Un incident de pollution s’est produit le 19 mars 2021 lors d’une vidange d’un bac de traitement du bois par la SASU Etablissements Borie, entraînant le déversement d’un produit chimique dans la Sénouire. Le procureur a proposé une convention judiciaire d’intérêt public, validée par le tribunal en septembre 2022. L’ANPER-TOS a ensuite assigné la société pour obtenir des dommages et intérêts, invoquant une pollution sur 18 kilomètres et la destruction de la faune aquatique. La SASU a contesté la compétence du tribunal de Clermont-Ferrand, demandant le renvoi au tribunal du Puy-en-Velay, ce qui a été accepté par le juge de la mise en état en décembre 2023. L’ANPER-TOS a interjeté appel, soutenant que le tribunal de Clermont-Ferrand était compétent. Les parties ont présenté leurs arguments respectifs, la SASU et son assureur plaidant pour le maintien de la décision initiale. Finalement, la cour a infirmé l’ordonnance, déclarant le tribunal de Clermont-Ferrand compétent et renvoyant l’affaire devant celui-ci.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
DE RIOM
Troisième chambre civile et commerciale
JOUR FIXE
ARRET N°
DU : 11 Septembre 2024
N° RG 23/01930 – N° Portalis DBVU-V-B7H-GDKA
VTD
Arrêt rendu le onze Septembre deux mille vingt quatre
décision dont appel : Ordonnance , origine Juge de la mise en état de Clermont-Ferrand, décision attaquée en date du 21 Décembre 2023, enregistrée sous le n° 23/01295
Procédure à jour fixe : ordonnance sur requête rendue le 03 janvier 2024 par Madame la Présidente de la troisième chambre civile et commerciale agissant sur délégation de Madame la Première Présidente de la Cour d’appel de Riom et assignation à jour fixe adressée au greffe par la communication électronique le 25 mars 2024
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre
Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller
M. François KHEITMI, Magistrat Honoraire
En présence de : Mme Cécile CHEBANCE, Greffier placé, lors de l’appel des causes et Mme Christine VIAL, Greffier, lors du prononcé
ENTRE :
L’ASSOCIATION NATIONALE DE PROTECTION DES EAUX ET RIVIERES, TRUITE-OMBRE-SAUMON dite ‘ANPER-TOS’
reconnue d’utilité publique depuis 1985
[Adresse 4]
[Localité 3]
élisant domicime au cabinet de Me Yann FAUCONNIER
Représentant : Me Yann FAUCONNIER, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
APPELANTE
ET :
GROUPAMA RHONE-ALPES AUVERGNE
Société d’Assurances
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentants : Me Philippe GATIGNOL de la SCP TEILLOT & ASSOCIES, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND (postulant) et Me Serge DEYGAS de la SELARL CARNOT AVOCATS, avocat au barreau de LYON (plaidant)
notifs aux parties
ETABLISSEMENTS BORIE
SAS à associé unique inscrite au RCS du Puy-En-Velay sous le n° 315 620 104
[Adresse 6]
[Localité 1]
Représentant : Me Jean-Louis TERRIOU de la SCP TERRIOU RADIGON FURLANINI, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
INTIMÉS
DEBATS : A l’audience publique du 29 Mai 2024 Madame THEUIL-DIF a fait le rapport oral de l’affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l’article 785 du CPC. La Cour a mis l’affaire en délibéré au 11 Septembre 2024.
ARRET :
Prononcé publiquement le 11 Septembre 2024, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Un incident est survenu le 19 mars 2021 au sein de la SASU Etablissements Borie, qui au cours d’une vidange d’un bac de traitement du bois, a déversé sur la surface du sol un produit de traitement contenant du Sarpalo 860 dilué (produit chimique de protection de bois à usage industriel) qui a rejoint un cours d’eau, la Sénouire, via le réseau de collecte des eaux pluviales.
Une mesure alternative aux poursuites a été proposée par le procureur de la République du tribunal judiciaire du Puy-en-Velay, sous la forme d’une convention judiciaire d’intérêt public dite ‘CJIP’.
