué le 15 juin 2011 au sein de l’établissement de [Localité 3], envoyait à la société un courrier en date du 27 juin 2011, aux termes duquel elle relevait les difficultés suivantes:
– les réunions mensuelles entre le délégué du personnel, M. [U], et la direction avaient été organisées par la direction avec un retard de 6 mois après les élections,
– M. [U] ne disposait pas d’un bureau en tant que délégué du personnel,
– il ne disposait pas d’un panneau d’affichage en place (panneau posé au sol),
– la direction ,n’avait pas fait droit à une demande de réunion exceptionnelle du CHSCT, faite par M. [U] et un autre représentant du personnel, aux fins d’examen des risques professionnels et l’élaboration d’un plan de prévention de ces risques, alors qu’aucun document unique d’évaluation des risques professionnels n’avait encore été élaboré.
Loin d’être un salarié difficile à gérer, comme l’indique à tort le conseil, M. [U] a toujours cherché à exercer ses mandats de représentant du personnel avec engagement et dans le respect des règles et l’intérêt collectif des salariés, ce qui explique qu’il ait été sollicité pour assister aux entretiens préalables aux licenciements de M. [F] directeur d’établissement et de M. [Z] directeur général du groupe.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, il apparaît donc que la société n’a pas respecté le statut de salarié protégé de M. [U], qui a été contraint de faire une prise d’acte de rupture de son contrat de travail tant en raison du harcèlement moral subi que du non respect de ses prérogatives de représentant du personnel, ce qui justifie l’allocation d’une indemnité forfaitaire égale aux salaires qu’il aurait perçus jusqu’à la fin de la période de protection, soit la somme de 130 020 € représentant 30 mois de salaire (30 x 4334), comme l’a jugé le conseil que la cour approuve, au vu d’une jurisprudence constante au visa de l’article L.2411-5 du code du travail.
Le préjudice de salaire pour l’atteinte à la santé (nouvelle demande) étant inclus dans le préjudice lié à la violation du statut protecteur et au harcèlement moral, déjà indemnisés, il n'[G] a pas lieu d’accorder de dommages et intérêts spécifiques de ce chef.
Sur la demande de revalorisation du salaire au coefficient 210 de la convention collective :
Aux termes de l’article L. 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, en raison notamment de ses activités syndicales.
L’article L. 1134-1 du même code dispose qu’en cas de litige relatif à l’application du texte précédent, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte et il incombe à la partie défenderesse, au vu des ces éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
La demande de M. [U] se fonde sur la discrimination syndicale, ce dernier estimant qu’il n’a pas eu le salaire et la promotion en position 3.2 qu’il aurait dû avoir, par comparaison à d’autres salariés de la société occupant soit des postes comparables soit de niveau inférieur.
M. [U], embauché avec un salaire de 4334 € brut/mois (52 000 € brut/an), sans primes, en qualité de consultant en management de projet statut cadre position 2.3 coefficient 150 de la convention collective dite SYNTEC, soutient qu’il a été maintenu depuis 2010 à une position et un coefficient ne correspondant pas à son poste, son expérience et son niveau de qualification, et qu’il n’a bénéficié d’aucune augmentation; il revendique au jour de sa prise d’acte, en novembre 2012, la position 3.2 avec le coefficient 210, et un salaire de 60 000 € brut/an, qui correspond à l’ingénieur ou cadre prenant des initiatives et ayant une responsabilité, suscitant orientant et contrôlant le travail de ses subordonnés, car dans sa mission ALSTOM il avait une complète autonomie dans la gestion du projet, n’étant limité que par le budget alloué par la direction, et en outre il encadrait un salarié cadre, analyste métier du projet.
Il fait valoir que son salaire était proche du minimum conventionnel (de 4078 € brut) et inférieur à celui d’autres salariés à poste et profil équivalents, citant nommément à la fois 3 salariés consultant en gestion de projet (avec des salaires annuels de 60 648, 82 000 et 99 000 €), dont un avec la même position et le même coefficient que lui, mais aussi 2 salariés moins qualifiés que lui (avec des salaires de 57 000 et 53 700 €), qui ont tous les 5 des salaires supérieurs au sien.
La société rétorque que cette demande, au vu des chiffres annoncés des salaires d’autres collègues, n’est pas justifiée par des pièces, sans pour autant produire elle-même ces justificatifs dont elle est détentrice (bulletins de paie ou graphique des salaires par catégorie de cadre).
Or, en l’absence d’éléments sur les diplômes de ces 5 salariés, sur leur expérience et leur date d’embauche, la cour ne peut apprécier la pertinence de la demande de revalorisation de salaire et de classification, qui suppose de disposer d’un panel de salariés ayant un poste, une qualification et une expérience comparables à la situation de M. [U] et de suivre l’évolution de leur salaire et de leur position entre 2008 et 2012.
M. [U] sera donc débouté de sa demande de modification de position et coefficient.
En revanche, il est établi qu’il n’a jamais bénéficié d’augmentation de salaire en 4 ans, [G] compris après une mission longue au cours de laquelle il a donné pleinement satisfaction; l’absence d’augmentation de son salaire fixe, couplée à l’absence de primes, constitue un élément objectif que lequel la société ne s’explique pas et qui est déjà indemnisé au titre de la violation du statut protecteur.
Sur les autres demandes diverses :
Sur le manquement à l’obligation d’adaptation à son poste de travail:
M. [U] déplore une absence de formation pendant plus de 4 ans et une mise au placard, nuisant à sa capacité à occuper un poste.
La société soutient qu’aucune périodicité n’est exigée par la loi, et qu’au regard de son ancienneté de 4 ans (si l’on exclut la période d’arrêt- maladie de 9 mois en 2012), l’absence de formation ne constitue pas un préjudice.
