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07 MARS 2023
Arrêt n°
SN/NB/NS
Dossier N° RG 21/00993 – N° Portalis DBVU-V-B7F-FS33
[S], [M] [I]
/
Association TERRE DE DEMAIN – LA PETITE MAISON DE [Localité 1]
jugement au fond, origine conseil de prud’hommes – formation paritaire d’aurillac, décision attaquée en date du 29 mars 2021, enregistrée sous le n° f19/00011
Arrêt rendu ce SEPT MARS DEUX MILLE VINGT TROIS par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d’Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :
M. Christophe RUIN, Président
Mme Frédérique DALLE, Conseiller
Mme Sophie NOIR, Conseiller
En présence de Mme Nadia BELAROUI greffier lors des débats et du prononcé
ENTRE :
Mme [S], [M] [I]
[Adresse 6]
[Localité 2]
Représentée par Me Nathalie NIGLIO de la SELARL NIGLIO AVOCAT, avocat au barreau de NIMES
APPELANTE
ET :
Association TERRE DE DEMAIN – LA PETITE MAISON DE [Localité 1]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Barbara GUTTON PERRIN de la SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND, avocat constitué, substitué par Me Corinne SERMADIRAS, avocat au barreau d’AURILLAC, avocat plaidant
INTIMEE
Après avoir entendu Mme NOIR, Conseiller en son rapport, les représentants des parties à l’audience publique du 09 Janvier 2023, la Cour a mis l’affaire en délibéré, Monsieur le Président ayant indiqué aux parties que l’arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 du code de procédure civile.
FAITS ET PROCÉDURE
L’association Terre de Demain – La Petite Maison, a pour activité la prise en charge d’enfants placés par l’Aide sociale à l’enfance et gère notamment une maison d’enfants à caractère social (Mecs).
Elle emploie 14 salariés (12,23 ETP).
Elle a pour seul financeur le conseil départemental du Cantal.
Mme [S] [P] a été embauchée par l’association Terre de Demain le 4 juillet 2011 en qualité de chef de service éducatif faisant fonction de directrice, statut cadre, classe 2, niveau 2, coefficient 770 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966.
À compter du 1er août 2015, Mme [R] est devenue présidente de l’association.
La salariée a débuté une formation Cafdes (Certificat d’aptitude aux fonctions de directeur d’établissement ou de service d’intervention sociale) à partir du 23 juin 2015, qui s’est achevée le 29 novembre 2017.
Mme [S] [P] a été placée en arrêt de travail pour maladie du 25 juin 2016 au 20 janvier 2017, puis en congés payés jusqu’au 12 février 2017.
Durant la relation de travail, elle a fait l’objet de plusieurs convocations à entretien préalable et sanctions disciplinaires : le 6 août 2015, le 30 juin 2017 et le 2 octobre 2017 qu’elle a contestés par courrier du 2 novembre 2017.
Par ce courrier, elle a également reproché à l’employeur de chercher à l’ ‘écoeurer’ depuis son retour d’arrêt de travail et a dénoncé un non-paiement de la totalité de son salaire net incluant les astreintes durant son arrêt de travail, le déroulement de sa formation Cafdes durant ses jours de congés, sa participation financière à cette formation inscrite au plan de formation, le refus de prendre en charge les frais de formation engagés durant son arrêt de travail et les difficultés financières que ces différents manquements de l’employeur lui ont causés.
Mme [S] [P] a de nouveau été placée en arrêt de travail à compter du 19 octobre 2017.
Par courrier de son conseil en date du 21 février 2018, elle a dénoncé à l’employeur de ‘nombreuses atteintes’ à son contrat de travail et un ‘véritable acharnement’ depuis plusieurs mois au moyen de plusieurs actes qualifiés de harcèlement et de discrimination affectant son état de santé. La salariée a demandé à l’association Terre et Demain de lui payer un rappel de salaire au titre des astreintes portant sur la période de juin 2016 à janvier 2017, mars 2017 et octobre 2017 au 21 février 2018, de la ‘rétablir’ à la classification conventionnelle cadre classe I, niveau II avec effet rétroactif, de lui payer les salaires correspondants, de lui rembourser les frais exposés pour sa formation Cafdes, de lui accorder les jours de congés payés pris sur son temps de formation avant le mois de mars 2017, d’annuler les deux sanctions disciplinaires des 30 juin 2017 et 2 octobre 2017, de la rétablir dans ses missions de directeur d’établissement et de ne plus lui adresser de mails et de courriers incessants comportant des reproches injustifiés de façon à préserver son état de santé.
Par courrier daté du 28 février 2018 adressé à Mme [J] [R], prise en sa qualité de présidente de l’association Terre et Demain, Mme [P] a pris acte de la rupture de son contrat de travail dans les termes suivants :
‘ Depuis plusieurs mois maintenant, je subis de nombreuses atteintes à mon contrat de travail et fait l’objet d’un véritable acharnement et votre arrivée à la présidence de l’association n’y est pas étrangère.
D’ailleurs, le ton était donné puisque dès mon retour d’arrêt de travail du 13 février 2017, et alors même que vous avez connaissance de la pathologie grave je souffrais, vous tentiez de me faire signer un document sournoisement intitulé ‘ feuille de route’ qui caractérise un retrait de délégation de pouvoir sur des missions qui m’étaient confiées jusqu’alors et que je menais à bien (notamment en ce qui concerne le pouvoir de recruter seule des salariés non cadre ou encore la tenue de réunions de délégués du personnel dont vous m’avez évincée). Malgré mon opposition et mon refus de le signer, parfaitement légitime compte tenu de la délégation de pouvoir consenti le 26 janvier 2015 qui lie l’association et qui vous appartenait de respecter, vous la mettrez en application. Vous en ferez même un motif de sanction le 2 octobre 2017.
Il s’agit là d’une première atteinte en contrat de travail et tout cela (plus particulièrement ma non participation aux réunions des délégués du personnel ou encore la réception des salariés qui se fait souvent hors ma présence) est de nature à discréditer aux yeux des salariés. C’est assurément le but recherché.
De la même manière, au prétexte d’une meilleure visibilité de la délégation de responsabilité, le compte rendu d’activité que vous souhaitiez instaurer est une atteinte flagrante à mon autonomie, à mon autorité mais aussi à mes compétences et un moyen nouveau pour me mettre en défaut.
Aussi, parallèlement et depuis votre arrivée j’ai eu à subir des convocations multiples à des entretiens préalables à sanction pour me mettre sous pression puisque certaines ne seront même pas suivies d’effet (la convocation du 21 août 2015). Désormais, les sanctions injustifiées pour des faits mineurs ‘ pleuvent’ (une du 30 juin 2017 pour une simple erreur de date dans mon agenda et celle du 2 octobre 2017 au sujet d’un prétendu comportement inadapté à l’égard des usagers).
J’en ai fermement contesté les termes par des argumentations circonstanciées, sans aucune réaction de la part de l’association, aucun retrait de ces sanctions ne m’ayant été notifiée à ce jour. J’en déduis qu’il s’agit de la nouvelle ‘ règle du jeu’ que vous avez imposée et je ne peux plus admettre de travailler sous cette pression constante.
Tout cela sans occulter vos nombreux mails courrier (notamment votre ‘ feuille de route’) qui comportent très souvent un ton de reproche et je ne peux plus me laisser dévaloriser de la sorte.
Dans ce contexte global de harcèlement, je déplore aussi que vous m’ayez imposé une participation au financement de la formation Cafdes tout en me reprochant également d’y consacrer trop de temps alors que la prise en charge de cette formation incombe à l’employeur au titre de son obligation de formation. Je regrette aussi que vous m’ayez imposé la prise de jour de congés pour participer à cette formation alors que, s’agissant d’une action inscrite au plan de formation (même si prise en charge partiellement par le fonds d’intervention Unifaf), elle devait se dérouler sur mon temps de travail effectif. Consciente de votre aberration, vous me demandiez d’effectuer cette formation sur mon temps de travail à partir de mars 2017 mais sans me permettre de récupérer les jours de congés perdus avant cette date.
Ceci explique également que je ne sois pas rémunérée à ma juste valeur. En effet, sous couvert d’une appellation fallacieuse de chef de service éducatif ‘ faisant fonction’ de directeur qui n’existe pas dans la convention collective, vous m’avez positionnée à un niveau conventionnel inférieur (cadre classe II niveau II) alors que les Directeurs d’établissements doivent bénéficier ‘a minima’ selon la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 du positionnement conventionnel de cadre classe I niveau II. Pourtant, j’accomplis bien des missions de direction depuis l’origine et ma délégation de pouvoirs du 26 janvier 2015 en témoigne.
Il y a là une atteinte évidente à ma rémunération.
Au-delà de ce harcèlement, j’ai également été la cible de diverses discriminations notamment eu égard à mon état de santé. J’en veux pour preuve :
– le non-paiement de mes astreintes durant mes arrêts de travail alors que l’indemnité d’astreinte fait partie intégrante du salaire à maintenir, me pénalisant ainsi financièrement durant ces périodes moralement compliquées à gérer. Ma rémunération est à nouveau mise à mal.
– la non prise en charge des frais de formation pédagogique pour les sessions de septembre, octobre et novembre 2016 au seul motif de ma maladie sur ces périodes avant que l’association ne fasse volte-face et régularise la situation après mes demandes multiples. Là encore, tout ceci sera source de tracas et de nature à me fragiliser davantage.
Ces faits caractérisent autant d’atteinte intolérable ma rémunération, à mes responsabilités et à mon autonomie, en bref à mon contrat de travail et autant d’actes de harcèlement et de discrimination à mon encontre. Bien entendu, ils sont en lien direct avec la dégradation de mon état de santé et l’arrêt de travail d’octobre 2017. J’aurais voulu reprendre mon poste au sein de l’association mais mon état de santé en pâtit et ne le permet plus.
Mon dernier courrier en date du 2 novembre 2017, au sein duquel je dénonçais votre stratégie de harcèlement à mon égard, est resté sans effet tout comme les demandes de rétablissement de ma rémunération, de mes droits et du respect de mon intégrité physique formulée par la voix de mon conseil. La responsabilité de l’association Terre et demain est dès lors pleinement engagée.
