Compte personnel de formation : 4 octobre 2022 Cour d’appel de Grenoble RG n° 20/02787

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Compte personnel de formation : 4 octobre 2022 Cour d’appel de Grenoble RG n° 20/02787
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C1

N° RG 20/02787

N° Portalis DBVM-V-B7E-KRIJ

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC

Me Célia LAMY

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 04 OCTOBRE 2022

Appel d’une décision (N° RG F 18/00044)

rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de GAP

en date du 17 août 2020

suivant déclaration d’appel du 10 septembre 2020

APPELANTE :

Madame [L] [F]

née le 24 Août 1964 à [Localité 6] (Algérie)

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par Me Dejan MIHAJLOVIC de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat postulant inscrit au barreau de GRENOBLE,

et par Me Odile LENZIANI de la SCP LENZIANI & ASSOCIES, avocat plaiant inscrit au barreau de MARSEILLE,

INTIMEE :

Société LA POSTE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Célia LAMY, avocat postulant inscrit au barreau de GRENOBLE,

et par Me Nicolas CARRERAS de la SELARL LIVELY, avocat plaidant inscrit au barreau d’AVIGNON,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente,

Madame Gaëlle BARDOSSE, Conseillère,

Madame Isabelle DEFARGE, Conseillère,

DÉBATS :

A l’audience publique du 13 juin 2022,

Mme Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente, chargée du rapport, assistée de Mme Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, en présence de Mmes [M] [G] et [H] [J], auditrices de justice, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile.

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 04 octobre 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L’arrêt a été rendu le 04 octobre 2022.

Exposé du litige :

Mme [F] a été embauchée par SA La Poste dans le cadre d’un contrat de professionnalisation en qualité de facteur sur la période du 26 septembre 2012 au 25 juin 2013.

A l’issue de son contrat de professionnalisation, elle a été embauchée en contrat de travail à durée indéterminée conclu le 26 juin 2013 en qualité de facteur, niveau 1-2 et nommée au centre courrier d'[Localité 3] PDC 1.

Mme [F], en raison d’une tendinopathie des muscles épicondyliens du coude droit a été placée en arrêt maladie de manière régulière à compter du mois d’avril 2014. Sa maladie a été admise au titre de la législation sur les risques professionnels le 17 février 2015.

Le 11 juin 2015, Mme [F] a été reconnue en qualité de travailleuse handicapée.

Un avis médical d’inaptitude temporaire préconisant une reprise au mois d’août 2015 avec réserves, a été rendu par le Médecin du travail le 19 juin 2015.

Un deuxième avis rendu le 04 août 2015 par le Médecin du travail l’a déclarée « Inapte temporaire à son ancien poste », apte à un travail, apte à une reprise à mi-temps thérapeutique avec réserves sur un autre poste excluant le port de charges répétitif supérieures à 5kg et le tri supérieur à 20 minutes.

Le 04 septembre 2015, le Médecin du travail a rendu le même avis d’inaptitude temporaire à son poste, l’a déclarée apte au travail « en cabine, au carré pro » avec réserves et précisé que le mi-temps thérapeutique devrait « sûrement encore être prolongé ».

Le 03 août 2016, Mme [F] a été déclarée inapte à titre temporaire et placée en arrêt de travail pour maladie professionnelle du 1er septembre au 02 novembre 2016.

Le 14 décembre 2017, elle a fait l’objet d’une mise à pied disciplinaire.

Le 24 avril 2018, Mme [F] a saisi le conseil des prud’hommes de Gap notamment aux fins de contester sa mise à pied du 11 décembre 2017, condamnation de son employeur pour des faits de harcèlement moral et au paiement de sommes au titre d’heures supplémentaires.

Par jugement du 17 aout 2020, le conseil des prud’hommes de Gap a :

Dit que Mme [F] ne rapporte pas la preuve d’un harcèlement moral, 

Requalifié la mise à pied disciplinaire en avertissement et condamné l’employeur à lui verser la somme de 381,81 euros représentant le temps de la mise à pied,

Rejeté la demande de dommages et intérêts formulée à ce titre,

Rejeté toutes autres demandes.

Condamné la Poste au paiement de la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens

La décision a été notifiée aux parties et Mme [F] en a interjeté appel.

Mme [F] a été licenciée pour faute grave le 29 juillet 2021 et a saisi le Conseil des prud’hommes en contestation de ce licenciement le 17 septembre 2021.

Par conclusions du 17 mai 2022, Mme [F] demande à la cour d’appel :

D’infirmer le jugement rendu par le Conseil des prud’hommes de Gap en date du 17 août 2020 en ce qu’il a :

Dit que Mme [F] n’apportait pas la preuve d’un harcèlement moral et l’a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral évaluée à la somme de 35 000 euros

Requalifié la mise à pied disciplinaire en avertissement et débouté Mme [F] de sa demande indemnitaire pour sanction disciplinaire injustifiée évaluée à la somme de 5 000 euros,

Débouté Mme [F] de sa demande relative au titre des heures supplémentaires et de sa demande de régularisation de ses droits à formation.

Le confirmer en toutes ses autres dispositions,

Et, statuant à nouveau, de :

Juger que Mme [F] a été victime d’actes de harcèlement moral, par conséquent, de condamner la SA la Poste à lui payer la somme de 35 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le harcèlement moral subi,

Annuler la sanction de mise à pied disciplinaire du 11 décembre 2017 et de condamner la Poste à lui payer sommes suivantes :

381,81 euros à titre de rappel de salaire sur la période du 15 au 21 janvier 2018

38,18 euros au titre de l’incidence congés payés

5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour sanction injustifiée

Condamner la SA la Poste à lui verser les sommes suivantes :

128,23 euros à titre de majoration au taux légal de 44,22 heures supplémentaires réalisées

12,82 euros au titre de l’incidence congés payés

Ordonner à la Poste de régulariser sa situation au titre de ses droits à formation en allouant au compte personnel de formation de cette dernière l’équivalent de 56,72 heures, soit une somme totale de 855 euros,

Juger que le montant des condamnations portera intérêts de droit à compter du jour de l’introduction de la demande en justice avec capitalisation,

Condamner la SA la Poste à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en sus de l’indemnité allouée sur ce fondement en première instance,

Condamner la SA la Poste aux entiers dépens.

Par conclusions du 17 mai 2022, la SA La Poste demande à la cour d’appel de :

Reformer le jugement rendu par le Conseil des prud’hommes de GAP en ce qu’il requalifié la mise à pied disciplinaire en un avertissement et condamné la SA la Poste à verser à Mme [F] la somme de 381,81 euros à titre de rappels de salaires sur la mise à pied disciplinaire ;

Confirmer le jugement rendu par le Conseil des prud’hommes de GAP dans toutes ses autres dispositions ;

Débouter par conséquent Mme [F] de l’intégralité de ses demandes.

Reconventionnellement,

Condamner Mme [F] à verser à la SA la Poste la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les éventuels dépens d’instance.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 mai 2022.

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l’article 455 du code de procédure civile de se reporter à leurs écritures susvisées.

SUR QUOI :

Sur la demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires non majorées :

Moyens des parties :

Mme [F] expose qu’à la demande de son employeur, elle multipliait les heures supplémentaires et certaines de ces heures n’étaient pas rémunérées au taux majoré en raison de nombreux dysfonctionnements dans l’application « Maboxrh ». Malgré ses demandes, elle n’a pas été rétablie dans ses droits. Elle a ainsi accompli sur la période de novembre 2016 à septembre 2020, l’équivalent de 44,22 d’heures supplémentaires non majorées. La Poste ne peut se prévaloir d’un décompte des heures supplémentaires sur une période pluri-hebdomadaire de quatre semaines, alors qu’en l’absence de dispositif d’aménagement du temps de travail supérieur à la semaine, les heures supplémentaires doivent être décomptées à la semaine.

La société La Poste expose que la salariée est positionnée sur une organisation pluri-hebdomadaire de 4 semaines pour 140 heures de travail effectif au total et qu’aucune heure supplémentaire n’est due à la salariée à l’issue de cette période, lorsque ses absences n’ont pas pour effet de porter sa durée du travail au-delà de celle fixée par la période de référence. Les heures excédentaires sollicitées ont bien été payées à cette dernière mais n’ont pas été majorées du fait des absences de la salariée sur cette période (congés payés, maladie, repos compensateur’) ce qui ressort d’ailleurs des bulletins de paie de l’intéressée. Elles sont ainsi libellées sous la forme « heure non majorée » sur les bulletins de paie.

Réponse de la cour,

S’agissant des heures supplémentaires, conformément à l’article L. 3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; la durée légale du travail, constitue le seuil de déclenchement des heures supplémentaires payées à un taux majoré dans les conditions de l’article L 3121-22 du code du travail, les heures supplémentaires devant se décompter par semaine civile.

Par application de l’article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, le juge formant sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande.

