Cobranding / Association de marques : 25 mai 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/08372

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Cobranding / Association de marques : 25 mai 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/08372
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Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 8

ARRET DU 25 MAI 2022

(n° , 13 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/08372 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CANCA

Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Juin 2019 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F 18/04185

APPELANTE

Madame [T] [B]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Patrick CHADEL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0105

INTIMÉE

SAS EFFICIO FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Michel GUIZARD, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s’étant pas opposés à la composition non collégiale de la formation, devant Madame Emmanuelle DEMAZIERE, vice-présidente placée, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, présidente

Mme Corinne JACQUEMIN, conseillère

Madame Emmanuelle DEMAZIERE, vice-présidente placée, rédactrice

Greffier, lors des débats : Mme Nolwenn CADIOU

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– signé par Madame Sophie GUENIER-LEFEVRE, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [B] [T] (Mme [B]) a été engagée par la société Efficio France dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée en date du 21 septembre 2015 en qualité de business developer parfums et cosmétiques, contrat relevant de la convention collective du personnel des prestataires de service dans le domaine du secteur tertiaire.

Le 26 décembre 2017, la société Efficio France convoquait Mme [B] à un entretien préalable à licenciement fixé au 8 janvier 2018.

Le 11 janvier 2018, elle notifiait à Mme [B] son licenciement pour insuffisance professionnelle.

Contestant son licenciement, par acte en date du 6 juin 2018, Mme [B] saisissait le conseil de prud’hommes de Paris.

Par jugement en date du 5 juin 2019, le conseil de prud’hommes de Paris a :

-condamné la société Efficio France à verser à Mme [B] les sommes de :

*491,20 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires et congés payés afférents du 21 septembre au 31 décembre 2015,

*7 518,60 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires pour l’année 2016 et congés payés afférents,

*700,50 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos pour l’année 2016,

*6 446,20 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires pour l’année 2017 et congés payés afférents,

*384,60 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos pour l’année 2017

avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation

-rappelé qu’en vertu de l’article R1454-28 du code du travail, ces condamnations sont exécutoires de droit à titre provisoire, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois.

-fixé cette moyenne à la somme de 8 324,68 euros

-800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

-débouté Mme [B] du surplus de ses demandes

-débouté la société Efficio France de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile et la condamne au paiement des entiers dépens.

Par déclaration en date du 24 juillet 2019, Mme [B] a interjeté appel.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées au greffe par voie électronique le 17 mars 2022, Mme [B] demande à la Cour :

-de confirmer le jugement du conseil en ce qu’il a annulé la convention de forfait jours, en ce qu’il a condamné la société à lui verser des rappels de salaire au titre des heures supplémentaires effectuées entre septembre 2015 et décembre 2017, au titre de la contrepartie obligatoire en repos pour les années 2016 et 2017 ainsi qu’à un article 700 du Code de Procédure Civile.

-d’infirmer le jugement pour le surplus et statuant à nouveau :

-de condamner la Société Efficio France à lui verser les sommes de :

*40 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

*80 625 euros à titre de rappel de commissions à titre principal,

*8 062,50 euros à titre de congés payés afférents à titre principal,

*15 249,27 euros à titre de rappel de commissions à titre subsidiaire,

*1 524,93 euros à titre de rappel de congés payés à titre subsidiaire,

*9 518 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires du 21 septembre au 31 décembre 2015,

*951,80 euros au titre des congés payés afférents,

*40 119,94 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires année 2016,

*4 012 euros au titre des congés payés afférents,

*46 774,54 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires année 2017,

*4 677,45 euros au titre des congés payés afférents

*412,05 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires du 1er au 11 janvier 2018,

*41,21 euros au titre des congés payés afférents,

*1 703,14 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos année 2015,

*170,31 euros au titre des congés payés afférents,

*9 504,62 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos année 2016,

*950,46 euros au titre des congés payés afférents,

*15 314,53 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos année 2017,

*1 531,45euros au titre des congés payés afférents,

*52 099 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

en tout état de cause,

-de condamner la société Efficio France à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

-de condamner la Société Efficio France aux entiers dépens de l’instance et aux frais d’exécution de la décision, notamment les frais de recouvrement résultant de l’application des articles 10 et 11 du décret du 12 décembre 1996 modifié portant fixation du tarif des huissiers de justice.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées au greffe par voie électronique le 18 mars 2022, la société Efficio France demande à la Cour :