Compte tenu de l’ensemble de ces griefs d’une particulière gravité est entièrement imputable à l’association Terre et Demain, la poursuite de mon contrat de travail se révèle désormais impossible. Ne pouvant plus travailler dans ces conditions, je n’ai désormais d’autre choix que de prendre acte de la rupture de mon contrat de travail. La présente vaut prise d’acte de rupture de mon contrat de travail aux torts exclusifs de l’association Terre et Demain et mon contrat de travail prend fin immédiatement. (…)’
Mme [P] a saisi le conseil de prud’hommes d’Aurillac le 28 février 2019.
Par jugement du 29 mars 2021 le conseil de prud’hommes d’Aurillac a :
– jugé que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail de Mme [P] est en réalité une démission ;
– condamné Mme [P] à payer à l’association Terre de Demain la somme de 3.577,88 euros, soit 2 mois de préavis déduction faute des congés payés ;
– condamné l’association Terre de Demain La Petite Maison, à payer à Mme [P] les sommes de 3.472,90 euros à titre de rappel de salaires pour astreinte et de 347,29 euros au titre des congés payés afférents ;
– débouté la salariée du surplus de ses demandes ;
– débouté Mme [P] et l’association Terre de Demain de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.
Mme [P] a interjeté appel de ce jugement 29 avril 2021.
Vu les conclusions notifiées à la cour le 12 décembre 2022 par Mme [P],
Vu les conclusions notifiées à la cour le 7 décembre 2022,
Vu les conclusions dites ‘ de procédure’ notifiées par l’association Terre et Demain le 27 décembre 2022 par lesquelles elle demande le rejet des conclusions et pièces notifiées par la partie appelante le 12 décembre 2022 ;
Vu les conclusions en réponse notifiées le 3 janvier 2023 par Mme [S] [P] par lesquelles elle demande de déclarer recevable ses conclusions du 12 décembre 2022.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions, Mme [P] demande à la cour de :
I. Réformer la décision rendue par le Conseil de Prud’Hommes d’Aurillac le 29 mars 2021 en ce qu’elle a :
– Dit et jugé que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail est en réalité une démission ;
– Déclaré recevable la demande reconventionnelle formée par l’Association Terre de Demain tendant à sa condamnation à lui verser la somme de 3.577,88 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, soit deux mois de préavis déduction faite des congés
payés ;
– Condamnée en conséquence à payer et à porter à l’employeur la somme de 3.577,88 euros soit
deux mois de préavis déduction faite des congés payés ;
– Débouté de sa demande de condamnation de l’employeur à lui verser la somme de
2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;
– Débouté du surplus de ses demandes soit :
1) A titre principal, en ce qu’elle l’a déboutée de ses demandes formulées ci-après, à savoir :
1-1. A titre principal :
– En ce qu’elle a dit et jugé que les faits de harcèlement moral ne sont pas établis ni avérés et qu’en conséquence, le harcèlement moral de l’employeur à son encontre n’est pas caractérisé ;
– En ce qu’elle l’a déboutée en conséquence de sa demande de condamnation de l’Association employeur à lui verser la somme de 25.000 euros net à titre de dommages et intérêts pour le harcèlement moral subi ;
– En ce qu’elle a dit et jugé que le reproche de discrimination n’est pas fondé et qu’en conséquence, les discriminations de l’Association Terre de Demain à son encontre notamment liées à l’état de santé et/ou à l’orientation sexuelle de la salariée ne sont pas caractérisées ;
– En ce qu’elle a dit et jugé que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail ne produit pas les effets d’un licenciement nul ;
– En ce qu’elle a dit et jugé que son positionnement est conforme à son contrat de travail et à l’organigramme validé par le Conseil Départemental du Cantal ;
– En ce qu’elle l’a déboutée de sa demande de positionnement conventionnel Cadre Classe 1 niveau 2 coefficient 824 de la Convention Collective Nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, sur la période de mars 2016 à juin 2017, puis Cadre Classe 1 niveau 2 coefficient 848 de juillet 2017 à décembre 2017 et Cadre Classe 1 niveau 1 coefficient 922,20 de janvier à mars
2018 ;
– En ce qu’elle l’a déboutée en conséquence de sa demande de condamnation de l’Association Terre de Demain à lui verser les sommes de 12.161,20 euros brut à titre de rappels de salaire et de 1.216,12 euros brut au titre des congés payés y afférents ;
– En ce qu’elle l’a déboutée en conséquence de sa demande de condamnation de l’Association Terre de Demain à lui verser les sommes de 30.803,36 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis, de 3.080,33 euros brut au titre des congés payés sur préavis, de 36.365,05 euros net à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement et de 73.329,20 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul et sans cause réelle et sérieuse ;
1-2. A défaut et subsidiairement :
– En ce qu’elle l’a déboutée de sa demande de positionnement conventionnel Cadre Classe 2 niveau 1 coefficient 901 de la Convention Collective Nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, sur la période de janvier à mars 2018 ;
– En ce qu’elle l’a déboutée en conséquence de sa demande de condamnation de l’Association Terre de Demain à lui verser les sommes de 1.423,38 euros brut à titre de rappels de salaire et de 142,34 euros brut au titre des congés payés y afférents ;
– En ce qu’elle l’a déboutée en conséquence de sa demande de condamnation de l’Association Terre de Demain à lui verser les sommes de 30.106,02 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis, de 3.010,60 euros brut au titre des congés payés sur préavis, de 35.541,43 euros net à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement et de 70.247,38 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul et sans cause réelle et sérieuse.
2) A titre subsidiaire, en ce qu’elle l’a déboutée de ses demandes formulées ci-après, à savoir :
2-1. A titre principal :
– En ce qu’elle a dit et jugé que les faits de harcèlement moral ne sont pas établis ni avérés et qu’en conséquence, le harcèlement moral à son encontre n’est pas caractérisé ;
– En ce qu’elle l’a déboutée en conséquence de sa demande de condamnation de l’Association Terre de Demain à lui verser la somme de 25.000 euros net à titre de dommages et intérêts pour le harcèlement moral subi ;
– En ce qu’elle a dit et jugé que le reproche de discrimination n’est pas fondé et qu’en conséquence, les discriminations de l’employeur à son encontre notamment liées à l’état de santé et/ou à l’orientation sexuelle de la salariée ne sont pas caractérisées ;
– En ce qu’elle a dit et jugé que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail ne produit pas les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– En ce qu’elle a dit et jugé que le positionnement conventionnel est conforme à son contrat de travail et à l’organigramme validé par le Conseil Départemental du Cantal ;
– En ce qu’elle l’a déboutée en conséquence de sa demande de positionnement conventionnel Cadre Classe 1 niveau 2 coefficient 824 de la Convention Collective Nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, sur la période de mars 2016 à juin 2017, puis Cadre Classe 1 niveau 2 coefficient 848 de juillet 2017 à décembre 2017 et Cadre Classe 1 niveau 1 coefficient 922,20 de janvier à mars 2018 ;
– En ce qu’elle l’a déboutée en conséquence de sa demande de condamnation de l’Association Terre de Demain à lui verser les sommes de 12.161,20 euros brut à titre de rappels de salaire et de 1.216,12 euros brut au titre des congés payés y afférents ;
– En ce qu’elle l’a déboutée en conséquence de sa demande de condamnation de l’Association Terre de Demain à lui verser les sommes de 30.803,36 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis, de 3.080,33 euros brut au titre des congés payés sur préavis, de 36.365,05 euros net à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement et de 73.329,20 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
2-2. A défaut et subsidiairement :
– En ce qu’elle l’a déboutée de sa demande de positionnement conventionnel Cadre Classe 2 niveau 1 coefficient 901 de la Convention Collective Nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, sur la période de janvier à mars 2018 ;
– En ce qu’elle l’a déboutée en conséquence de sa demande de condamnation de l’Association Terre de Demain à lui verser les sommes de 1.423,38 euros brut à titre de rappels de salaire et de 142,34 euros brut au titre des congés payés y afférents ;
– En ce qu’elle l’a déboutée en conséquence de sa demande de condamnation de l’Association Terre de Demain à lui verser les sommes de 30.106,02 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis, de 3.010,60 euros brut au titre des congés payés sur préavis, de 35.541,43 euros net à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement et de 70.247,38 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
3) En tout état de cause, en ce qu’elle l’a déboutée de ses demandes formulées ci-après, à savoir :
– En ce qu’elle a dit et jugé que le retrait par l’Association Terre de Demain de missions essentielles et/ou de délégations précédemment confiées ne porte pas atteinte à son contrat de travail ;
– En ce qu’elle a dit et jugé que le droit à la formation professionnelle est respecté par l’Association Terre de Demain ;
– En ce qu’elle l’a déboutée en conséquence de sa demande de condamnation de l’employeur à lui verser les sommes de 3.967,69 euros brut pour les congés et repos dont elle a été privée durant sa formation professionnelle, de 396,77 euros brut au titre des congés payés y afférents et de 1.562,49 euros net à titre de remboursement des frais de formation professionnelle (CAFDES) engagés en lieu et place de l’employeur ;
– En ce qu’elle l’a déboutée en conséquence de sa demande de condamnation de l’employeur à lui verser la somme de 5.000 euros net à titre de dommages et intérêts pour sa résistance abusive à la rémunérer conformément aux dispositions conventionnelles applicables, à l’absence de paiement de ses astreintes pendant ses arrêts de travail, à la privation de ses droits à repos pris durant sa formation professionnelle ;
– En ce qu’elle a rejeté la demande d’annulation des deux sanctions disciplinaires notifiées (l’avertissement du 2 octobre 2017 et la lettre d’observations du 30 juin 2017).
– En ce qu’elle l’a déboutée en conséquence de sa demande de condamnation de l’Association Terre de Demain à lui verser la somme de 5.000 euros net à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi pour les sanctions disciplinaires injustifiées ;
– En ce qu’elle a refusé d’ordonner que les condamnations porteront intérêt au taux légal à partir de leur date d’exigibilité.
