Cobranding / Association de marques : 25 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 19/15256

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Cobranding / Association de marques : 25 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 19/15256
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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 1

ARRÊT DU 25 JANVIER 2023

(n°009/2023, 12 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 19/15256 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CAOG2

Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Juillet 2019 -Tribunal de Grande Instance de Paris – 3ème chambre – 3ème section – RG n° 17/09426

APPELANTE

Madame [A] [H]

Née le 16 Octobre 1977 à [Localité 6],

Directrice artistique,

De nationalité britannique,

Demeurant Chez M. [R] [H],

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée et assistée de Me Delphine MOLLANGER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0627,

INTIMÉS

SAS OLT,

Société au capital de 125 801,53 euros,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 519 242 531

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 3]

[Localité 5]

SCP ABITBOL & ROUSSELET,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 808 326 979,

Prise en la personne de Maître [O] [F], en qualité d’administrateur judiciaire de la société OLT SAS, domiciliée ès qualités audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

SELARL AXYME,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 830 793 972,

prise en la personne de Maître [B] [E], en qualité de mandataire judiciaire de la société OLT SAS, domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentés et assistés de Me Sophie VIARIS DE LESEGNO de la SELEURL SVL AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : G605,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre, et Madame Brigitte CHOKRON, magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport.

Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre,

Madame Françoise BARUTEL, conseillère.

Madame Brigitte CHOKRON, magistrate honoraire,

Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL

ARRÊT :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre et par Karine ABELKALON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu le jugement contradictoire rendu le 5 juillet 2019 par le tribunal de grande instance (aujourd’hui tribunal judiciaire) de Paris qui a :

-rejeté la demande de Mme [A] [H] tenant à la fixation au passif de la société OLT (SAS) prise en la personne de son administrateur et de son mandataire, d’une créance au titre de la rémunération de ses droits patrimoniaux d’auteur dans le cadre des créations réalisées dans le cadre des collaborations extérieures avec des entreprises tierces au cours des années 2015 et 2016,

-débouté Mme [A] [H] de sa demande subsidiaire en contrefaçon de droits d’auteur,

-condamné Mme [A] [H] aux dépens et à payer à la société OLT prise en la personne de la SCP Abitbol et Rousselet et la SELARL Axyme la somme de 7.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

-rejeté les demandes pour frais irrépétibles formées par la SCP Abitbol et Rousselet et la SELARL Axyme,

-dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,

-autorisé la SELARL Cabinet Pierrat, avocat, à recouvrer directement contre Mme [A] [H] ceux des dépens dont elle aurait fait l’avance sans en avoir reçu provision, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Vu l’appel de ce jugement interjeté par Mme [A] [H] suivant déclaration d’appel remise au greffe de la cour le 23 juillet 2019.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 10 octobre 2022 par Mme [A] [H], appelante, qui demande à la cour, au visa des articles L. 112-2, L. 111-1, L. 131-3, L 131-4 et L.331-1-3 du code de la propriété intellectuelle, 12 du code de procédure civile, 1984 et 1993 du code civil, L 622-21 et L 622-22 du code de commerce, de:

-la déclarer recevable et bien fondée en son appel,

-infirmer le jugement déféré en ce qu’il a :

-rejeté la demande de Mme [A] [H] à la fixation au passif de la société OLT SAS, prise en la personne de son administrateur et de son mandataire, d’une créance au titre de la rémunération de ses droits patrimoniaux d’auteur dans le cadre des créations réalisées dans le cadre des collaborations extérieures avec des entreprises tiers au cours des années 2015 et 2016,

-débouté Mme [A] [H] de sa demande subsidiaire en contrefaçon de droits d’auteurs,

-condamné Mme [A] [H] aux dépens,

-condamné Mme [A] [H] à payer à la société OLT SAS, prise en la personne de la SCP Abitbol et Rousselet et la SELARL AXYME, la somme de 7.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