Ainsi, si la preuve des horaires de travail effectués n’incombe spécialement à aucune des parties et si l’employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient aussi à ce dernier de présenter préalablement des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies de nature à permettre également à l’employeur d’y répondre utilement. Une fois constatée l’existence d’heures supplémentaires, le juge est souverain pour évaluer l’importance des heures effectuées et fixer le montant du rappel de salaire qui en résulte sans qu’il soit nécessaire de préciser le détail du calcul appliqué.

En l’espèce, à l’appui de cette demande Mme [F] produit :

Deux courriels qu’elle a adressés à Mme [S] (RH).

Le 02 mars 2018, par lequel elle sollicite le paiement des heures supplémentaires majorées pour le mois de février 2018 et la mise à jour le solde de ses heures supplémentaires et majoration y afférentes depuis novembre 2016.

Le 23 janvier 2019, (auquel est annexé un message RH du 05 mars 2018) par lequel elle rappelle que depuis 2016, la gestion de ses heures supplémentaires via « Maboxrh » pose difficulté et prend pour exemple le fait qu’au 31 décembre 2018 son compte présente un solde de 0 alors qu’elle aurait accomplie 76 heures.

Ses bulletins de salaires d’avril 2017 à mars 2018 sur lesquels figurent la mention du paiement d’heures non majorées.

Un historique des « heures excédentaires » tiré de l’application « Maboxrh » portant sur les années 2016, 2017 et 2020.

Un tableau établi par ses soins de décompte des heures supplémentaires non majorées s’élevant à 44.22 heures de novembre 2016 à février 2018.

Mme [F], qui ne verse aucune pièce venant corroborer le fait qu’elle aurait été contrainte d’accomplir de heures supplémentaires alors que le contrat de travail stipule que l’accomplissement d’heures supplémentaires aura lieu sur demande de l’employeur, ne produit aucun élément permettant de corroborer le fait que l’accomplissement des heures alléguées résultait d’une surcharge de travail. En outre, dans les pièces produites par la salariée, rien ne permet de confirmer que l’application « Maboxrh » relative à l’enregistrement des horaires de travail dysfonctionnait.

Le fait conclu selon lequel son employeur a pu être condamné, dans d’autres instances, à régler des heures supplémentaires à d’autres salariés est inopérant s’agissant du présent litige qui ne concerne que les relations contractuelles entre la SA La Poste et Mme [F].

De plus Mme [F], qui sollicite aux termes de ses écritures « le paiement d’un rappel de salaire pour un montant de 128.23 euros au taux légal de 44.22 heures supplémentaires réalisées » pour une période de novembre 2016 à septembre 2020, ne précise pas le détail de ce calcul. Enfin, les pièces produites, hormis celle issue de l’application « maboxrh », ne concernent pas l’année 2020.

En conséquence, les pièces ainsi produites par Mme [F] ne constituent pas des éléments suffisamment précis de nature à étayer l’allégation selon laquelle elle a réalisé des heures supplémentaires majorées qui n’auraient pas été rémunérées et permettant à la cour d’être éclairée sur ses demandes et pour l’employeur d’y répondre utilement. Il convient donc de confirmer la décision des premiers juges et de rejeter la demande formulée à ce titre.

Sur la demande de régularisation des heures de formation au titre du Droit individuel à la formation et du compte personnel de formation (DIF et CPF) :

Mme [F] expose qu’elle a acquis 177 heures de formation (129H au titre du DIF et 48H au titre du CPF). Ayant réalisé une action de formation de manager de proximité mobilisant l’équivalent de 62 heures de DIF, il devait donc lui rester à minima un solde de droits à formation de 115 heures. Le plafond de 150 heures au total prévu à l’article R.6323-7 du code du travail n’a nullement été dépassé dans le cadre de l’action menée.

La SA La Poste expose que le cumul entre les heures comprises dans le DIF et le CPF ne peut être supérieur à un plafond de 150 heures au total conformément à l’article L.6323-7 du code du travail. En réalité, le solde des droits à formation de Mme [F] est de 58,28 heures au total ce qui a déjà été indiqué à la salariée.

Réponse de la Cour,

Il découle de l’article L.6323-7 du code du travail dans la version applicable à l’espèce que le droit à une durée complémentaire de formation qualifiante, mentionné à l’article L. 122-2 du code de l’éducation, se traduit, lorsque cette formation est dispensée sous le statut de stagiaire de la formation professionnelle, par l’abondement du compte personnel de formation à hauteur du nombre d’heures nécessaires au suivi de cette formation. Ces heures sont financées par la région au titre du droit d’accès à un premier niveau de qualification mentionné au deuxième alinéa du I de l’article L. 6121-2 du présent code. Le cas échéant, l’abondement mentionné au premier alinéa du présent article vient en complément des droits déjà inscrits sur le compte personnel de formation pour atteindre le nombre d’heures nécessaire à la réalisation de la formation qualifiante. Cet abondement n’entre pas en compte dans les modes de calcul des heures créditées chaque année sur le compte et du plafond de cent cinquante heures du compte personnel de formation mentionné à l’article L. 6323-11. Par dérogation à l’article L. 6323-6, les formations éligibles au titre du présent article sont celles inscrites au programme régional de formation professionnelle

En l’espèce, Mme [F] qui allègue être créancière de 57 heures de formation et sollicite à ce titre la condamnation de l’employeur au paiement de la somme de 855 euros produit notamment une lettre du 28 février 2018 qu’elle adresse au responsable du Pôle développement RH de La Poste portant sur la « formation dans le cadre du CPF ». Elle y énonce ses doléances concernant ses demandes de formations, le manque d’accompagnement ou encore le fait que certaines formations lui ont été refusées ou encore que son compte formation comporte des formations qu’elle n’a pas suivies. Elle revendique aux termes de cette lettre avoir acquis 177 heures de formation.

Elle verse un justificatif de droits acquis à formation lors de son précédent emploi à la mairie d'[Localité 3] de 98.33 heures pour l’année 2011, une lettre de La Poste l’avisant qu’au 1er janvier 2014, elle bénéficie d’un report de solde acquis de 0 pour l’année 2013 et d’un solde de 10h28 et enfin une lettre de La Poste du 1er janvier 2015 l’informant d’un solde de droit acquis en matière de DIF de 30,28 heures (« report du solde au 1er janvier 20l4 de 10,28 heures + droits acquis au titre de l’année 2014 = 20 heures »).

Le 02 mars 2018, Mme [F] s’adresse à l’AGEFO (organisme de gestion et de financement des formations) et pose la question du calcul du solde de jours restant dus son compte personnel de formation, elle précise que son employeur l’a avisée du fait que l’AGEFO demandait la correction de ce solde de 177 heures revendiqué.

L’AGEFO lui répond, le 16 mars 2018 par mail, que seules 31 heures peuvent être reportées sur son compte DIF, confirmant ainsi le décompte de La Poste en date du 1er janvier 2015. Il lui est aussi précisé que les heures acquises et non utilisées lors de son précédent contrat de travail sont perdues.

Mme [F] échoue en conséquence à démontrer la réalité de sa créance. Par voie de confirmation de la décision déférée, il convient de rejeter la demande formulée au titre du solde d’heures de formation.

Sur la demande d’annulation de la sanction disciplinaire du 11 décembre 2017 :

Moyens des parties :

Mme [F] conteste la sanction disciplinaire du 11 décembre 2017 et expose que :

Les premiers juges qui ont relevé que les prétendues insultes et menaces reprochés n’étaient pas avérées et que le prétendu abandon de poste avait donné lieu à la prescription d’un arrêt de travail en date du 05.10.2017, ont annulé la sanction de mise à pied disciplinaire prononcée, puis l’ont requalifiée en un avertissement ce qu’ils ne pouvaient faire.

L’employeur avait épuisé son pouvoir disciplinaire par l’envoi d’une lettre du 23 octobre 2017 au terme de laquelle il lui a expressément reprochée d’avoir insulté M. [K] [Y] et d’avoir quitté le centre courrier sans autorisation de sa hiérarchie à plusieurs reprises, faits invoqués à l’appui de la sanction de mise à pied disciplinaire du 11.12.2017. Les observations écrites prises par l’employeur au terme de cette lettre, à la suite d’agissements de la salariée considérés par lui comme fautifs, constituent une sanction disciplinaire.

S’agissant des faits reprochés à l’appui de la sanction du 11 décembre 2017, ils ne sont pas établis : Mme [F] conteste avoir proféré des insultes envers son encadrant ([K] [Y]) et a sollicité vainement les images de vidéo-surveillance qui le confirmeraient. En outre, à les supposer démontrés, ses propos intervenant en réaction à une situation de harcèlement moral seraient défensifs et ne pouvant dès lors être sanctionnés. Sur les abandons de poste reprochés en septembre, octobre et novembre 2017, elle a été contrainte de quitter son poste de travail en raison des agissements de son encadrant et du processus de harcèlement moral mis en ‘uvre à son encontre et elle s’est rendue chez son médecin qui, compte tenu de son état de santé, lui a prescrit à chaque fois un arrêt de travail.