-de confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Paris en ce qu’il a :

*considéré que M. [K] avait parfaite légitimité pour signer la lettre de licenciement de Mme [B] ;

-jugé le licenciement de Mme [B] comme étant justifié pour motif réel et sérieux ;

-débouté Mme [B] de ses demandes d’indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

-débouté Mme [B] de ses demandes d’indemnités pour préjudice moral ;

-débouté Mme [B] de sa demande de rappel de commissions ;

-jugé que Mme [B] ne justifiait pas de la réalité d’un travail effectif sur les heures supplémentaires qu’elle dit avoir effectuées ;

-condamné la Société Efficio France à verser à Mme [B] les sommes de :

*491,20 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires et congés payés afférents du 21 septembre au 31 décembre 2015

*7 518,60 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires pour l’année 2016 et congés payés afférents

*700,50 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos pour l’année 2016

*6 446,20 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires pour l’année 2017 et congés payés afférents

*384,60 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos pour l’année 2017

-débouté Mme [B] du surplus de ses demandes au titre des heures supplémentaires qu’elle dit avoir effectuées ;

-débouté Mme [B] de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé ;

-débouté Mme [B] du surplus de ses demandes.

à titre reconventionnel :

-de condamner Mme [B] au remboursement d’une somme de 14 352 euros bruts ; indûment perçue au titre des jours de repos supplémentaires, à supposer que sa convention de forfait annuel en jours soit considérée par la Cour comme privée d’effet ;

-de condamner Mme [B] à verser à la Société Efficio France la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

-de condamner Mme [B] aux entiers dépens de l’instance et aux frais d’exécution de la décision.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 22 mars 2022 et l’audience de plaidoiries a été fixée au 4 avril 2022.

Il convient de se reporter aux énonciations de la décision déférée pour plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure, ainsi qu’aux conclusions susvisées pour l’exposé des moyens des parties devant la cour.

MOTIFS

I- Sur l’exécution du contrat de travail

A-Sur la validité et l’opposabilité de la clause de forfait annuel en jours

Selon l’article L. 3121-43 devenu L.3121-58 du code du travail, peuvent conclure une convention de forfait en jours sur l’année :

– les cadres qui disposent d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduisent pas à suivre l’horaire collectif applicable au sein de l’atelier, du service ou de l’équipe auquel ils sont intégrés,

– les salariés dont la durée du travail ne peut pas être déterminée et qui disposent d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps pour l’exercice des responsabilités qui leur sont confiées.

La mise en place d’une convention individuelle de forfait en heures ou en jours est subordonnée à la conclusion d’un accord collectif déterminant notamment le nombre d’heures ou de jours dans le forfait, et les règles de suivi de la charge de travail des salariés, ainsi que la période de référence du forfait et à la conclusion d’une convention individuelle de forfait passée par écrit.

L’invalidité de l’accord collectif faute de prévoir un dispositif propre à assurer la

garantie du respect de durées raisonnables de travail ainsi que des repos journaliers

et hebdomadaires entraîne la nullité de la convention individuelle de forfait en

jours qui lui est adossée.

En revanche, en cas de non-respect par l’employeur des clauses précisément

destinées à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié soumis au

régime du forfait en jours, la convention individuelle de forfait en jours est privée d’effet

et partant, inopposable au salarié.

En l’espèce, au terme du contrat de travail de Mme [B], il était stipulé que compte tenu de son niveau de responsabilité et de la grande autonomie dont elle disposait dans l’organisation de son emploi du temps et du fait que l’exercice des responsabilités confiées ne peut s’inscrire dans une durée de travail prédéterminée, elle relève, pour le calcul de son temps de travail, d’un forfait annuel en jours conformément aux dispositions des articles L.3121-43 et suivants du code du travail et à la convention collective applicable.

Les dispositions de l’article 2.8.3. du titre II de l’accord du 11 avril 2000 relatif à l’ARTT annexé à la convention collective du personnel des prestataires de service dans le domaine du secteur tertiaire applicables à l’espèce prévoient que :

‘Les cadres concernés par un forfait jours bénéficient chaque année d’un entretien avec leur supérieur hiérarchique, au cours duquel il sera évoqué l’organisation du travail, l’amplitude des journées d’activité et de la charge de travail en résultant.

Cette amplitude et cette charge de travail devront rester raisonnables et assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail des intéressés.