-le confirmer pour le surplus,

En conséquence,

-fixer la créance de Mme [A] [H] au passif de la société OLT SAS à la somme de 508.557,00 euros au titre de la rémunération de ses droits patrimoniaux d’auteurs sur les Créations qu’elle a réalisées dans le cadre des collaborations extérieures avec des entreprises tierces au cours des années 2015 et 2016,

Subsidiairement,

-fixer la créance de Mme [A] [H] au passif de la société OLT SAS à la somme de 508.557,00 euros au titre en réparation du préjudice subi par Mme [A] [H] du fait des actes de contrefaçon commis à son encontre par la société OLT SAS,

En tout état de cause,

-débouter la société OLT SAS de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles,

-fixer la créance de Mme [A] [H] au passif de la société OLT SAS à la somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-dire que la société OLT SAS supportera les entiers dépens de l’instance.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 3 octobre 2022 par la SCP Abitbol & [F] prise en la personne de Me [O] [F], la SELARL Axyme prise en la personne de Me [B] [E] et la société OLT (SAS), intimées, qui demandent à la cour de :

-prononcer la mise hors de cause des organes de la procédure du fait de l’adoption du plan de redressement par le tribunal de commerce de Paris,

-confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a:

-rejeté la demande de Mme [A] [H] à la fixation au passif de la société OLT SAS, prise en la personne de son administrateur et de son mandataire, d’une créance au titre de la rémunération de ses droits patrimoniaux d’auteur dans le cadre des créations réalisées dans le cadre des collaborations extérieures avec des entreprises tiers au cours des années 2015 et 2016,

-débouté Mme [A] [H] de sa demande subsidiaire en contrefaçon de droits d’auteurs,

A titre incident,

Vu l’article 1240 du code civil :

-infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société OLT SAS de sa demande reconventionnelle pour procédure abusive,

-juger que Mme [A] [H] a introduit la présente procédure à l’encontre de la société OLT SAS dans une manifeste intention de nuire,

En conséquence,

-condamner Mme [A] [H] à verser à la société OLT SAS une somme de 50.000 euros de dommages et intérets au titre de la procédure abusive,

-condamner Mme [A] [H] à verser à chacun des défendeurs la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-condamner Mme [A] [H] aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL SVL Avocat conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Vu l’ordonnance de clôture du 19 octobre 2022.

SUR CE, LA COUR:

Il est expressément référé, pour un plus ample exposé des faits de la cause et de la procédure, au jugement entrepris et aux écritures, précédemment visées, des parties.

Il suffit de rappeler que Mme [A] [H], styliste dans le secteur de la mode, est à l’origine de la création en 2010, avec M. [L] [S], un investisseur de fonds, de la société [A] [H] SARL ayant pour objet le développement de ses collections d’articles de mode . Associée minoritaire au sein de la société, Mme [A] [H] a conclu avec celle-ci, en qualité de styliste- directrice artistique, un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à effet du 1er janvier 2010, puis à temps plein à effet du 1er juin 2012. Un avenant au contrat de travail a été convenu à effet du 1er janvier 2015 conférant à Mme [A] [H] le statut de cadre-dirigeante.

Par assemblée générale du 10 juin 2014, la société [A] [H] SARL a été transformée en SAS et a adopté pour dénomination sociale ‘OLT SAS’.

Le 5 mars 2010 la société [A] [H] SARL et Mme [A] [H] avaient déposé conjointement la marque française semi-figurative ‘OLT- [A] [H]’ n°3 718 859 dans les classes 14, 22, 24, 25 et 26. Par contrat du 1er juillet 2014, Mme [A] [H] a cédé ses droits sur la marque à la société OLT SAS

en contrepartie d’un prix de cession de 25.000 euros.

En décembre 2014, la société OLT IP, SARL de droit luxembourgeois, a été constituée pour gérer les droits de propriété intellectuelle attachés à la dénomination ‘ [A] [H]’. Le capital de cette société est détenu par Mme [A] [H] à hauteur de 50% et, pour l’autre moitié, par une société Ginza dirigée par M. [L] [S]. La société OLT IP a fait l’acquisition, par deux contrats du 30 janvier 2015, de la marque verbale française n° 3 680 175 ‘[A] [H]’, déposée le 30 septembre 2009 en classes 14,22, 24, 25 et 26, dont Mme [A] [H] était titulaire en copropriété avec une société Realitism dirigée par M. [L] [S]. En contrepartie de la cession de ses droits sur la marque, Mme [A] [H] a perçu la somme de 25.000 euros.