Or, la cour considère qu’il était loisible pour M. [U] de solliciter une formation s’inscrivant dans le cadre du plan de formation de la société, ce qu’il n’a pas fait, préférant suivre des cours de chinois, non directement utiles à son employabilité.
Sa demande sera donc rejetée.
Sur le remboursement des heures de DIF non utilisées:
La société, sans mentionner les textes applicables, objecte que les heures de DIF non utilisées sont perdues en cas de prise d’acte de rupture, laquelle ne donne pas droit au chômage ; la cour en déduit qu’elle se fonde sur les anciens articles L.6323-17 et 18 du code du travail, qui posent des conditions particulières pour l’exercice du DIF après la rupture du contrat de travail, notamment en cas de démission.
Or, dès lors que la prise d’acte produit les effets d’un licenciement nul et non d’une démission, la société ne peut se prévaloir de ces dispositions, de sorte qu’il convient de faire droit à la demande de M. [U], en lui allouant la somme de 343 € au titre des heures de DIF non utilisées.
Sur le solde de congés payés :
Comme le soutient valablement la société, il restait bien à M. [U] des jours de congé payés à prendre (soit 14,5 jours) qu’il aurait du prendre entre le 1er mai et le 31 octobre 2011, sans qu’il soit établi qu’il en ait été empêché, puisqu’il n’était ni en arrêt maladie ni en mission à cette époque.
Cette demande sera donc rejetée, comme l’a jugé le conseil.
Sur les indemnités de prévoyance :
M. [U] soutient que la société ne lui aurait pas reversé la somme de 3034 € correspondant à 10% des prestations prévoyance (90% du salaire brut étant du par l’AG2R La Mondiale, mais la société ne lui aurait reversé que 80%) pour la période d’arrêt- maladie de juin à novembre 2012 pendant laquelle la société était subrogée dans les droits de M. [U].
La société ne réplique pas sur ce point, alors que M. [U] produit des justificatifs étayant sa demande (pièces 124 à 126), de sorte que la cour fera droit à sa demande.
Sur l’amende civile, les dommages et intérêts pour appel abusif et argument calomnieux:
Il n’est pas avéré que la société ait formé un appel abusif, puisque sur certains points la cour lui a donné raison.
Si la société ne respectait pas le contradictoire dans la communication des pièces, comme le soutient M. [U], il appartenait à ce dernier de demander que ces pièces soient écartées, ce qu’il n’a pas fait.
Concernant la demande de renvoi de la société qui aurait été dilatoire en mai 2016, la société invoquant un changement d’avocat et l’envoi prochain de nouvelles conclusions qui se sont avérées identiques, il est difficile d’en conclure systématiquement à une manoeuvre dilatoire, car tout changement d’avocat fait inévitablement perdre du temps dans la prise de connaissance d’un dossier d’une telle ampleur comprenant plus de 100 pages de conclusions de la part de M. [U] et 141 pièces.
En conséquence, ses demandes nouvelles des chefs susvisés seront rejetées.
Sur les demandes accessoires:
La capitalisation des intérêts sera ordonnée, comme le conseil l’a jugé.
IL sera alloué à M. [U] la somme de 5000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, tant au titre de la première instance que l’appel, la cour infirmant ainsi le conseil de ce chef.
Les dépens d’appel seront mis à la charge de la société.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant contradictoirement,
Confirme le jugement du conseil de prud’hommes de BOULOGNE BILLANCOURT en date du 3 juillet 2015, en ce que le conseil a conféré à la prise d’acte de rupture de M. [U] les effets d’un licenciement nul, a reconnu l’existence d’un manquement à l’obligation de sécurité et lui a alloué la somme de 130 020 € au titre de la violation du statut de salarié protégé, en ce qu’il a fait application de l’article L.1235-5 du code du travail, et en qu’il a débouté M. [U] de sa demande de rappels de salaire liés à la revalorisation de son salaire et au changement de classification, de sa demande d’indemnité de travail dissimulé, de sa demande au titre des congés payés et des frais de formation en chinois, et au titre du manquement à l’obligation d’adaptation au poste, mais l’infirme pour le surplus,
et statuant à nouveau :
Condamne la société ETOP INTERNATIONAL à payer à M. [U] les sommes suivantes:
– 60 426,67 € au titre des heures supplémentaires, outre 6042,66 € au titre des congés payés afférents,
– 348,87 € au titre des frais de certification non remboursés par la société au titre des années 2008 et 2011,
– 343 € au titre des heures de DIF non utilisées,
– 3034 € au titre du solde des indemnités de prévoyance,
– 13 443,93 € brut à titre d’indemnité de préavis, outre la somme de 1344,39 € au titre des congés payés afférents,
– 6 841,46 brut à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,
ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du 5 janvier 2013,
– 10 000 € de dommages et intérêts au titre du non respect de l’obligation de sécurité et de santé au travail et du manquement à l’obligation de prévention des risques professionnels,
– 30 000 € d’indemnité de licenciement nul,
– 5000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
Déboute les parties sur leurs demandes au titre des frais de transport,
Et [G] ajoutant:
Déboute M. [U] de ses demandes nouvelles (au titre du préjudice de salaire résultant de l’atteinte à la santé, au titre de l’amende civile, les dommages et intérêts pour appel abusif et argument calomnieux) et la société de sa demande reconventionnelle au titre du préavis;
Dit que les dépens d’appel sont mis à la charge de la société ETOP INTERNATIONAL.
Prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, Président et par Madame FABRE, Greffier en pré affectation, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GREFFIER, Le PRESIDENT,