Notamment, la pratique du forfait jours ne doit pas se traduire par des amplitudes journalières et hebdomadaires de travail qui ne permettraient pas un équilibre satisfaisant entre la vie professionnelle et la vie personnelle du cadre concerné.

Ainsi, les 13 heures d’amplitude de travail quotidiennes autorisées par la loi ne doivent pas avoir un caractère systématique.’

Toutefois et nonobstant ces dispositions, l’employeur ne justifie pas avoir fait bénéficier à Mme [B] d’un entretien annuel relatif à sa charge de travail ni avoir contrôlé sa charge de travail.

Aussi, la convention individuelle de forfait en jours prévue au terme du contrat de travail de Mme [B] ne respecte pas les dispositions conventionnelles applicables et lui est donc inopposable.

B- sur les conséquences de l’inopposabilité du forfait jours au salarié

L’inopposabilité de la convention de forfait conduit à l’application des règles générales sur le temps de travail.

Le salarié peut donc prétendre au paiement d’heures supplémentaires.

Sur les heures supplémentaires

En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, en vertu de l’article L. 3171-4 du code du travail, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires.

Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances s’y rapportant.

A l’appui de sa demande, Mme [B] produit au débat :

– des extraits du logiciel CRM (logiciel de la relation client) sur la période du 21 septembre 2015 au 31 décembre 2017 (pièce 33 à 35)

– des décomptes d’heures supplémentaires établis entre le 21 septembre 2015 et le 14 janvier 2018 (pièces 36 à 39)

– des échanges de courriels et justificatifs de trajets (pièces 33 à 35)

Ces éléments sont suffisamment précis pour mettre l’employeur en mesure d’y répondre utilement et de fournir ses propres éléments.

Toutefois, la société Efficio France ne produit aucune pièce au débat et ne justifie donc pas avoir contrôlé le temps de travail de la salariée comme elle en a l’obligation.

Elle reconnaît par ailleurs l’exécution d’heures supplémentaires par la salariée dans la limite de celles entrées dans le logiciel ‘CRM’ enregistrant les réunions avec les clients.

L’effectivité du dépassement du temps de travail, également reconnue par la société intimée, doit donc être retenue.

Néanmoins, la société Efficio France critique les pièces versées au débat par la salariée en faisant valoir que c’est de sa seule initiative qu’elle a envoyé des courriels en dehors de ses horaires habituels de travail et que les temps de trajet ne sont pas du temps de travail effectif.

Elle demande ainsi à la cour de limiter le montant des condamnations à ce titre à celles prononcées par le conseil de prud’hommes.

Or, il convient de rappeler que, conformément aux dispositions de l’article L.3121-4 du code du travail, les temps de déplacement dépassant le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel du travail doivent faire l’objet d’une contrepartie et et que dans ce cadre Mme [B] justifie de nombreux déplacements à l’étranger .

Il échet également de rappeler que c’est à l’employeur qu’il appartient de contrôler le temps de travail de ses salariés et que les heures supplémentaires doivent être rémunérées dés lors que leur réalisation est rendue nécessaire par les tâches confiées au salarié.

Toutefois, il y a lieu de constater que, comme le souligne l’employeur,certains courriels produits au débat ont été envoyés par la salariée en dehors de ses heures de travail et ce alors qu’aucun impératif ne justifiait leur envoi en urgence (notamment en mai 2017 pour solliciter des informations).

Aussi, ces envois,ne peuvent suffire à caractèriser un dépassement du temps de travail à hauteur de celui sollicité par Mme [B].

En conséquence, au vu des pièces produites et des explications de parties, il y a lieu de fixer ainsi le nombre d’heures supplémentaires effectuées par Mme [B] et les créances s’y rapportant ainsi

– en 2015 : 50 heures et la créance d’y rapportant à 3434 euros outre 343,40 euros au titre des congés payés afférents ;

– en 2016 : 260 heures et la créance d’y rapportant à 17 855 euros outre 1785,55 euros au titre des congés payés afférents ;

-en 2017 : 320 heures et la créance d’y rapportant à 21 976 euros outre 2197,60 euros au titre des congés payés afférents ;

soit au total à 43 276 euros outre 4327,60 au titre des congés payés afférents.