II. STATUANT A NOUVEAU :
1. A TITRE PRINCIPAL :
1-1. A titre principal :
– Ecarter des débats les pièces adverses n°6, n°36, n°20, n°21, n°25, n°30, n°31, n°32, n°34 et n°37 produites par l’Association pour les motifs précédemment exposés ;
– Juger que les faits de harcèlement moral sont établis et avérés et qu’en conséquence, le harcèlement moral de l’employeur à son encontre est caractérisé ;
– En conséquence, condamner l’employeur à lui payer la somme de 25.000 euros net à titre de dommages et intérêts pour le harcèlement moral subi ;
– Juger que le reproche de discrimination est fondé et qu’en conséquence, les discriminations de l’Association à son encontre notamment liées à l’état de santé et/ou à l’orientation sexuelle de la salariée sont caractérisées ;
– Juger que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d’un licenciement nul ;
– Juger que le positionnement conventionnel n’est pas conforme à son contrat de travail ;
– Juger qu’elle aurait dû être positionnée Cadre Classe 1 niveau 2 coefficient 824 de la Convention Collective Nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, sur la période de mars 2015 à juin 2017, puis Cadre Classe 1 niveau 2 coefficient 848 de juillet 2017 à décembre 2017 et Cadre Classe 1 niveau 1 coefficient 922,20 de janvier à mars 2018 ;
– En conséquence, condamner l’employeur à lui verser les sommes de 17.805,04 euros brut à titre de rappels de salaire et de 1.780,50 euros brut au titre des congés payés y afférents ;
– En conséquence, condamner l’employeur à lui verser les sommes de 30.803,36 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis, de 3.080,33 euros brut au titre des congés payés sur préavis, de 36.365,05 euros net à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement
et de 73.329,20 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul et sans cause réelle et sérieuse.
1-2. A défaut et subsidiairement :
– Ecarter des débats les pièces adverses n°6, n°36, n°20, n°21, n°25, n°30, n°31, n°32, n°34 et n°37 produites par l’Association pour les motifs précédemment exposés ;
– Juger que les faits de harcèlement moral sont établis et avérés et qu’en conséquence, le harcèlement moral de l’Association à son encontre est caractérisé ;
– En conséquence, condamner l’Association Terre de Demain à lui verser la somme de 25.000 euros net à titre de dommages et intérêts pour le harcèlement moral subi ;
– Juger que le reproche de discrimination est fondé et qu’en conséquence, les discriminations de l’Association à son encontre notamment liées à l’état de santé et/ou à l’orientation sexuelle de la salariée sont caractérisées ;
– Juger que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d’un licenciement nul ;
– Juger que le positionnement conventionnel n’est pas conforme à son contrat de travail ;
– Juger qu’elle aurait dû être positionnée Cadre Classe 2 niveau 1 coefficient 901 de la Convention Collective Nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, sur la période de janvier à mars 2018 ;
– En conséquence, condamner l’Association Terre de Demain à lui verser les sommes de 1.423,38 euros brut à titre de rappels de salaire et de 142,34 euros brut au titre des congés payés y afférents ;
– En conséquence, condamner l’employeur à lui payer les sommes de 30.106,02 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis, de 3.010,60 euros brut au titre des congés payés sur préavis, de 35.541,43 euros net à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement
et de 70.247,38 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul et sans cause réelle et sérieuse.
2. A TITRE SUBSIDIAIRE :
2-1. A titre principal :
– Ecarter des débats les pièces adverses n°6, n°36, n°20, n°21, n°25, n°30, n°31, n°32, n°34 et n°37 produites par l’Association pour les motifs précédemment exposés ;
– Juger que les faits de harcèlement moral sont établis et avérés et qu’en conséquence, le harcèlement moral de l’Association est caractérisé ;
– En conséquence, condamner l’Association à lui payer la somme de 25.000 euros net à titre de dommages et intérêts pour le harcèlement moral subi ;
– Juger que le reproche de discrimination est fondé et qu’en conséquence, les discriminations à son encontre notamment liées à l’état de santé et/ou à l’orientation
sexuelle de la salariée sont caractérisées ;
– Juger que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– Juger que le positionnement conventionnel n’est pas conforme à son contrat de travail ;
– Juger qu’elle aurait dû être positionnée Cadre Classe 1 niveau 2 coefficient 824 de la Convention Collective Nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, sur la période de mars 2015 à juin 2017, puis Cadre Classe 1 niveau 2 coefficient 848 de juillet 2017 à décembre 2017 et Cadre Classe 1 niveau 1 coefficient 922,20 de janvier à mars 2018 ;
– En conséquence, condamner l’employeur à lui verser les sommes de 17.805,04 euros brut à titre de rappels de salaire et de 1.780,50 euros brut au titre des congés payés y afférents ;
– En conséquence, condamner l’Association Terre de Demain à lui verser les sommes de 30.803,36 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis, de 3.080,33 euros brut au titre des congés payés sur préavis, de 36.365,05 euros net à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement et de 73.329,20 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
2-2. A défaut et subsidiairement :
– Ecarter des débats les pièces adverses n°6, n°36, n°20, n°21, n°25, n°30, n°31, n°32, n°34 et n°37 produites par l’Association pour les motifs précédemment exposés ;
– Juger que les faits de harcèlement moral sont établis et avérés et qu’en conséquence, le harcèlement moral de l’Association à son encontre est caractérisé ;
– En conséquence, condamner l’Association à lui payer la somme de 25.000 euros net à titre de dommages et intérêts pour le harcèlement moral subi ;
– Juger que le reproche de discrimination est fondé et qu’en conséquence, les discriminations de l’Association notamment liées à l’état de santé et/ou à l’orientation
sexuelle de la salariée sont caractérisées ;
– Juger que la prise d’acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– Juger que le positionnement conventionnel n’est pas conforme à son contrat de travail ;
– Juger qu’elle aurait dû être positionnée Cadre Classe 2 niveau 1 coefficient 901 de la Convention Collective Nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, sur la période de janvier à mars 2018 ;
– En conséquence, condamner l’Association à lui verser les sommes de 1.423,38 euros brut à titre de rappels de salaire et de 142,34 euros brut au titre des congés payés y afférents ;
– En conséquence, condamner l’Association à lui verser les sommes de 30.106,02 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis, de 3.010,60 euros brut au titre des congés payés sur préavis, de 35.541,43 euros net à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement
et de 70.247,38 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
3. DANS TOUS LES CAS, EN TOUT ETAT DE CAUSE :
– Juger que le retrait par l’Association de missions essentielles et/ou de délégations précédemment confiées porte atteinte à son contrat de travail;
– Juger que le droit à la formation professionnelle n’est pas respecté par l’employeur ;
– En conséquence, condamner l’employeur à lui payer les sommes de 7.364,46 euros brut pour les congés et repos dont elle a été privée durant sa formation professionnelle, de 736,45 euros
brut au titre des congés payés y afférents et de 1.562,49 euros net à titre de remboursement des frais de formation professionnelle (CAFDES) engagés en lieu
et place de l’Association ;
– En conséquence, condamner l’employeur à lui verser la somme de 5.000 euros net à titre de dommages et intérêts pour sa résistance abusive à la rémunérer conformément aux dispositions conventionnelles applicables, à l’absence de paiement de ses astreintes pendant ses arrêts de travail, à la privation de ses droits à repos pris durant sa formation professionnelle ;
– Juger que les deux sanctions disciplinaires (l’avertissement du 2 octobre 2017 et la lettre d’observations du 30 juin 2017) sont nulles ;
– En conséquence, condamner l’employeur à lui payer la somme de 5.000 euros net à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi pour les sanctions disciplinaires
injustifiées ;
– Juger en ce qui concerne les demandes salariales (rappels de salaires et de congés payés afférents, d’indemnité de licenciement et de préavis) que les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter du 22 février 2018 date de la réception de la mise en demeure par
l’Association employeur et à tout le moins à compter du 28 février 2019 date de la saisine du Conseil de Prud’Hommes ;
– Juger en ce qui concerne les autres demandes indemnitaires qu’elles porteront intérêts au taux légal à compter de la reddition de l’arrêt à intervenir ;
– Juger que les intérêts échus depuis plus d’une année auront vocation à se capitaliser conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;
– Juger que la demande reconventionnelle formée par l’Association tendant à sa condamnation à lui verser la somme de 3.577,88 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, soit deux mois de préavis déduction faite des congés payés est irrecevable et la débouter ;
– Débouter l’Association Terre de Demain de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
– Condamner l’employeur à lui verser la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et la condamner aux entiers dépens ;
– Débouter l’Association Terre de Demain de sa demande de condamnation à lui verser la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile d’appel ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.
III. Confirmer la décision rendue par le Conseil de Prud’Hommes d’Aurillac le 29 mars 2021 pour le surplus et, ce faisant :
– Juger l’employeur mal fondé en son appel incident et l’en débouter ;
– En conséquence, juger que le maintien de salaire au titre des arrêts de travail devait inclure le paiement des astreintes ;
– En conséquence, condamner l’employeur à lui payer la somme de 3.472,90 euros brut à titre de rappels de salaire et de 347,29 euros brut au titre des congés payés y afférents ;
– Débouter l’Association Terre de Demain de toutes ses demandes, fins et conclusions.
Dans ses dernières conclusions, l’association Terre de Demain – La Petite Maison, demande à la cour de :
– confirmer le jugement en ce qu’il a jugé que la prise d’acte de la salariée était une démission et condamnée celle-ci à lui payer la somme de 3.577,88 euros au titre du préavis déduction faite des congés payés et l’a déboutée de ses autres demandes ;
– infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée à payer à la salariée les sommes de 3.472,90 euros à titre de rappel de salaires pour astreinte outre 347,29 euros au titre des congés payés afférents ;
au
– dire que les demandes de paiement des astreintes pendant les congés maladies de Mme [P] devront être rejetées ;
– condamner la salariée à lui payer la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire la cour rappelle qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions recevables des parties et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion contenue dans ces écritures mais qu’en revanche, elle ne statue pas sur des prétentions indéterminées, trop générales ou non personnalisées, ou non efficientes, notamment celles qui relèvent d’une reprise superfétatoire, dans le dispositif des conclusions d’une partie, de l’argumentaire (ou des moyens) contenu dans les motifs.