Par un contrat du 30 mars 2015, la société OLT IP a consenti à la société OLT SAS, devenue propriétaire de la marque semi-figurative ‘OLT- [A] [H]’ n° 589, un contrat de licence exclusive pour l’exploitation de la marque verbale ‘[A] [H]’ n°175.

C’est dans ce contexte que Mme [A] [H], ayant exécuté en 2015 et 2016 des prestations pour des entreprises tierces, à savoir les sociétés Uniqlo, Lancôme et Dyptique, dans le cadre de contrats de collaboration (ou de co-branding) conclus par la société OLT SAS avec ces entreprises, a estimé qu’une rémunération complémentaire lui était dûe pour ces prestations qui, selon elle, sont extérieures à la relation de travail avec la société OLT SAS et ne relèvent pas de la clause de cession de droits d’auteur au profit de l’employeur stipulée au contrat de travail.

Par courrier d’avocat du 10 mai 2017, elle mettait en demeure la société OLT SAS de lui régler la somme de 500.557 euros correspondant à 100% des recettes nettes encaissées dans le cadre des contrats de collaboration conclus en 2015 et 2016 avec des entreprises tierces. Par réponse du 5 juin 2017 la société OLT SAS s’y refusait, faisant valoir que les prestations litigieuses avaient été réalisées par Mme [A] [H] en exécution de son contrat de travail, sur son temps de travail et avec les moyens mis à sa disposition par son employeur.

Suivant acte d’huissier de justice du 27 juin 2017, Mme [A] [H] a fait délivrer assignation à la société OLT SAS devant le tribunal de grande instance de Paris en paiement de la somme de 500.557 euros au titre des droits patrimoniaux d’auteur revendiqués sur les créations réalisées dans le cadre des quatre contrats de collaboration (2 avec la société Uniqlo, 1 avec la société Dyptique et un avec la société Lancôme) conclus en 2015 et 2016.

Par jugement du 28 septembre 2017, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société OLT SAS et désigné en qualité d’administrateur judiciaire la SCP Abitbol & [F] en la personne de Me [O] [F], en qualité de mandataire judiciaire la SELARL Axyme en la personne de Me [B] [E].

Mme [A] [H] a procédé le 13 octobre 2017 aux formalités de déclaration de créance prescrites à l’article L. 622-22 du code de commerce.

Par des conclusions du 11 janvier 2018, les organes du redressement judiciaire sont intervenus volontairement en reprise d’instance.

Dans le dernier état de ses conclusions devant le tribunal, Mme [A] [H] a demandé que soit fixée sa créance ‘au passif de la société OLT SAS’ pour un montant de 500.557 euros au titre la rémunération de ses droits patrimoniaux d’auteur sur les créations qu’elle a réalisées dans le cadre des collaborations avec des entreprises tierces en 2015 et 2016, subsidiairement, que soit fixée sa créance pour un même montant au titre de la réparation du préjudice subi en conséquence des actes de contrefaçon commis à son endroit par la société OLT SAS.

Il a été conclu en défense au débouté de Mme [A] [H] et à la condamnation de celle-ci en paiement de la somme de 50.000 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive et d’une amende civile.

Le tribunal, par le jugement dont appel, a rejeté les demandes respectives des parties. Selon les motifs du jugement, les premiers juges ont retenu que Mme [A] [H] n’est pas fondée à soutenir que les droits d’auteur sur ses créations n’ont pas été valablement cédés à son employeur, ni que les prestations qui ont été réalisées au profit des sociétés précitées (Uniqlo, Lancôme et Dyptique) étaient exclues de ses fonctions salariales et en conséquence ne peut poursuivre la société OLT SAS pour contrefaçon de droits d’auteur sur ses créations. Les rémunérations obtenues à ces titres, par la société OLT SAS ont été perçues par celle-ci en sa qualité de bénéficiaire de la cession de droits d’auteur que [A] [H] lui a consentie, et non pas en qualité de mandataire de celle-ci, à charge pour l’employeur de reverser à [A] [H], la quote-part lui revenant. Le tribunal a cependant estimé qu’aucune faute de nature à constituer un abus d’ester en justice n’était caractérisée à la charge de Mme [A] [H].

