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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 9
ARRET DU 08 SEPTEMBRE 2022
(n° , 26 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/17044 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEMVY
Décision déférée à la Cour : arrêt de renvoi après cassation rendu le 09 septembre 2021 par la 2ème Chambre Civile de la Cour de Cassation, sur pourvoi d’un arrêt du 09 janvier 2020 par le pôle 5 chambre 9 de la Cour d’Appel de PARIS, lui-même rendu sur renvoi après cassation par un arrêt du 09 janvier 2019 de la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation sur appel d’un arrêt du 14 juin 2017 du pôle 5 chambre 8 (rectifié par arrêt du 05 juillet 2017 du pôle 5 chambre 8) de la Cour d’Appel de PARIS), sur un jugement du Tribunal de Commerce de PARIS du 14 septembre 2015
APPELANTES
S.A.S. POSSIBLE
[Adresse 2]
[Localité 7]
S.A.S. IPANEMA
[Adresse 9]
[Localité 6]
Représentées par Me Jean-philippe AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0053, avocat postulant
Représentées par Me Isabelle RHILANE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
INTIMES
Monsieur [H] [K]
né le 07 Décembre 1957 à [Localité 13]
[Adresse 4]
[Localité 8]
S.A.S.U. DMC
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentés par Me Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0334, avocat postulant
Représentés par Me François BERTHOD, avocat au barreau de PARIS, toque : R0289, avocat plaidant
PARTIES INTERVENANTES VOLONTAIRES
Monsieur [E] [S]
né le 17 Mai 1973 à [Localité 12]
[Adresse 5]
[Localité 10]
Représenté par Me Mathieu EYCHENE de l’AARPI RONDOT EYCHENE FREMINVILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : K0030, avocat postulant
Monsieur [X], [Y] [J]
né le 26 Mars 1975 à [Localité 13]
[Adresse 1]
[Localité 11]
Représenté par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER – BEQUET – MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050, avocat postulant
Représenté par Me Marie-laure ARBEZ-NICOLAS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1375, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 804 et suivants du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 02 avril 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant :
Madame Sophie MOLLAT, Présidente
Madame Déborah CORICON, Conseillère
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:Madame Sophie MOLLAT, Présidente
Madame Florence DUBOIS STEVANT, Conseillère
Madame Déborah CORICON, Conseillère
GREFFIERE : Madame FOULON, lors des débats
ARRET :
– contradictoire
– rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Sophie MOLLAT, Présidente et par Madame FOULON, Greffière.
************
Exposé des faits et de la procédure
Le 11 mars 2013, la société IPANEMA qui exerce une activité d’édition, a signé une lettre
d’intention en vue du rachat:
– des actions de la société POSSIBLE dont l’objet selon les statuts est:
* la création, la conception, la gestion de tous supports de communication écrits, musicaux, cinématographiques, vidéos ou télévisuels,
*la production, l’édition, la publication, la diffusion, la location de l’ensemble de ces produits, ainsi que toutes opérations commerciales se rattachant au négoce de ces produits et notamment l’achat et la vente de tous droits musicaux,
*la création, l’acquisition, la location, la prise en location-gérance de tous établissements ou fonds de commerce se rapportant à l’une ou l’autre des activités mentionnées ci-dessus,
*et généralement toutes opérations financières, commerciales, industrielles, civiles, mobilières ou immobilières pouvant se rattacher directement ou indirectement à l’un des objets spécifiqués ou à tout autre objet similiaire ou connexe
– et des actions de la société KAOGOUMII, dont l’objet selon les statuts est:
* la production, la post-production, le graphisme dans le milieu de l’audiovisuel et toutes activités connexes s’y rattachant,
* la participation directe ou indirecte de la société dans toutes opérations pouvant se rattacher à l’objet sus-indiqué, par voie de création de sociétés nouvelles, apports-fusions, alliances, sociétés en participation ou groupements d’intérêt économique
*et généralement toutes opérations commerciales, industrielles, financières, mobilières ou immobilières pouvant se rattacher directement ou indirectement à l’objet social ou susceptible d’en faciliter l’extension.
Par acte sous seing privé en date du 26 juillet 2013, la société IPANEMA a ainsi procédé à l’acquisition, par voie de cession auprès de Messieurs [H] [K] (actionnaire à hauteur de 2499 parts sur 2500 de la société POSSIBLE, et de 75% de la société KAOGOUMII), [T] [M] (1 part sur les 2500 de la société POSSIBLE) et [X] [J] (25% de KAOGOUMII), de la totalité des actions et des droits de vote composant le capital social des sociétés POSSIBLE et KAOGOUMII, à l’exception d’une participation des 10% dans la société KAOGOUMII restant à Monsieur [X] [J] et cédée en 2015.
Les valorisations retenues par les parties étaient les suivantes :
– La valorisation pour la totalité des actions et des droits de vote de la société POSSIBLE s’est élevée à 3.490.000 euros (article 6.1 dela Convention); dont 3.350.400 euros au comptant et 139.600 euros versés au 1.01.2014
– La valorisation pour 90% des actions et des droits de vote de la société KAOGOUMII s’est élevée à 1.510.000 euros, dont 1.449.600 euros au comptant et 60.400 euros versés au 1.01.2014
soit au total 5.000.000 euros.
Monsieur [K] a ainsi perçu:
– au titre de la cession de POSSIBLE, comptant, la somme de 3.349.060 euros
– au titre de la cession de KAOGOUMII, comptant, la somme de 1.208.000 euros.
Monsieur [J] a perçu comptant la somme de 241.600 euros.
Les paiements différés ne sont pas intervenus compte tenu du litige survenu.
Le 26.06.2013 une garantie d’actifet de passif a été consentie par M. [H] [K] au profit de la société IPANEMA:
– pour la cession de la société POSSIBLE pour un montant de 1.000.000,00 € ramené à 500.000,00 € à compter du 26 juillet 2014, et comprenant une franchise de 50.000 euros
– pour la cession de la société KAOGUMII pour un montant de 400.000,00 € ramené à 200.000,00 € à compter du 26 juillet 2014, et comprenant une franchise de 30.000 euros pour KAOGUMII.
En garantie de la GAP, M. [K] consentait à la société IPANEMA un nantissement sur un contrat d’assurance souscrit à son nom dans les comptes de la banque HSBC pour un montant maximal de 400 000 euros, jusqu’au 30 juin 2014 , puis de 300.000 euros jusqu’au 30 juin 2015, date à laquelle la garantie d’actif et de passif prenait fm.
Par ailleurs, le 1er août 2013, un contrat de prestations de services et d’assistance était signé entre la société DM Consulting, représentée par M. [K] et la société POSSIBLE, moyennant une rémunération brute de 250 000 euros hors-taxes dont la finalité était d’assurer la transmission du savoir-faire de Monsieur [K].
S’estimant trompée et excipant de manoeuvres de M. [H] [K] lors de la cession d’actions, par courrier du 23 janvier 2014 la société IPANEMA l’informait de son intention de mettre en oeuvre la garantie d’actif et de passif invoquant un dol et une réticence dolosive s’agissant du fait qu’elle aurait découvert, après la cession, qu’il n’existait aucun lien contractuel direct et réel avec l’ensemble des annonceurs mais que ceux ci étaient liés avec l’agence de communication ASAP qui sous-traitait aux sociétés POSSIBLE et KAOGOUMII des prestations avec cette précision que la dirigeante de la société ASAP était la compagne de Monsieur [K] et que les liens contractuels entre les sociétés étaient liés à ces relations affectives entre les parties que la cession faisait disparaitre.
Par ordonnance du 24 mars 2014 les sociétés IPANEMA et POSSIBLE ont été autorisées à assigner à bref délai M. [K] et la société DM Consulting.
Par actes des 27 mars et 4 avril 2014, les sociétés IPANEMA et POSSIBLE ont ainsi attrait devant le tribunal de commerce de PARIS, Monsieur [K] et la société DM Consulting en annulation de la cession des actions des sociétés POSSIBLE et KAOGOUMII consentie par M. [K] à la société IPANEMA.
Elles demandaient que soit prononcée l’annulation des contrats de cession avec toutes conséquences de droit et notamment les restitutions, subsidiairement la condamnation de M. [K] au paiement d’une somme de 2 millions d’euros à titre de réduction du prix de cession des actions, ainsi que d’une somme d’un million d’euros avec intérêts au taux légal au titre de la garantie d’actif et de passif, outre une somme de cent mille euros à titre de dommages-intérêts pour violation de l’obligation d’information générale précontractuelle, ainsi que la résolution du contrat de prestations de service.
M. [J], détenteur au moment de la cession de 25% des parts de la société KAOGOUMII, intervenait volontairement pour demander, en cas d’annulation de la cession des actions, la condamnation de M. [K] à lui payer une somme de 180 000 euros à titre de dommages-intérêts.
Par jugement du 14 septembre 2015, le tribunal de commerce de Paris a :
– déclaré irrecevable l’intervention volontaire de M. [J],
– débouté les sociétés IPANEMA et POSSIBLE de leurs demandes,
– condamné la société IPANEMA à payer à M. [K] une somme de 189 877 euros avec intérêts au taux légal à compter du 31 janvier 2015,
– condamné la société POSSIBLE à payer à la société DM Consulting une somme de 160.416,38 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture anticipée du contrat de prestations, services et d’assistance,
– débouté M. [K] de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,
– condamné solidairement les sociétés lpanema et POSSIBLE aux dépens, ainsi qu’au paiement d’une somme de 25 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Les sociétés IPANEMA et POSSIBLE ont interjeté appel le 16 octobre 2015.
Par arrêt du 14 juin 2017, rectifié par arrêt du 5 juillet 2017 la cour d’appel de Paris a:
– Infirmé le jugement en ce qu’il a déclaré irrecevable M. [J] en son intervention, et statuant à nouveau, déclaré M. [J] recevable en son intervention volontaire,
– Confirmé le jugement en ce qu’il a débouté la société IPANEMA de sa demande d’annulation des cessions pour dol, et en ce qu’il a condamné la société IPANEMA à payer à M. [K] une somme de 189 877 euros avec intérêts au taux légal à compter du 31 janvier 2015 au titre du solde du prix de cession,
– Infirmé pour le surplus,
Statuant à nouveau,
– Condamné M. [K], à payer à la société IPANEMA une somme de 180.000 euros à titre de dommages-intérêts,
– Prononcé la résiliation du contrat de prestation de services aux torts de la société DM Consulting,
En conséquence,
– débouté les sociétés POSSIBLE et DM Consulting de leurs demandes en paiement au titre de ce contrat,
– Débouté M [J] de sa demande de dommages-intérêts à l’encontre de M [K],
– Débouté M [K] de sa demande de dommages-intérêts à l’encontre de M [J],
– Condamné M. [K] aux dépens de première instance et d’appel avec recouvrement dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile,
– condamné également Monsieur [K] à payer à la société IPANEMA la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Les sociétés IPANEMA et POSSIBLE se sont pourvues en cassation.
