Compte personnel de formation : 7 décembre 2022 Cour d’appel de Reims RG n° 21/01805

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Compte personnel de formation : 7 décembre 2022 Cour d’appel de Reims RG n° 21/01805
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Arrêt n°

du 07/12/2022

N° RG 21/01805

MLB/FJ

Formule exécutoire le :

à :

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 07 décembre 2022

APPELANTE :

d’un jugement rendu le 1er septembre 2021 par le Conseil de Prud’hommes de REIMS, section Encadrement (n° F 20/00309)

Madame [N] [S]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par la SELARL MCMB, avocats au barreau de REIMS

INTIMÉE :

SA LA POSTE

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par la SCP SAMMUT-CROON-JOURNE-LEAU, avocats au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 septembre 2022, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller, chargé du rapport, qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 26 octobre 2022, prorogée au 7 décembre 2022.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Madame Christine ROBERT-WARNET, président

Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Madame Lozie SOKY, greffier placé

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Christine ROBERT-WARNET, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

La SA La Poste a embauché Madame [N] [S] suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 3 octobre 2007, en qualité de conseiller financier, classification III-2.

Suivant avenant au contrat de travail en date des 2 et 12 novembre 2010, Madame [N] [S] a exercé la fonction de conseiller spécialisé en patrimoine, classification III-2.

Suivant avenant au contrat de travail en date des 12 et 15 avril 2012, Madame [N] [S] exerce la fonction de conseiller spécialisé patrimoine confirm, classification III-3.

Au début de l’année 2019, elle a présenté une demande de départ en formation via le compte personnel de formation sur temps de travail, laquelle lui a été refusée le 4 avril 2019.

Le 25 avril 2019, les parties ont signé une convention de rupture conventionnelle du contrat de travail à durée indéterminée de Madame [N] [S]. La demande d’homologation a été transmise à la Direccte, l’homologation résultant d’une décision implicite d’acceptation acquise au 1er juin 2019.

Le 27 mai 2020, Madame [N] [S] saisissait le conseil de prud’hommes de Reims de différentes demandes à l’encontre de la SA La Poste.

Par jugement en date du 1er septembre 2021, le conseil de prud’hommes a :

– constaté l’absence de faute de la SA La Poste à l’occasion du refus de demande de formation opposé à Madame [N] [S],

– constaté l’absence de discrimination salariale à l’égard de Madame [N] [S],

– constaté l’absence de nullité de la rupture conventionnelle,

en conséquence,

– débouté Madame [N] [S] de ses demandes,

– débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

– condamné Madame [N] [S] aux dépens.

Le 27 septembre 2021, Madame [N] [S] a formé une déclaration d’appel.

Dans des écritures en date du 22 décembre 2021, Madame [N] [S] demandait à la cour de réformer la décision et :

vu les dispositions des articles L.6111-1 et R.6323-10 du code du travail,

– de dire et juger que la SA La Poste a manqué à son obligation en matière d’accès à la formation,

en conséquence,

– de condamner la SA La Poste à lui payer la somme de 10000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation des règles afférentes au congé de formation professionnelle,

vu les dispositions des articles L.1132-1, L.1134-1 et L.3221-4 du code du travail,

– de dire et juger qu’elle a fait l’objet d’une discrimination salariale, à tout le moins qu’il a été porté atteinte au principe ‘à travail égal, salaire égal’,

en conséquence,

– de condamner la SA La Poste à lui payer la somme de 20000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la discrimination salariale,

– de dire et juger la rupture conventionnelle du 25 avril 2019 nulle et de nul effet,

en conséquence,

– de condamner la SA La Poste à lui payer les sommes de :

. 69000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 11403 euros à titre d’indemnité de préavis,

. 1140 euros à titre de congés payés sur préavis,

– d’ordonner la compensation entre les sommes au remboursement desquelles elle est tenue au titre de l’annulation de la rupture conventionnelle et celles auxquelles la SA La Poste est tenue au titre de l’indemnité de licenciement à hauteur de la somme de 24000 euros,

– de condamner la SA La Poste à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– d’ordonner à la SA La Poste d’avoir à lui remettre ses documents de fin de contrat rectifiés.

