Commissions de l’agent commercial : passer par une expertise judiciaire ?

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Commissions de l’agent commercial : passer par une expertise judiciaire ?

En cas de litige sur le montant de la commission de l’agent commercial, le juge n’a aucune obligation de faire droit à une demande d’expertise, de surcroît en l’absence d’élément sérieux et objectif quant à la réalité des commissions qui lui seraient dues postérieurement à la rupture du contrat d’agence commerciale.

La charge de la preuve

L’article 9 du code de procédure civile dispose : ‘Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention’.

Le droit aux mesures d’instruction

L’article 146 du même code prévoit que : ‘Une mesure d’instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l’allègue ne dispose pas d’éléments suffisants pour le prouver.

En aucun cas une mesure d’instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l’administration de la preuve’.

Le droit à commission de l’agent commercial

Aux termes de l’article L.134-7 du code de commerce : ‘Pour toute opération commerciale conclue après la cessation du contrat d’agence, l’agent commercial a droit à la commission, soit lorsque l’opération est principalement due à son activité au cours du contrat d’agence et a été conclue dans un délai raisonnable à compter de la cessation du contrat, soit lorsque, dans les conditions prévues à l’article L. 134-6, l’ordre du tiers a été reçu par le mandant ou par l’agent commercial avant la cessation du contrat’.

Refus d’expertise confirmé

En l’espèce, pour demander l’infirmation du jugement en ce qu’il a rejeté sa demande au titre des commissions acquises par lui et non réglées et demander la condamnation de la société FBD au paiement de la somme de 12 191,74 euros à ce titre, M. [F] [W] soutient qu’il était le seul agent de la société, que les ventes se faisaient sur la base du référencement et qu’ainsi, les ventes conclues après la cessation du contrat d’agence résultent nécessairement de son activité d’agent commercial.

Sur la demande d’expertise, M. [W] soutient qu’il doit être commissionné sur des commandes qu’il a reçues après la rupture du contrat et transmises à la société FBD et que cette dernière refuse de transmettre ses éléments comptables permettant de calculer les commissions litigieuses.

La société intimée fait quant à elle valoir que M. [W] n’a jamais produit les éléments permettant d’établir que le droit à commission existe (identité du client, offres et propositions commerciales faites, éventuels contrats de référencement, échanges de correspondances et tous autres documents précontractuels établis avec la clientèle).

Par ailleurs, concernant le chiffre d’affaires réalisé postérieurement à la rupture du contrat d’agence commerciale, la société FBD expose avoir réglé à M. [W] la somme de 7 042,99 euros TTC pour la période du 1er juillet 2018 au 30 juin 2019, dont 6 038 euros directement aux impôts du fait d’un avis à tiers détenteur.

La société FBD fait également valoir que depuis juillet 2018, elle a enregistré un certain nombre d’avoirs liés à des reprises de marchandises invendues, qui représentent environ 30% du chiffre d’affaires et que M. [W] refuse de prendre en compte. La société demande la confirmation du jugement en ce qu’il a rejeté la demande de M. [W] au titre des commissions et de l’expertise.

M. [W] verse au soutien de ses prétentions des mails concernant :

– une offre de panier ‘oie’ faite en février et avril 2018 pour un magasin à [Localité 4] ;

– une offre de panier ‘Bresse’ faite en juillet 2017 pour des magasins Gamm Vert ;

– un cadencier, les tarifs 2018 et conditions générales de ventes transmis en décembre 2017 à une centrale d’achat Gamm Vert.

Néanmoins, ces mails produits en pièces 6 et suivantes par M. [W] ne font nullement mention des montants concernés et c’est dès lors à juste titre que le tribunal a considéré que ces pièces ne permettent pas de justifier de la somme réclamée et ne permettent pas davantage d’établir qu’ils concernent des commissions dues pour des commandes livrées en septembre 2018, ainsi qu’il le soutient.

Le jugement qui l’a débouté de sa demande de condamnation de la société FBD à lui payer la somme de 12 191,74 euros à ce titre sera confirmé de ce chef.

Concernant la demande d’expertise, il sera fait observer que, si M. [W] a formulé cette demande devant le juge de la mise en état dans le cadre de la première instance, il n’a, à aucun moment, demandé la communication par la société FBD de toutes les informations et documents comptables nécessaires pour établir le montant des commissions qu’il revendique.

Le décompte sous forme de tableau qu’il produit en pièce n°165 ne peut constituer un élément de preuve objectif et satisfaisant, dès lors qu’il s’agit du propre tableau élaboré par M. [W] lui-même et qu’il n’est pas corroboré par des pièces venant appuyer ses demandes sur ce point.

La pièce suivante n°166 contenant des avis de paiement de la société Euralis ne détaille pas les opérations auxquelles elle se réfère et mentionne des sommes qui ne correspondent pas à celles exposées dans le tableau, de sorte qu’elle n’est pas exploitable.

Enfin, ainsi que l’a relevé le tribunal, M. [W] reste taisant sur le règlement des commissions qu’il a perçues à hauteur de 7 042,99 euros, pour la période du 1er juillet 2018 au 30 juin 2019, ainsi que la société FBD en justifie en pièce n°92.

L’absence d’élément sérieux et objectif

En conséquence, en l’absence d’élément sérieux et objectif quant à la réalité des commissions qui lui seraient dues postérieurement à la rupture du contrat d’agence commerciale, il sera débouté de sa demande d’expertise, la mesure d’instruction n’ayant pas vocation à suppléer sa carence dans l’administration de la preuve, confirmant le jugement sur ce point.


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