Sur le repos compensateur

A défaut de dispositions conventionnelles spécifiques, conformément à l’article L. L3121-11 du code du travail (applicable avant la loi n° 2016-789 du 8 août 2016) puis à l’article L.3121-38 du code du travail : toute heure supplémentaire accomplie au delà du contingent annuel donne droit à une contrepartie obligatoire en repos, laquelle est fixée à 50% pour les entreprises de 20 salariés au plus, comme c’est le cas en l’espèce.

Conformément à l’article 2-5 de l’accord du 11 avril 2000 relatif à l’ARTT rattaché à la convention collective du personnel des prestataires de service dans le domaine du secteur tertiaire applicable en l’espèce, le contingent annuel d’heures supplémentaires est fixé à 70 heures par an.

Le salarié qui n’a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos a droit à l’indemnisation du préjudice qu’il a subi, laquelle doit correspondre à la rémunération que le salarié aurait perçu s’il avait accompli son travail et le montant de l’indemnité de congés payés afférente.

En l’espèce, le contingent annuel d’heures supplémentaires a été dépassé à hauteur de 190 heures en 2016 et de 250 heures en 2017.

Il y a lieu en conséquence d’allouer à la salariée une somme de 12 086,80 euros à titre d’indemnisation pour repos compensateur non pris.

Sur le remboursement des jours de repos supplémentaires liés au forfait annuel en jour

Il est admis qu’en application dispositions de l’article 1302-1 du Code civil, dès lors qu’une convention de forfait en jours est privée d’effet, le paiement des jours supplémentaires accordés en exécution de la convention de forfait jours devient indû et que l’employeur peut en demander le remboursement.

L’employeur demande en l’espèce le remboursement 14 jours supplémentaire accordé par an à la salariée soit la somme de 16 666,86 euros brut.

Si la salariée ne s’oppose pas à cette demande en son principe, elle fait valoir qu’elle doit être proratisée en 2015 sur la période de sa demande soit du 15 septembre aux 31 décembre 2015 et qu’en conséquence la somme de 1620,38 euros doit être retranchée.

Cette demande doit en outre être ramenée au montant net que la salariée doit seule restituer.

Il y a donc lieu d’accueillir la demande de l’employeur à hauteur de la somme de 11 811,48 euros net.

C – Sur la demande au titre du travail dissimulé

Des articles L 8221-3, 8221-5 et 8223-1 du Code du Travail, il résulte qu’en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours en mentionnant intentionnellement sur un bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

De ce qui précède, il résulte que l’employeur n’a pas porté sur les bulletins de salaire le nombre exact d’heures travaillées par Mme [B].

Cependant, le caractère intentionnel de la dissimulation ne résulte pas de la seule mention sur les bulletins de salaire d’un nombre insuffisant d’heures de travail effectif et ne peut donc être considéré comme établi en l’espèce.

La demande formée a donc été à juste titre rejetée et le jugement doit être confirmé de ce chef.

D- Sur la demande de rappel de commissions

Il est admis que les objectifs sont librement fixés par l’employeur dans le cadre de son pouvoir de direction mais que la bonne foi devant présider aux relations contractuelles l’oblige à ne pas fixer d’objectifs irréalisables privant dans les faits le salarié de sa rémunération variable.

En l’espèce, il résulte du contrat de travail de Mme [B] que ses commisisons sur objectifs sont définies en annexe B et des stipulations de cette annexe que le bénéfice du commissionnement est conditionné par la réalisation d’un chiffre d’affaires générant une marge nette annuelle de 500 000 euros.

Or, si Mme [B] demande un rappel de commissions en se fondant sur la marge qu’elle a réalisée telle qu’elle résulte des tableaux qu’elle a établis (pièces 22 et 40), elle ne conteste pas ne pas avoir réalisé une marge nette annuelle de 500 000 euros ouvrant droit à commissionnement mais fait valoir qu’étant amenée à travailler également dans d’autres domaines d’activité, elle ne pouvait aisémement atteindre ses objectifs.

Toutefois, il ne résulte pas de ces éléments que l’employeur ait exécuté son contrat de travail de mauvaise foi.

Aussi, elle sera déboutée de sa demande à ce titre.

II – Sur le licenciement

A- Sur le signataire de la lettre de le licencenciement

Mme [B] fait valoir qu’à la date à laquelle son licenciement lui a été notifié, le signataire, M.M n’avait pas pouvoir de signer la lettre de licenciement.

Or, il n’est pas contesté que le 27 juin 2014, M.M, directeur administrateur et financier avait reçu à cette fin délégation de pouvoir de M.U alors Président de la société Efficio France (pièce 9).