Devant la cour, les parties réitèrent leurs prétentions telles que soutenues devant le tribunal sauf pour les intimées à demander la mise hors de cause des organes de la procédure de redressement judiciaire de la société OLT SAS par suite de l’adoption du plan de redressement par le tribunal de commerce de Paris.

Sur ce dernier point, il ressort des dispositions de son jugement rendu le 19 juin 2019, que le tribunal de commerce de Paris a arrêté le plan de redressement par voie de continuation de la société OLT SAS, a mis fin à la mission de la SCP Abitbol &[F] prise en la personne de Me [O] [F] en qualité d’administrateur judiciaire, a désigné la SCP Abitbol &[F] prise en la personne de Me [O] [F] en qualité de commissaire à l’exécution du plan et a maintenu la SELARL Axyme prise en la personne de Me [B] [E] en sa qualité de mandataire judiciaire jusqu’à la remise de son compte-rendu de fin de mission.

Il y a lieu en conséquence de mettre hors de cause la SCP Abitbol &[F] prise en la personne de Me [O] [F] qui, par suite du jugement précité, a perdu la qualité d’administrateur judiciaire sous laquelle elle est intimée en cause d’appel. Il n’y a pas lieu en revanche de mettre hors de cause la SELARL Axyme prise en la personne de Me [B] [E] dès lors que celle-ci, en l’état du jugement précité, a été maintenue dans sa mission de mandataire judiciaire et a ainsi conservé la qualité de mandataire judiciaire sous laquelle elle est intimée en cause d’appel. Si la SCP Abitbol &[F] prise en la personne de Me [O] [F] a été désignée, selon le jugement précité, en qualité de commissaire à l’exécution du plan, force est pour la cour de constater qu’elle n’ est pas intervenue volontairement à la procédure, ni n’a été appelée en intervention forcée en telle qualité.

Mme [A] [H] persiste quant à elle à demander à la cour la fixation de ses créances ‘ au passif de la société OLT SAS’.

Ceci ayant été exposé, il est constant et, en toute hypothèse, il n’est pas contesté par Mme [A] [H] que sa relation de travail avec la société OLT SAS est gouvernée par un contrat de travail à durée indéterminée signé en date du 22 juin 2012 avec effet au 1er juin 2012 et par un avenant non daté, mais dont elle précise dans ses conclusions (page 17) qu’il a été signé courant décembre 2014, avec effet au 1er janvier 2015.

Aux termes de l’avenant, il est précisé que :

-Le présent avenant au contrat de travail de Mme [A] [H] a pour objet de préciser ses fonctions actuelles ainsi que les nouvelles modalités concernant l’exécution de ses fonctions et sa rémunération .

-Il annule et remplace l’ensemble des dispositions contractuelles ayant le même objet et qui auraient pu être antérieurement conclues entre Mme [A] [H] et la société OLT et, plus particulièrement, les articles : ‘Article 1- Conditions d’engagement’ , ‘Article 2- Attributions et emploi’ , ‘Article 5- Rémunération’ et ‘Article 7- Exclusivité’ du contrat de travail initial du 22 juin 2012.

-Les autres dispositions contractuelles en vigueur figurant au contrat initial du 22 juin 2012 demeurent inchangées et applicables, à savoir, les articles : ‘Article 4- Lieu de travail’, ‘Article 6- Congés payés’ et ‘ Article 8- Propriété intellectuelle’.