Par ordonnance du 12 septembre 2022, le président du tribunal judiciaire du Puy-en-Velay a validité la CJIP.
Considérant que la SASU Etablissements Borie était responsable d’une importante pollution sur environ 18 kilomètres entre les communes de Paulhaguet (43) et Vieille-Brioude (43) entraînant la destruction de plusieurs milliers d’individus appartenant à différentes espèces composant la faune aquatique de ce milieu, l’Association Nationale de Protection des Eaux et Rivières Truite-Ombre-Saumon dite ‘ANPER-TOS’ a, par acte du 28 mars 2023, fait assigner devant le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand ladite société afin de solliciter sa condamnation à lui verser une somme de 30 840 euros à titre de dommages et intérêts.
La société Groupama Rhône-Alpes Auvergne, assureur de la SASU Etablissements Borie au titre d’un contrat ‘assurances responsabilité et dommages environnement’ est intervenue volontairement à l’instance selon conclusions du 6 juin 2023.
Par conclusions d’incident, la SASU Etablissements Borie a invoqué in limine litis l’incompétence du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand et a demandé que le juge de la mise en état déclare cette juridiction incompétente ratione loci au bénéfice du tribunal judiciaire du Puy-en-Velay.
Par ordonnance du 21 décembre 2023, le juge de la mise en état a :
– déclaré l’intervention volontaire de la société Groupama Rhône-Alpes Auvergne, assureur de la SASU Etablissements Borie, recevable ;
– fait droit à l’exception d’incompétence territoriale soulevée par la SASU Etablissements Borie ;
– dit que le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand était territorialement incompétent au profit du tribunal judiciaire du Puy-en-Velay pour trancher des demandes formées par ANPER-TOS à l’encontre de la SASU Etablissements Borie ;
– renvoyé l’affaire devant le tribunal judiciaire du Puy-en-Velay ;
– dit n’y avoir lieu à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, et débouté les parties de leurs demandes formulées à ce titre ;
– condamné ANPER-TOS au paiement des dépens ;
– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Le juge a, au visa des articles 73, 75 et 42 du code de procédure civile, L.211-20 du code de l’organisation judiciaire et de la notice du décret n°2021-286 du 16 mars 2021, énoncé :
– que le lieu du sinistre et le siège social de la défenderesse se trouvaient en Haute-Loire ;
– qu’il n’était pas démontré que l’infraction reprochée à la SASU Etablissements Borie devait être considérée comme une infraction des plus complexes, n’ayant d’ailleurs pas fait l’objet, sur le plan pénal, d’une transmission au tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand par le parquet du Puy-en-Velay ;
– que ANPER-TOS avait, dans le cadre d’un dépôt de plainte avec constitution de partie civile, effectué auprès du parquet du Puy-en-Velay, accepté la compétence du tribunal judiciaire du Puy-en-Velay ;
– qu’il n’y avait pas lieu que la juridiction spécialisée en matière d’environnement soit reconnue comme compétente en l’absence d’infraction complexe, s’agissant de statuer sur une demande de dommages et intérêts au profit de ANPER-TOS.
Suivant déclaration électronique reçue au greffe de la cour en date du 28 décembre 2023, l’association ANPER-TOS a interjeté appel de l’ordonnance.
Par ordonnance du 3 janvier 2024, la présidente de la troisième chambre civile et commerciale agissant sur délégation de la première présidente de la cour d’appel de Riom a autorisé l’association ANPER-TOS à assigner à jour fixe la SASU Etablissements Borie et la SA Groupama Rhône-Alpes Auvergne, pour l’audience du 29 mai 2024 devant la troisième chambre civile, pour statuer sur les mérites de l’appel.