La SA La Poste fait valoir pour sa part que la sanction disciplinaire de mise à pied de 7 jours est fondée et expose que :

La lettre du 23 septembre 2017 ne constitue pas une sanction disciplinaire car il s’agissait d’une réponse adressée à la salariée suite à deux courriers de sa part.

Sur les faits reprochés, la salariée a insulté et menacé son supérieur hiérarchique le 29 septembre 2017 puis a abandonné son poste à 3 reprises sans y avoir demandé l’autorisation de l’employeur.

Réponse de la Cour,

L’article L.1333-1 du code du travail prévoit qu’en cas de litige en matière de sanctions disciplinaires, la juridiction apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction, que l’employeur fournit au conseil des prud’hommes les éléments retenus pour prendre la sanction, qu’au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l’appui de ses allégations, la juridiction forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles et que si un doute subsiste, il profite au salarié.

Un même fait ne saurait justifier successivement deux mesures disciplinaires. Aucun reproche formulé à l’appui du licenciement ne peut être justifié par des faits ayant été sanctionnés par le biais d’un avertissement. Ainsi, lorsque l’employeur notifie une sanction disciplinaire, il épuise son pouvoir de sanction et il ne peut donc faire état, pour justifier la mesure de licenciement, de faits antérieurs à l’avertissement prononcé.

En l’espèce, Mme [F] qui sollicite l’annulation de la sanction de mise à pied, fait tout d’abord valoir que le courrier adressé par son employeur le 23 octobre 2017 constituerait un avertissement et que l’employeur aurait dès lors épuisé son pouvoir disciplinaire. Il ressort de la lecture de ce courrier du 23 octobre 2017, qu’il est adressé à Mme [F] par l’employeur et fait en réalité suite à deux courriers de la salariée des 7 et 14 octobre 2017. S’il est exact que le Directeur M. [C] [Y], évoque des faits qui vont ensuite faire l’objet de la mesure disciplinaire de mise à pied de décembre 2017, la teneur de ce courrier en ce qu’il se limite à apporter des éléments de réponse à la salariée ne peut être qualifiée de sanction disciplinaire. Par conséquent, faute de sanction précédente pour les mêmes faits, il n’y a pas lieu de considérer que l’employeur ait épuisé son pouvoir de sanction lorsqu’il a notifié la mise à pied du 14 décembre 2017.

Sur les griefs sur lesquels se fondent la sanction disciplinaire de mise à pied, aux termes de la lettre du 14 décembre 2017, l’employeur reproche d’abord à Mme [F] d’avoir insulté et menacé son supérieur hiérarchique, M. [K] [Y], le 29 septembre 2017 et ensuite d’avoir abandonné son poste le 5 octobre 2017 et le 3 novembre 2017.

La salariée conteste avoir insulté son encadrant, M. [K] [Y], mais admet avoir quitté à deux reprises son poste. Elle dément qu’il s’agisse d’abandons de poste au motif que ces départs seraient le résultat du harcèlement moral dont elle se dit victime et d’une absence de protection de son employeur la concernant.

Il est constant que s’est tenue le 29 septembre 2017, une réunion d’équipe, conduite par M. [K] [Y] en présence de Mme [F] et d’autres salariés. Il est établi que M. [K] [Y] a procédé à un rappel des consignes de sécurité portant sur le port de la ceinture de sécurité. M. [Y] relevant que l’un des facteurs avait contrevenu aux consignes 4 fois en 15 jours. Durant ce rappel des consignes, Mme [F] expose s’être sentie visée car selon elle M. [K] [Y] la regardait avec insistance. Il ressort de l’attestation de M. [K] [Y] que le rappel à l’ordre concernant la ceinture visait bien Mme [F] mais il n’est cependant pas contesté que M. [K] [Y] n’a nommé personne.

Il n’est pas contesté que suite à cette réunion, M. [K] [Y] lui a demandé de venir dans son bureau pour lui indiquer qu’en l’absence de transmission des justificatifs d’absences des 22 et 23 septembre 2017, elle serait inscrite en « absences injustifiées » selon Mme [F], « absences à régulariser » selon M. [K] [Y].

Mme [F] note le 29 septembre 2017 sur le registre hygiène et sécurité sa réclamation quant à la décision de M. [K] [Y] concernant ses absences, précise qu’elle quitte le travail, après en avoir informé son supérieur, n’étant pas en état de rester. Il est constant qu’à 9h30 Mme [F] indique à M. [K] [Y] ne pas se sentir bien et que les pompiers sont appelés. La salariée quitte les lieux pour se rendre chez son médecin qui va lui prescrire un arrêt de travail pour syndrome dépressif.

Sur les insultes qui auraient été proférées, la lettre de mise à pied disciplinaire n’énonce pas leur teneur, seul M. [K] [Y] en atteste. M. [Z], contrôleur de gestion, arrive sur les lieux alors que la salariée est déjà partie et n’a pas assisté à la scène. Le rapport circonstancié du directeur d’établissement, M. [C] [Y] dressé le 27 octobre ne mentionne pas sa présence sur les lieux. En résumé, seul M. [K] [Y] atteste des insultes qui auraient proférées à son encontre par Mme [F] tandis que Mme [F] les conteste. Il existe dès lors un doute sur la réalité des insultes. Ce fait n’est pas établi.

Sur les griefs d’abandons de poste des 5 octobre et 3 novembre 2017, il convient de rappeler que l’abandon de Poste se manifeste par le comportement du salarié qui quitte son poste de travail sans autorisation de l’employeur ou encore qui s’absente de manière prolongée ou répétée sans justificatif pendant ses heures de travail.

Concernant le 05 octobre 2017, Mme [F] ne conteste pas avoir quitté sans autorisation le travail pour se rendre chez son médecin. Elle a noté sur le registre hygiène et sécurité que M. [K] [Y] se serait adressé violemment à elle lors d’un briefing. Dans la partie « suite donnée », M. [C] [Y] (directeur d’établissement) indique « je tiens à signaler que M. [Y] ne s’est pas adressé à vous violemment lors du brief mais a haussé le ton à l’issue de celui-ci. Un entretien de recadrage de M. [Y] a été effectué ce jour en présence de Mme [S] ». Ces deux mentions confirment l’existence d’une tension entre la salariée et l’encadrant, [K] [Y], le 05 octobre 2017 et le fait que ce dernier a haussé le ton en s’adressant à la salariée. Mme [F] précise dans le registre qu’elle ne se sent pas en état de partir en tournée.

L’employeur admet d’ailleurs aux termes de ses écritures mais également dans le rapport circonstancié établi par M. [C] [Y] le 27 octobre 2017, que la salariée ne se sentait pas bien le 05 octobre 2017 puisque la secrétaire du CHSCT a sollicité par téléphone de M. [C] [Y] qu’il contacte les pompiers. Il ressort en outre de ce même rapport que M. [C] [Y] propose à Mme [F] de ne plus être en lien direct avec M. [K] [Y].

Ces éléments contredisent la lettre de notification de la mise à pied qui mentionne que le 05 octobre « aucun évènement précis ou lésion n’aurait été signalé ». De même, il n’est pas contesté que le 06 octobre Mme [F] a remis un Cerfa-accident de travail et un arrêt du travail débutant le 05 octobre 2017, arrêt qui sera prolongé jusqu’au 29 octobre, justifiant ainsi de son absence de la veille.

Le fait que la Caisse primaire ait rejeté par la suite, la demande de reconnaissance d’accident du travail n’enlève rien au fait que la salariée a justifié des raisons de son absence. Au surplus, La Poste n’apporte aucun élément permettant de relever une désorganisation des services en raison du départ soudain de la salariée. L’abandon de poste du 05 octobre 2017 n’est donc pas établi.

S’agissant de l’abandon de poste reproché du 03 novembre 2017, il est établi que Mme [F] a fait l’objet d’une convocation en vue d’un entretien disciplinaire par lettre du 30 octobre 2017 en raison des deux premiers griefs ci-dessus évoqués. Le même jour, l’assistant social de La poste la contacte par courrier afin d’établir un rapport dans le cadre de l’enquête administrative en cours. Mme [F] ne conteste pas avoir démissionné verbalement le 03 novembre puis avoir quitté le travail.

Il ressort d’un courrier adressé à la salariée le 13 novembre 2017 par la responsable du développement RH que suite aux annotations portées par Mme [F] le 03 novembre 2017 sur le registre dénonçant des faits de harcèlement moral (extraits non produits) « la Poste peut mettre en place un dispositif de prévention ». Ce courrier mentionne également que la salariée a bien transmis un arrêt de travail dès le 04 novembre 2017 et qu’elle avait fait état de son mal être avant de partir chez son médecin. De nouveau, il y a lieu de constater que la salariée a informé son employeur des conditions entourant son départ et n’a ainsi pas commis de faute en quittant son travail pour des raisons de santé et de mal être et qu’au surplus La Poste ne produit aucune pièce sur les conséquences du départ de cette salariée en terme d’organisation.