Ainsi qu’il a été exactement observé par les premiers juges, il découle expressément des stipulations qui précèdent que l’avenant ne modifie en rien l’article 8 du contrat de travail du 22 juin 2012, intitulé ‘Propriété intellectuelle’ qui demeure applicable, ainsi qu’il est encore précisé aux termes de l’avenant, en toutes ses dispositions, lesquelles prévoient que :

8.1. Madame [A] [H] cède à titre exclusif à l’Employeur l’ensemble les des (sic) droits de propriété intellectuelle (droits de reproduction et de représentation ‘ à l’exclusion de ceux et (sic) d’adaptation) ‘ relatifs aux créations réalisées dans le cadre du présent contrat, au fur et à mesure de leur réalisation.

La présente cession concerne l’ensemble des ‘uvres protégées à quelque titre que ce soit par le Code de la propriété intellectuelle réalisées par Madame [A] [H] dans le cadre du présent contrat.

Madame [A] [H] cède en conséquence à l’Employeur :

8.1.1. Droits de reproduction : (…)

8.1.2. Droits de représentation : (…)

8.1.3. Droit de distribution : (…)

8.1.4. Droits d’utilisations secondaires : (…)

(‘.)

8.4. L’Employeur exercera les droits visés au présent article soit directement soit par le biais de cessions à des tiers. L’Employeur pourra procéder à toutes formalités afin d’assurer la protection des créations en France et/ou à l’étranger, notamment par le biais de dépôt de modèles à l’INPI. ( En gras dans le texte ).

8.5. L’Employeur aura, par l’effet des présentes, le droit de poursuivre toute contrefaçon ou toute exploitation illicite sous quelques formes que ce soit, dans la limite des droits cédés en vertu des présentes, mais à ses frais, risques et périls et à sa propre requête.

(…)

8.8. Les cessions de droits intervenues en exécution du présent contrat perdureront au-delà de sa rupture pour quelque cause que ce soit.

En conséquence de ces dispositions de son contrat de travail, qui sont explicites et ne prêtent aucunement à interprétation, ce qui n’est pas, au demeurant, discuté, Mme [A] [H] a cédé à la société OLT SAS ses droits patrimoniaux d’auteur sur les créations réalisées dans le cadre de ses fonctions salariées de styliste-directrice artistique. L’appelante soutient cependant que les travaux exécutés dans le cadre de contrats de collaboration avec des entreprises tierces ne relèveraient pas de son contrat de travail et ne seraient pas couverts par la clause de cession de droits telle qu’énoncée dans le contrat de travail. Elle estime à cet égard qu’il se déduit des termes mêmes de la clause visant ‘les ‘uvres protégées (…) réalisées par Mme [A] [H] dans le cadre du présent contrat’ (souligné par la concluante) que les créations réalisées dans le cadre de contrats de type co-branding avec des entreprises tierces sont nécessairement exclues de la cession de droits prévue dans le contrat de travail.

Or, Mme [A] [H] ne saurait être suivie en son argumentation dès lors que le contrat de travail énonce en son article 8.4 précité que l’employeur exercera les droits, objets de la cession, soit directement, soit par le biais de cessions à des tiers.

Ainsi, la société OLT SAS, cessionnaire des droits de Mme [A] [H] sur les créations réalisées dans le cadre de son contrat de travail se trouvait autorisée à conclure avec des entreprises tierces des contrats de collaboration (société Uniqlo les 29 juin 2015 et 4 juillet 2016, société Dyptique le 2 novembre 2015, société Lancôme le 15 janvier 2016) en vue de l’exploitation, par ces entreprises tierces, des créations de sa salariée.

En outre, l’avenant au contrat de travail, à effet du 1er janvier 2015, destiné à préciser les fonctions de Mme [A] [H], les modalités d’exécution de son contrat de travail et les conditions de sa rémunération prévoit à l’article 4, sous le titre ‘Exclusivité’, que Mme [A] [H] s’engage à consacrer tout son temps de travail et tous ses efforts au profit exclusif de la société OLT et ne peut exercer une activité professionnelle pendant la durée du présent contrat, sauf accord préalable exprès et écrit du président de la société OLT, dans la limite de 50% de son temps.