Par actes des 7 et 14 mars 2024, l’appelante a fait assigner la SASU Etablissements Borie et la SA Groupama Rhône-Alpes Auvergne à jour fixe devant la chambre désignée par l’ordonnance précitée.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées et notifiées le 17 mai 2024, l’association ANPER-TOS demande à la cour, au visa du code de l’organisation judiciaire, du code de l’environnement et du décret n°2021 du 16 mars 2021, de :
– dire et juger son appel recevable et bien fondé ;
– infirmer l’ordonnance ;
– déclarer le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand compétent ;
– renvoyer l’affaire devant le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand ;
– condamner la SASU Etablissements Borie au paiement d’une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la même aux dépens de première instance et d’appel en accordant pour ces derniers, à Me Yann Fauconnier, avocat, le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que le juge de la mise en état a commis une erreur de droit en ajoutant une condition non prévue par l’article L.211-20 du code de l’organisation judiciaire et en faisant une lecture erronée du décret du 16 mars 2021. Elle constate que le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand désigné PRE (Pôle Régional Environnement) a été saisi d’une action en responsabilité civile prévue par l’article L.142-2 du code de l’environnement, et qu’il s’agit d’un cas d’attribution au PRE prévu par l’article précité. Cet article ne conditionne pas la compétence de la juridiction spécialisée au cas d’infractions complexes, ni au choix de l’une des parties. Les travaux parlementaires invoqués par Groupama ne concernent pas cet article, mais uniquement le dispositif pénal de l’article 706-2-3 du code de procédure pénale. Il n’y a qu’en matière de procédure pénale que le critère de ‘complexité’ de l’affaire est retenu, non en procédure civile.
En outre, elle expose que l’erreur commise semble venir d’une interprétation erronée de la notice du décret listant les tribunaux judiciaires devenant PRE : si la notion d’infraction complexe est bien évoquée dans cette note introductive, elle est spécifique à la procédure pénale spéciale. L’article L.211-20 du COJ ne prévoit pas de critère particulier tenant à la complexité du dossier et/ou à l’orientation de la procédure pénale, la compétence est matérielle et attribuée en fonction de l’action engagée. Elle estime que le décret n’a pas vocation à préciser le champ de compétence des juridictions déjà organisé par les dispositions législatives, ni à énumérer des critères supplémentaires pour la compétence ‘procédure civile’ du PRE.
Enfin, elle précise que l’article D.211-10-4-1 du COJ prévoit, par renvoi au tableau VIII-IV annexé au même code, le siège et le ressort des tribunaux judiciaires compétents pour connaître des actions en responsabilité civile mentionnées à l’article L.211-20 précité. Si elle avait accepté la compétence pénale de la juridiction du Puy-en-Velay par un dépôt de plainte avec constitution de partie civile, cela ne saurait préjuger de sa volonté de reconnaître une quelconque compétence civile à cette même juridiction. Au jour de l’assignation, la loi créant les PRE et son décret d’application étaient entrés en vigueur, et aucune juridiction n’était plus saisie de cette affaire.
Dans ses dernières écritures déposée et notifiées le 3 avril 2024, la SASU Etablissements Borie demande à la cour de :
– débouter l’association ANPER-TOS de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
– confirmer l’ordonnance attaquée ;
– la recevoir en ses demandes ;
– condamner l’association ANPER-TOS à lui payer la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la même aux entiers dépens.
Elle fait observer qu’elle demeure en Haute-Loire et que le dossier a déjà été examiné par le tribunal judiciaire du Puy-en-Velay, à la fois sur l’aspect pénal et civil, à travers la validation d’une convention judiciaire d’intérêt public par ordonnance du 12 septembre 2022.
Elle expose que la notice du décret n°2021-286 du 16 mars 2021 précise les actions, non pas uniquement en matière pénale, mais aussi en matière civile : cette notice a pour but de préciser que les infractions environnementales peuvent être traitées dans le cadre d’une procédure non complexe selon les règles liées au lieu de l’infraction ou de la résidence du défendeur, et que pour les infractions complexes, la saisine du PRE doit s’imposer. Ainsi, le juge n’a pas fait d’erreur en droit ou en interprétation. Une bonne administration de la justice veut que ce dossier soit traité par le même tribunal, la volonté de l’association ANPER-TOS de délocaliser ses demandes a pour but de ‘battre monnaie’.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées et notifiées le 14 mai 2024, la société Groupama Rhône-Alpes Auvergne demande à la cour, au visa de l’article L.211-20 du code de l’organisation judiciaire, du décret n°2021 du 16 mars 2021, de la loi 2020-1672 du 24 décembre 2020, du rapport de l’Assemblée nationale relatif au projet de loi susvisé, de :
– débouter l’association ANPER-TOS de sa demande d’infirmation de l’ordonnance ;
– confirmer l’ordonnance ;
– condamner l’association ANPER-TOS à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient qu’il ressort des débats devant l’Assemblée nationale que la volonté du législateur a été de créer un pôle spécialisé chargé de traiter les contentieux complexes, les affaires techniques, celles dans le cadre desquelles le préjudice subi est important ou celles qui s’étendent sur un vaste ressort géographique, tandis que les affaires ne présentant pas de gravité particulière ou de complexité continueront d’être traitées par les juridictions locales. Elle estime que dans cette affaire, il n’existe aucune obligation de saisir le PRE.