Au vu de ce précède, la preuve de l’existence des injures envers M. [K] [Y] n’étant pas rapportée par l’employeur, le doute doit profiter à la salariée. Concernant le grief d’abandons de poste, il a été constaté que les départs du lieu de travail non contestés par la salariée, sans autorisation préalable étaient légitimés à bref délai par un arrêt maladie alors que l’employeur n’apporte pour sa part aucun élément permettant de constater que ces absences auraient entrainé une désorganisation. Au surplus, il a été relevé que ces absences s’inscrivent dans un contexte de tension entre la salariée et M. [K] [Y], son encadrant, Mme [F] se disant victime de faits de harcèlement moral de sa part. Par conséquent, la sanction disciplinaire du 11 décembre 2017 n’est pas fondée.

Par voie d’infirmation, il convient donc de prononcer l’annulation de la sanction disciplinaire prononcée envers Mme [F] le 17 décembre 2017 et de condamner la Société La Poste au paiement de la somme de 381,81 € à titre de rappel de salaire sur la période de mise à pied du 15 au 21 janvier 2018 outre la somme de 38,18 € au titre des congés payés afférents.

Mme [F] n’apporte aucun élément à même d’étayer l’existence d’un préjudice moral subi en raison de la sanction disciplinaire, distinct de la perte de rémunération ici réparée. La demande de dommages et intérêts formulée à ce titre est rejetée par voie de confirmation.

Sur le harcèlement moral, la discrimination relative à son état de santé ou le handicap et le manquement à l’obligation de sécurité et de prévention

Moyens des parties :

Mme [F] expose qu’à compter du mois d’août 2015, elle a dû faire face à une dégradation sensible de ses conditions de travail et à des mesures discriminatoires en raison de son état de santé et de son handicap, l’employeur ayant mis en ‘uvre un processus de harcèlement moral et de discrimination eu égard à son état de santé visant notamment à la déstabiliser et à l’évincer de l’entreprise. Elle expose que :

L’employeur qui lui a imposé une visite médicale de reprise à plus de 600 km de chez elle,

L’employeur n’a pas respecté les préconisations de la Médecine du travail lors de sa reprise le 05 août 2015 qui interdisaient le port répétitif de charges supérieures à 5 kg et un tri supérieur à 20 mn. Elle nettoyait les véhicules au karcher, aucun poste ne lui était attribué. Ces éléments ont été consignés dans le registre d’hygiène et de sécurité et notés dans son dossier médical. En octobre 2015, elle a été affectée en tournée puis à compter de janvier 2016 en tournée mixte sans respect des préconisations ou de son statut de travailleur handicapé,

Elle a subi le comportement agressif de son encadrant, M. [Y],

Le directeur de l’établissement s’est abstenu de respecter les textes, accords et dispositifs interne à l’entreprise, la plaçant dans une situation d’inégalité, d’incertitude et d’isolement,

Elle a fait l’objet d’une sanction disciplinaire non fondée de 7 jours, les prétendus griefs reprochés résultent directement de la situation de harcèlement moral subie et de l’absence de mesures de protection prises par l’employeur,

Elle s’est heurtée après son affectation à la cabine et au carré pro à de nombreux dysfonctionnements dans l’organisation du travail, à des tensions avec des facteurs, à des mesures de représailles de sa hiérarchie et des accusations non fondées avant d’être évincée de l’entreprise,

Elle a fait l’objet d’une discrimination en raison de son état de santé ou en raison de son handicap,

L’employeur a manqué à l’obligation de sécurité et de prévention en ne prenant aucune mesure destinée à prévenir le harcèlement moral qu’elle dénonçait et pour préserver sa santé. Il l’a laissée travailler sous les ordres de ses présumés harceleurs induisant une détérioration de ses conditions travail. Il n’a été pris aucune mesure visant à prévenir le harcèlement et plus globalement les risques psychosociaux auxquels elle était exposée. Enfin La Poste n’a pas tenu compte des préconisations et avis du médecin du travail. Le dispositif prévu dans l’entreprise concernant le protocole de prévention de harcèlement moral n’a pas été respecté s’agissant du premier protocole engagé à compter de février 2021 suite à ses dénonciations.

La société La Poste expose que Mme [F] ne présente pas d’éléments permettant de supposer des faits de harcèlement moral à son encontre. Les pièces versées sont des courriers qu’elle a rédigés ou encore des annotations sur le registre du CHSCT. S’agissant des attestations produites en cause d’appel, alors qu’elles sont datées de 2018, elles émanent toutes d’anciens salariés ou de salariés non présents sur le site d'[Localité 3], aucune pièce d’identité n’est jointe et certains témoignages ne comportent aucune date.

Sur les missions de la salariée lors de sa reprise, les contre-indications médicales ont été respectées tout comme celles émises postérieurement comme démontré par les fiches de postes. S’agissant d’un dés’uvrement durant l’été 2015, Mme [F] n’apporte aucun élément. Le nettoyage du véhicule faisait partie de ses tâches et le médecin n’avait posé aucune restriction à ce sujet,

Sur le véhicule mis à sa disposition : les photos produites ne permettent pas de dire qu’il s’agit de véhicules de La Poste et montrent uniquement de la poussière et non une défectuosité,

Sur le comportement de M. [K] [Y] : Mme [F] n’apporte aucune preuve d’insultes à son égard,

Sur les manquements de La Poste dans les procédures internes, les procédures en question n’ont pas de valeur contraignante et ne sauraient être détournées de leur finalité pour alimenter un contentieux en reconnaissance d’une situation de harcèlement moral,

Sur la formation, le directeur d’établissement a toujours donné son accord de principe à la salariée pour suivre ces formations. Concernant ses droits au titre du DIF et du CPF, le solde des droits à formation de Mme [F] est de cause fixé à 58,28 heures au total ce qui lui a déjà été indiqué,

Sur les heures supplémentaires : elles ont été rémunérées,

Sur les refus de congés payés : certaines demandes de congés payés ont pu être refusées par l’employeur compte tenu des nécessités du service et de nombreuses demandes de congés ont été validées par la direction,

Sur le protocole de prévention du harcèlement moral : il lui a été proposé la mise en place du protocole d’intervention par courrier recommandé du 13 novembre 2017 mais elle n’a jamais retourné le coupon requis. Concernant la validité du protocole ouvert suite à la dénonciation de faits de harcèlement moral par Mme [F] le 19 janvier 2021, la salariée n’a pas répondu ni donné suite à toutes les tentatives de contacts. Une 1ère commission s’est tenue le 29 mars 2021 dans le délai de 10 semaines requis, en l’absence de Mme [F] et a repris néanmoins les griefs évoqués par écrit par la salariée à l’appui de ses accusations de harcèlement. Sur le protocole harcèlement moral ouvert à l’encontre de la salariée, certains collègues dénoncent le comportement harcelant de la salariée à leur égard,

Sur les suites de l’agression du 11 janvier 2019, les démarches nécessaires ont été engagées ainsi que mentionné dans le registre hygiène et sécurité. Le traitement RH a bien été effectué. Les démarches en gendarmerie ont bien été accomplies. La salariée ne s’est pas placée en arrêt de travail ni n’a demandé à bénéficier de la protection fonctionnelle dont elle pouvait bénéficier,

Sur les conditions de la reprise de la salariée en mi-temps thérapeutique en en 2020 : aucune dégradation des conditions de travail n’est démontrée et une lettre de mission a été établie pour la période de janvier à avril 2020. Elle a ensuite été déclarée apte à une reprise à temps plein et a été positionnée sur un poste d’agent courrier cabine, La Poste s’est donc assurée de l’aménagement du poste.

Réponse de la Cour,

Aux termes des articles L.1152-1 et L. 1152- 2 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel et aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

Suivants les dispositions de l’article L.1154-1 du même code, lorsque le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral; dans l’affirmative, il appartient ensuite à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Les règles de preuve plus favorables à la partie demanderesse ne dispensent pas celle-ci d’établir la matérialité des éléments de fait précis et concordants qu’elle présente au soutien de l’allégation selon laquelle elle subirait un harcèlement moral au travail. L’article L.1152-4 du même code oblige l’employeur à prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.

En application de l’article L. 4121-1 du code du travail, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels ;

2° Des actions d’information et de formation ;

3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.

L’article L. 4121-2 du même code précise que l’employeur met en ‘uvre les mesures prévues à l’article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :

1° Eviter les risques ;

2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;

3° Combattre les risques à la source ;

4° Adapter le travail à l’homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;

5° Tenir compte de l’état d’évolution de la technique ;

6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n’est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux;

7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral, tel qu’il est défini à l’article L. 1152-1 ;

8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;

9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs.

Une discrimination est une différence opérée pour un motif prohibé. L’article L. 1132-1 du code du travail fixe 24 motifs prohibés. Lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, qu’au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination et que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Enfin en application des dispositions de l’article L. 1152-4 du code du travail qui décline cette obligation générale de sécurité pesant sur l’employeur en matière de harcèlement moral, l’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.

S’agissant du harcèlement moral allégué, il est constant qu’avant sa reprise du travail en août 2015, Mme [F] avait fait l’objet d’une reconnaissance de maladie professionnelle le 17 février 2015 puis s’était vue reconnaître le statut de travailleur handicapé le 11 juin 2015. Il est constant qu’elle a fait l’objet d’une visite médicale de reprise le 04 août 2015 à [Localité 7], soit à plus de 600 km de son domicile, la veille de la reprise de son emploi. Ce fait est établi.