Dans des écritures en date du 12 mars 2022, la SA La Poste concluait à la confirmation du jugement, au rejet du surplus des demandes de Madame [N] [S], à sa condamnation à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par arrêt en date du 29 juin 2022, la cour a :

– ordonné une réouverture des débats et renvoyé à l’audience du 12 septembre 2022 afin que les parties concluent au titre de la formation professionnelle sur le fondement de l’article D.6323-4 du code du travail ;

– imparti à Madame [N] [S] jusqu’au 30 juillet 2022 pour conclure, à la SA La Poste jusqu’au 25 août 2022 pour répliquer et à Madame [N] [S] jusqu’au 5 septembre 2022 pour une réplique éventuelle ;

– dit que l’ordonnance de clôture sera rendue le 5 septembre 2022 ;

– réservé les demandes et les dépens.

Dans ses écritures en date du 6 juillet 2022, Madame [N] [S] a formulé ses demandes au titre de l’accès à la formation au visa des articles L.6111-1 et D.6323-4 du code du travail.

Dans ses écritures en date du 11 juillet 2022, la SA La Poste réplique avoir notifié sa réponse à la salariée dans le délai de 30 jours tel que prévu à l’article D.6323-4 du code du travail.

En raison de problème de greffe, le délibéré initialement fixé au 9 novembre 2022 a été prorogé au 7 décembre 2022.

Motifs :

– Sur le manquement de la SA La Poste à son obligation en matière d’accès à la formation :

Madame [N] [S] reproche aux premiers juges d’avoir retenu que son employeur lui avait opposé un refus à sa demande de formation dans le délai légal, de sorte que celui-ci était licite, ce que la SA La Poste demande à la cour de confirmer.

Aux termes de l’article D.6323-4 du code du travail applicable en l’espèce, ‘A compter de la réception de la demande, l’employeur dispose d’un délai de 30 jours calendaires pour notifier sa réponse au salarié. L’absence de réponse de l’employeur dans ce délai vaut acceptation de la demande’.

Les parties s’accordent sur le principe que seul un dossier complet est de nature à faire courir le délai.

Madame [N] [S] soutient que son dossier de demande de formation étant complet à la date du 15 février 2019, l’employeur aurait dû lui répondre au plus tard le 18 mars 2019, ce qu’il n’a pas fait, puisqu’il ne lui a répondu que le 4 avril 2019 et que dans ces conditions, son absence de réponse vaut acceptation de la demande.

Or, la SA La Poste lui oppose à raison qu’à la date du 18 mars 2019, son dossier n’était toujours pas complet.

En effet, il ressort du formulaire de demande de départ en formation produit par la salariée, qu’un certain nombre de cases n’était pas renseigné, parmi lesquelles notamment : ‘nombre d’heures CPF et valeur en euros (cf compteur en ligne)’, ‘date de fin’ de l’action.

C’est dans ces conditions qu’en réponse à la demande de la salariée en date du 7 mars 2019, la SA La Poste lui écrivait le 8 mars 2019, que des éléments nécessaires à l’étude de sa demande faisaient toujours défaut, parmi lesquels :

– calendrier précis du déroulé de la formation mentionnant la date de début et de fin,

– dernier bulletin de paie et attestation des droits acquis (nombre d’heures CPF et valeur en euros).

La SA La Poste indiquait ensuite, le 4 avril 2019, qu’après avoir réceptionné un dossier complet le 18 mars 2019, elle n’accédait pas à sa demande.

Il ressort donc de ces éléments que la SA La Poste a répondu à Madame [N] [S] dans le délai légal d’un mois à compter du jour où son dossier a été complet. En effet, Madame [N] [S] n’établit pas avoir adressé à l’employeur l’ensemble des éléments requis par le formulaire avant le 18 mars 2019. Il importe peu à cet effet que son supérieur hiérarchique ait émis dès le 15 février 2019 un avis favorable à sa demande, ce qui ne signifie pas que le dossier était complet, mais constitue au vu de l’imprimé produit, un des éléments du dossier de demande de formation.