Elle ajoute qu’il est d’une bonne administration de la justice de confier cette procédure à la juridiction du Puy-en-Velay qui en a déjà connu un aspect.
Enfin, elle considère que la procédure nécessite d’articuler une phase administrative, puis une phase judiciaire, de sorte qu’il convient de considérer qu’à partir du moment où un parquet territorialement compétent est saisi, il n’est plus possible de saisir le pôle spécialisé.
Il sera renvoyé pour l’exposé complet des demandes et moyens des parties à leurs dernières conclusions.
L’article 789 du code de procédure civile dispose que lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent pour statuer sur les exceptions de procédure.
L’article 42 du code de procédure civile énonce que la juridiction territorialement compétente, est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur.
L’article 46 précise que le demandeur peut saisir à son choix, outre la juridiction où demeure le défendeur, en matière délictuelle, la juridiction du lieu du fait dommageable ou celle dans le ressort de laquelle le dommage a été subi.
Selon l’article L.211-20 du code de l’organisation judiciaire, dans le ressort de chaque cour d’appel, un tribunal judiciaire spécialement désigné connaît :
1° des actions relatives au préjudice écologique fondées sur les articles 1246 à 1252 du code civil ;
2° des actions en responsabilité civile prévues par le code de l’environnement ;
3° des actions en responsabilité civile fondées sur les régimes spéciaux de responsabilité applicables en matière environnementale résultant de règlements européen, de conventions internationales et des lois prises pour l’application de ces conventions.
L’article D.211-10-4-1 du même code prévoit que le siège et le ressort des tribunaux judiciaires compétents pour connaître des actions mentionnées à l’article L.211-20 sont fixés conformément au tableau VIII-IV annexé au présent code.
En l’espèce, le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand désigné PRE a été saisi par l’association ANPER-TOS d’une action en responsabilité civile prévue par l’article L.142-2 du code de l’environnement.
Cet article dispose :
‘Les associations agréées mentionnées à l’article L. 141-2 peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts collectifs qu’elles ont pour objet de défendre et constituant une infraction aux dispositions législatives relatives à la protection de la nature et de l’environnement, à l’amélioration du cadre de vie, à la protection de l’eau, de l’air, des sols, des sites et paysages, à l’urbanisme, à la pêche maritime ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions et les nuisances, la sûreté nucléaire et la radioprotection, les pratiques commerciales et les publicités trompeuses ou de nature à induire en erreur quand ces pratiques et publicités comportent des indications environnementales ainsi qu’aux textes pris pour leur application.
Ce droit est également reconnu, sous les mêmes conditions, aux associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans à la date des faits et qui se proposent, par leurs statuts, la sauvegarde de tout ou partie des intérêts visés à l’article L. 211-1, en ce qui concerne les faits constituant une infraction aux dispositions relatives à l’eau, ou des intérêts visés à l’article L. 511-1, en ce qui concerne les faits constituant une infraction aux dispositions relatives aux installations classées.’
L’action dont est saisie le tribunal relève bien de l’un des cas d’attribution au PRE prévu au 2° de l’article L.211-20 du code de l’organisation judiciaire.