C’est en vain que l’appelante entend se prévaloir, pour en conclure que ses prestations pour des entreprises tierces seraient exclues de la cession de droits au profit de l’employeur, des dispositions de l’article 7.3 du contrat de travail initial stipulant à son bénéfice, en sus du salaire, une rémunération spécifique pour de telles prestations qualifiées de ‘missions externes’.

Force est en effet de rappeler que, selon ses termes ci-dessus cités, l’avenant signé entre les parties en décembre 2014 et applicable au 1er janvier 2015, annule et remplace l’ensemble des dispositions contractuelles ayant le même objet ( …) antérieurement conclues entre Mme [A] [H] et la société OLT SAS et, plus particulièrement, les articles : ‘Article 1- Conditions d’engagement’, ‘Article 2- Attributions et emploi’ , ‘Article 5- Rémunération’ et ‘Article 7- Exclusivité’ du contrat de travail initial du 22 juin 2012.

Ainsi, Mme [A] [H] ne peut utilement invoquer dans le présent litige, qui concerne des prestations effectuées en 2015 et 2016, l’ ‘Article 7- Exclusivité’ du contrat de travail initial du 22 juin 2012 auquel s’est substitué à compter du 1er janvier 2015 l’ ‘Article 4- Exclusivité’ de l’avenant.

Or, en vertu de l’article 4, précité, de l’avenant Mme [A] [H] est tenue de consacrer tout son temps de travail et tous ses efforts au profit exclusif de son employeur et ne peut s’engager pour son compte personnel dans des activités extérieures qu’à titre exceptionnel et avec l’accord exprès et écrit de son employeur.

En la cause, force est de constater qu’elle n’est pas en mesure de justifier d’un tel accord de son employeur pour des prestations fournies à des entreprises tierces en exécution de commandes dont elle prétend, à tort, qu’elles ont été passées directement auprès d’elle.

Force est de relever, en effet, que les contrats de collaboration avec les sociétés Uniqlo, Lancôme et Dyptique désignent pour partie au contrat la société OLT SAS et ont pour objet des commandes passées non pas à Mme [A] [H] mais à la société OLT SAS qui déclare s’engager à les honorer.

Ainsi, aux termes du contrat avec la société Lancôme, Lancôme a demandé à OLT de lui prêter son concours pour la création d’une collection de maquillage en édition limitée signée ‘[A] [H]’ , ci-après la Collection, ainsi que la communication y afférente, ce que OLT a accepté’ . (…) OLT s’engage à créer pour Lancôme une collection en édition limitée de maquillage impliquant le décor de packagings et des éléments de commercialisation (…) OLT cède à Lancôme en contrepartie de la rémunération prévue à l’article 5 du présent contrat le droit de reproduire, de représenter et d’adapter les créations, (…) aux fins de commercialisation, de communication et de promotion de la Collection (…).

S’il est mentionné, dans chacun des quatre contrats, qu’il a été conclu ‘en présence de Mme [A] [H]’, cette dernière n’est pas pour autant partie au contrat même si elle figure au nombre des signataires du contrat .

En outre, il n’est pas sans intérêt de relever, dans le contrat Lancôme, que Mme [A] [H] y est désignée en sa qualité, expressément rappelée, de directrice artistique, ce qui vient confirmer qu’elle intervient dans ce contrat dans le cadre de sa relation de travail avec la société OLT SAS et qu’elle reconnaît à celle-ci les droits d’exploitation, régulièrement cédés dans le cadre du contrat de travail, sur les créations qu’elle aura réalisées pour la société Lancôme.

De même, le contrat Dyptique stipule expressément que OLT concède en licence l’ensemble de ses droits (souligné par la cour) de reproduction, de représentation et d’adaptation attachés aux Créations aux fins de fabrication, promotion et commercialisation des Produits dans les conditions définies au Contrat.