Sur la recevabilité des conclusions et pièces notifiées par la partie appelante le 12 décembre 2022 :
L’association Terre et Demain demande à la cour de déclarer irrecevables les conclusions et pièces notifiées par Mme [P] le 12 décembre 2022, à 6 heures de la date annoncée de l’ordonnance de clôture au motif de la violation du principe du contradictoire.
Contrairement à ce que soutient la partie appelante elle a bien notifié le 12 décembre 2022 une nouvelle pièce 69 à savoir son bordereau de communication de pièces de première instance.
En l’absence d’ordonnance de clôture signée, la clôture sera fixée au 9 janvier 2023, date de l’audience.
En conséquence, les conclusions de la partie intimée notifiées le 7 décembre 2022 ainsi que les conclusions et pièces de la partie appelante notifiée le 12 décembre 2022 sont recevables.
Sur la demande de Mme [S] [P] tendant à voir écarter des débats les pièces adverses n°6, 36, 20, 21, 25, 30, 31, 32, 34 et 37 :
Mme [S] [P] demande à la cour d’écarter des débats les pièces 6, 36, 20, 21, 25, 30, 31, 32, 34 et 37 produites par l’association Terre et Demain.
S’agissant des pièces n°6 et 36, la salariée soutient :
– que ces pièces portent atteinte à sa vie privée
– que leur mode d’obtention est déloyal car les deux associations ‘étaient en relation antérieurement et ont assurément convenu à l’avance des questions et les réponses seraient apportées dans le cadre de cette sommation interpellative. La précision des réponses le confirme’ et que ‘ les pièces produites par l’association le démontrent également puisque la sommation interpellative intervenue le 14 mai 2020 (pièce adverse 36) est diligentée après que les deux associations aient pris attache et échangé sur la situation de Madame [P] dès le mois de septembre 2019 (pièces adverses 6)’
– qu’en application du droit de la preuve découlant de l’article 6 §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et du principe de loyauté dans l’administration de la preuve découlant de l’article 9 du code de procédure civile, ces éléments doivent être écartés des débats
– que le fait de l’avoir, postérieurement à la rupture du contrat de travail, ‘pistée’ en interrogeant d’autres employeurs est illégal comme contraire à la loi du 6 janvier 1978 relative à la protection des données personnelles ainsi qu’au règlement européen n°2016-678 de protection des données personnelles du 27 avril 2016 qui interdisent de faire circuler les données personnelles des salariés sans leur consentement et à leur insu
– que le fait d’avoir interrogé son nouvel employeur sur les conditions de son départ au mois de novembre 2018, révèle une intention de nuire et constitue une intrusion dans sa vie privée.
L’association Terre et Demain répond que :
– il n’existe aucune connivence entre les deux associations et que les questions posées dans le cadre de la sommation interpellative sont des questions classiques
– qu’il n’existe pas d’atteinte à la vie privée dès lors que les éléments dévoilés appartiennent également aux employeurs et ne sont que la description d’une situation réelle
– que faire délivrer une sommation interprétative ne constitue pas une violation de la vie privée, n’a rien d’illégal et n’est pas contraire aux ‘articles 6 et 9 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales’ et que les réponses apportées à cette sommation ne sont pas illicites.
La pièce n°6 produite par l’association Terre et Demain est un courrier de l’association APEDM foyer [7] daté du 24 septembre 2019 adressé à Maître [W], conseil de la partie intimée, rédigé ainsi : ‘En réponse à votre courrier en date du 19 septembre 2019, je vous informe que Madame [S] [P] a été dans les effectifs de notre structure du 5 mars 2018 au 5 novembre 2018″.
La pièce n°36 est une sommation interpellative adressée à l’association APEDM foyer [7] datée du 14 mai 2020, à la demande de l’association Terre et Demain dans le cadre de l’instance prud’homale, pour établir la situation professionnelle de Mme [S] [P] à compter du 1er mars 2018.
La Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, s’applique aux traitements automatisés de données à caractère personnel, ainsi qu’aux traitements non automatisés de données à caractère personnel contenues ou appelées à figurer dans des fichiers.
En l’espèce, les pièces n°6 et 36 dont la licéité est contestée ne sont pas issues d’un traitement automatisé de données ou d’un traitement automatisé de données de sorte que les dispositions de cette loi ne leur sont pas applicables.
D’autre part, l’existence d’un échange antérieur à la délivrance de la sommation interpellative entre l’association Terre et Demain et l’association APEDM foyer [7] sur la situation professionnelle de Mme [S] [P] ne suffit pas à établir l’intention de nuire, ni l’existence d’une connivence entre les deux associations de nature à remettre en cause la loyauté de l’obtention de cette preuve ou encore que les déclarations de l’association APEDM foyer [7] sont le fruit d’un stratagème.
Il résulte des articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 9 du code civil et 9 du code de procédure civile, que le droit à la preuve peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie privée à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit proportionnée au but poursuivi.
En l’espèce, hormis la question relative au motif du licenciement de Mme [S] [P] par l’association APEDM foyer [7], les questions posées à ce nouvel employeur dans la sommation interpellative du 14 mai 2020 sont en lien avec les conditions et la date d’embauche de Mme [S] [P] et cette pièce est utilisée pour démontrer que la prise de rupture était, en réalité, motivée par une nouvelle embauche.
La pièce dont il est demandé le rejet des débats apparaît donc indispensable et proportionnée à l’exercice du droit de l’association Terre et Demain à se défendre contre la demande de prise d’acte de rupture produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse formée à son encontre.
S’agissant de la pièce 34, Mme [S] [P] soutient qu’elle est irrecevable comme non datée et non signée. Or, ce moyen n’est pas de nature à conduire au rejet de la pièce, seule la force probante de celle-ci étant susceptible d’être discutée.
Enfin, s’agissant des pièces 20, 21, 25, 30, 31, 32 et 37, la salariée ne fait valoir aucun moyen et se prévaut même de certaines d’entre elles.
En conséquence la cour déboute la partie appelante de sa demande de rejet des pièces adverses n°6, 36, 20, 21, 25, 30, 31, 32, 34 et 37.
Sur la demande de requalification de la prise d’acte de rupture en licenciement nul :
La prise d’acte de rupture du contrat de travail entraîne la cessation immédiate de la relation contractuelle qui ne peut plus ensuite être rétractée.
Il appartient dans ce cadre au salarié d’établir les faits qu’il allègue à l’encontre de l’employeur.
Ces faits sont ceux dont le salarié a eu connaissance avant de prendre acte de la rupture de son contrat de travail, ils doivent donc être antérieurs ou contemporains à la démission.
L’écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige ; le juge est tenu d’examiner tous les manquements de l’employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit.
Il résulte de la combinaison des articles L.1231-1, L.1237-2 et L.1235-1 du code du travail que la prise d’acte ne permet au salarié de rompre le contrat de travail qu’en cas de manquement de l’employeur à ses obligations revêtant une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail.
La rupture par prise d’acte produit, soit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou d’un licenciement nul, si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, les effets d’une démission.
Selon l’article L1152-3 du code du travail: ‘Toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul’.
Il résulte des termes de la lettre du 28 février 2018 retranscrits ci-dessus et de ses conclusions devant la cour qu’au soutien de sa demande de prise d’acte de rupture du contrat de travail, Mme [S] [P] reproche à l’association Terre et Demain un harcèlement moral et une discrimination en raison de son état de santé.
S’agissant du harcèlement moral, la cour rappelle :
– qu’aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
– qu’en vertu de l’article L. 1154-1 du code du travail dans sa version issue de la Loi 2016-1088 du 8 août 2016, lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4 , le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement ; qu’au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
– qu’il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail. Dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
En l’espèce, Mme [S] [P] reproche à l’employeur les faits suivants :
– d’avoir, dès son retour d’arrêt de travail du 13 février 2017, alors qu’il avait connaissance de la pathologie grave dont elle souffrait, tenté de lui faire signer un document intitulé ‘ feuille de route’ lui retirant son autonomie notamment sur le recrutement des personnels salariés non cadres, la soumettant à un suivi intensif en lui imposant un compte rendu d’activité hebdomadaire et une information portant sur ses temps de présence effectif
– d’avoir ainsi cherché à modifier son contrat de travail
– de l’avoir écartée de la tenue des réunions des délégués du personnel
– d’avoir ainsi porté atteinte à son autonomie, à son autorité et à ses compétences
– d’avoir mis cette feuille de route en application malgré son refus de la signer
– d’en avoir fait un motif de sanction le 2 octobre 2017
Il ressort de l’avis d’arrêt de travail du 20 août 2016 (pièce 21 de la partie appelante) que l’arrêt de travail de la salariée depuis le 25 juin 2016 était justifié par un cancer et il n’est pas contesté que l’employeur avait connaissance de cette maladie.
Selon la fiche de poste de chef de service faisant fonction de directeur signé entre les parties le 26 janvier 2015, Mme [S] [P] était responsable de l’ensemble des fonctions éducatives, techniques, administratives et financières ainsi que de la gestion des moyens humains et matériels de son établissement. À ce titre, elle disposait d’une large autonomie dans tous ces domaines et notamment le pouvoir de ‘ recruter le personnel non cadre de l’établissement dans les limites des effectifs autorisés’ et d’assurer le lien avec les instances représentatives du personnel. Elle était enfin la représentante de l’association Terre et Demain vis-à-vis de l’extérieur et agissait par délégation du conseil d’administration auquel elle rendait compte.
La salariée verse aux débats en pièce 26 un document intitulé ‘ feuille de route’ daté du 13 février 2017, soit le jour même de son retour dans l’association après plusieurs mois d’absence suite à son congé maladie. Par ce document d’ores et déjà signé de sa présidente, dont la mention ‘pour acceptation par la chef de service faisant fonction de directrice [S] [P]’, démontre qu’il devait être soumis à l’approbation de la salariée, l’employeur retire à cette dernière toute autonomie en matière de recrutement du personnel non cadre de l’établissement et la soumet à un suivi intensif de son activité.