Les dispositions de l’article L.211-20 figurent dans la sous-section 2 (compétence particulière à certains tribunaux judiciaires) de la section 1 relative à la compétence matérielle du Titre 1er relatif au ‘tribunal judiciaire’. Il résulte de ce texte, une volonté du législateur de confier les actions en responsabilité civile prévues par le code de l’environnement aux seuls tribunaux judiciaires spécialement désignés.
La juridiction saisie demeure compétente pour statuer sur les procédures introduites antérieurement à la date d’entrée en vigueur de l’article 2 du décret n°2021-286 du 16 mars 2021, soit le 1er avril 2021.
Le critère de complexité invoqué par les intimées est seulement mentionné dans l’article 706-2-3 du code de procédure pénale qui énonce notamment :
‘I.-Dans le ressort de chaque cour d’appel, la compétence territoriale d’un tribunal judiciaire est étendue au ressort de la cour d’appel pour l’enquête, la poursuite, l’instruction et le jugement des délits, à l’exclusion de ceux mentionnés aux articles 706-75 et 706-107 du présent code, prévus par le code de l’environnement, par le code forestier, au titre V du livre II du code rural et de la pêche maritime, aux 1° et 2° du I de l’article L. 512-1 et à l’article L. 512-2 du code minier ainsi qu’à l’article 76 de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, dans les affaires qui sont ou apparaîtraient complexes, en raison notamment de leur technicité, de l’importance du préjudice ou du ressort géographique sur lequel elles s’étendent.’
De même la notice du décret n°2021-286 du 16 mars 2021 précise :
‘Notice : les articles 706-2-3 du code de procédure pénale et L. 211-20 du code de l’organisation judiciaire, dans leur rédaction issue des articles 15 et 17 de la loi n° 2020-1672 du 24 décembre 2020 relative au Parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée, prévoient la création de pôles régionaux spécialisés en matière d’atteintes à l’environnement. Ce décret détermine le siège et le ressort de ces tribunaux judiciaires, qui seront compétents pour connaître des infractions les plus complexes en matière environnementale, ainsi que des actions relatives au préjudice écologique fondées sur les articles 1246 à 1252 du code civil, des actions en responsabilité civile prévues par le code de l’environnement et des actions en responsabilité civile fondées sur les régimes spéciaux de responsabilité applicables en matière environnementale résultant de règlements européens, de conventions internationales et des lois prises pour l’application de ces conventions. (…)’
Le critère de complexité renvoie aux infractions en matière environnementale. Le décret détermine le siège et le ressort des tribunaux judiciaires compétents pour connaître des infractions les plus complexes en matière environnementale, ainsi que des actions relatives au préjudice écologique fondées sur les articles 1246 à 1252 du code civil, des actions en responsabilité civile prévues par le code de l’environnement (et…).
Au surplus, si l’association ANPER-TOS avait accepté la compétence pénale de la juridiction du Puy-en-Velay par un dépôt de plainte avec constitution de partie civile, cela ne saurait préjuger de sa volonté de reconnaître une compétence civile à cette même juridiction. Au jour de l’assignation, le 28 mars 2023, aucune autre juridiction n’était plus saisie de cette affaire et les dispositions de la loi n°2020-1671 du 24 décembre 2020 créant le pôle spécialisé et celles de son décret d’application étaient entrées en vigueur.
Dans ces circonstances, l’ordonnance sera infirmée, le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand sera déclarée compétent, et l’affaire sera renvoyée devant lui.
Succombant à l’instance, la société Etablissements Borie sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel. La distraction des dépens sera ordonnée au profit de Me Fauconnier, avocat, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
Néanmoins, l’équité commande de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à la disposition des parties au greffe de la juridiction ;
Infirme l’ordonnance déférée ;
Statuant à nouveau :
Déclare le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand compétent territorialement pour connaître du litige opposant l’Association Nationale de Protection des Eaux et Rivières Truite-Ombre-Saumon, la SASU Etablissements Borie et la société Groupama Rhône-Alpes Auvergne ;
Renvoie l’affaire et les parties devant le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand ;
Dit n’y avoir lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SASU Etablissements Borie aux dépens de première instance et d’appel ;
Ordonne la distraction des dépens au profit de Me Fauconnier, avocat.
Le greffier, La présidente,