Le Médecin du travail, le Dr [D], rend l’avis suivant : « Inapte temporaire à son ancien poste. Apte à une reprise à mi-temps thérapeutique sur un poste excluant le port de charges répétitif supérieur à 5kg et le tri supérieur à 20 minutes. Apte à un travail de bureau ». Cet avis est conforme à celui rendu lors de la visite de pré-reprise du 19 juin 2015.

Sur l’absence de poste disponible à son arrivée, Mme [F] produit le mail que Mme [S] (RH) adresse au Dr [D] (médecin du travail), le 04 aout 2015, dans lequel elle lui indique qu’il n’y a pas de poste disponible pour la salariée correspondant aux préconisations du 19 juin 2015. Mme [F] a néanmoins repris son travail et note sur le registre du CHSCT dès le 05, 06 et 7 aout qu’elle a nettoyé des véhicules au Karcher qualifiant cette pratique « d’humiliation ». Elle alerte le directeur de La Poste service courrier-colis, M. [A], le 17 août 2015 par courrier dénonçant notamment l’absence de poste disponible à son retour. Elle déplore de ne pas avoir eu de fiche de poste et d’avoir dû « quémander » une tâche à réaliser et ajoute souhaiter que les préconisations du médecin du travail soient respectées. Ce fait est établi.

Lors d’une nouvelle visite à la Médecine du travail à [Localité 7] le 04 septembre 2015, l’avis est rédigé en ces termes « Toujours inapte temporaire à son Poste (pas d’hyper sollicitation du membre supérieur droit) ; Apte au travail en cabine, au carré pro (si pas de port de charges répétitifs supérieur à 10 kg) ; Apte au tri pendant 20 minutes maximum. Le mi-temps thérapeutique devra sûrement encore être prolongé. », le Dr [D] mentionne sur le dossier médical que la salariée exprime les doléances sur ses conditions de reprises.

Sur l’absence alléguée de respect des préconisations médicales, dès sa reprise mais encore à compter du mois de janvier 2016, alors que Mme [F] est affectée sur une tournée mixte numéro 14 à temps complet, (colis/courrier/imprimés publicitaires), il est constant que la salariée fait l’objet d’un avis médical le 24 février 2016 selon lequel elle est jugée « Apte à : Tri colis si colis inférieur ou égal à 10 kg ; flashage colis ; distribution colis ; distribution tournée si inférieure à 2 heures ; tri sur CHM ; cabinet ; carré pro ; tri des BAL ; livraison dépôt relais inférieur à 10 kg avec chariot ; relevage bal ; collecte et remise, dans tous les cas, si tri pas plus d’une heure par vacation ; Inapte à : chargement déchargement camions ; boulisterie sur différents chantiers, IP tri et distribution »

Mme [F] signale dans le registre du CHSCT le 03 mars 2016 avoir distribué des imprimés publicitaires pendant 2 heures et avoir échangé avec son supérieur hiérarchique sur la question du respect de la fiche d’aptitude du 24 février 2016. A la rubrique « suites données » il est indiqué par M. [C] [Y], Directeur d’établissement, « vu le 03 mars 2016 Nous nous conformons dès ce jour à la fiche d’aptitude de la médecine de prévention ».

Mme [F] établit ainsi avoir dénoncé sur le registre d’hygiène et de sécurité et via des dénonciations répétées à l’employeur le non-respect des préconisations médicales dès sa reprise d’emploi en aout 2015 jusqu’en aout 2016.Ce fait est établi.

Sur le « comportement agressif » de M. [K] [Y] à son égard, Mme [F] produit :

Une note portée sur le registre du CHSCT le 28 aout 2015 dans laquelle elle indique avoir accompli 20 minutes de tri puis s’être vue « ordonner » par M. [Y] « en élevant la voix » en présence de ses collègues de demeurer inactive devant son bureau de 8h30 à 10 h45,

Une attestation signée par 8 salariés, dont Mme [F], indiquant que M. [K] [Y] était parfois en état d’ivresse,

Une lettre du 1er septembre 2016 dans laquelle Mme [F] dénonce à son employeur l’état d’ébriété de M. [Y] de novembre à décembre 2015 et le fait qu’en mars 2016 il l’a « violemment » interpellée devant ses collègues.

Les notes ainsi rédigées par la salariée sur le registre ou encore son courrier du 1er septembre 2016 ne permettent pas de constater des faits précis s’agissant d’un comportement ou des propos inadaptés de la part de M. [Y] à son encontre. Ainsi, hormis le signalement d’un problème d’alcoolisation de l’encadrant sur le lieu de travail, aucune des pièces versées ne vient corroborer un comportement inadapté et agressif de M. [K] [Y] envers la salariée. De même le fait qu’un protocole de prévention du harcèlement moral a été sollicité par un autre salarié concernant M. [K] [Y], ne concerne pas la situation de la salariée. Enfin, s’il a pu être relevé que courant octobre 2017 des tensions étaient relevées entre M. [K] [Y] et la salariée et que M. [C] [Y] (Directeur d’établissement) avait repris les choses avec M. [K] [Y] concernant son comportement du 05 octobre 2017, cela ne suffit pas à établir le comportement agressif allégué. Au vu de ces seuls éléments, il convient de dire que ce fait n’est pas établi.

Sur le retrait de la tournée 14 (devenue tournée 2) et le non-respect des procédures de vente des quartiers (BRH 3 septembre 2013), il est établi par les pièces produites par Mme [F] qu’elle dénonce ses craintes de perdre cette tournée par courrier du 1er septembre 2016 alors qu’elle est en arrêt maladie. Elle justifie avoir continué d’alerter sur le respect des règles d’attribution des tournées par plusieurs courriers postérieurs. Cependant, Mme [F] admet qu’elle a finalement conservé la charge de cette tournée devenue tournée 2 via la procédure de rachat des quartiers sur laquelle elle a pu continuer à exercer à l’issue de son arrêt maladie. Ce fait n’est pas établi.

Mme [F] allègue ensuite plusieurs manquements de l’employeur à savoir le défaut de respect des règlementations et accords applicables dans l’entreprise, à son détriment.

S’agissant du non-respect du dispositif d’accompagnement prévu au BRH N°34 du 14 avril 2005, il est constant que la salariée a été victime d’une agression le 19 janvier 2016 durant son travail et que l’auteur a fait l’objet de poursuites pénales devant le Tribunal correctionnel. Mme [F] s’est vu refuser une demande d’absence faite en août 2020 pour se rendre au Tribunal en septembre 2020 et elle dénonce l’absence d’accompagnement de son employeur le jour de l’agression ainsi que pour les démarches postérieures. Ce fait est établi.

Sur le non-respect de l’accord de 2015 relatif au handicap et plus précisément s’agissant du non-respect des règles d’hygiène et de sécurité, allégués par Mme [F], les photographies des véhicules produites montrant un habitacle sale et des pneus usés ne permettent pas de constater qu’il s’agit d’un véhicule de La Poste. S’agissant du fait que son outil de travail permettant de flasher les colis (FACTEO) dysfonctionnait, Mme [F] n’apporte aucun élément permettant de caractériser le danger qui en serait résulté ou encore sur le fait conclu que d’autres collègues, contrairement à elle, disposait d’outils plus récents. Elle admet d’ailleurs qu’elle a pu obtenir un nouveau FACTEO sur demande. Ces faits ne sont pas établis.

Sur le défaut de paiement de ses heures supplémentaires en lien notamment avec un dysfonctionnement de son outil BB, les demandes formulées à ce titre ont été rejetées par la Cour de céans. Ce fait n’est pas établi.

Sur les refus répétés de demandes de congés ou d’absences par l’employeur, le refus d’absence pour se rendre au Tribunal en septembre 2020 est établi. Concernant les autres refus d’absence allégués, les pièces versées par Mme [F] permettent de confirmer des refus d’absence ou de congés de l’employeur en janvier et Mars 2018.

Sur le fait que l’employeur lui imputait à tort des jours de congés sans tenir compte des règles de report de congés en raison des périodes d’arrêts de travail, en méconnaissance des textes internes à l’entreprise et de la jurisprudence, Mme [F] ne verse que sa lettre de dénonciation de ce fait à l’employeur du 08 Juin 2018, non corroborée par des éléments extérieurs objectifs. Ce fait n’est pas établi.

Sur le fait que l’employeur lui annonçait le 17 octobre 2018 avoir décidé de lui retenir le montant des indemnités journalières de sécurité sociale dont il avait fait l’avance dans le cadre de la subrogation et que la Caisse n’avait pas versées, Mme [F] ne produit aucune pièce démontrant que « cet état de fait résultait de l’absence d’établissement de l’attestation de salaire » par l’employeur. De plus, elle n’apporte aucun élément permettant de constater que cette retenue a été opérée, ce fait n’est pas établi.