En effet, cette ‘feuille de route’stipule que, désormais :
– l”étude des candidatures et la conduite des entretiens d’embauche se feront en collaboration étroite entre le CA de l’association Terre et Demain et l’équipe de la petite maison’ comprenant la chef de service faisant fonction de directeur et un membre de l’équipe exerçant la même fonction que la personne recrutée et que ‘la décision finale sera prise de façon coopérative’
– Mme [S] [P] doit transmettre par courriel (avec confirmation de lecture) à la présidente et au vice président de l’association, en fin de semaine, un compte rendu de son activité, de sa présence physique à la petite maison en indiquant ces temps de présence effectifs.
Ces dispositions limitant son autonomie en matière de recrutement du personnel et lui imposant un contrôle strict de son activité, incompatibles avec l’autonomie et la délégation de pouvoir qui lui étaient reconnues dans sa fiche de poste, constituent bien des modifications de son contrat de travail et non pas une simple déclinaisons d’instructions précises de l’employeur.
En outre, l’association Terre et Demain ne conteste pas avoir évincé Mme [S] [P] des réunions des délégués du personnel.
Enfin, il résulte du courrier de notification de sanction disciplinaire du 2 octobre 2017 que Mme [S] [P] a été sanctionnée pour un ‘ non-respect des directives du conseil d’administration de Terre de demain notifiées dans une feuille de route transmise en mains propres le 13 février 2017 et que [Mme [S] [P]] a refusé de signer’. Cet élément démontre que l’employeur a mis en oeuvre les modifications du contrat de travail sans l’accord de la salariée et qu’il a également fondé une sanction disciplinaire sur ces modifications non acceptées.
La matérialité de tous ces faits est établie.
– d’avoir cherché à la discréditer aux yeux des salariés en l’excluant des réunions des délégués du personnel et en recevant des salariés hors sa présence :
Dans ses conclusions, l’association Terre et Demain reconnaît que sa présidente a reçu le délégué du personnel hors la présence de Mme [P] et indique que par ces échanges, elle a été informée des difficultés relationnelles de la directrice avec le personnel.
Cependant, il n’est pas démontré que l’employeur a ainsi cherché à discréditer la directrice aux yeux du personnel.
Ce fait n’est donc pas matériellement établi.
– de l’avoir à plusieurs reprises, convoquée à des entretiens préalables à sanction pour la mettre sous pression puisque certaines – la convocation du 21 août 2015 – n’ont pas été suivies d’effet
– de lui avoir notifié des sanctions disciplinaires injustifiées le 30 juin 2017 et le 2 octobre 2017
– de ne pas avoir répondu à ses argumentations et de ne pas avoir retiré ces sanctions injustifiées :
Mme [S] [P] verse aux débats la copie d’une convocation à entretien préalable à une éventuelle notification d’observation datée, non pas du 21 août 2015, mais du 6 août 2015.
Cette convocation reproche à la salariée :
– une écoute et une ‘ tentative de recherche de solution’ insuffisantes suite à l’hospitalisation en urgence de l’encadrant du séjour à [Localité 4] plage durant la semaine du 4 au 11 juillet 2015
– de ne pas avoir été retirer un courrier recommandé le 7 juillet 2015.
Il n’est pas contesté que l’entretien préalable fixé dans cette convocation a bien eu lieu et qu’aucune sanction disciplinaire n’a été prononcée contre Mme [S] [P].
L’appelante produit également un courrier de notification d’une observation daté du 30 juin 2017 dans lequel il lui est reproché d’avoir été absente, pour cause de formation Cafdes, à une réunion partenariale prévue le 18 mai 2017 dont elle était responsable et de n’avoir pas prévu son remplacement, ce qui aurait pu compromettre les relations de l’association avec le conseil départemental du Cantal.
Enfin, Mme [P] verse aux débats la copie de notification d’un avertissement, datée du 2 octobre 2017, dans lequel il lui est reproché d’avoir, entre le 13 février 2017 et le 20 septembre 2017 :
– violé les directives du conseil d’administration de l’association notifiées dans une feuille de route transmise en main propre le 13 février 2017, qu’elle a refusé de signer
– adopté une attitude anxiogène voire violente à l’égard d’un garçon de huit ans confié à l’établissement et conduit à la gendarmerie de [Localité 5] après son exclusion de l’école
– eu un comportement brutal et humiliant à l’égard d’une fillette de 12 ans en présence d’une éducatrice
– priorisé sa formation Cafdes au détriment du bon fonctionnement de l’établissement.
Mme [S] [P] produit également la copie d’un courrier du 2 novembre 2017 dans lequel elle conteste le bien-fondé de ces convocations à entretien préalable et sanctions disciplinaires.
L’association Terre et Demain ne justifie pas d’une réponse apportée à ce courrier et il est constant que ces sanctions disciplinaires n’ont pas été rapportées.
La matérialité de ces faits est donc établie.
– de lui avoir adressé de nombreux courriers et mails ( notamment la feuille de route) sur un ton de reproche et dévalorisant :
Mme [S] [P] ne précise et ne produit pas les courriers et mails de l’employeur dont elle se prévaut.
En revanche, le document intitulé ‘ feuille de route’ comporte des termes dévalorisant sur la qualité du travail de la salariée puisqu’il lui est reproché, de façon indirecte au travers de la ‘posture soutenance à l’égard du personnel’ désormais exigée de sa part, de ne pas ‘ donner de coup de main au reste de l’équipe’, de ne pas manifester son intérêt et sa reconnaissance pour le travail de l’équipe et de tenir des propos ‘ disqualifiants et menaçants’.
Ce dernier fait est matériellement établi.
– de l’avoir positionnée et rémunérée au niveau cadre classe II niveau II alors que, du fait de l’exercice de ses missions de directrice d’établissement, elle aurait dû être classée et rémunérée depuis l’origine au niveau cadre classe I niveau II :
Il résulte du contrat de travail et de la fiche de poste du 26 janvier 2015 que la salariée, effectivement recrutée sur un poste de chef de service éducatif avec un diplôme d’état d’éducateur spécialisé de niveau III (pièce 40 de la partie appelante et 4 de la partie intimée), faisait en réalité fonction de directrice.
Il ressort du contrat de travail et des bulletins de paie versés aux débats que Mme [S] [P] a été classée durant toute relation de travail à la catégorie classe II, niveau II de la convention de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966.
Selon l’annexe 6 à cette convention collective :
– sont positionnés en classe I les directeurs d’établissement et de service ainsi que les directeurs des ressources humaines, les secrétaires généraux et les directeurs administratifs et /ou financiers d’association employant moins de 800 salariés permanents à temps plein ou partiel y compris les titulaires de contrats aidés, ayant un niveau II minimum de qualification, une mission de responsabilité et une autonomie dans la décision définie par délégation
– sont positionnés en classe II les chefs de service, directeurs adjoints, directeurs techniques etc. ayant une mission de responsabilité et un degré d’autonomie dans la décision. Ils sont classés en trois catégories en fonction de leur niveau de qualification I, II, III.
– le directeur d’établissement ou de service, dispose du pouvoir hiérarchique et de décision et, par délégation des instances dirigeantes de l’association ou de l’organisme et sous leur contrôle, il est chargé de la conception et de la mise en oeuvre et du développement des actions éducatives, pédagogiques, techniques ou thérapeutiques pour lesquelles l’établissement ou service est créé et autorisé, il dispose du pouvoir disciplinaire conformément aux délégations accordées, il est responsable de la sécurité des personnes et des biens qui lui sont confiés, il élabore ou participe à l’élaboration du budget de l’établissement ou service et ordonnance les dépenses dans le cadre du budget qui lui est alloué pour l’exploitation dont il est responsable.
En l’espèce, l’association Terre et Demain ne conteste pas que Mme [S] [P] assurait, dans les faits et par délégation du conseil d’administration auquel elle rendait compte, les missions figurant dans la fiche de poste signée le 26 janvier 2015 à savoir :
– l’autorité hiérarchique sur l’ensemble des personnels de l’établissement
– l’ensemble des choix d’organisation interne, la définition des orientations, la mise en place de l’action des équipes
– la supervision du travail de l’ensemble du personnel et des intervenants extérieurs, la validation des axes de travail déterminés par le projet d’établissement
– le pouvoir disciplinaire, cet élément étant en outre confirmé par la note d’incident rédigée par Mme [S] [P] le 3 avril 2015 suite à la chute d’un enfant monté sur le toit d’un préau après l’absence d’un moniteur éducateur (pièce 17)
– la ‘responsabilité de la sécurité des personnes et des biens de son établissement’
– la conduite de la préparation du budget, la gestion du compte-courant de l’établissement (chèques, retraits, virements) et la réalisation des dépenses d’investissement budgétées.
Ces éléments sont confirmés dans le document intitulé ‘synthèse des entretiens juin 2015″, réalisé à la demande du bureau de l’association, dans lequel il est indiqué que : ‘le malaise qui s’exprime dans l’équipe par rapport à la direction s’est installé peu à peu depuis trois ans. Le premier sentiment global exprimé parmi les salariés est que la directrice n’est plus ‘dans’ l’équipe éducative mais à côté, avec une activité centrée sur la gestion de l’établissement’.
Il est ainsi établi que Mme [S] [P], assurait dans les faits, les missions de directrice.
En revanche et ainsi que le fait valoir l’employeur, elle ne disposait pas du niveau II minimum de qualification exigé pour pouvoir prétendre à la classe I.
De ce fait et en application des dispositions conventionnelles précitées, il n’est pas établi qu’elle aurait dû être classée dès l’origine de la relation contractuelle en classe I niveau II et non pas en classe II niveau II.
– de lui avoir imposé une participation financière à la formation Cafdes et de lui avoir reproché d’y consacrer trop de temps alors que cette formation incombe à l’employeur au titre de son obligation de formation
– de lui avoir imposé, avant le mois de mars 2017, la prise de jour de congés pour participer à cette formation alors que, s’agissant d’une action inscrite au plan de formation, elle devait se dérouler sur mon temps de travail effectif.
– de ne pas lui avoir permis de récupérer les jours de congés pris avant le mois de mars 2017 pour participer à cette formation :
Selon l’article D451-11 du code de l’action sociale et des familles, le certificat d’aptitude aux fonctions de directeur d’établissement ou de service d’intervention sociale (Cafdes) atteste des compétences nécessaires pour conduire l’action d’un ou plusieurs établissements ou services du champ de l’action sociale, médico-sociale ou sanitaire.