Par arrêt du 9 janvier 2019 la Cour de cassation a cassé et annulé l’arrêt en toutes ses dispositions aux motifs que:
‘pour rejeter les demandes, formées par les sociétés lpanema et POSSIBLE, d’annulation des contrats de cession de parts et de prestations de services et d’assistance conclus avec la société DM Consulting et de paiement de dommages-intérêts fondées sur la réticence dolosive commise par M. [K] et condamner la société IPANEMA à payer à M. [K] le solde du prix de cession, l’arrêt, après avoir constaté que la société lpanema ignorait que l’agence ASAP, dont la dirigeante, Mme [I], était la compagne de M. [K], avait seule un contact direct avec les annonceurs et avait ainsi la possibilité de demander ou non aux sociétés cédées d’effectuer des prestations techniques pour les annonceurs, retient que la société IPANEMA ne rapporte pas la preuve que c’est de manière intentionnelle que M. [K] ne l’a pas informée de l’existence de l’agence ASAP et des liens personnels qu’il entretenait avec sa dirigeante, comme de la dépendance économique dans laquelle se trouvaient les sociétés cédées à l’égard de cette société tierce;
Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que ces éléments étaient de nature à affecter les résultats et les perspectives des sociétés cédées, ce dont il résultait que le silence gardé par M. [K] sur ces informations, dont il ne pouvait ignorer l’importance dans la mesure où elles faisaient peser un aléa sur la pérennité des sociétés qu’il cédait, était nécessairement intentionnel, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations a violé l’article 1116 ancien du code civil ;’
‘pour condamner M. [K] à payer à la société IPANEMA une somme de 180 000 euros à titre de dommages-intérêts, l’arrêt retient que le préjudice subi par la société IPANEMA se limite à la perte de chance de réaliser un chiffre d’affaires plus important, qu’il fixe à la somme précitée;
Qu’en statuant ainsi, alors qu’il n’était pas soutenu que le préjudice subi par la société IPANEMA, résultant du manquement de M. [K] à son obligation précontractuelle d’information, devait se limiter en une perte de chance, la cour d’appel, qui a relevé d’office le moyen tiré de l’existence d’un tel préjudice. sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur ce point, a méconnu les exigences de l’article 16 du code de procédure civile ;’
‘Pour rejeter la demande de la société POSSIBLE de remboursement de la somme de 104 165 euros au titre des honoraires versés à la société DM Consulting en exécution du contrat de prestations de services et d’assistance, l’arrêt retient que la résiliation ne peut avoir d’effet rétroactif, compte-tenu des diligences déjà effectuées par la société DM Consulting ;
Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait relevé que M. [K] ne disposait pas des relations nécessaires à la bonne exécution du contrat et que la société DM Consulting s’était bornée à proposer des rendez-vous avec quelques clients, ce dont il résultait que la société DM Consulting n’avait pas, dès l’origine, exécuté le contrat et qu’il n’y avait jamais eu de réelle contrepartie aux honoraires versés, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l’article 1184 ancien du code civil.’
Le 9 avril 2019 les sociétés IPANEMA et POSSIBLE ont saisi la cour d’appel de Paris sur renvoi après cassation.
Par arrêt en date du 9.01.2020 la cour d’appel saisi sur renvoi, a:
dit que la déclaration de saisine des sociétés IPANEMA et POSSIBLE était dépourvue d’effet dévolutif,
En conséquence,
dit que la cour d’appel n’était saisie d’aucun litige,
condamné solidairement les sociétés IPANEMA et POSSIBLE à payer à Monsieur [K] et à la société DM Consulting la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.
condamné solidairement les sociétés IPANEMA et POSSIBLE aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.
Par arrêt en date du 9.09.2021 la Cour de Cassation a cassé en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 9 janvier 2020, entre les parties, par la cour d’appel de Paris, remis l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyé devant la cour d’appel de Paris autrement composée.
Aux termes de leurs conclusions signifiées par voie électronique le 9.05.2022 les sociétés IPANEMA et POSSIBLE demandent à la cour:
d’INFIRMER le jugement rendu parle Tribunal de Commerce de Paris en date du 14 septembre 2015 en ce qu’il a :
– Débouté les sociétés IPANEMA et POSSIBLE de l’ensemble de leurs autres demandes;
– Condamné la SAS IPANEMA à payer à M. [H] [K] la somme de 189.877 € augmentée des intérêts depuis le 31 janvier 2014 et jusqu’à parfait paiement;
– Condamné la SAS POSSIBLE à payer à la SAS DMC Consulting la somme de 160.416,38 € à titre de dommages et intérêts en conséquence de la rupture anticipée du contrat de prestations de services et d’assistance en date du 1er août 2013;
– Condamné solidairement les sociétés IPANEMA et POSSIBLE à payer aux défendeurs la somme de 25.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du CPC et débouté pour le surplus;
– Condamné solidairement les sociétés IPANEMA et POSSIBLE aux dépens, dont ceux à recouvrer parle greffe, Iiquidés àla somme de 191,64 € dont 31,72 € de TVA ,
– Sauf à le confirmer en ce qu’il a jugé les demandeurs recevables en leur action et rejeté la fin de non recevoir tirée de la théorie de l’estoppel et débouté les défendeurs de leur demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive
STATUANT A NOUVEAU :
CONSTATER que Monsieur [H] [K] a délibérément dissimulé des informations essentielles au consentement de la société IPANEMA à la cession des actions des sociétés POSSIBLE et KAOGOUMII.
CONSTATER que si la société IPANEMA avait eu connaissance de ces informations elle n’aurait pas acquis les actions des sociétés POSSIBLE et IPANEMA, ou à tout le moins, elle ne les aurait pas acquises pour le prix arrêté entre les parties
CONSTATER que Monsieur [H] [K] a effectué diverses déclarations et délivré diverses garanties et notamment celle d’indemniser la société IPANEMA de l’intégralité du préjudice résultant de I’inexactitude de ses déclarations.
CONSTATER la survenance de préjudices entrant dans le champ d’application de la garantie d’actif et de passif souscrite par Monsieur [H] [K], et que lesdits préjudices ouvrent droit à indemnisation conformément aux termes de ladite garantie.
En conséquence :
ATITRE PRINCIPAL,
PRONONCER la nullité pour cause de dol de la cession des actions des sociétés POSSIBLE et KAOGOUMII consentie par Monsieur [H] [K] au profit de la société IPANEMA;
PRONONCER la nullité du contrat de prestation de services et d’assistance du 1er août 2013 conclu entre la société POSSIBLE et la société DM CONSULTING pour absence de cause et/ou indivisibilité des conventions;
Le tout avec les conséquences de droit concernant les restitutions.
CONDAMNER Monsieur [H] [K] à payer à la société IPANEMA la somme de 1.642.244,56 euros pour manquement à son obligation de négocier de bonne foi ;
A TITRE SUBSIDIAIRE, si la Cour devait ne pas prononcer la nullité,
CONDAMNER Monsieur [H] [K] à payer à la société IPANEMA la somme de 1.700.000 d’euros à titre de dommages et intérêts pour cause de dol ;
CONDAMNER Monsieur [H] [K] à payer à la société IPANEMA la somme de 1.000.000 d’euros en application dela garantie d’actif et de passif;
CONDAMNER Monsieur [H] [K] au paiement de la somme de 1.642.244,56 euros pour manquement à son obligation de négocier de bonne foi ;
PRONONCER la résolution du contrat de prestation de services et d’assistance du 1er août 2013 conclu entre la société POSSIBLE et la société DM CONSULTING au titre de l’indivisibilité des conventions;
CONDAMNER la société DM CONSULTING à rembourser à la société POSSIBLE la somme de 104.165 euros HT, à laquelle il conviendra d’ajouter la taxe sur la valeur ajoutée aux taux en vigueur correspondant aux 5 mensualités versées depuis le 1er août 2013;
A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE, si la Cour devait juger les actes de Monsieur [H] [K] comme non constitutifs d’un dol :
DIRE et JUGER que Monsieur [H] [K] a manqué à son obligation de négocier de bonne foi ;
CONDAMNER en conséquence Monsieur [H] [K] à payer à la société IPANEMA la somme de 1.642.244,56 euros à titre de dommages et intérêts;
CONDAMNER Monsieur [H] [K] à payer à la société IPANEMA la somme de 1.000.000 d’euros en application dela garantie d’actif et de passif;
PRONONCER la résolution du contrat de prestation de services et d’assistance du 1er août 2013 conclu entre la société POSSIBLE et la société DM CONSULTING pour mauvaise exécution;
CONDAMNER la société DM CONSULTING à rembourser à la société POSSIBLE la somme de 104.165 euros HT, à laquelle il conviendra d’ajouter la taxe sur la valeur ajoutée aux taux en vigueur correspondant aux 5 mensualités versées depuis le 1er août 2013;
EN TOUT ETAT DE CAUSE,
CONDAMNER solidairement Monsieur [H] [K] et la société DM CONSULTING au paiement de la somme de 60.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile;
Les CONDAMNER solidairement aux entiers dépens.
Aux termes de leurs conclusions signifiées par voie électronique le 24.01.2022, Monsieur [K] et la société DMC demandent à la cour de:
Débouter les sociétés IPANEMA et POSSIBLE de toutes leurs demandes ;
Par conséquent,
Confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 14 septembre 2015 ;
A titre subsidiaire, si l’annulation de la cession devait être prononcée
Désigner un expert aux fins de déterminer les prélèvements et distributions intervenus au bénéfice du cessionnaire depuis la cession, en déduire le montant des restitutions à opérer, donner à la Cour tous éléments lui permettant de déterminer le montant de la moins-value subie sur les actions restituées du fait de la gestion du cessionnaire, et en tout état de cause réserver toute restitution du prix de cession au résultat d’une telle expertise ;
A titre subsidiaire, si une responsabilité devait être retenue
Juger que toute condamnation à des dommages et intérêts ne pourrait excéder 100.000€, plus faible montant retenu par les demandeurs en première instance ;
En tout état de cause
Condamner solidairement les sociétés IPANEMA et POSSIBLE à payer aux concluants la somme de 50.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Condamner les sociétés IPANEMA et POSSIBLE aux entiers dépens.