Sur le respect de l’accord national intitulé « un avenir pour chaque postier » par des refus de candidatures à des postes en interne, Mme [F] dénonce le non-respect des règles d’attribution de postes (responsable opérationnel) dans le registre d’hygiène et de sécurité en septembre, octobre 2017. Mme [F], candidate sur des postes en interne à compter de 2019, produit les refus de son employeur qui sont tous motivés par le fait qu’elle ne présenterait pas le niveau de qualification requis. Mme [F] n’établit pas en quoi ces refus contreviendraient à l’accord sus visé alors même qu’elle produit une lettre de l’employeur qui lui explique les règles d’attribution des postes en fonction des qualifications requises. Enfin, Mme [F] qui allègue le poste de responsable d’équipe à [Localité 4] aurait été occupé avant et après sa candidature par des personnes ne présentant pas le grade exigé, n’apporte aucun élément pour étayer ses dires. Ce fait n’est pas établi.

Mme [F] fait encore grief à l’employeur de ne pas avoir respecté l’accord national susvisé concernant ses droits à formations. Elle démontre avoir fait plusieurs demandes de formations de Manager de proximité qui ne lui ont pas été accordées. Elle justifie en outre avoir porté une réclamation à l’employeur sur le refus d’une formation en 2019 dans le cadre d’un parcours qualifiant. Ce fait est établi.

S’agissant du manquement tiré d’un solde de droit à formation (DIF/CIF) et le fait que l’employeur l’aurait inscrite à des formations qu’elle n’a pas suivies, Mme [F] produit les lettres par lesquelles elle alerte et interroge, outre l’employeur, l’organisme en charge de la gestion du compte formation (AGEFOS) courant 2018. Il a cependant été jugé par la cour de céans que la demande formulée à ce titre devait être rejetée. En outre, sur des inscriptions à des formations à son insu par l’employeur, Mme [F] ne verse aucun élément probant. Ainsi, alors qu’elle allègue avoir été inscrite à une formation pendant un arrêt maladie en octobre 2019, l’arrêt maladie n’est pas versé et lorsqu’elle se plaint de cette situation à son employeur le 19 octobre 2019, elle ne fait pas du tout mention d’un arrêt maladie. Ce fait n’est pas établi

Il est établi que Mme [F] a fait l’objet d’une sanction disciplinaire en décembre 2017 pour des insultes à l’encontre de son supérieur le 29 septembre 2017, des absences non justifiées le 05 octobre 2017 et le 03 novembre 2017 et a été mise à pied du 15 au 21 janvier 2018, mise à pied qui a été jugée non fondée et annulée par la Cour de céans. Ce fait est établi.

Mme [F] allègue ensuite l’existence plusieurs dysfonctionnements dans ses conditions de travail et de manquements de l’employeur à compter de sa reprise de travail après un arrêt maladie le 20 janvier 2020.

Sur le fait que des postes correspondant à sa situation médicale aurait été attribués à des agents sans restriction médicale, Mme [F] ne produit aucune autre pièce que ses propres courriers de réclamation à l’employeur. Ce fait n’est pas établi.

Sur le fait qu’elle se trouvait de nouveau sans poste à son retour, les attestations versées ne sont pas suffisamment circonstanciées. S’il est exact que la salariée a relevé à sa reprise en mars 2020, qu’il figurait sur le planning des points d’interrogation la concernant dans le mail que produit Mme [F] adressé à M. [N] [R] elle précise qu’à 11h19 le planning avait été rectifié. Ce fait n’est pas établi.

Sur ses conditions de travail suite à son reclassement en cabine et en carré pro à compter du 1er juillet 2020, Mme [F] va signer plusieurs avenants entre août et décembre et exercer la fonction d’agent de courrier niveau de classification I-2 puis de facteur niveau de classification I-3 et enfin, selon le dernier avenant de décembre 2020, d’agent courrier II-I. Mme [F] n’établit pas en quoi ces avenants auraient modifié à son désavantage son contrat de travail alors même qu’elle ne conteste pas que cette affectation correspond aux préconisations de la commission mais encore pour le dernier avenant, constitue une promotion. Ce fait n’est pas établi.

Mme [F] dénonce en outre une absence de formation lors de cette prise de fonction sans développer de moyens de fait à ce sujet et sans apporter de pièces permettant à la cour de déterminer quelles formations lui faisaient défaut alors qu’il est constant qu’elle exerçait la fonction de factrice depuis plusieurs années. Ce fait n’est pas établi.

Sur le fait que ses horaires de travail ont été modifiés en septembre 2020, Mme [F] produit la lettre de La Poste qui l’avise de ce changement des horaires d’ouverture du guichet « carré pro » motivé par la pandémie COVID 19. D’une part il doit être noté qu’il entre dans le pouvoir de direction de l’employeur de modifier les horaires de travail d’un salarié dont le contrat de travail ne prévoit pas d’horaires fixes contractualisés, et d’autre part que cette décision de l’employeur est motivée en l’espèce par un fait objectif lié à la crise sanitaire, la salariée en ayant été valablement informée. Ce fait n’est pas établi.

Sur le fait que l’établissement « carré pro » dans lequel elle exerçait n’a pas été équipé d’écrans de protection contrairement à d’autres, Mme [F] se limite à produire une lettre adressée à l’employeur à ce sujet. Ce fait n’est pas établi.

Sur le fait qu’à compter de novembre 2020, Mme [F] se serait vue retirer l’habilitation lui permettant d’effectuer directement le dépôt d’argent liquide auprès du comptable de l’enseigne, Mme [F] fournit une lettre de La Poste, répondant à ses questions à ce sujet, lui expliquant que sur [Localité 3], le « carré pro » n’existait plus comme à [Localité 4] pour des raisons de sûreté. Mme [F] n’établit donc pas l’existence d’un retrait d’habilitation la concernant particulièrement. Ce fait n’est pas établi.

Mme [F] fait enfin grief à son employeur ne pas avoir respecté son obligation de prévention du harcèlement moral. Mme [F] justifie avoir régulièrement dénoncé des faits de harcèlement moral à son encontre depuis septembre 2017 par des courriers ou notes dans le registre hygiène et sécurité. Ces dénonciations se sont poursuivies après la saisine du conseil des prud’hommes (avril 2018) dans la présente instance mais encore par une nouvelle saisine du conseil des prud’hommes le 17 septembre 2021 en contestation du licenciement.

Suite à sa prise de poste juillet 2020 au « Carré pro » d'[Localité 3], Mme [F] fait cette fois état de « dysfonctionnements dans l’organisation du travail générant des tensions entre certains facteurs et les agents de cabine », des tensions avec ses collègues notamment en raison du non-respect par ceux-ci de la règlementation et des procédures en vigueur.

Le 15 décembre 2020, Mme [F] écrit une lettre adressée à M. [C] [Y] (directeur d’établissement) à propos de l’entretien tenu le même jour avec lui qu’elle qualifie de disciplinaire et évoque subir un harcèlement moral de sa part. Elle adresse d’autres courriers courant décembre 2020 faisant état d’une situation de harcèlement moral et d’une aggravation depuis l’appel interjeté dans la présente procédure à la Médecine du travail et les membres du CHSCT.

Mme [F] dénonce également dans des lettres adressées à l’employeur à cette période, les conditions dans lesquelles le protocole de prévention de harcèlement moral la concernant, ouvert en janvier 2021 suite à ses courriers des 15 et 22 décembre 2022, a été mené. Mme [F] relève notamment qu’elle n’a été entendue que dans le cadre d’un autre protocole de prévention du harcèlement moral ouvert en mars 2021, à son encontre, du fait de la dénonciation de salariés et non dans le cadre du protocole ouvert suite à ses propres dénonciations de harcèlement moral. Il est enfin établi que la protection fonctionnelle demandée le 03 Juin 2021 va lui être refusée.

Ainsi Mme [P] établit qu’elle a dénoncé de façon répétée une situation qu’elle qualifiait de harcèlement moral à plusieurs reprises et le fait que cette situation n’était pas suivie des effets attendus par son employeur.

Enfin s’agissant de son état de santé, Mme [F], outre les avis de la Médecine du travail concernant son aptitude à l’emploi, produit un arrêt maladie du 05 octobre 2017 pour syndrome anxieux. En novembre 2017, elle fait l’objet d’un arrêt maladie et de la prescription d’anti dépresseurs. En janvier 2020, le Médecin du travail adresse un courriel à l’employeur suite à la visite de reprise dans lequel elle indique avoir déjà alerté l’employeur sur la situation de Mme [F] et signale la dégradation de sa santé. Le médecin écrit notamment « depuis le temps que les choses auraient dû être réglées, il n’en est rien. Qu’en est-il de la prévention et de la bienveillance que prône le siège, serait-ce juste une vitrine hypocrite ‘ ».