Il ressort du compte rendu du bureau de l’association Terre et Demain du 2 mai 2015 (pièce 20 de la partie intimée) que l’employeur a autorisé Mme [S] [P] à entreprendre la formation Cafdes à la condition que les jours de formation soient pris sur ses congés annuels et ‘CT3 .
L’employeur reconnaît dans ses conclusions que le bureau de l’association a refusé de prendre en charge les frais de cette formation.
Mme [S] [P] soutient que l’association Terre et Demain était tenue de financer le reste à charge de cette formation (à hauteur de 6 822,13 euros) partiellement financée par l’Unifaf (à hauteur de 25 980,83 euros), sans pouvoir exiger qu’elle effectue cette formation sur ses congés dans la mesure où cette formation était obligatoire pour occuper son poste de directrice d’établissement.
Il résulte des motifs ci-dessus que Mme [S] [P] exerçait de façon effective les missions de directrice même si, du fait de sa qualification de niveau III, elle ne pouvait prétendre à la classification correspondante à son niveau de responsabilité et d’autonomie dans la décision.
L’article D312-176-8 du code de l’action sociale et des familles permet à les titulaires d’un diplôme sanitaire ou social de niveau III, justifiant d’une expérience professionnelle de trois ans dans le secteur sanitaire, social ou médico-social d’assurer la direction soit un établissement ou service qui emploie moins de dix salariés, soit un établissement relevant du III et IV de l’article L. 313-12 (établissement qui accueillent des personnes âgées dépendantes), soit un établissement ou un service d’une capacité inférieure au seuil fixé à l’article D. 313-16 par dérogation à l’article D312-176-7 qui impose en principe d’être titulaire d’une certification au moins de niveau II, c’est à la condition qu’ils aient suivi, ou s’engagent à suivre et achever dans un délai de cinq ans une formation à l’encadrement inscrite sur une liste fixée par arrêté du ministre chargé des affaires sociales.
Mme [S] [P] justifie au moyen d’une attestation de l’Institut de formation des cadres de l’économie sociale (pièce 16) des enseignements du Cafdes à savoir :
– DF1 Elaboration et conduite stratégique du projet d’établissement ou de service
– DF2 Management et gestion des ressources humaines
– DF3 Gestion économique, financière et logistique d’un établissement ou service
– DF4 Expertise de l’intervention sanitaire et sociale sur un territoire.
Il n’est pas discuté que le Cafdes est une formation à l’encadrement figurant sur la liste fixée par arrêté du ministre chargé des affaires sociales visée à l’article D312-176-8 du code de l’action sociale et des familles.
Dans ces conditions, les fonctions de directrice de Mme [S] [P], qui ne disposait à son embauche que d’une certification de niveau III et qui exerçait dans les faits, des fonctions de directrice d’établissement au sens des dispositions de la convention collective, nécessitaient qu’elle suive la formation du Cafdes.
En conséquence et contrairement à ce que soutient l’employeur, ce dernier était tenu de financer la part de la formation Cafdes non prise en charge par l’Unifaf, ce d’autant que la salariée n’est pas responsable du défaut de financement intégral de sa formation puisqu’il ressort d’un courriel de l’Unifaf du 21 mai 2015 (pièce 27 de la partie appelante) que le reste à charge est lié à un taux de cotisation insuffisant de la part de l’association Terre et Demain.
De même, l’employeur ne pouvait imposer à la salariée d’effectuer cette formation sur ses congés.
En effet, il résulte des dispositions de l’article L6321-2 du code de travail que : ‘Toute action de formation qui conditionne l’exercice d’une activité ou d’une fonction, en application d’une convention internationale ou de dispositions légales et règlementaires, constitue un temps de travail effectif et donne lieu pendant sa réalisation au maintien par l’entreprise de la rémunération’.
La matérialité de ces faits est établie.
– une dégradation de son état de santé et un arrêt de travail du mois d’octobre 2017 :
La matérialité de ce fait est établie par l’avis d’arrêt de travail initial du 19 octobre 2017 et les avis de prolongation, dont l’un fait état d’un épisode dépressif réactionnel.
À l’issue de cette analyse il apparaît que Mme [S] [P] rapporte la preuve que l’association Terre et Demain :
– lui a soumis pour signature le 13 février 2017, dès son retour d’arrêt de travail, un document intitulé ‘ feuille de route’ lui retirant son autonomie notamment sur le recrutement des personnels salariés non cadres et la soumettant à un suivi intensif en lui imposant un compte rendu d’activité hebdomadaire et l’obligation de l’informer de ses temps de présence effectif, ce en dépit de sa connaissance de la grave maladie dont elle souffrait
– a ainsi tenté de modifier son contrat de travail
– l’a écartée des réunions des délégués du personnel
– a mis cette feuille de route en application malgré son refus de la signer
– a fait de son refus de signer cette feuille de route un motif de sanction le 2 octobre 2017
– l’a plusieurs fois convoquée à des entretiens préalables à sanction qui n’ont pas tous donnés lieu à sanction
– lui a notifié des sanctions disciplinaires le 30 juin 2017 et le 2 octobre 2017
– n’a pas répondu à ses arguments et n’a pas retiré ces sanctions injustifiées
– s’est adressé à elle sur un ton de reproche et dévalorisant dans la feuille de route
– lui a imposé une participation financière à la formation Cafdes et lui a reproché d’y consacrer trop de temps, alors que cette formation incombe à l’employeur au titre de son obligation de formation
– lui a imposé, avant le mois de mars 2017, la prise de jours de congés pour participer à cette formation alors que cette formation devait se dérouler sur son temps de travail effectif.
L’appelante rapporte également la preuve que son état de santé s’est dégradé et qu’elle a été placée en arrêt de travail à compter du mois d’octobre 2017.
Ces fait précis, pris dans leur ensemble, laissent présumer l’existence d’un harcèlement moral.
De son côté, l’association Terre et Demain fait valoir :
– que pendant des années, Mme [S] [P] a été surclassée
– que le conseil départemental du Cantal, son seul financeur, avait prévu uniquement un poste de chef de service et aucun poste de directeur
– que la délégation générale de signature n’a pas été retirée à Mme [P] à son retour d’arrêt maladie
– que la ‘feuille de route’ ne constitue pas une modification du contrat de travail mais la déclinaison des orientations qu’elle souhaitait donner à la salariée avec des instructions précises
– que Mme [S] [P] n’a jamais perdu ses fonctions de chef de service
– que l’employeur ne peut évoquer les motifs des arrêts de travail successifs de la salariée sans porter une atteinte à la vie privée de celle-ci
– que les arrêts de travail de la salariée sont liés à ses dérives professionnelles et ses absences répétées ainsi qu’à ses mauvaises relations avec des enfants accueillis au sein de la Mecs et différents acteurs
– que la formation Cafdes n’était pas obligatoire
– que Mme [S] [P] était parfaitement informée des conditions dans lesquelles son employeur l’autorisait à suivre la formation Cafdes à savoir de prendre ses jours de formation sur ses congés pour ne pas nuire au fonctionnement de la Mecs et prendre en charge ses frais de formation pour ne pas impacter le budget formation de l’ensemble des salariés
– que Mme [S] [P] est la seule responsable de l’absence de prise en charge du reliquat de ses frais de formation pour ne pas avoir mobilisé son compte personnel de formation
– que la salariée a décidé toute seule de passer le Cafdes parce que ‘ ça l’arrangeait’.
Ces différents moyens ne sont pas de nature à démontrer que les agissements de l’association Terre et Demain n’étaient pas constitutifs d’un harcèlement moral et que ses décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
S’agissant de la tentative de modification des fonctions de Mme [S] [P] du 13 février 2017 et de la sanction disciplinaire du 2 octobre 2017 y faisant référence, l’association Terre et Demain expose :
– que les relations entre Mme [S] [P] et l’équipe éducative se sont rapidement dégradées et qu’elle a pris très au sérieux les remontées d’informations émanant notamment du médecin de travail, de M. [D], délégué du personnel, et du Conseil départemental du Cantal, ce d’autant que ‘ la crédibilité du travail de l’établissement [était] sérieusement entamée’
– que son conseil d’administration a alors décidé d’organiser des entretiens individuels auprès des 13 salariés pour établir le ‘ressenti’ de chacun dans l’établissement, ce qui a conduit à une synthèse écrite des entretiens (sa pièce 19 intitulée ‘synthèse des entretiens juin 2015″)
– que ce document a été présenté à la chef de service faisant fonction de directrice qui l’a ‘rejeté en bloc’, puis a fait l’objet d’une réunion dédiée le 1er juillet 2015 à laquelle Mme [P] ‘refusera de participer et présentera un arrêt maladie cinq jours plus tard’
– qu’ ‘à la suite de cette synthèse, 5 propositions seront faites à la salariée dont la première vise un changement de son attitude avec l’équipe éducative et la secrétaire
– que Mme [S] [P] refusera de s’y soumettre.
Il est effectivement constant que les relations entre la directrice et les membres de l’équipe éducative étaient très dégradées.
Cependant, la cour relève que les 5 propositions formulées dans les suites immédiates de la ‘synthèse des entretiens juin 2015″, sans attendre les observations de Mme [S] [P] sur le contenu de cette synthèse, constituent les 5 paragraphes de la ‘feuille de route’ soumise à la salariée et que les termes de cette synthèse ont été immédiatement contestés par un courriel du 28 juin 2015 dans lequel cette dernière fait état de son mal être, de son envie de suicide et reproche à l’employeur son absence d’objectivité et de soutien dans ses tâches de directrice.
De plus, cette ‘note de synthèse”, qui se borne à retranscrire de façon très générale le ressenti et la ‘perception de chacun par rapport au problème rencontré’ au travers de témoignages dont les auteurs ne sont pas identifiés et qui ne présente donc aucune garantie de fiabilité, ne permet pas d’établir que la responsabilité de cette situation incombait exclusivement à Mme [S] [P] et que les modifications du contrat de travail soumises à cette dernière étaient uniquement fondées sur la volonté de mettre fin à un dysfonctionnement.