Aux termes de ses conclusions signifiées par voie électronique le 15.04.2022 Monsieur [J] demande à la cour de:
IN LIMINE LITIS
– Infirmer le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Paris le 14 septembre 2015 en ce qu’il a dit l’intervention volontaire de Monsieur [X] [J] irrecevable et le recevant en ses demandes :
STATUANT A NOUVEAU
A titre principal
– Dire Monsieur [X] [J] recevable et bien-fondé en son intervention volontaire notamment en application des articles 325, 328 et 330 du Code de Procédure Civile
– Dire que l’intervention volontaire de Monsieur [J] se rattache par un lien suffisant aux prétentions originaires de la Société IPANEMA
– Dire que Monsieur [J] dispose d’un droit d’agir relativement à la prétention qu’il élève et qui tend au paiement du prix de cession par la Société IPANEMA en application de l’article 329 du Code de Procédure Civile
– Constater que la question portant sur le dol et l’évaluation des réparations en découlant est atteinte par la cassation et n’a pas été définitivement tranchée
– Dire que les demandes indemnitaires de Monsieur [J] n’ont pas été soumises aux Juges pour le cas où le dol venait à être constaté et qu’en tout état de cause leur sort dépend de l’action principale
– Déclarer recevable et bien-fondé Monsieur [X] [J] en son appel incident, en ses demandes, fins et conclusions au regard notamment des articles 624 et 625 du Code de procédure civile compte tenu de la cassation totale et de l’existence d’un lien d’indivisibilité et de dépendance nécessaire entre les chefs de demandes composant l’instance et les dispositions des arrêts cassés
A titre subsidiaire
– Dire que l’autorité de la chose jugée attachée à l’arrêt du 14 juin 2017 tel que rectifié le 5 juillet 2017 par la Cour d’appel de Paris est devenue irrévocable seulement en ce qu’elle a déclaré l’intervention et les demandes de Monsieur [J] recevables
– Dire que l’intervention de Monsieur [J] lui est définitivement acquise
En tout état de cause
– Débouter Monsieur [H] [K] et la Société DMC de toutes leurs demandes, fins et conclusions dirigées contre Monsieur [J] et en particulier celles du chef de l’irrecevabilité des prétentions formulées par Monsieur [J]
– Déclarer recevables les demandes formées par Monsieur [J]
Par conséquent et y faisant droit,
SUR LE FOND
– Confirmer le Jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la nullité de la cession pour cause de dol
STATUANT A NOUVEAU
A titre principal
Dire que la Société IPANEMA reste devoir à Monsieur [J] la somme de 10.067 € au titre du paiement différé de la cession d’action du 23 Juillet 2013 avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir et l’y condamner
Constater que Monsieur [X] [J] n’a pas participé aux négociations ayant abouti à la signature de la convention du 26 Juillet 2013
Dire que la Société IPANEMA a contracté en pleine connaissance de cause le 31 Juillet 2015 pour acquérir la totalité du capital social de KAOGOUMII alors que les informations constitutives selon elle d’un dol par réticence ainsi plus généralement que le vice affectant selon elle l’acte de cession du 26 Juillet 2013 lui étaient à cette date connus
Dire que ces faits impliquent et démontrent la volonté des Sociétés IPANEMA et POSSIBLE de contracter et de poursuivre l’acquisition des Sociétés cibles
Dire que les informations litigieuses qui auraient été dissimulées ou gardées sous silence par Monsieur [K] n’ont pas provoqué une erreur déterminante du consentement des Sociétés IPANEMA et POSSIBLE
A titre subsidiaire,
Si toutefois la Cour devait retenir l’existence d’un dol commis par Monsieur [H] [K]
Dire que la responsabilité de Monsieur [J] n’est pas recherchée et qu’aucune demande judiciaire n’est formulée par les Sociétés IPANEMA et POSSIBLE à l’encontre de Monsieur [X] [J]
Dire qu’aux termes de son dispositif la Société IPANEMA sollicite la nullité pour cause de dol de la cession d’actions des sociétés POSSIBLE et KAOGOUMII consentie par Monsieur [H] [K] et en tirer les conséquences de droit quant à l’étendue de la nullité en cas de prononcé et quant aux restitutions, en application de l’article 954 du Code de Procédure civile selon lequel la Cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif
Dire que les Sociétés IPANEMA et POSSIBLE auraient contracté mais à des conditions différentes
Dire au vu des faits de la cause que le vice du consentement invoqué par les sociétés IPANEMA et POSSIBLE n’a porté que sur l’évaluation du prix et ne saurait être sanctionné par la nullité mais par l’octroi de dommages et intérêts constituant en cause d’appel leur demande subsidiaire
Dire que la remise en état conduirait à des conséquences disproportionnées et ce alors que les Sociétés IPANEMA ET KAOGOUMII ont contracté postérieurement à l’engagement de leur action judiciaire et en connaissance du vice invoqué
Dire que le dol doit au cas de l’espèce être sanctionné par l’octroi de dommages et intérêts dont seul l’auteur peut être tenu débiteur
Par conséquent,
En cas de prononcé de la nullité de la cession des actions de Monsieur [K] : à savoir en cas de nullité partielle de la cession d’actions du 26 Juillet 2013
Condamner Monsieur [H] [K] à payer à Monsieur [J] la somme de 35.000 € en réparation de son préjudice moral
En cas de prononcé de la nullité totale de la cession d’actions du 26 Juillet 2013
Dire que Monsieur [X] [J] dont la responsabilité n’est pas recherchée n’a pas à subir les conséquences dommageables résultant du dol commis à son préjudice et dont seul son auteur doit répondre
Dire Monsieur [J] bien-fondé à engager la responsabilité de Monsieur [K] pour faute commise dans le cadre de son mandat et à solliciter la réparation de ses entiers préjudices
Constater l’existence des préjudices financier et moral subis par Monsieur [J]
Par voie de conséquence et dans cette hypothèse,
Condamner Monsieur [H] [K] à payer à Monsieur [X] [J] la somme de 286.667 € à titre de dommages et intérêts en réparation de ses préjudices financier, matériel et moral
En toute hypothèse
Condamner Monsieur [H] [K] à garantir Monsieur [J] de toutes les conséquences financières découlant de l’annulation de la convention de cession du 26 Juillet 2013 pour dol et en particulier à le garantir des condamnations prononcées à son encontre au profit des sociétés IPANEMA et POSSIBLE
Condamner la partie qui succombe à lui verser la somme de 15.000 € sur le fondement de l’article 700 du CPC et aux entiers dépens.
Aux termes de conclusions d’intervention volontaire signifiées le 15.04.2022 Monsieur [S] demande à la cour:
– de recevoir son intervention volontaire au soutien des prétentions des intimés
– de confirmer le jugement
– de condamner les sociétés IPANEMA et POSSIBLE à lui verser la somme de 8000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et de les condamner aux dépens.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l’intervention volontaire de Monsieur [S]
Monsieur [S] indique en page 4 de ses conclusions qu’il intervient volontairement à l’instance afin de défendre son honneur et sa considération, tout en oeuvrant pour la manifestation de la vérité et qu’en raison des accusations pénales portées contre lui il dispose d’un intérêt moral à soutenir les prétentions des défendeurs à la saisine pour la conservation de ses droits.
La société IPANEMA et la société POSSIBLE concluent au rejet de l’intervention volontaire de Monsieur [S] pour défaut d’intérêt à agir.
Sur ce
L’article 554 du code de procédure civile dispose que peuvent intervenir en cause d’appel dès lors qu’elles y ont intérêt les personnes qui n’ont été ni parties, ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité.
L’article 330 dispose dans son premier alinéa que l’intervention est accessoire lorsqu’elle appuie les prétentions d’une partie. Elle est recevable si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie.
L’article 31 du code de procédure civile dispose que l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
En l’espèce aucune demande n’est formulée contre Monsieur [S] qui n’a jamais été associé de la société POSSIBLE ou de la société KAOGOUMII de telle sorte que Monsieur [S] n’a aucun intérêt pécuniaire à intervenir dans le présent litige.
Par ailleurs la décision rendue n’est pas susceptible d’affecter les droits de Monsieur [S]: sa responsabilité n’est pas recherchée et aucune demande ne peut être articulée par lui contre les autres parties à l’instance en relation avec la cession des parts sociales des sociétés POSSIBLE et KAOGOUMII.
Enfin le seul intérêt moral à voir la position de l’une des parties retenue par la cour ne caractérise pas un intérêt à agir.
En conséquence il convient de déclarer irrecevable l’intervention volontaire de Monsieur [S].
Sur l’intervention volontaire de Monsieur [J]
Le tribunal de commerce a rejeté l’intervention volontaire de Monsieur [J].
Monsieur [J] expose qu’il a un intérêt évident et légitime à intervenir à la procédure, dans la mesure où il va être directement concerné par la solution du litige puisque si la convention de cession était annulée cela pourrait avoir pour effet d’entrainer la restitution du prix qu’il a perçu au titre de la vente de ses actions dans KAOGOUMII et si la convention de cession n’est pas annulée il est légitime à demander le solde du prix de ses actions cédées qui n’a jamais été réglé.
Les sociétés IPANEMA et POSSIBLE concluent à l’infirmation du jugement mais ne développent aucune demande spécifique concernant l’intervention volontaire de Monsieur [J].
Monsieur [K] conclut à la confirmation du jugement sans cependant développer de moyen concernant l’intervention volontaire de Monsieur [J].
Sur ce:
L’article 325 du code de procédure civile dispose que l’intervention n’est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant.
Or en l’espèce la décision qui va être rendue va avoir une incidence directe sur les obligations à restitution des sommes perçues par Monsieur [J] si la cession de KAOGOUMII est annulée et sur les droits de Monsieur [J] à demander le complément de son prix de vente si la cession n’est pas annulée.
Il s’ensuit que les prétentions de Monsieur [J] se rattachent aux prétentions des parties par un lien suffisant et qu’en outre Monsieur [J] a un intérêt à cette intervention volontaire.
Celle ci sera déclarée recevable et le jugement infirmé sur ce point.