La salariée verse plusieurs arrêts maladie pour les mois de janvier, février, mai et juin 202 et il est acquis que son licenciement intervient en juillet 2021, ainsi qu’une lettre de son médecin généraliste de février 2021 faisant état d’un syndrome dépressif réactionnel à ses conditions de travail. Le Médecin du travail qui la reçoit le 17 mai 2021 en visite de pré-reprise note que « son état de santé et la situation professionnel conflictuelle nécessite une prolongation de l’arrêt en accord avec le psychiatre afin de stabilisé la chimique ».

Sur la discrimination alléguée en raison de sa santé ou de son handicap, si les pièces produites par Mme [F] permettent de constater qu’elle a régulièrement formulé ce grief à son employeur, ses seules dénonciations, non corroborées par des éléments objectifs extrinsèques ne permettent pas laisser supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte liée à son état de santé.

Au vu de ce qui précède, Mme [F] établit en revanche l’existence matérielle de certains faits précis et concordants, qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral à son encontre et il appartient à l’employeur de démontrer que les faits ainsi établis sont étrangers à tout harcèlement moral.

Sur les conditions du retour de la salariée en août 2015, la SA La Poste ne donne aucune explication sur le fait que la visite médicale de reprise se soit déroulée à plus de 600 km du domicile de la salariée.

Sur le respect des préconisations médicales suite à cette reprise, la SA La Poste verse une « lettre de mission » signée par la salariée le 05 septembre 2015 qui mentionne l’existence d’une inaptitude temporaire à la distribution donc aux anciennes fonctions de factrice. Il est indiqué en outre qu’à compter du 04 septembre 2015 la salariée sera affectée au « tri, traitement distri, back office » sur le site d'[Localité 3]. Cette lettre de mission démontre que l’employeur avait prévu une affectation pour la salariée à compter de sa reprise à un autre poste que celui initialement occupé. Le fait que Mme [F] se serait retrouvée sans poste à son retour est ainsi démenti.

Sur le fait dénoncé par la salariée, dès sa reprise en août 2015, d’avoir été amenée à nettoyer des véhicules, il n’est pas contesté que les facteurs soient chargés de nettoyer leur véhicule. En revanche, il n’est donné aucune explication sur les mentions faites dans le registre par la salariée dès août 2015 selon lesquelles elle nettoyait des véhicules au karsher alors qu’à cette date, il n’est pas contesté que Mme [F] n’effectuait pas des tâches de facteur. En effet, étant inapte à exercer son ancienne fonction de factrice et en application de la lettre de mission du 5 Septembre 2015, Mme [F] n’utilisait pas de véhicule, n’étant plus affectée aux tournées et ne devait donc pas être en charge du nettoyage de véhicules.

S’agissant de la période ultérieure, à compter de février 2016, Mme [F] fait l’objet d’un nouvel avis selon lequel elle est déclarée apte à la « tournée colis et sécable. Eviter impérativement la pub, travaux interieurs ok ». Pour justifier du respect des préconisations médicales, la SA La Poste produit une fiche de Poste mentionnant les tâches suivantes : « conduite 4RM, Manutention des CP colis, travaux intérieurs collectifs colis+ flashage arrivée+flashage affectation des tournées, travaux individuels colis ». La salariée allègue ne pas avoir eu ce document qui n’est d’ailleurs ni daté, ni signé.et l’employeur ne justifie qu’il lui a été effectivement adressé.

En novembre 2016, Mme [F] est déclarée apte avec des réserves s’agissant de l’interdiction des imprimés publicitaires, du tri du courrier, d’une distribution ne dépassant pas deux heures. La SA La Poste fait valoir que la fiche sus visée et contestée, continuerait de s’appliquer mais n’apporte aucune contradiction à l’affirmation de Mme [F] lorsqu’elle indique avoir été affectée à compter de janvier 2016 sur une tournée mixte comportant la distribution d’imprimés publicitaires. L’employeur ne fait état ni d’une étude de poste ni même de la réalité des tâches accomplies, par la salariée durant cette période alors que le Médecin du travail a émis des réserves sur l’accomplissement de certaines tâches.

Il convient en outre de relever que, suites aux nombreuses annotations de la salariée sur le registre, ce n’est que le 3 mars 2016 que M. [C] [Y], directeur, va indiquer que les préconisations médicales étaient respectées « dès ce jour » ce qui rejoint l’affirmation de la salariée sur une amélioration de la situation qu’à compter de mars 2016 lorsque la distribution des imprimés publicitaires a été retirée de ses charges.

La Poste ne démontre donc pas avoir respecté les préconisations médicales de la reprise de la salariée à mars 2016.

S’agissant des suites données à l’agression du 11 janvier 2019 et l’accompagnement de la salariée, le registre hygiène et sécurité comporte une note portée par l’employeur selon laquelle une « plainte a été effectuée le 14 janvier par la Poste. L’incident a été enregistré dans risk ». La SA La Poste, qui ne produit aucune copie de la plainte en question, verse l’attestation de M. [U] (membre de la direction) selon lequel il aurait « essayé de déposer plainte au nom de la Poste » et que la gendarmerie d'[Localité 3] aurait refusé de prendre sa plainte au nom de l’établissement. Cette attestation n’est étayée par aucun autre élément et contredit la mention sur le registre qui fait état d’un dépôt de la plainte et non d’une tentative.

Sur le dispositif de prise en charge post-agression prévu par le BRH Numéro 34 du 14 avril 2005 revendiqué par la salariée, la SA La Poste est taisante se limitant à indiquer qu’il ne lui appartiendrait pas de démontrer qu’elle a mis en ‘uvre tel ou tel accord. L’employeur ne conteste donc pas le fait que ce protocole prévoit une prise en charge des personnels agressés via un soutien administratif, médico-social ou encore judiciaire. Au-delà de la question du caractère contraignant de ce dispositif pour l’employeur, la SA La Poste n’argue ni ne justifie d’aucune mesure d’accompagnement de la salariée suite à cet évènement, peu important le fait que la salariée n’ait pas fait l’objet d’un arrêt maladie.

Il est ainsi admis par l’employeur qu’alors que la salariée avait droit à la protection fonctionnelle, aucune proposition ne lui a été faite. Aucune des recommandations figurant à ce dispositif n’a donc été mise en ‘uvre alors même qu’il y est notamment indiqué que dès la survenue de l’agression, une prise en charge est obligatoirement mise en place mais encore que la personne victime est suivie dans toutes ses démarches. Sur le fait non contesté que Mme [F] a été contrainte de poser une journée de congés pour se rendre à l’audience de jugement de son agresseur le 4 septembre 2020, l’employeur n’apporte aucune contradiction ni élément de réponse.

La société La Poste ne justifie par ailleurs pas des motifs présidant au non-respect des dispositions du BRH du 14 avril 2005 et au défaut d’accompagnement de la salariée suite à son agression durant l’exercice de son activité professionnelle du 11 janvier 2019.

Sur les refus d’absence autre que celui en lien avec l’agression évoqué précédemment, les réponses apportées à l’employeur ne permettent pas de relever que lesdits refus seraient injustifiés. Ainsi, l’employeur, dans le cadre de son pouvoir de direction était en droit de refuser une demande d’absence à la salariée en lien avec son mari ou encore pour se rendre à un enterrement.

Sur les formations refusées, La Poste produit les réponses adressées à la salariée courant février et mars 2018 permettant de relever que les demandes de formation de « manager de proximité » faites par Mme [F] ont fait l’objet d’un accord de principe s’agissant de la formation débutant sous condition d’obtention du financement mais encore de l’éligibilité de l’agent en rapport avec le solde du compte personnel de formation.

Ainsi s’agissant de sa demande de formation « manager de proximité » déposée le 10 septembre 2017 (début de formation le 27 octobre) l’employeur lui explique que l’organisme de financement a répondu la veille du début de cette formation et qu’il n’est dès lors pas responsable de ce délai contraint qui a empêché le déplacement de la salariée à la formation. Sur la demande formulée le 29 octobre 2017 en vue d’une formation débutant le 16 novembre, il lui est expliqué que la demande était tardive, devant être faite 60 jours avant.

Enfin s’agissant d’une nouvelle demande portant sur cette formation faite en décembre 2017 et débutant le 22 février 2018, l’employeur lui réplique qu’elle ne devait pas faire de démarches auprès de l’organisme de formation alors que le financement n’était pas validé par l’AGEFOS PME. La salariée ne conteste pas avoir été avisée verbalement du retard de réponse de l’organisme de financement puis par courrier du 26 février du fait que le financement de cette formation serait limité aux heures présentes sur son compte de formation mais encore sous réserve d’une correction par la salariée des heures portées sur ce compte faisant état d’un solde de 177 heures au lieu de 58,28 heures. Il est clairement indiqué à la salariée qu’à défaut de remplir ces deux conditions, le coût de cette formation ne serait pas pris en charge par La Poste.

La société La Poste justifie donc avoir accepté les demandes de la formation de « manager proximité » sollicitées par Mme [F] et avoir accompli les démarches en ce sens, n’étant pas responsable des décisions ou retard de l’organisme décideur du financement. La Poste démontre en outre avoir rappelé à la salariée les conditions requises mais encore lui avoir expliqué les difficultés. Il est au surplus admis par la salariée qu’elle a finalement obtenu le 17 octobre 2018 le diplôme de « Manager de Proximité ».