Par conséquent, l’association Terre et Demain ne démontre pas que sa décision de modifier le contrat de travail de Mme [S] [P] n’était pas constitutive d’un harcèlement moral et que cette décision était justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
S’agissant des convocation à entretien préalable et sanctions disciplinaires, il apparaît :
– que l’association Terre et Demain ne rapporte pas la preuve de la matérialité des faits invoqués dans la convocation à entretien préalable du 6 août 2015 dans la mesure où le compte rendu de ‘[V]’ produit en pièce 25 n’est pas signé et que son auteur n’est pas précisément identifié
– que pour ce qui concerne la sanction disciplinaire du 30 juin 2017, Mme [S] [P] démontre au moyen d’un échange de courriels des 11 et 15 mai 2017 avec le conseil départemental du Cantal que les faits qui lui sont reprochés – son absence à la réunion initialement prévue le 18 mai 2017 motivé par un examen du Cafdes le même jour susceptible de porter préjudice aux relations partenariales – n’a pas mis à mal les relations de l’association avec son partenaire puisque cette réunion a été reportée sans difficultés au 29 juin 2017
– que pour ce qui concerne la sanction disciplinaire du 2 octobre 2017 visant un ‘non respect des directives du conseil d’administration de Terre et Demain notifiées dans une feuille de route transmis en main propre le 13 février 2017 et que vous avez refusé de signer, une attitude anxiogène et violente à l’égard d’un enfant de huit ans confié à l’établissement et conduit à la gendarmerie de [Localité 5] après son exclusion de l’école, un comportement brutal et humiliant à l’égard d’une fillette de 12 ans, en présence d’une éducatrice’ et enfin ‘la priorisation de la formation Cafdes aux dépens du fonctionnement de la Petite Maison’ :
– le refus d’accepter, non pas des directives de l’employeur mais une modification du contrat de travail, n’est pas fautif
– les deuxième et troisième faits reprochés à la salariée sont datés respectivement des 31 mars et 30 juin 2017 (pièces 8 de la partie appelante et 30 de la partie intimée) si bien qu’ils étaient prescrits à la date de notification de cette sanction disciplinaire et qu’en toute hypothèse, l’employeur avait épuisé son pouvoir disciplinaire par la notification de la précédente sanction du 30 juin 2017
– l’association Terre et Demain ne rapporte aucune preuve du quatrième fait reproché à la salariée, étant ici relevé que la formation Cafdes ne s’est pas déroulée sur le temps de travail de Mme [P].
En conséquence, l’employeur ne démontre pas que cette convocation à entretien préalable et ces sanctions disciplinaires n’étaient pas constitutives d’un harcèlement moral et quelles étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral.
À l’issue de cette analyse, il apparaît que l’existence d’un harcèlement moral est établi.
Outre un harcèlement moral, Mme [S] [P] invoque également au soutien de sa demande de prise d’acte l’existence d’une discrimination en matière de rémunération et de formation en raison de son état de santé ou de son orientation sexuelle.
Aux termes de l’article L 1132-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son sexe, de sa situation de famille, de sa grossesse, de son apparence physique, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son patronyme, de son lieu de résidence, de son état de santé, de sa perte d’autonomie, de son handicap, de ses caractéristiques génétiques, de ses m’urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales, de sa capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée.
Selon l’article L.1132-4 du code du travail, toute disposition ou tout acte pris à l’égard d’un salarié en méconnaissance du principe de non-discrimination est nul.
Le régime probatoire en matière de discrimination est prévu à l’article L.1134-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008, qui énonce : ‘Lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.’
En application de ces dispositions, il appartient au juge :
1°) d’examiner la matérialité de tous les éléments invoqués par le salarié ;
2°) d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte ;
3°) dans l’affirmative, d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
En l’espèce, Mme [S] [P] reproche à l’association Terre et Demain :
– de ne pas avoir intégré les astreintes dans le montant du maintien de salaire durant son arrêt de travail :
Selon l’article 6 de l’annexe n°6 à la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 : ‘Sous réserve des dispositions de l’article 26 de la convention collective du 15 mars 1966, en cas d’arrêt de travail résultant de maladie, d’accident du travail, les cadres percevront :
– pendant les 6 premiers mois : le salaire net qu’ils auraient perçu normalement sans interruption d’activité,
– pendant les 6 mois suivants : le demi-salaire net correspondant à leur activité normale (…)’.
Il ressort de la lecture du contrat de travail que les astreintes constituent bien un élément de la rémunération de Mme [S] [P] et de ses fiches de paie que cette dernière percevait chaque mois une indemnité d’astreinte qui apparaît explicitement comme un élément de la rémunération brute de la salariée.
Il en résulte que, contrairement à ce que soutient l’association Terre et Demain, l’indemnité d’astreinte constitue une partie du salaire normalement perçu par Mme [S] [P].
De ce fait et en application des dispositions conventionnelles rappelées ci-dessus, l’employeur était tenu de calculer le maintien de salaire en tenant compte des astreintes que la salariée aurait perçues normalement si elle n’avait pas été placée en arrêt de travail.
Les faits sont donc matériellement établis.
– d’avoir refusé dans un premier temps de prendre en charge les frais de formation au titre des sessions de septembre, octobre et novembre 2016 et d’avoir attendu de multiples demandes pour régulariser la situation :
Mme [S] [P] verse aux débats un courrier de l’association Terre et Demain daté du 21 mars 2017 dans lequel l’employeur lui notifie son refus de prendre en charge les frais de formation pour les sessions de septembre, octobre et novembre 2016 correspondant à l’arrêt maladie au motif d’une absence d’autorisation du médecin du travail.
En revanche, la salariée ne justifie pas avoir transmis à l’association Terre et Demain le certificat médical du 19 août 2017 indiquant que le diagnostic médical n’empêche pas la participation à la formation Cafdes.
Par conséquent, Mme [S] [P] n’est pas fondée à reprocher à l’employeur d’avoir tardivement pris en charge ses frais de formation au titre des mois de septembre, octobre et novembre 2017.
– une dégradation de son état de santé et un arrêt de travail du mois d’octobre 2017 :
Il résulte des motifs ci-dessus que ce fait est matériellement établi.
Le défaut d’intégration des indemnités d’astreinte dans le montant du maintien de salaire durant l’arrêt de travail de la salariée et la dégradation de l’état de santé de celle-ci ayant conduit à son placement en arrêt de travail à compter du mois d’octobre 2017 en raison d’un épisode dépressif réactionnel, pris dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’une discrimination en matière de rémunération et de formation, en raison de l’état de santé.
Or, l’association Terre et Demain ne rapporte pas la preuve de ce que l’absence d’intégration les indemnités d’astreinte dans le montant des maintiens de salaire durant l’arrêt de travail pour maladie était étrangère à toute discrimination et elle ne rapporte pas non plus la preuve d’une erreur de sa part sur l’étendue des droits de la salariée, qui aurait été confortée par un avis du Syndicat des employeurs associatifs de l’action sociale et médico-sociale interrogé par sa présidente, avis qui n’est pas versé aux débats.
L’existence d’une discrimination en matière de rémunération et de formation en raison de l’état de santé est ainsi démontrée.
En revanche, aucun élément ne permet d’établir que cette discrimination est également due à l’orientation sexuelle de la salariée.
Le harcèlement moral et la discrimination dont a été victime Mme [S] [P] de la part de l’association Terre et Demain constituent des manquements de l’employeur à ses obligations d’une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail.
En conséquence et en application des principes susvisés, la prise d’acte de rupture produit les effets d’un licenciement nul.
De ce fait, Mme [S] [P] peut prétendre au paiement d’une indemnité compensatrice de préavis et d’une indemnité conventionnelle de licenciement à hauteur des montants suivants, non discutés par la partie intimée :
– indemnité compensatrice de préavis : 30’803,36 euros bruts, outre 3 080,33 euros de congés payés afférents (6 mois de salaire en application de l’article 9 de l’annexe 6 à la convention collective)
– indemnité conventionnelle de licenciement : 36’365,05 euros bruts.
Ces condamnations seront assorties d’intérêts au taux légal à compter du 28 février 2019, date de convocation devant le bureau de conciliation valant première mise en demeure dont il est justifié.
Selon l’article L1235-3-1 du code du travail dans sa version issue de l’Ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017, l’article L. 1235-3 n’est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est lié à des faits de harcèlement moral ou sexuel. Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l’exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l’employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
En l’espèce, aucune des parties ne demande la réintégration de Mme [S] [P].
Compte tenu notamment, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Mme [S] [P] (4 144,47 euros de rémunération mensuelle brute en moyenne pendant les 6 derniers mois), de son âge au jour de son licenciement (54 ans), de son ancienneté à cette même date (6 ans et 8 mois), tels que ces éléments résultent des pièces et des explications fournies qui démontrent que la salariée a immédiatement retrouvé un emploi dès le 5 mars 2018, il y a lieu de lui allouer, en application de l’article L.1235-3 du code du travail dans sa version en vigueur, une somme de 25 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul.
Cette condamnation sera assortie des intérêts légaux à compter du présent arrêt.
Le jugement déféré sera infirmé de tous ces chefs.
Sur la demande de paiement du préavis formée par l’employeur :
Dès lors que la prise d’acte de rupture s’analyse en un licenciement nul, l’employeur ne peut prétendre à l’indemnisation de la période de préavis non effectuée.
En conséquence la cour, infirmant le jugement déféré de ce chef, rejette la demande d’indemnité de préavis.
Sur le harcèlement moral :
Il résulte des motifs ci-dessus que l’existence d’un harcèlement moral est établie.
Au vu de la durée et de la gravité des conséquences de ce harcèlement moral sur l’état de santé de Mme [S] [P] telles qu’elles ressortent des avis d’arrêt de travail versés aux débats qui démontrent que cette dernière a connu de ce fait un épisode dépressif de près de 5 mois, la cour évalue à la somme de 3 000 euros le montant des dommages et intérêts pour préjudice moral.
Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.
Sur la discrimination liée à état de santé et à l’orientation sexuelle :
Il résulte des motifs ci-dessus que l’existence d’une discrimination en matière de rémunération et de formation en raison de l’état de santé est établie.