Sur le dol
Les sociétés IPANEMA et POSSIBLE soutiennent que Monsieur [H]
[K] a commis un dol lors de la cession des actions des sociétés POSSIBLE et
KAOGOUMII:
-en faisant croire à ses futurs acquéreurs que les sociétés cibles exerçaient une activité d’agence de publicité détenant un savoir-faire spécifique en la matière et une clientèle attachée alors qu’il ne s’agissait en réalité que de simples agences dites « spécialisées ” qui intervenaient uniquement dans la réalisation de prestations techniques,
– en cachant l’état de dépendance économique à laquelle étaient soumises les sociétés cibles vis-à-vis de l’Agence ASAP,
– et enfin en dissimulant la relation qu’il entretenait avec Mme [I], associée fondatrice d’ASAP.
Elles exposent que pour organiser sa tromperie, Monsieur [H] [K] a usé de diverses man’uvres, qu’il a ainsi présenté de fausses informations, notamment au travers du Mémorandum d’information et lors des discussions entretenues avec les acquéreurs, tout en interdisant à l’acquéreur d’interroger le personnel comme stipulé dans le mémorandum ce qui a mis la société IPANEMA dans l’impossibilité de vérifier la réalité ou la fausseté de la présentation de la société POSSIBLE, et qu’il a omis certaines informations couvrant sa dissimulation par des mensonges appuyés par des écrits et des attestations de tiers, qu’il a volontairement laissé croire à la société IPANEMA qu’il détenait un savoir-faire spécifique dans la recherche et la création d’identités et de codes sonores, alors même que ce savoir-faire était détenu par une autre entité, non partie à la cession, la société ASAP.
Elles soutiennent que cette situation de dépendance économique est démontrée par les pièces communiquées par les demanderesses faisant ressortir un chiffre d’affaires direct et indirect avec l’agence ASAP de l’ordre de 85% en 2013 et 52% fin 2016, étant précisé d’une part qu’entre 2014 et 2021, le chiffre d’affaires réalisé avec les clients de l’agence ASAP a chuté de 55% et d’autre part qu’une grosse partie du chiffre d’affaires était réalisée par des contrats en cours portant sur les droits musicaux.
Elles précisent qu’à la date de la cession, la société IPANEMA avait pour seule activité celle de presse et d’édition et n’avait donc pas de compétence particulière concernant le domaine de la publicité, ce pour quoi elle souhaitait acquérir une agence de publicité dans le cadre de son développement externe.
Elles concluent qu’en dissimulant I’état de dépendance économique des sociétés cibles vis-à-vis de l’agence ASAP, situation renforcée par la liaison existante entre le dirigeant des premières et l’associée fondatrice de la seconde, Monsieur [H] [K] a commis un dol par réticence, ayant induit en erreur la société IPANEMA quant à l’activité des sociétés cédées, peu importe l’absence de diligence de celle-ci.
Monsieur [K] expose que contrairement à ce qui est soutenu par les appelantes il existe une relation directe entre POSSIBLE et les annonceurs.
Il expose que POSSIBLE a développé un véritable savoir-faire dans la création et la définition de chartes sonores basées sur des titres connus pour aider à l’identification par le grand public du message publicitaire du client et que ce savoir faire repose sur Monsieur [K] qui a longtemps travaillé dans l’industrie musicale, que ce positionnement constitue la plus-value de POSSIBLE et sa singularité par rapport aux structures intégrées au sein des agences de publicité ou aux simples exécutants sous- traitants, qu’il s’agit donc bien d’une activité de création d’identité sonore, que s’agissant de KAOGOUMII elle a essentiellement une activité de post production et entretient également des relations directes avec les annonceurs qui sont en conséquence ses clients, qu’elle est susceptible de compléter l’activité de POSSIBLE.
Il expose qu’à la fin de l’année 2012, IPANEMA a pris l’initiative de lui proposer de lui racheter ses deux sociétés POSSIBLE et KAOGOUMII, que cette logique de développement par le redéploiement de ses activités est cohérente avec l’activité première d’IPANEMA et que celle ci s’est entourée de plusieurs conseils, qu’un audit complet a été réalisé par KPMG, que le contrat de cessions a été signé et a été accompagné d’une garantie d’actif et de passif et d’un contrat de prestation de services avec Monsieur [K] pour accompagner la transition.
Il expose que de nombreux documents ont été transmis, qu’un rapport a été établi par l’auditeur KPMG le 4 avril 2013 missionné par IPANEMA, que KPMG a eu accès aux contrats client, que cet audit met en lumière le client unique de KAOGOUMII et la faible clientèle de POSSIBLE (7 clients principaux), ce qui détruit dans les faits l’idée de l’acquisition d’un portefeuille de clientèle.
Il fait valoir qu’aucune garantie d’actif ni aucune garantie de chiffre d’affaires n’a jamais été demandée quant à la constitution de la clientèle et/ou son maintien, qu’il est donc particulièrement inexact de prétendre désormais que l’opération avait pour objet l’acquisition d’un portefeuille de clientèle.
Il indique que non seulement le dossier des demandeurs à la saisine manque totalement en fait mais que les seuls éléments matériels ayant pu conduire le premier juge d’appel à retenir un grief à l’encontre des concluants repose sur des attestations de témoins dont il est désormais démontré qu’elles ne peuvent revêtir aucune valeur probante au regard des sommations interpellatives qui ont été effectuées et des déclarations qui ont été alors faites qui réduisent la portée des attestations produites.
Il expose que les demandeurs ont varié quant à la détermination de l’erreur causée par le dol en exposant d’abord qu’ils avaient acquis les sociétés dans le but de reprendre un portefeuille de clientèle, pour ensuite indiquer qu’il avait commis un dol en leur faisant croire que les sociétés cibles exerçaient une activité d’agence de publicité pour terminer en soutenant un état caché de dépendance économique de POSSIBLE.
Il conteste que les sociétés aient été cédées comme des agences de publicité indiquant que la lettre d’intention d’IPANEMA indique, pour expliquer son intérêt dans le rachat, que la société POSSIBLE a développé un savoir-faire dans l’achat et la négociation de droits musicaux ainsi que dans le conseil en communication et la création de jingles publicitaires et qu’en conséquence IPANEMA ne peut soutenir aujourd’hui avoir eu l’intention d’acquérir une agence de publicité, qu’enfin dès la lettre d’intention IPANEMA a proposé un prix d’achat de 5 millions d’euros.
Il conteste la dépendance économique vis à vis de la société ASAP exposant que KPMG a constaté lors de son audit que le chiffre d’afffaire était sécurisé à hauteur de 52% par les revenus des contrats de revente des droits d’oeuvres musicales auprès de 7 grands groupes et que les autres prestations sont constituées par des travaux auprès de 6 clients majeurs, qu’au vu de la pièce 34 établie par l’expert-comptable chargé de documenter la data room, il apparaît que seuls 6 clients de POSSIBLE, sur les 26 désignés, ont pu opérer simultanément sur des projets avec ASAP, que IPANEMA ne rapporte d’ailleurs aucune preuve d’une prétendue dépendance cachée, que le chiffre d’affaires post cession s’est maintenu, étant précisé qu’IPANEMA était pleinement informée de ce que la clientèle n’etait pas acquise ‘ pour toujours’, mais supposait un véritable dynamisme commercial, avec un creux annoncé dès 2013 et a fortiori en 2014, que le taux de 85% est littéralement fantaisiste et n’a jamais été étayé car la documentation produite en data room sous couvert de l’expert-comptable puis auditée par KPMG révèle que jamais un tel pourcentage d’activité n’a été facturé par POSSIBLE avec et/ou en présence d’ASAP.
Il indique que l’agence ASAP a maintenu et maintient la relation contractuelle avec POSSIBLE et que l’activité de cette dernière n’est pas uniquement liée à la relation avec ASAP, mais que le renouvellement de son portefeuille client est constant, que POSSIBLE poursuit son activité créative en matière d’identité sonore, qu’IPANEMA développe elle-même son activité en matière de création d’identité sonore grâce au savoir-faire des sociétés acquises dans le cadre de son groupe.
Il indique que les demandes de dommages et intérêts sont fantaisistes et visent à la réparation d’un même manquement et d’un même dommage, excédant même le montant de la cession après déduction de la trésorerie et souligne qu’il n’est plus invoqué aucun dol pour ce qui concerne KAOGOUMII alors même qu’il est demandé l’annulation de la cession des deux sociétés sans distinction.
Monsieur [J] fait valoir qu’il n’a pas participé aux négociations.
Il expose que la société IPANEMA avait connaissance du lien de dépendance économique de la société KAOGOUMII du fait que celle-ci ne possédait qu’un seul client, la société OLIVE FILMS, et que cette relation commerciale ne faisait pas l’objet d’un contrat spécifique ce qui représentait un risque important en cas de perte ou de faillite du client expressément indiqué par KPMG, que KAOGOUMII était donc fortement dépendante du niveau d’activité de son client principal.
Il fait valoir que la société OLIVE FILMS était en relation directe avec la Société KAOGOUMII et non dirigé par l’agence ASAP.
S’agissant de la société POSSIBLE il indique que l’agence ASAP au sein de laquelle Madame [I] est décisionnaire a maintenu ses relations avec les Sociétés cédées postérieurement à la cession et a continué à confier des contrats à la Société POSSIBLE jusqu’à ce jour.
Il fait observer que la dénonciation de la cession d’actions par les Sociétés IPANEMA et POSSIBLE dérive de la perte de LCL alors que cette perte est liée au jeu du marché.
Il précise que IPANEMA lui a racheté ses actions KAOGOUMII postérieurement à l’engagement de l’action pour dol au prix de 460,66 euros l’action et a donc confirmé sa volonté de continuer à acquérir les actions litigieuses.
Sur ce
L’article 1116 ancien du code civil dispose dans son premier alinéa que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manoeuvres l’autre partie n’aurait pas contracté.
La caractérisation d’un dol suppose la triple preuve de la matérialité des manoeuvres dolosives,de la volonté de leur auteur de tromper le consentement de son co-contractant et du caractère déterminant de l’erreur provoquée.
Il ressort par ailleurs de la jurisprudence au visa de l’ancien article 1116, que le dol peut être constitué par le silence d’une partie dissimulant intentionnellement à son cocontractant un fait qui, s’il avait été connu de lui, l’aurait empêché de contracter.
La cession des sociétés POSSIBLE et KAOGOUMII s’est effectuée sur la base de plusieurs documents s’agissant principalement:
– d’un mémorandum établi par la société XV FINANCE à la demande des cédantes
– d’une lettre d’intention établie par IPANEMA,
– d’un rapport de KPMG établie à la demande d’IPANEMA.
Le mémorandum a été établi dans le but d’informer les cessionnaires potentiels et contient diverses informations confidentielles concernant les principaux clients des deux sociétés et leurs résultats comptables.