S’agissant de l’absence de formation dispensée tous les deux ans, La Poste est taisante sur l’application des dispositions de l’accord « un avenir pour chaque postier » du 05 février 2019 qui prévoit une action de formation au moins tous les deux ans et ne verse aucun élément permettant de contredire la salariée.

Sur la sanction disciplinaire, il a été jugé que les griefs n’étaient pas établis et que la sanction devait être annulée.

Sur le respect de l’obligation de sécurité et de prévention des faits de harcèlement moral, il convient de rappeler que l’obligation de sécurité et de prévention n’est pas facultative et que, non seulement l’employeur doit prendre toute mesure pour faire cesser une situation de harcèlement moral, mais encore justifier de la mise en place de mesures de prévention des faits de harcèlement moral.

Par ailleurs, en présence de faits de harcèlement moral au travail, l’employeur peut manquer à son obligation de protection de la santé des employés en s’abstenant de prendre les précautions et les mesures immédiates directes pour stopper les faits de harcèlement qui ont été portés à sa connaissance. Le fait, par exemple, de ne pas ordonner d’enquête interne afin de vérifier l’existence d’agissements, que ces derniers soient établis ou non, a pu constituer un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.

En l’espèce, il n’est pas contesté que dès le 29 septembre 2017, Mme [F] dénonce sur le registre d’hygiène et de sécurité être victime de faits de harcèlement moral de la part de M. [K] [Y], son encadrant. Cette annotation, en lien avec une réclamation de la salariée quant au traitement de ses absences, fait l’objet d’une réponse rapide sur le même registre Il n’est cependant justifié d’aucune vérification de ses dires ou de mesures d’enquêtes. La seule mesure prise suite à cette dénonciation est celle de M. [C] [Y] qui écrit le 23 octobre 2017 à la salariée qu’il serait désormais son seul interlocuteur et avait décidé de supprimer tout contact entre elle et son encadrant M. [K] [Y]. Il est établi par les courriers échangés à cette période entre la salariée et le directeur de l’établissement que Mme [F] a indiqué que cette seule mesure était insuffisante.

Mme [F] signale de nouveaux faits de harcèlement moral dans le registre hygiène et sécurité le 03 novembre 2017, mettant en cause M. [K] [Y]. La société La Poste lui écrit, le 13 novembre 2017, que La Poste « peut mettre en place un dispositif de prévention » dès réception de l’accord de la salariée via un coupon réponse. Ce courrier lui explique en outre que le protocole donnera lieu à son audition ainsi que celle du « présumé harceleur ». Il n’est pas contesté qu’en l’absence de réponse de la salariée, la SA La Poste ne va pas donner de suite à cette proposition.

Le 30 janvier 2018, Mme [F], via son conseil, dénonce à nouveau les faits de harcèlement moral dont elle s’estime victime. La société La Poste n’allègue ni ne démontre avoir pris des mesures d’investigation et de précaution suite à ce courrier.

Il est établi que Mme [F] a saisi le conseil des prud’hommes en avril 2018 en annulation de la sanction disciplinaire mais également pour voir juger qu’elle est victime de harcèlement moral.

Par courriers des 15 et 22 décembre 2020, la salariée dénonce une nouvelle fois une situation de harcèlement moral à son encontre mettant en cause notamment le directeur de l’établissement de [Localité 2], M. [C] [Y]. Par lettre du 19 janvier 2021, il lui est indiqué qu’un protocole est mis en place s’inscrivant sur 10 semaines durant lesquelles sont prévues son audition et celle de M. [C] [Y]. Il est encore précisé que le dispositif prévoit des rencontres avec la psychologue du travail, le Médecin du travail et l’assistant social.

Mme [F] accepte la mise en place du protocole par lettre du 12 février 2021 dans laquelle elle exprime ses réserves quant au succès de la démarche en raison de l’absence de mesures prises auparavant malgré ses dénonciations anciennes.

Contrairement au fait conclu par Mme [F], il est démontré que Mme [O], psychologue du travail, tente de la contacter le 11 février 2021, Mme [O] précise qu’elle est intervenue dans le cadre des deux protocoles à savoir celui concernant les dénonciations de Mme [F] et celui mettant en cause Mme [F].

Il n’est justifié en revanche, contrairement au fait conclu par l’employeur, d’aucune tentative de contact de la salariée par l’assistante sociale, d’intervention du Médecin du travail malgré les termes du courrier du 19 janvier 2021 prévoyant leurs interventions respectives.

En outre, la SA La Poste allègue d’une réunion d’une commission le 29 mars 2021, soit dans le délai de 10 semaines imparti sans produire aucun élément corroborant ce fait. Il n’est par ailleurs produit aucun compte rendu d’entretien avec M. [C] [Y].

Il est donc établi que la salariée n’a pas été entendue dans le cadre de ce protocole, sans que sa défaillance ne soit démontrée mais encore la mise en place des mesures annoncées est démentie par les pièces produites.

Ainsi que conclu par la salariée, Mme [F] ne va être entendue que dans le cadre d’un autre protocole ouvert suite aux dénonciations de faits de harcèlement moral par des salariés la mettant en cause.

Il ressort ainsi d’un mail de Mme [I], adressée à Mme [O] le 03 mars 2021, qu’elle a été en contact avec Mme [F] qui lui a demandé un mail pour pouvoir échanger. Mme [I] indique à Mme [O] qu’elle a précisé à la salariée qu’elle travaillait pour « SKY ».

Un courrier du 20 mars 2021 de Mme [F] à l’employeur permet de constater que la salariée déplore l’absence d’avancée du protocole ouvert sur sa situation le 19 janvier 2021. Ce courrier confirme en outre que, lors de l’échange du 03 mars 2021 avec Mme [I], Mme [F] a appris l’existence d’un autre protocole suite à sa mise en cause pour des faits de harcèlement moral, Mme [I] l’avisant qu’elle « souhaite l’entendre à ce sujet ». L’employeur répond à la salariée que deux protocoles ont été ouverts le 25 janvier 2021 et que conformément à leurs obligations internes « deux enquêtes ont été diligentées ».

Le fait que la salariée qui se dit victime de faits de harcèlement moral soit elle-même mise en cause pour des faits de même nature ne saurait dispenser l’employeur du respect de l’obligation de sécurité et de prévention, à son égard. Or, il convient de constater que la SA La Poste qui produit de nombreux éléments en rapport avec la mise en cause de Mme [F] pour des faits de harcèlement moral, est toutefois défaillante à justifier de la réalité de l’enquête menée dans le cadre du protocole de janvier 2021 concernant les faits de harcèlement moral dénoncés à plusieurs reprises par la salariée à son encontre.

La SA La Poste échoue donc à établir le respect de son obligation légale de sécurité et de prévention des faits dénoncés de harcèlement moral de manière répétée par la salariée.

Il a par ailleurs été constaté que l’employeur échouait à démontrer le respect des préconisations médicales durant l’année 2016.

Enfin, il a été relevé que Mme [F] présentait des éléments démontrant le lien entre les faits dénoncés et son état de santé. Ainsi et notamment il n’est justifié par la SA La Poste d’aucune réponse à l’alerte faite par le médecin du travail le 29 janvier 2020 faite en ces termes :« la situation de Mme [F] et par conséquent sa santé se détériorent et se dégradent de jour en jour’Bien sûr vous n’avez qu’un son de cloche et je comprends que vous preniez le partie de sa hiérarchie. Cependant je tiens à vous rappeler que ce n’est pas la première fois que je vous alerte à ce sujet. ».

Au vu de ce qui précède, il convient de constater que l’employeur échoue à démontrer que les faits matériellement établis par Mme [F] sont tous justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le harcèlement moral est donc établi.

Il convient en conséquence de condamner La Poste à verser à Mme [F] la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral.

Sur les demandes accessoires :

Le jugement déféré sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.

Il convient de condamner la société La Poste, partie perdante, aux entiers dépens et à la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

DECLARE Mme [F] recevable en son appel,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a :

Rejeté les demandes de Mme [F] au titre des heures supplémentaires et de régularisation de la situation de la salariée au titre des droits à formation,

Condamné la société La Poste au paiement de la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens

INFIRME pour le surplus,

STATUANT à nouveau sur les chefs d’infirmation,

ANNULE la sanction de mise à pied disciplinaire du 11 décembre 2017,

DIT que Mme [F] a été victime des faits de harcèlement moral,

CONDAMNE la SA La Poste à payer à Mme [F] les sommes suivantes :

381,81 euros à titre de rappel de salaire sur la période du 15 au 21 janvier 2018 outre la somme de 38,18 euros au titre de l’incidence congés payés,

20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le harcèlement moral.

DIT que le montant des condamnations portera intérêts de droit à compter du jour de l’introduction de la demande en justice avec capitalisation,

Y ajoutant,

CONDAMNE la SA La Poste au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

CONDAMNE la SA La Poste aux dépens en cause d’appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La Greffière, La Conseillère faisant fonction de Présidente,

 


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