En conséquence la cour, infirmant le jugement de ce chef, dit que Mme [S] [P] a été victime de d’une discrimination en matière de rémunération et de formation en raison de l’état de santé.
En revanche la cour rejette la demande présentée à hauteur de cour tendant à voir dire que la salariée a également été victime d’une discrimination en raison de son orientation sexuelle.
Sur la demande de reclassification et la demande de rappel de salaires au titre de la reclassification conventionnelle :
Il résulte des motifs ci-dessus que Mme [S] [P] ne pouvait prétendre au positionnement en classe 1 dès l’origine du contrat de travail dans la mesure où elle ne disposait pas du niveau II minimum de qualification exigé par les dispositions conventionnelles.
Il ressort de sa pièce 64 que la salariée a obtenu le Cafdes le 8 janvier 2018 et il est constant que ce certificat est de niveau I.
C’est donc à partir du 8 janvier 2018 qu’elle remplissait toutes les conditions conventionnelles pour être positionnée en classe I à savoir effectuer des tâches relevant des fonctions de directrice et être titulaire d’une qualification de niveau II minimum.
Selon l’annexe 6 à la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, les cadres classe I bénéficient des coefficients suivants, selon que le niveau I ou le niveau II est exigé :
– après 3 ans :896, 1 si le niveau I est exigé et 824 si le niveau II est exigé
– après 6 ans : 922,2 si le niveau I est exigé et 848 si le niveau II est exigé.
Les calculs de rappels de salaire détaillés en pages 24 et 25 de ses conclusions de la partie appelante, qui prennent en compte la différence entre le coefficient appliqué par l’employeur et le coefficient auquel la salariée aurait dû être classée sur la période de janvier à mars 2018 en fonction de son ancienneté et de son niveau (cadre classe 1 niveau 1 coefficient 922,20 de janvier à mars 2018) n’étant pas discutés, la cour condamne l’association Terre et Demain à payer à Mme [S] [P] un rappel de salaires au titre de la reclassification conventionnelle d’un montant de 1 616,37 euros, outre 161,63 euros de congés payés afférents, assortis d’intérêts légaux à compter du 28 février 2019.
Le jugement déféré sera infirmé de ces chefs.
Sur la demande de rappel des indemnités d’astreinte au titre du maintien de salaire :
Ainsi qu’il est jugé plus haut et contrairement à ce que soutient l’association Terre et Demain, elle devait calculer le maintien de salaire de Mme [S] [P] en tenant compte des astreintes que celle-ci aurait perçues normalement si elle n’avait pas été placée en arrêt de travail.
Le montant accordé par les premiers juges n’étant pas discuté, la cour, confirmant le jugement de ce chef, condamne l’association Terre et Demain à payer à Mme [S] [P] la somme de 3 472,90 euros à titre de rappel de salaire pour les astreintes, outre 347,29 euros de congés payés afférents, assortie d’intérêts au taux légal à compter du 28 février 2019.
Sur la demande indemnisation des congés et repos utilisés durant la formation professionnelle et sur la demande de remboursement des frais de formation professionnelle (Cafdes) :
Mme [S] [P] fait valoir qu’à la demande de l’employeur, elle a consacré 39 jours de congés payés et de RTT à sa formation Cafdes entre le 1er juin 2015 et le 31 mai 2017.
Elle soutient que l’association Terre et Demain doit lui rembourser ces 39 jours de congés et RTT d’un montant total de 7 364,46 euros bruts et 736,45 euros de congés payés afférents, dans la mesure où :
– l’association Terre et Demain avait donné son accord à cette formation
– cette formation était nécessaire à l’exercice de ses fonctions de directrice en application de l’article D312-176-7 du code de l’action sociale et des familles
– l’article L6321-2 du code du travail stipule que toute action de formation suivie par un salarié pour assurer son adaptation au poste de travail ou liée à l’évolution ou maintien de l’emploi dans l’entreprise constitue du temps de travail effectif et donne lieu pendant sa réalisation au maintien par l’entreprise la rémunération
– la CJUE estime que le droit au congé annuel payé de chaque travailleur doit être considéré comme un principe du droit social de l’Union revêtant une importance particulière.
Il résulte des motifs ci-dessus que l’employeur ne pouvait imposer à la salariée d’effectuer cette formation sur ses congés et qu’il était également tenu de financer la part de la formation Cafdes non prise en charge par l’Unifaf.
De ce fait et les calculs détaillés en page 34 des conclusions de la partie appelante n’étant pas discutés, la cour, infirmant le jugement de ce chef, condamne l’association Terre et Demain à payer à Mme [S] [P] la somme de 7 364,46 euros bruts à titre de rappel de congés payés durant les journées de formation et 736,45 euros bruts de congés payés afférents, assortis d’intérêts au taux légal à compter du 28 février 2019.
De même, Mme [S] [P] verse aux débats une facture du 6 décembre 2017 de la société Ifocas d’un montant de 1 562,49 euros libellée à son nom correspondant à la formation Cafds pour la période de juillet à novembre 2017.
En conséquence la cour, infirmant le jugement de ce chef, condamne l’association Terre et Demain à payer à Mme [S] [P] la somme de 1 562,49 euros en remboursement des frais de formation professionnelle Cafdes.
Cette condamnation sera assortie d’intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.
Sur la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive :
Mme [S] [P] sollicite également la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.
Au soutien de cette demande, elle invoque le refus de l’employeur de la rémunérer conformément aux dispositions conventionnelles applicables, l’absence de paiement des astreintes pendant ses arrêts de travail et la privation de ses droits à repos durant sa formation professionnelle.
Toutefois, ces manquements de l’employeur ne suffisent pas à caractériser un abus du droit de résister aux demandes de la salariée.
En conséquence la cour, confirmant le jugement de ce chef, rejette la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.
Sur la demande d’annulation des deux sanctions disciplinaires du 30 juin 2017 et du 2 octobre 2017 et la demande de dommages-intérêts pour sanctions disciplinaires injustifiées :
Il résulte des motifs ci-dessus que les deux sanctions disciplinaires notifiées à Mme [P] par l’association Terre et Demain le 30 juin 2017 et le 2 octobre 2017 ne sont pas fondées, soit que la matérialité des faits invoqués n’est pas établie, soit que les faits sont prescrits, soit que le pouvoir disciplinaire de l’employeur soit épuisé.
En conséquence la cour, infirmant le jugement de ce chef, annule les sanctions disciplinaires notifiées par l’association Terre et Demain le 30 juin 2017 et le 2 octobre 2017.
En revanche, Mme [S] [P] n’alléguant et ne justifiant d’aucun préjudice en lien avec ces sanctions disciplinaires annulées, la cour confirme le jugement en ce qu’il a rejeté sa demande de dommages et intérêts.
Sur la capitalisation des intérêts légaux :
La capitalisation des intérêts sera ordonnée, conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil.
Sur les demandes accessoires :
Partie perdante, l’association Terre et Demain supportera la charge des dépens de première instance et d’appel.
Par ailleurs, Mme [S] [P] a dû pour la présente instance exposer tant en première instance qu’en appel des frais de procédure et honoraires non compris dans les dépens qu’il serait inéquitable de laisser intégralement à sa charge.
Il y a donc lieu d’infirmer le jugement déféré en ce qu’il l’a déboutée de sa demande présentée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et de condamner l’employeur à lui payer sur le même fondement une indemnité de 4 000 euros au titre des frais qu’elle a dû exposer en première instance et en appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Fixe la clôture au 9 janvier 2023 ;
Déclare recevables les conclusions de la partie intimée notifiées le 7 décembre 2022 ainsi que les conclusions et pièces de la partie appelante notifiée le 12 décembre 2022 ;
Rejette la demande d’irrecevabilité des pièces n°6, 36, 20, 21, 25, 30, 31, 32, 34 et 37 produites par l’association Terre et Demain ;
CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a :
– condamné l’association Terre et Demain à payer à Mme [S] [P] la somme de 3 472,90 euros à titre de rappel d’indemnité d’astreinte et 347,29 euros de congés payés afférents ;
– rejeté la mande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
– rejeté la demande de dommages et intérêts pour sanctions disciplinaires injustifiées ;
INFIRME le jugement en toutes ses autres dispositions et, statuant à nouveau et y ajoutant :
DIT que Mme [S] [P] a été victime de harcèlement moral de la part de l’association Terre et Demain ;
DIT que Mme [S] [P] a été victime d’une discrimination en matière de rémunération et de formation en raison de l’état de santé ;
DIT que la prise d’acte de rupture du 28 février 2018 s’analyse en un licenciement nul ;
ANNULE les sanctions disciplinaires notifiées par l’association Terre et Demain le 30 juin 2017 et le 2 octobre 2017 ;
CONDAMNE l’association Terre et Demain à payer à Mme [S] [P] les sommes suivantes :
– 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral, avec intérêts légaux à compter du présent arrêt ;
– 1 616,37 euros à titre de rappel de salaire sur reclassification et 161,63 euros de congés payés afférents, assortis d’intérêts légaux à compter du 28 février 2019 ;
– 7 364,46 euros bruts à titre de rappel de congés payés durant les journées de formation et 736,45 euros bruts de congés payés afférents, assortis d’intérêts au taux légal à compter du 28 février 2019 ;
– 1 562,49 euros en remboursement des frais de formation professionnelle Cafdes, assortis d’intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
– 30’803,36 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 3 080,33 euros de congés payés afférents, avec intérêts légaux à compter du 28 février 2019 ;
– 36’365,05 euros bruts à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement, avec intérêts légaux à compter du 28 février 2019 ;
– 25 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul, avec intérêts légaux à compter du présent arrêt ;
REJETTE la demande au titre de la discrimination en raison de l’orientation sexuelle ;
DIT que les sommes allouées supporteront, s’il y a lieu, le prélèvement des cotisations et contributions sociales ;
ORDONNE la capitalisation des intérêts dus au moins pour une année entière ;
CONDAMNE l’association Terre et Demain à payer à Mme [S] [P] la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE l’association Terre et Demain aux entiers dépens de première instance et d’appel ;
DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.
Le greffier, Le Président,
N. BELAROUI C. RUIN