Si il débute en indiquant dans le sommaire au titre du paragraphe 2 ‘synthèse’ que les sociétés sont spécialisées dans la production et la post-production d’oeuvres musicales, audiovisuelles et cinématographiques essentiellement destinées à la publication et la communication des grandes entreprises. Les équipes des sociétés produisent et post-produisent des spots publicitaires radiophoniques et télévisés. Les clients sont des grands groupes français et internationaux ou des agences de publicité, il est précisé dans le chapitre 1.3 ‘présentation des activités’ que les sociétés sont spécialisées dans la production sonore (musicale et vocale) et la post production audiovisuelle et digitale, essentiellement pour la publicité et la communication des grandes entreprises et que POSSIBLE regroupe 4 activités autour des domaines sonores du Sound Design:
1 la recherche et la création de l’identité et code sonore pour les marques à partir d’oeuvres existantes et de création originales (par un artiste ou en interne). Les codes sonores sont ensuite adaptés et appliqués aux différents supports de diffusion
2 dans le cadre de cette activité la société est amenée à acquérir et revendre des droits d’oeuvre musicales. Cette sous activité de gestion des droits est à la fois constitutive d’un positionnement original par rapport à la concurrence et génératrice de fortes marges.
3 l’arrangement de musiques de publicité déjà créées. Le cas de ‘rafraichissement’ de code sonore historique, exemple de DIM.
4 production d’artistes et signature de licence avec des maisons de disque pour l’exploitation de musique. Ainsi la société s’est constituée un catalogue d’édition sous la marque ‘cherry on the cake’.
S’agissant de KAOGOUMII il est indiqué que KAOGOUMII vient compléter l’offre de POSSIBLE en prenant en charge l’intégralité de la post-production audiovisuelle de films publicitaires.
Ainsi la société réalise pour le compte de ses clients:
i- le dérushage
ii- le montage des images selectionnées
iii- les trucages
iv- l’étalonage son/image et la pose du son sur les images
v- la mise aux normes et aux formats digitaux (tablettes, téléphones, etc…)
vi- la remise des copies aux antennes/diffuseurs
En amont des opérations de post-production, KAOGOUMII réalise en outre les story board interactifs des publicités de ses clients.
Aux termes d’une lettre d’intention en date du 11.03.2013 IPANEMA a effectué une offre d’acquisition pour les sociétés POSSIBLE et KAOGOUMII dont elle résume l’activité de la façon suivante:
– la société POSSIBLE a développé un savoir faire dans l’achat et la négociation de droits musicaux ainsi que dans le conseil en communication et la création de jingles publicitaires
– la société KAOGOUMII fonctionne en tandem avec la société POSSIBLE et a développé depuis sa création en 2005, un savoir faire dans la production, la post production et le graphisme dans le milieu de l’audiovisuel et plus particulièrement des films publicitaires.
(…)
Nous souhaitons à ce jour enrichir l’offre de la société IPANEMA avec le savoir-faire développé par les sociétés POSSIBLE et KAOGOUMII en matière de conseil et de production de contenus dans le milieu de l’audiovisuel.
Enfin le rapport KPMG en date du 4 avril 2013 indique en page 9:
L’activité de POSSIBLE SAS est constituée à 52% par les revenus des contrats de revente de droits d’oeuvres musicales auprès de 7 grands groupes (…).
Les autres prestations de POSSIBLE SAS sont principalement constituées de travaux de post productions auprès des 6 clients majeurs et quelques clients autres dont SAMSUNG; Les prestations hors contrat font l’objet de commandes et de facturation au cas par cas par les équipes opérationnelles qui gèrent la relation client en direct.
(…)
L’activité de KAOGOUMII est constituée de prestations de post production audiovisuelle de films publicitaires réalisées auprès d’un client majeur, Olive films.
Ainsi il résulte du mémorandum que ni POSSIBLE, ni KAOGOUMII n’ont été présentés comme des agences de publicité contrairement à ce que soutiennent les appelantes.
IPANEMA avait parfaitement conscience de l’activité de la société POSSIBLE , ainsi qu’il ressort de sa lettre d’intention, à savoir que POSSIBLE intervenait dans le domaine de la création audio et de la production d’enregistrements, et les informations portées à sa connaissance ont été confirmées par le rapport KPMG.
Quand à KAOGOUMII le mémorandum indique que la société intervient en amont dans la réalisation des story board interactifs des publicités de ses clients, mais il ressort tant de la lettre d’intention que du rapport KPMG que IPANEMA était informée que l’activité essentielle de KAOGOUMII était une activité de post production pour un client majeur Olive Films.
Par ailleurs l’examen des contrats signés par la société POSSIBLE, par KPMG dans le cadre de son rapport d’audit préalable à la cession, établit l’absence de tout contrat de création publicitaire passé entre la société POSSIBLE et les annonceurs puisque KPMG a constaté deux activités: une activité de revente de droits d’oeuvres musicales, qui faisait l’objet de contrats, et des travaux de post-production, qui ne faisaient pas l’objet de contrats.
En conséquence il n’existe aucune information trompeuse concernant les activités exercées par les deux sociétés et la société IPANEMA est mal fondée à soutenir que les sociétés cibles ont été présentées comme exerçant une activité d’agence de publicité.
S’agissant de la clientèle de POSSIBLE
Concernant POSSIBLE il ressort du rapport KPMG que plus de la moitié du chiffre d’affaire est réalisée au titre de la gestion des droits d’oeuvre musicale, soit une gestion contractuelle, financière, et administrative qui intervient après que la création audio a été réalisée pour mettre en oeuvre celle ci et permettre son utilisation pendant plusieurs années, soit le temps nécessaire pour ancrer l’identification sonore d’une marque ou d’une entreprise.
Cet aspect de l’activité de POSSIBLE qui est indépendante de toute activité de création ou de production audio, amène la société à facturer directement aux clients ses prestations de gestion de droits audiovisuels mais le chiffre d’affaire au titre de la gestion des droits est lié au fait que la société a, en amont, effectué le travail soit de création et de production, soit uniquement de production de l’identité audio de la marque ou de l’entreprise pour laquelle est élaborée la campagne de publicité. En effet aucun document versé aux débats n’établit l’intervention de POSSIBLE pour gérer des droits audio pour des créations sonores effectuées par d’autres sociétés.
En d’autres termes POSSIBLE n’est pas seulement un prestataire de gestion de droits audio, intervenant au cas par cas, mais cet aspect de son activité est le prolongement de sa première activité s’agissant de la création et/ou production d’identités audio.
Dans le cadre de cette activité de gestion de droits, le tableau des contrats de revente de droits qui figure dans le rapport KPMG fait figurer par ordre d’importance dans le chiffre d’affaire réalisé sur cette seule activité les sociétés suivantes: MMA, MAAF, FONCIA, PANZANI, LCL, BPI, Sofinco.
Par ailleurs le rapport KPMG indique que les autres prestations sont principalement constituées de travaux de post-production auprès des 6 clients majeurs et quelques clients autres, les 6 clients majeurs faisant à l’évidence référence aux 6 premiers clients de l’activité de revente de droits soit MMA, MAAF, FONCIA, PANZANI, LCL, BPI.
Or il ressort des éléments versés aux débats que les campagnes de publicité de MMA, MAAF, PANZANI, LCL, FONCIA et SOFINCO ont été organisées par l’agence ASAP qui était antérieurement l’AGENCE VIRTUELLE qui est également la créatrice des campagnes CREDIT AGRICOLE et GALERIES LAFAYETTE:
– La pièce 54 qui est une page des echos.fr du 18.01.2005 présente l’Agence Virtuelle créée par [V] [G] et [L] [I] en indiquant: ‘créée il y a 10 ans l’agence qui gère la publicité des Galeries Lafayette, de MAAF et MMA a fait le pari réussi de ne travailler qu’avec des créateurs’ précisant que l’agence intervient aussi pour le Crédit Agricole.
– La pièce 55 qui est un article en date du 28.02.2008 présente l’agence ASAP qui est le nouveau nom de l’Agence Virtuelle et rappelle les campagnes les plus marquantes de celle ci: GALERIES LAFAYETTE, MMA, MAAF, CREDIT AGRICOLE.
– La pièce 72 des appelants rapporte la preuve que la campagne LCL a été créée dans son concept par l’agence ASAP.
– Enfin les pièces 24 et 36 des appelants établissent que la campagne de PANZANI est une campagne de l’agence ASAP, comme la campagne SOFINCO et la campagne FONCIA (la pièce 36 est la présentation par l’agence ASAP elle-même de son mode de fonctionnement et de ses principaux clients).
Quel que soit l’apport de POSSIBLE dans le processus de création de l’identité sonore desdites marques, à savoir création et production audio ou seulement production audio, l’intervention de POSSIBLE s’est faite par l’intermédiaire de l’agence de publicité ASAP qui était en charge de la conception de la campagne incluant l’identité sonore, qu’elle a sous traitée à la société POSSIBLE.
La facturation directe entre POSSIBLE et les annonceurs s’explique par le fonctionnement de l’AGENCE VIRTUELLE comme de l’agence ASAP qui a pris sa suite décrite:
-dans le document constituant la pièce 54 des appelants s’agissant d’un article de presse, par les fondateurs de l’agence: des structures hiérarchiques courtes, une logistique réduite au minimum via l’externalisation de l’ensemble des fonctions de services sur des partenaires indépendants. (…) Le principe est d’assembler librement des compétences et des talents extérieurs le temps d’un projet.
– dans le document constituant la pièce 36 des appelants s’agissant de la fiche de présentation de l’agence ASAP: on se fait rémunérer sur nos idées et souvent avec des royalties.Nous ne prenons aucune commission officielle ou officieuse sur les frais techniques qui sont facturés directement du prestataire à l’annonceur sans aucune intermédiation de l’Agence qui limite donc sa facturation à ses seules idées.
Dans le cadre d’une campagne de publicité l’annonceur s’adresse à une agence de publicité qui effectue le travail de création, dans le cas présent l’agence ASAP, et cette agence de publicité soit dispose d’équipes internes pour prendre en charge les différents aspects de ladite campagne, soit s’adresse à des prestataires pour réaliser certaines tâches spécifiques: création visuelle, création sonore, production visuelle, production audio, adaptation aux différents supports, gestion des droits, diffusion. En d’autres termes l’agence de publicité est le maître d’oeuvre qui en tant que connaisseur de l’environnement professionnel de la publicité choisit à quel prestataire s’adresser.