En outre et si la société Efficio France, représentée par M.U, associé unique de ladite société a désigné ensuite la SARL Efficio Group Holding devenue, après changement de dénomination, MSCH Holding en qualité de Président de la société Efficio France (pièces 4 à 7), la délégation de pouvoir établie par M.U, Président de la société Efficio Group Holding devenue,MSCH Holding restait néanmoins valable dés lors qu’il était Président de la société holding et avait ainsi pouvoir de prendre des engagements pour le compte de sa filiale, représentée par la personne morale dont il était gérant et unique associé.

Ce moyen ne saurait donc prospèrer.

B-Sur le bien fondé du licenciement

En application de l’article L. 1235-1 du code du travail , l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement, n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

Il est en outre admis que pour que l’insuffisance de résultat ne constitue pas en soi une cause réelle et sérieuse de licenciement et qu’il doit donc être recherché si le fait de ne pas avoir atteint les objectifs résulte d’une insuffisance professionnelle du salarié..

En l’espèce, la lettre de licenciement, dont les termes fixent les limites du litige, est ainsi motivée

‘ (…) Votre mission consistait à développer le chiffre d’affaires de la société en favorisant les ventes sur le secteur nouvellement créé de la cosmétique et à mettre en place une croissance durable sur ce secteur que vous connaissez bien.

Votre embauche correspondait ainsi à une volonté de la société de créer une unité de développement parfum cosmétique, secteur dans lequel vous disposez d’une expérience reconnue et dans lequel des perspectives de croissance et de développement étaient particulièrement porteuses. Votre séniorité et votre autonomie constituaient de réels atouts sur lesquels nous misions pour créer et développer ce nouveau département.

1) Malgré d’importants moyens mis à votre disposition, votre action de prospection s’est révélée inadaptée et vaine

A la suite de votre première année d’exercice, un premier bilan effectué au cours de votre entretien annuel en mars 2017 a mis en évidence la nécessité de participer à plus de projet et de développer de manière significative des actions de prospection. Nos attentes étaient également fortes quant à votre capacité à être force de proposition pour faire en sorte de dépasser les résultats obtenus en 2016.

L’objectif initial fixé à 500 000 euros de marge a donc été reconduit d’un commun accord et vous avez précisé après cette première année au sein de notre société envisager de conclure une dizaine de nouveaux contrats au cours de l’année à venir.

Pour vous accompagner dans cette tâche, la société a multiplié les actions permettant d’assurer sa présence régulière sur le secteur de la cosmétique. C’est ainsi que vous avez eu accès au salon Tax free à [Localité 5] en 2016 et en 2017, au salon tax free à Singapour en mai 2016 et 2017 et en Chine en mars 2017 et que vous vous êtes rendue aux USA à [Localité 6] afin d’y rencontrer des prospects importants et prometteurs. Nous avons ainsi fait de la participation de la société aux événements (cercle du luxe, Adetem) en lien avec la cosmétique et l’univers du luxe une véritable priorité

M.U, président la société, n’a pas manqué de vous accompagner lors de vos premiers déplacements que ce soit lors des salons tax free en Asie en 2016 ou à [Localité 5] tandis que l’ensemble des équipes et fonctions support de la société ont été mobilisées sur ces différents événements notamment pour assurer la réussite des salons à [Localité 5].

Toujours dans la perspective de donner une véritable visibilité à notre société sur ce secteur, nous avons sponsorisé le CEW, premier réseau mondial des professionnels de beauté en juin et novembre 2017.

Pour compléter ces actions visant à améliorer la présence de notre entreprise sur le marché, nous avons mandaté, en février 2017 une société de conseil en stratégie commerciale pour aider l’ensemble des business développeur,dont vous faites partie, dans leur prospection. Nous avons également organisé une formation de prospection téléphonique pour l’ensemble des forces commerciales de la société fin septembre 2017. Nous vous avons permis également de signer divers contrats d’apporteur d’affaires pour vous aider à concrétiser des opportunités commerciales et ce, dés 2016. Enfin, pour vous aider dans le suivi des actions prospectives mises en place et leur transformation en opportunités commerciales, nous avons recruté un stagiaire qui a été dédié à votre activité durant ces quatre derniers mois afin de vous assister dans vos tâches administratives et de prospection ainsi que de veille sur le marché.