C’est donc à juste titre que dans ces conditions, les premiers juges ont débouté Madame [N] [S] de sa demande de dommages-intérêts.

– Sur la discrimination salariale :

Madame [N] [S] demande à la cour d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de dommages-intérêts d’un montant de 10000 euros pour discrimination salariale au motif qu’elle a été victime de discrimination salariale et à tout le moins d’une atteinte au principe ‘à travail égal, salaire égal’.

Dans son dispositif, elle élève sa demande de dommages-intérêts à la somme de 20000 euros, au seul titre toutefois de la discrimination salariale. En application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour n’est donc pas saisie d’une demande de dommages-intérêts au titre de la violation du principe ‘à travail égal, salaire égal’.

Il appartient à la salariée de soumettre à la cour des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination et le cas échéant à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Madame [N] [S] ne satisfait pas à la preuve qui lui incombe à ce titre.

En effet, elle soutient que c’est à la suite de la dénonciation d’un harcèlement auprès du CHSCT de la Poste à [Localité 5], dont elle aurait été victime en 2012, qu’elle n’aurait plus eu de réelle progression salariale. Or, il ne ressort nullement de la seule pièce qu’elle produit à ce titre -pièce n°19- qu’elle aurait dénoncé auprès du CHSCT avoir subi des faits de harcèlement moral au mois de septembre 2012, puisque celle-ci est composée d’un mail entre [L] [J] et [Courriel 4] le 9 septembre 2012 et d’un courrier dactylographié de sa part, sans établir au demeurant qu’il ait été annexé audit mail.

Le jugement doit donc être confirmé du chef du rejet de la demande de Madame [N] [S] à ce titre.

– Sur la nullité de la rupture conventionnelle de son contrat de travail :

Madame [N] [S] reproche aux premiers juges d’avoir rejeté sa demande tendant à voir prononcer la nullité de la rupture conventionnelle de son contrat de travail signée le 25 avril 2019.

Elle soutient en effet que ladite rupture a été signée ‘dans un contexte de fraude à ses droits de bénéficier du congé demandé dans le cadre de son compte personnel de formation’, dès lors que la SA La Poste lui avait refusé sa formation et lui avait laissé entendre que le seul moyen pour elle de l’obtenir serait en réalité une rupture conventionnelle.

Or, le calendrier des étapes de négociation de la rupture conventionnelle et les propres écrits de la salariée vont à l’encontre de ses allégations.

En effet, c’est dès le 1er février 2019, soit le lendemain du dépôt de sa demande de formation, et à une date à laquelle elle ne disposait d’aucune réponse à ce titre, qu’elle adressait un courrier ayant pour objet ‘demande de rupture conventionnelle du contrat de travail’. Elle y indiquait expressément qu’elle souhaitait démarrer de nouveaux projets professionnels et mettre en place une rupture conventionnelle de son contrat et fin à son CDI dès le 1er septembre 2019.

Le refus opposé à Madame [N] [S] au titre de sa formation étant par ailleurs légal, comme il vient d’être retenu, aucune fraude, au vu de l’ensemble de ces éléments, n’est donc caractérisée à ses droits à ce titre.

Le jugement doit être confirmé du chef du rejet de la de la demande de Madame [N] [S] tendant à voir prononcer la nullité de la rupture conventionnelle et des demandes en découlant.

*********

Le jugement doit être confirmé du chef des dépens et du chef du rejet des demandes au titre des indemnités de procédure.

Partie succombante, Madame [N] [S] doit être condamnée aux dépens d’appel et déboutée de sa demande d’indemnité de procédure.

Il y a lieu en équité de laisser à la SA La Poste la charge de ses frais irrépétibles d’appel non compris dans les dépens.

Par ces motifs :

La cour, statuant contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Confirme le jugement déféré ;

Y ajoutant :

Déboute Madame [N] [S] et la SA La Poste de leur demande d’indemnité de procédure ;

Condamne Madame [N] [S] aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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