En l’espèce concernant POSSIBLE, en 2011, 6 des 7 clients de l’activité de revente des droits d’oeuvres musicales représentant 52% du chiffre d’affaires étaient des clients dont la campagne de publicité avait été créée par l’agence ASAP.
Et 5 des 6 clients de l’activité de post production représentant 48% du chiffre d’affaires étaient des clients dont la campagne de publicité avait été créée par l’agence ASAP.
Il en ressort ainsi que l’agence ASAP était un partenaire essentiel de la société POSSIBLE.
Or les éléments communiqués lors du processus de négociation de la cession litigieuse ne pouvaient permettre de comprendre l’apport essentiel de l’agence ASAP dans le chiffre d’affaires de la société POSSIBLE puisque comme il a été indiqué, après la création de l’identité sonore dans le cadre de la première campagne de publicité les relations professionnelles constituées principalement de gestion de droit à hauteur de 52% étaient gérées en direct entre les clients et POSSIBLE, sans mention que la mise en relation s’était faite à travers ASAP.
Il y a lieu de souligner que KPMG a constaté que le chiffre d’affaires de POSSIBLE était concentré sur 7 clients représentant 99% des revenus dont 6 s’agissant de clients ayant confié leur campagne de publicité à l’agence ASAP.
Aucun élément du mémorandum n’attire l’attention des cessionnaires éventuels sur cette relation de dépendance entre les deux sociétés et les éléments communiqués au cessionnaire ne permettaient pas d’établir ce lien essentiel pour la pérennité de l’activité de la société POSSIBLE.
Or cette information était cruciale pour appréhender l’indépendance et la réputation de la société dans le milieu de la publicité et donc sa capacité à trouver de nouveaux clients. En d’autres termes le fait que POSSIBLE intervienne principalement pour les clients de l’agence ASAP, sauf s’agissant de DIM et de SAMSUNG, ou que POSSIBLE intervienne auprès de différents clients annonceurs à la demande de différentes agences de publicité amène à porter un regard très différent sur les capacités de la société à maintenir et développer son activité dans l’avenir: la dépendance à l’égard d’un client majeur lie le maintien et le développement de l’activité à la permanence de la relation que la cession met forcément en difficulté au regard du caractère personnel des relations alors que l’intervention auprès de plusieurs agences de publicité démontre un référencement de la compétence technique et ne lie pas la relation professionnelle à la relation personnelle mais à la compétence technique, qu’il conviendra alors de maintenir.
A ce titre dans le mémorandum remis aux éventuels cessionnaires en page 13 POSSIBLE fait état de sa notoriété sur ses marchés qui lui amène un flux naturel et régulier de nouveaux clients en complète contradiction avec la réalité d’une relation passant quasi uniquement par le biais de la société ASAP.
Cette dépendance avec l’agence ASAP a été découverte par IPANEMA lorsqu’elle a rencontré les quelques salariés de POSSIBLE ainsi qu’en rapportent la preuve les attestations versées aux débats de Messieurs [A], [P], [B], [S] et [J] qui ne sont pas utilement remises en cause par les sommations interpellatives qui ont été ensuite mises en oeuvre.
Par ailleurs le caractère personnel de la relation l’était d’autant plus que Mme [I] l’une des deux associés de l’agence ASAP est la compagne de Monsieur [K], élément qui avait été également passé sous silence et que IPANEMA a découvert après la cession, ainsi qu’en rapportent la preuve les mêmes attestations.
Monsieur [K] fait valoir que le partenariat s’est poursuivi avec l’agence ASAP mais cet élément qui n’est pas documenté importe peu dans la mesure où le dol s’apprécie au jour de la conclusion du contrat et les éléments postérieurs à celui ci à savoir l’évolution économique de la société ne sauraient régulariser a posteriori la faute commise par l’un des cocontractants lors de la formation du contrat.
Il en est de même s’agissant de l’évolution de la société POSSIBLE, du développement de son activité, du renouvellement de son portefeuille, qui relèvent du travail effectué par la cessionnaire après la cession, mais ne sauraient régulariser le vice du consentement découlant du comportement du vendeur.
En n’informant pas le cessionnaire que l’essentiel du chiffre d’affaires de la société à court et moyen termes était lié à sa relation particulière avec l’agence ASAP Monsieur [K] a effectué une présentation volontairement fallacieuse de sa société.
Cette présentation fallacieuse a eu une incidence sur l’analyse de la réelle rentabilité à moyen terme de la société et a eu des conséquences sinon sur l’achat de la société en tout cas sur le prix de cession au regard de la fragilité des relations professionnelles induite par la cession.
La dissimulation de ces deux informations, la dépendance à l’égard de l’agence ASAP et les liens personnels le liant à Mme [I], doit être qualifiée d’omission dolosive dès lors d’une part que Monsieur [K] ne pouvait ignorer l’importance de ces deux informations pour le maintien et le développement de l’activité de la société POSSIBLE, au regard du poids majeur des clients orientés vers elle par l’agence ASAP dans son chiffre d’affaires, ni que, par la vente à IPANEMA de la société, le lien étroit reliant ASAP à POSSIBLE du fait de la relation personnelle existant entre les deux dirigeants disparaissait avec le risque que la société ASAP s’adresse à d’autres prestataires pour les identités sonores de ses clients et que d’autre part, du fait de l’importance de ces éléments qui étaient de nature à affecter les résultats et les perspectives des sociétés cédées, le silence gardé par M. [K] était nécessairement intentionnel.
S’agissant de la clientèle de la société KAOGOUMII
Le mémorandum indique que la société OLIVE FILMS représente en 2011 79% du chiffre d’affaires.
La dépendance à un seul client est donc clairement indiquée et la fragilité de l’activité est relevée par KPMG qui précise que la relation commerciale ne fait pas l’objet d’un contrat spécifique ce qui représente un risque important en cas de perte ou de faillite du client en soulignant que OLIVE FILMS représente 98% du chiffre d’affaires de KAOGOUMII.
Les relations entre POSSIBLE et KAOGOUMII étaient en outre parfaitement connues puisqu’il est indiqué dans le mémorandum que les activités de KAOGUMII viennent compléter celles de POSSIBLE en investissant dans les domaines de la post-production.
En conséquence la société IPANEMA était consciente, lors de la vente, de la dépendance économique de la société KAOGUMII.
Monsieur [J] dans son attestation indique que la société OLIVE FILMS est une société de production avec laquelle [L] [I] avait l’habitude de travailler.
Cependant OLIVE FILMS était une société indépendante. Il n’est pas établi que son sous traitant, s’agissant de KAOGOUMII, lui ait été imposé par l’agence ASAP dans le cadre de la prestation effectuée pour le compte de celle ci, de telle sorte que le fait de ne pas avoir porté à la connaissance d’IPANEMA que OLIVE FILMS était une société de production travaillant avec ASAP ne constitue pas une omission dolosive.
Il convient donc de débouter la société IPANEMA de sa demande de voir retenu le dol concernant la cession des parts sociales de KAOGOUMII.
Sur les conséquences du dol concernant la cession de POSSIBLE
Les appelantes demandent au principal la nullité de la cession des actions et à titre subsidiaire l’allocation de dommages et intérêts si compte tenu des circonstances et notamment du délai écoulé depuis l’assignation délivrée par les concluantes, la Cour devait ne pas prononcer la nullité de la cession en faisant valoir que le chiffre d’affaires réalisé avec les clients d’ASAP a chuté de plus de 50% entre 2014 et 2021 et en concluant que le prix d’acquisition des deux sociétés n’aurait pas dû excéder 3.300.000 euros. Elles demandent donc 1.700.000 euros en faisant valoir que leurs demandes ne sont pas contraires à la jurisprudence puisque, en sollicitant la restitution de l’excédent de prix que la société IPANEMA a versé compte tenu de la réticence dolosive du cédant, elles ne font que solliciter la réparation de ‘la perte de chance d’avoir pu contracter à d’autres conditions plus avantageuses’.
Monsieur [K] réplique que le préjudice est une perte de chance d’avoir pu contracter à des conditions plus avantageuses, que la perte de chance doit être démontrée, puis mesurée à la chance perdue et ne doit pas être confondue avec – pas plus qu’elle ne peut y être égale – les conditions plus avantageuses souhaitées par celui qui s’en prétend victime car elle ne peut, par définition être l’égal de l’avantage qu’aurait procuré cette chance si elle s’était réalisée .
Il considère que IPANEMA se contredit lorsqu’elle sollicite la nullité du contrat et en même temps l’allocation de dommages et intérêts.
Il indique que le prix réel est de 3,7 millions d’euros dans la mesure où, au regard de la trésorerie dont disposaient les deux sociétés, trois jours après la cession une somme totale de 1.340.000 euros a été remontée, en dividendes et compte courant à IPANEME, et que dans l’hypothèse où la nullité pour dol serait retenue, POSSIBLE serait donc bien fondée à solliciter la restitution par IPANEMA, a minima, de cette somme.
Il ajoute qu’il conviendra plus généralement d’ordonner la restitution de toute distribution intervenue ou transfert de sommes au profit d’IPANEMA depuis le mois d’août 2013 dès lors qu’IPANEMA affirme avoir découvert le vice de la chose achetée à cette date, qu’elle est en effet, en cas d’annulation, possesseur de mauvaise foi à compter de ladite date, ce qui entraîne obligation de restitution intégrale.
Il indique que le chiffrage des préjudices demandés ne repose sur aucun calcul ni aucune indemnité, que les appelantes réclament trois indemnisations en visant le même manquement et le même dommage et formulent une demande de 4,4 millions d’euros pour une société acquise 2,5 millions d’euros, et qu’il incombera à la Cour de nommer un expert pour déterminer le montant de la moins-value subie sur la valeur des actions restituées du fait de la gestion d’IPANEMA et plus généralement pour déterminer le montant de toute restitution en fonction des sommes prises par IPANEMA, et de réserver toute restitution du prix de cession au résultat d’une telle expertise.
Sur ce
Compte tenu des délais qui se sont écoulés depuis la cession intervenue en aout 2013, soit il y a 9 ans, la nullité de la cession et la remise des parties dans l’état où elles se trouvaient se heurte à des difficultés importantes au regard du fait que la société POSSIBLE a poursuivi son activité et a été intégrée dans la société IPANEMA. La remise en état des parties dans l’état dans lequel elles se trouvaient avant la cession imposerait de faire des comptes complexes pour différencier les revenus perçus après la cession relevant des nouveaux clients de la société POSSIBLE et les revenus relevant des anciens clients et différencier dans le même sens les charges, ce qui s’agissant des charges de personnel ou d’intermittent s’avère compliqué.