Malgré l’ensemble de ses actions démontrant l’investissement de l’entreprise à vos côtés, vous n’avez pas su obtenir des résultats concrets et obtenir la conclusion des contrats commerciaux ou d’offres de partenariat.

Nous vous avons alertée à de nombreuses reprises sur la nécessité de vous investir dans la relance systématique des prospects, de rencontrer davantage vos prospects et d’être plus proactif dans l’analyse des situations et dans la recherche de solutions à mettre en ‘uvre et des actions correctrices à apporter afin d’élargir votre champ de prospection afin de les transformer en opportunités commerciales concrètes.

Le nombre d’opportunités n’a pas augmenté entre 2016 et 2017 et nous avons pu constater que vos interlocuteurs n’étaient pas toujours les décideurs potentiels. Pourtant vous n’avez pas jugé utile de changer vos méthodes de travail ou de vous interroger sur la nécessité de les adapter afin d’obtenir des résultats concrets. Vous n’avez pas non plus su animer et faire fructifier votre réseau d’apporteur d’affaires.

2/ votre absence de développement d’une clientèle et de transformation d’opportunités démontre une insuffisance de résultat constitutive d’une insuffisance professionnelle

Vos performances commerciales sont très en deçà des attentes légitimes de la société et mettent en évidence les limites de votre action commerciale qui n’a manifestement pas permis d’amorcer l’activité pour laquelle vous avez été recrutée. Aujourd’hui et après plus de deux ans de collaboration nous avons le regret de constater que malgré les opportunités créées, vous n’avez pas pas su créer des relations commerciales concrètes à l’exception de la signature d’un unique contrat, ‘Erborian’ avec une marge potentielle très faible de 9 000 euros. L’écart est tel comparé aux estimations attendues qu’il constitue en lui-même un échec qui vous est imputable.

Nous considérons que ces faits constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement (…)’

Si la société Efficio reproche à Mme [B] une insuffisance de résultats en lien avec une méthode de travail inadaptée et une insuffisante proactivité, elle ne justifie pas que, conformément à ce qui est mentionné dans la lettre de licenciement, elle l’ait alertée sur la nécessité de modifier sa démarche commerciale et ne produit aucune pièce au débat pour justifier l’insuffisance professionnelle dont elle fait état .

De son côté, Mme [B] justifie avoir participé à la nouvelle présentation du site internet de la société (pièce 17), établi un plan d’action (pièce 31), revu les processus logistique ( pièce 12), avoir participé au recrutement, à la formation et à l’accompagnement de nouveaux collaborateurs (pièce 16), avoir accompagné avec efficacité et professionnalisme la société M à laquelle la société Efficio France avait confié un projet visant à améliorer sa stratégie commerciale (témoignages de Mrs [J] et [V] , alors salariés de la société M : pièces 23 et 24), recherché de nouveaux réseaux de distribution (pièces 10 et 28), Mme [V], témoignant en sa qualité d’ancienne directrice du développement ‘l’avoir vu proposer et se débattre pour essayer de trouver des issues alors même que le secteur beauté n’était pas viable depuis le début (..)’, avoir assuré un bon suivi de prospects comme Amore Pacific, Mme B, directrice France et USA de cette entreprise attestant notamment ‘en octobre 2015, Mme [B] m’a contacté afin de me proposer l’offre d’Efficio. Je n’avais jamais réalisé d’opérations de Barter (échange) mais la réputation de sérieux et le professionnalisme de Mme [B] que je connaissais professionnellement depuis plus de 10 ans m’ont convaincu d’étudier ce type de prestation et de le présenter à ma direction… durant toute la période d’octobre 2015 à mai 2017, Mme [B] a toujours eu un comportement irréprochable. Elle a initié différents contrats, communications et suivis. Malgré la complexité des dossiers, elle n’a jamais cessé de proposer des solutions adaptées à nos marques en respectant les règles et stratégies de notre groupe. Entre chaque dossier, Mme [B] a maintenu le contact en s’informant de l’actualité du groupe Amore Pacific et elle nous a tenus informés de l’activité d’Efficio au travers de newsletters ou rendez-vous'(pièce 25).

Elle justifie en outre avoir négocié et fait signer deux contrats à une entreprise chinoise, la responsable des achats de cette entreprise attestant de son professionnalisme et de sa détermination sans laquelle les négociations n’auraient pu aboutir (pièce 27).