La société IPANEMA conscient de cette difficulté demande en conséquence l’allocation de dommages et intérêts pour indemniser la perte de chance d’avoir pu négocier le prix d’achat de la société POSSIBLE à un niveau moindre que celui payé au regard des informations qui lui ont été cachées.
Il convient en conséquence de fixer le préjudice subi par la société IPANEMA au titre de la réticence dolosive dont elle a été victime.
S’agissant de la perte de chance d’avoir pu négocier un prix de vente moindre
Les éléments retenus pour qualifier la réticence dolosive démontrent que si IPANEMA en avait été informée elle aurait été amenée à prendre conscience que la dépendance de la société à l’égard de l’agence ASAP et les liens personnels liant Monsieur [K] et Mme [I] étaient de nature à influer sur le développement de la société acquise et sur la rentabilité à moyen terme de la société dont elle poursuivait l’acquisition, ce qui aurait entrainé une discussion du prix de cession de la société POSSIBLE.
Il convient d’évaluer à 80% la perte de chance de ne pas avoir pu négocier le prix de vente de la société POSSIBLE.
Sur le prix de vente
La société POSSIBLE a été cédée pour la somme de 3.490.000 euros.
Contrairement à ce que soutient l’intimé la trésorerie est un des éléments du prix de vente comme ayant été mis en avant dans le mémorandum au soutien de la présentation de la société et dans la lettre d’intention d’IPANEMA qui indique: le prix global de l’acquisition sera de 5 millions d’euros en princpal, ce prix ayant été fixé en prenant en compte la création récente des sociétés, l’existence d’une trésorerie de l’ordre de 1,2 millions d’euros.
Il s’ensuit que rien ne justifie de déduire le montant de la trésorerie du prix de vente versé.
La société POSSIBLE a souhaité sécuriser le processus de transmission de la clientèle de la société et, aux termes de sa lettre d’intention, a fait de la signature d’un contrat de travail avec Monsieur [K] jusqu’au 30.06.2014, pour un montant de 100.000 euros brut annuel, une condition essentielle de son projet d’investissement.
La lettre d’intention prévoit de sanctionner la violation de cette obligation par Monsieur [K] par le versement d’une indemnité de 500.000 euros outre la privation du prix de vente différé à hauteur de 1.000.000 euros.
Ces différentes sommes établissent la valeur du processus de sécurisation de la clientèle, valeur qui aurait été discutée si les éléments relatifs à la dépendance vis à vis de l’agence ASAP et les liens personnels existant entre Monsieur [K] et Mme [I] avaient été portés à sa connaissance.
Le contrat de cession signé prévoit finalement le versement du prix de vente comptant pour 3.350.400 euros et différé pour 139.600 euros, pour POSSIBLE, et prévoit en outre une rémunération annuelle pour Monsieur [K], intervenant par l’intermédiaire de la société DMC, de 250.000 euros HT. Le contrat de prestation de service signé entre POSSIBLE et DMC le 1.08.2013 ne prévoit pas de clause pénale en cas de rupture du contrat par DMC.
On peut donc retenir que la discussion sur la diminution du prix de vente se serait engagée dans une fourchette comprise entre 1.100.000 euros (différé de paiement de 1 million et rémunération de Monsieur [K] de 100.000 euros visés dans la lettre d’intention) et 389.600 euros (différé de paiement de 139.600 euros et rémunération de DMC de 250.000 euros) pour aboutir à une diminution moyenne de 744.800 euros.
Il y a donc lieu de fixer le montant des dommages et intérêts, au titre de la perte de chance de ne pas avoir pu négocier une baisse du prix de vente, à 80% de la diminution moyenne qui aurait pu être escomptée, soit la somme de 595.840 euros.
Sur la mise en oeuvre de la garantie d’actif et de passif
Les appelantes exposent qu’en vertu de cette garantie, et des déclarations faites aux termes de la Convention de garantie, Monsieur [H] [K] s’est engagé vis-à-vis de la société IPANEMA à prendre en charge, à titre d’indemnité, « tout préjudice résultant pour la SOCIETE ou le BENEFICIAIRE, de l’inexactitude des déclarations effectuées ci-dessus par le garant’, que cette GAP s’étend aux informations transmises par le garant, que celui ci a volontairement omis de communiquer à la société IPANEMA un élément essentiel dont la révélation était substantielle et rendait trompeuse la situation des sociétés.
Elles demandent donc la condamnation de Monsieur [K] au paiement de la garantie d’actif et de passif pour un montant de 1.000.000 euros en indiquant que le cumul de l’action pour dol et celle au titre de la garantie d’actif et de passif n’est pas interdit et que le préjudice qu’elles subissent pour manquement à l’obligation de négocier de bonne foi est évalué à 1.641.866,28 euros.
Monsieur [K]expose que comme l’indiquent le mot et le concept, la garantie d’actif et de passif n’opère pas dans le même registre que la demande fondée sur le dol qui atteint le consentement, que la garantie d’actif et de passif porte sur :
– la détention des titres ;
– la constitution et le fonctionnement de la société ;
– la nature des titres ;
– les comptes sociaux ;
– les éléments d’actifs corporels et incorporels :
– les contrats en cours
et qu’IPANEMA est défaillante à rapporter la preuve que la garantie d’actif et de passif doit être mobilisée
Il indique que le montant réclamé n’est pas justifié alors que par ailleurs le chiffre d’affaires d’IPANEMA est passé de 3,2 millions en 2014 à 4,1 millions euros en 2015 soit une hausse de 26%, que les charges ont augmenté de façon importante de la seule volonté d’IPANEMA
Sur ce
L’article 2.2 de la garantie d’actif et de passif prévoit que Monsieur [K] s’engage vis à vis de la société IPANEMA à prendre en charge, à titre d’indemnité, ‘tout préjudice tant pour la société ou le bénéficiaire de l’inexactitude des déclarations effectuées ci-dessus par le garant.
L’article 1.22 de cette convention de garantie précise que les données des présentes déclarations et de ses annexes sont conformes à la réalité et comprennent toutes les informations nécessaires au bénéficiaire pour fonder son jugement sur le patrimoine, l’activité, la situation financière, les résultats et les perspectives des sociétés.
Aucune des déclarations faites par le garant dans le présent acte et ses annexes n’omet d’indíquer un élément dont la révélation serait importante ou rendrait trompeuse les résultats des sociétés, qui n’aít été indiqué dans le présent acte ou ses annexes.
A la connaissance du garant, il n’existe aucun fait ou circonstance affectant ou pouvant affecter dans l’avenir, de façon préjudiciable, l’activité, la situation financière, fiscale ou autres et les résultats des sociétés, qui n’aient été indiqué dans le présent acte ou ses annexes.
L’article 2.2 dernier alinéa ajoute que la présente garantie ne pourra pas porter sur les documents communiqués au bénéficiaire dans la data room des 28 et29 mars 2013, dont le sommaire est annexé aux présentes (annexe n°2), mais elle s’appliquera à tous les événements, y compris ceux se rapportant à ces documents communiqués, mais dont le bénéficiaire n’avait pas connaissance par l’effet de la seule lecture de ces documents.
Il a été retenu supra que le garant, Monsieur [K], avait omis d’indiquer un élément dont la révélation était importante et qui pouvait affecter dans l’avenir de façon préjudiciable, l’activité de la société POSSIBLE et ses résultats, de telle sorte que la garantie d’actif et de passif, mise en oeuvre conformément aux dispositions contractuelles, peut recevoir application.
Le fait que les deux demandes, à savoir l’indemnisation du préjudice résultant de l’omission dolosive et l’indemnisation du préjudice résultant de la mise en oeuvre de la garantie d’actif et de passif procèdent du même fait constitué par l’absence d’information par le cédant au cessionnaire que son principal apporteur d’affaire était l’agence ASAP avec laquelle des relations personnelles existaient en la personne de leurs associés respectifs, ne saurait entrainer le rejet de la demande d’indemnisation sur le fondement de la garantie d’actif et de passif. En effet l’octroi de dommages et intérêts dans le cadre du dol a pour but d’indemniser le vice du consentement qui a entrainé pour le cessionnaire le versement d’un prix d’achat de la société POSSIBLE plus important que celui qu’il aurait versé si il avait connu l’information dissimulée alors que la mise en oeuvre de la GAP a pour but d’indemniser la cessionnaire des conséquences de la dissimulation de cette information pour l’avenir de la société cédée, s’agissant en particulier des résultats escomptés.
La société IPANEMA demande le versement de la somme de 1.000.000 euros sans expliciter d’une façon ou d’une autre, de façon détaillée, sa demande au montant maximum de la garantie d’actif et de passif alors même que la société acquise a continué son activité, générant du chiffre d’affaires et des bénéfices après la cession.
S’agissant de l’évaluation du préjudice, elle ne peut être basée sur la baisse du chiffre d’affaires de la société POSSIBLE entre 2013, année de la cession où le chiffre d’affaires était de 1.283.680 euros, et 2014 où le chiffre d’affaires a été de 901.314 euros, dans la mesure où cette baisse était parfaitement connu de l’acquéreur dès lors que cette baisse était en relation avec l’arrivée à échéance de certains contrats de gestion de droit. Il convient d’ailleurs de préciser que certains contrats ont été reconduits permettant à la société POSSIBLE de réaliser un chiffre d’affaires plus important que celui initialement prévu.
Ainsi un tableau a été communiqué dans le cadre des négociations contractuelles établi au 31.12.2012, qui indiquait un chiffre d’affaires acquis pour 2013 de 440.132,40 euros (alors qu’il a été finalement de 1.283.680 euros) et pour 2014 de 58.364,15 euros (alors qu’il a été finalement de 901.314) contre 1.116.647,74 euros en 2012.
Ainsi la baisse prévisible du chiffre d’affaires était connue de la société IPANEMA.
Le préjudice de la société IPANEMA est en réalité constitué par le fait d’avoir dû développer, dans le cadre de l’activité de la société POSSIBLE, l’activité commerciale s’agissant du démarcharge commercial, et de la création de relations commerciales avec les agences de publicité et de communication susceptibles de faire appel à elle.
La société IPANEMA était parfaitement informée de la nécessité de maintenir et de transmettre ce qu’elle pensait être l’existence d’un réseau de relations commerciales, nécessité qui avait été pointée dans le rapport de KPMG, ce pour quoi elle avait décidé de signer un contrat de prestation de service avec Monsieur [K], contrat qui sera examiné ci après. Mais n’étant pas informée de l’absence de réseau commercial solide et de l’absence de référencement auprès d’autres agences que l’agence ASAP elle n’était pas en mesure de prendre conscience que le seul engagement de Monsieur [K] pour maintenir et transmettre les relations commerciales existant ne suffirait pas pour maintenir le chiffre d’affaire réalisé par la société et qu’il allait être nécessaire de développer un véritable réseau commercial. C’est cette dépense, constituée principalement par les salaires d’un commercial affecté au développement de la société POSSIBLE, qui constitue le préjudice pouvant être indemnisé dans le cadre de la garantie d’actif et de passif.
Il y a lieu à ce titre de fixer ledit préjudice à la somme de 200.000 euros équivalent à deux ans de salaires incluant les cotisations sociales.
S’agissant de la société KAOGOUMII
Aucun élément ne rapporte la preuve que des informations inexactes ont été communiquées concernant la société KAOGOUMII.
Par ailleurs l’omission dolosive n’a pas été retenue s’agissant de la cession de la société KAOGOUMII de telle sorte qu’il ne peut être reproché aux cédants d’avoir dissimulé des informations concernant la société à la société IPANEMA.
La garantie d’actif et de passif ne peut donc être mise en oeuvre concernant la société KAOGOUMII et la société IPANEMA est déboutée de toute demande la concernant relevant de la mobilisation de la garantie d’actif et de passif.
Sur la responsabilité civile de Monsieur [K]
Les appelantes concluent que Monsieur [H] [K] a manifestement manqué à son obligation de négocier de bonne foi en ne révélant pas à la société IPANEMA la dépendance économique que subissaient les sociétés POSSIBLE et KAOGOUMII vis-à-vis de la société ASAP, ni même le rôle important et décisionnaire que jouait sa propre concubine au sein des sociétés cibles.
Elles exposent que le comportement de Monsieur [H] [K] leur a causé un préjudice distinct du dol et caractérisé par:
– Les sommes investies : La société VILABOCE, holding personnelle de Monsieur [F] [U], et actionnaire majoritaire de la société IPANEMA, a investi 200.000 euros par voie d’apport en compte courant d’associé afin de faire face aux pertes subies et la dette de la société IPANEMA vis-à-vis de sa société mère, née des suites du comportement de Monsieur [H] [K], constitue un préjudice qu’il appartient à ce dernier de réparer.
– des pertes d’exploitation: les sociétés cibles ont enregistré à elles deux une perte de résultat net de l’ordre de 578.000 euros,
– des frais annexes: Depuis l’acquisition des sociétés POSSIBLE et KAOGOUMII, la société IPANEMA a remboursé 292.622,28 euros en intérêts d’emprunt outre les intérêts et accessoires à échoir
– un préjudice d’image: le comportement de Monsieur [H] [K] a eu des conséquences financières et économiques telles que certains partenaires financiers de la société IPANEMA lui ont retiré leur soutien, comme la BNP PARIBAS qui, suite à la découverte de la situation, lui a interdit tout découvert. Le préjudice subi est de 300.000 euros.
Monsieur [K] indique que les demandes formulées ont été multipliées par 15, que ces demandes n’ont, au surplus, aucun lien avec le prétendu manquement à l’obligation de négocier de bonne foi : les investissements réalisés, la baisse des résultats nets, les intérêts d’emprunts ou le préjudice d’image sont la conséquence des choix de gestion d’IPANEMA et non de son prétendu manquement.
Sur ce
La cour rappelle que le dol par omission a été retenu ce qui amène à écarter une action fondée sur l’absence de négociation de bonne foi qui ne peut être qu’une action subsidiaire si le dol n’était pas retenu.
Les demandes articulées sur ce fondement sont donc rejetées.
Sur le contrat de prestation de services et d’assistance du 1er août 2013
Les appelantes indiquent qu’elles ont conclu un contrat avec Monsieur [K], qu’il a été réglé 5 mensualités sur les 12 prévues au contrat, que l’annulation rétroactive de la cession entraine l’annulation du contrat de prestations de service set le remboursement des sommes versées car les deux contrats sont indivisibles.
Elles exposent que si la cour n’alloue que des dommages et intérêts pour dol il conviendrait de prononcer la résolution judiciaire du contrat de prestation de service d’une part pour cause d’indivisibilité des contrats et d’autre part pour mauvaise exécution du contrat compte tenu de la pauvreté de la prestation et de son caractère sporadique au regard de l’importance de la rémunération et en outre au regard du fait que les prestations que devait effectuer Monsieur [K] sont sans objet, au regard de l’absence de savoir-faire de ce dernier dans la création de spots publicitaires puisque comme démontré supra, seule sa compagne, Madame [L] [I], est à l’origine des signatures musicales pour les clients susmentionnés, et se sont bornés à quelques rendez vous professionnels.
Elles demandent le rejet de la demande reconventionnelle en paiement au titre des honoraires dus à DMC.
Monsieur [K] indique qu’il a été mis fin à ce contrat sans aucun motif qui entretiendrait un lien quelconque avec son exécution dont il atteste par les pièces versées aux débats son activité effective et quasi quotidienne.
Sur ce
Le ler août 2013 la société DM Consulting, présidée par M. [H] [K] a conclu avec la société POSSIBLE un contrat de prestations de services et d’assistance pour une durée d’une année en contrepartie d’une rémunération brute de 250 000 euros hors-taxes.
Ce contrat était préconisé par la société KPMG qui avait souligné que les relations commerciales étaient gérées intuitu personae par Monsieur [K].
La convention signée prévoyait ainsi que la société DM Consulting s’obligeait à effectuer des
recommandations et conseils en matière de contrats, de politique commerciale, à aider la
société POSSIBLE à la définition de la stratégie marketing et, de façon générale, à lui apporter
son aide en matière de stratégie et développement.
La nullité de la cession n’étant pas prononcée il n’y a pas lieu d’apprécier le caractère indivisible des deux contrats.
Les éléments versés aux débats par la société DMC ne rapportent pas la preuve de la réalisation de sa mission puisqu’il ressort des quelques pièces communiquées que celle ci s’est bornée à proposer des rendez vous avec quelques clients, à accompagner la nouvelle équipe dans trois renégociations, à assurer le suivi de quelques bons de commande et de quelques facturations, à superviser la réalisation d’une identité sonore pour Samsung avec quelques conseils s’agissant des démarches à réaliser auprès du client mais n’a effectué aucun travail de conseil en stratégie marketing et de développement.
L’absence d’exécution des obligations contractuelles contractées est d’une telle importance qu’elle justifie la résolution du contrat demandé par POSSIBLE.
Il y a donc lieu d’une part de débouter la société DMC de sa demande de paiement des honoraires non versés et de la condamner au remboursement de la somme de 104.165 euros correspondant aux honoraires déjà versés.
Sur les demandes reconventionnelles sur le reliquat de prix
Monsieur [K] demande la somme de 189.877 euros au titre du prix non versé et le solde du contrat de consultant et conteste tout manquement à l’exécution du contrat.
Sur ce
La société IPANEMA n’a pas réglé le solde du prix de cession et il convient en conséquence de confirmer le jugement et de la condamner à payer à Monsieur [K] la somme de 189.860 euros avec intérêts au taux légal à compter du 31.01.2015.
Sur les demandes de Monsieur [J]
Monsieur [J] demande la condamnation de la société IPANEMA à lui verser la somme de 10.067 € au titre du paiement différé de la cession des actions de KAOGOUMII du 23 Juillet 2013 avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir.
Sur ce
La société IPANEMA n’a pas réglé le solde du prix de cession et il convient en conséquence de la condamner à payer à Monsieur [J] la somme de 10.067 euros avec intérets au taux légal à compter de la présente décision.
Les autres sommes réclamées par Monsieur [J] le sont à titre subsidiaire, de telle sorte qu’il n’y a pas lieu de les examiner.
Sur la demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
Il est inéquitable de laisser les appelantes supporter les frais irrépétibles engagés pour assurer leur défense et il convient de condamner in solidum, Monsieur [K] et DMC à leur payer la somme de 30.000 euros.
Il est inéquitable de laisser Monsieur [J] supporter les frais irrépétibles engagés pour assurer sa défense et il convient de condamner IPANEMA et POSSIBLE à lui verser la somme de 5.000 euros.
Les dépens sont mis à la charge de Monsieur [K] et de la société DMC in solidum.
PAR CES MOTIFS
Déclare irrecevable l’intervention volontaire de Monsieur [S]
Infirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de PARIS le 14.09.2015 sauf en ce qu’il a condamné la société IPANEMA à payer la somme de 189.877 euros au titre du solde du prix de vente de la société POSSIBLE avec intérêts depuis le 01.01.2014 et en ce qu’il a débouté Monsieur [K] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
Et statuant à nouveau
Déclare recevable l’intervention volontaire de Monsieur [J]
Dit que Monsieur [K] a délibérement dissimulé des informations essentielles au consentement de la société IPANEMA à la cession des actions de la société POSSIBLE
En conséquence de cette réticence dolosive condamne Monsieur [K] à payer à titre de dommages et intérêts la somme de 595.840 euros à la société IPANEMA sur le fondement de l’article 1116 ancien du code civil
Faisant application de la garantie d’actif et de passif consentie par Monsieur [K] condamne Monsieur [K] à payer à la société IPANEMA la somme de 200.000 euros
Déboute la société IPANEMA de ses demandes tendant à condamner Monsieur [K] pour ne pas avoir négocié de bonne foi
Déboute la société IPANEMA de sa demande de nullité pour dol de la cession de la société KAOGOUMII et de sa demande au titre de la garantie d’actif et de passif s’agissant de cette société
Condamne la société IPANEMA à payer à Monsieur [J] la somme de 10.067 euros au titre du solde de la cession des actions de la société KAOGOUMII
Dit n’y avoir lieu de statuer sur les autres demandes de Monsieur [J] articulées à titre subsidiaire
Prononce la résolution du contrat de prestation de services aux torts de la société DM CONSULTING
En conséquence déboute la société DM CONSULTING de sa demande de paiement des honoraires en exécution du contrat de prestation de services et la condamne à rembourser à la société POSSIBLE la somme de 104.165 euros HT, outre la TVA
Condamne in solidum Monsieur [K] et la société DMC à payer aux sociétés POSSIBLE et IPANEMA la somme de 30.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
Condamne la société IPANEMA à payer à Monsieur [J] la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
Déboute Monsieur [S] de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
Condamne in solidum Monsieur [K] et la société DMC aux dépens des instances de première instance et d’appel.
La greffière La présidente