Elle établit en outre par la production de plusieurs témoignages que c’est l’organisation inadaptée mise en place par son employeur qui ne lui a pas permis d’atteindre ses objectifs.Ainsi, Mme [X], ancienne directrice du développement commercial entre otobre 2010 et mars 2018 atteste ne jamais avoir atteint son objectif commercial, avoir vu se succéder un nombre important de collaborateurs qui sont restés très peu de temps dans l’entreprise (entre 48 heures et une année) et des difficultés rencontrées en interne dans la mesure où le personnel n’était pas adapté à la complexicité de l’activité de ‘barter’ (pièce 28) tandis que Mme [L] et [E], stagiaires au sein de l’entreprise attestent des restrictions budgétaires ayant impactées les possibilités de développer la clientèle (pièces 29 et 30) et que M. [P], directeur événementiel de l’entreprise de mai 2012 à septembre 2018 et ayant exercé des fonctions de directeur ‘revente ‘à partir de septembre 2017 atteste que l’appelante a mis en place toutes les actions commerciales nécessaires au bon développement de son secteur mais que ce développement n’a pu avoir les effets escomptés dans la mesure où Efficio n’était ni structuré ni équipé pour permettre ce développement, le personnel du département revente n’étant ainsi pas formé à la revente des produits dans le domaine des parfums et cosmétiques et se trouvant démobilisé à la suite de changements stratégiques incessants décidés par la direction et d’absence de stratégie commerciale claire (pièce 41).

Il résulte donc de l’ensemble de ces éléments que l’insuffisance de résultat reprochée à la salariée ne résulte pas de son insuffisance professionnelle, laquelle n’est par ailleurs pas établie et au contraire contredite par les pièces produites au débat par l’appelante.

Le licenciement de Mme [B] ne repose donc pas sur une cause réelle et sérieuse.

Tenant compte de l’âge de la salariée au moment de la rupture (48 ans), de son ancienneté (deux ans), de son salaire brut moyen des 6 derniers mois (8333 euros), des justificatifs de son inscription à Pôle Emploi jusqu’au 14 mars 2019, il y a lieu de fixer à la somme de 28 000 euros les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sur le fondemement de l’article L.1235-3 du code du travail et conformément au barème applicable.

La salariée ne démontrant pas de préjudice distinct dans le cadre de la rupture de son contrat de travail sera en revanche déboutée de sa demande au titre de son préjudice moral.

III- Sur le remboursement des allocations de chômage,

Les conditions d’application de l’article L 1235 – 4 du code du travail étant réunies, il convient d’ordonner le remboursement des allocations de chômage versées au salarié dans la limite de six mois d’indemnités.

IV- Sur les autres demandes

Les sommes retenues par l’huissier instrumentaire en application de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 ne constituant pas des dépens afférents à l’instance au sens de l’article 695 du code de procédure civile, seul le juge de l’exécution est compétent pour trancher un litige sur ce point, la demande formée à ce titre devant dès lors être rejetée.

En raison des circonstances de l’espèce, il apparaît équitable d’allouer à Mme [B] une indemnité en réparation de tout ou partie de ses frais irrépétibles dont le montant sera fixé au dispositif.

La société Efficio France qui succombe sera en outre condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Par arrêt contradictoire,

INFIRME le jugement déféré, sauf en ce qu’il a admis le principe d’exécution d’heures supplémentaires, débouté Mme [B] de ses demandes de rappel de commissions, de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé et du préjudice moral, débouté la société Efficio France de sa demandes au titre des frais irrépétibles et en ce qu’il l’a condamnée au paiement d’une somme de 800 euros à ce titre,

Statuant à nouveau des seuls chefs infirmés et y ajoutant,

DIT le licenciement de Mme [B] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la société Efficio France à Mme [B] les sommes de :

– 43 276 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires

– 4327,60 au titre des congés payés afférents

– 12 086,80 euros à titre d’indemnisation pour repos compensateur non pris

– 28 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

– 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE Mme [B] à payer à la société Efficio France la somme de 11 811,48 euros net,

DIT que les sommes à caractère salarial produiront intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de sa convocation en conciliation et que les sommes à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter du jugement de première instance pour les sommes indemnitaires confirmées et à compter du présent arrêt pour le surplus,

ORDONNE le remboursement à l’organisme les ayant servies, des indemnités de chômage payées au salarié au jour du présent arrêt dans la limite de six mois d’indemnités,

REJETTE les autres demandes,

CONDAMNE la société Efficio France aux dépens.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

 


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