Il découle ainsi des stipulations précitées que Mme [A] [H] ne saurait sérieusement soutenir que la société OLT SAS n’est intervenue aux contrats de collaboration litigieux qu’en sa qualité de titulaire des droits sur la marque verbale [A] [H] n° 175 dont elle bénéficie, par le contrat du 30 mars 2015 avec la société OLT IP, de la licence exclusive d’exploitation. Force est en effet de constater que les droits d’utilisation respectivement conférés aux sociétés Lancôme, Uniqlo et Dyptique ne concernent pas seulement la dénomination [A] [H] mais portent expressément sur les créations qui auront été réalisées par Mme [A] [H] dans le cadre des contrats de collaboration conclus par son employeur avec ces sociétés.

En conséquence de quoi, les rémunérations perçues par la société OLT SAS en contrepartie de ces contrats l’ont été en sa qualité de bénéficiaire de la cession de droits d’auteur consentie par sa salariée et non pas, ainsi que le prétend Mme [A] [H] en qualité de mandataire de celle-ci.

L’appelante soutient enfin, pour conclure subsidiairement à la contrefaçon, que la clause de cession de droits telle qu’énoncée dans son contrat de travail serait nulle en ce qu’elle procéderait d’une cession globale d’oeuvres futures prohibée par les dispositions de l’article L.131-1 du code de la propriété intellectuelle.

Or, en l’espèce, la clause de cession de droits stipulée à l’article 8 du contrat de travail au profit de l’employeur couvre les créations réalisées dans le cadre du présent contrat, au fur et à mesure de leur réalisation .

Une telle clause n’est pas nulle dès lors qu’elle délimite le champ de la cession à des oeuvres déterminables et individualisables à savoir celles réalisées par la salariée dans le cadre du contrat de travail et au fur et à mesure que ces oeuvres auront été réalisées. Ainsi, la clause de cession n’encourt pas le grief de cession globale d’oeuvres futures puisqu’elle ne vise pas globalement les oeuvres objet de la cession en outre, elle ne porte pas sur des oeuvres futures mais sur des oeuvres réalisées, la cession n’opérant qu’au fur et à mesure de la réalisation.

L’appelante prétend encore que la clause de cession de droits serait nulle car dénuée de contrepartie financière pour la cédante.

Cependant, étant observé qu’une rémunération forfaitaire n’opérant pas de distinction entre la rémunération de la prestation de travail et la contrepartie de la cession des droits d’auteur est licite, le contrat de travail, tel que modifié par l’avenant applicable au 1er janvier 2015, prévoit pour la salariée une rémunération fixe réévaluée de 72.000 euros, une rémunération variable en fonction des résultats obtenus au regard des objectifs arrêtés par la société et un budget mensuel de 3.000 euros pour les frais.

Par ailleurs, Mme [A] [H], associée dans la société OLT SAS à hauteur de 24% et dans la société OLT IP à hauteur de 50% bénéficie nécessairement des résultats de ces sociétés auxquels elle est directement intéressée par la perception de dividendes.

En conséquence de l’ensemble des observations qui précèdent, les premiers juges seront approuvés en ce qu’il ont retenu à bon droit que Mme [A] [H] n’est pas fondée à contester la validité de la clause de cession de droits stipulée dans son contrat de travail au profit de son employeur, et qu’elle n’est pas davantage fondée à prétendre que les prestations qui ont été réalisées pour les sociétés Uniqlo, Lancôme et Dyptique dans le cadre des contrats de collaboration conclus avec ces sociétés en 2015 et 2016 seraient exclues de ses fonctions salariales.

En conséquence, le tribunal n’est pas critiquable en ce qu’il a débouté Mme [A] [H] de sa demande de rémunération complémentaire pour les prestations réalisées dans le cadre des contrats de collaboration avec des entreprises tierces, ni en ce qu’il l’a déboutée de sa demande subsidiaire de dommages-intérêts pour contrefaçon.

La société OLT SAS soutient à titre reconventionnel que Mme [A] [H] n’a engagé le procès que dans une manifeste intention de lui nuire. Elle poursuit donc, par infirmation du jugement sur ce point, la condamnation de l’appelante à lui payer des dommages-intérêts d’un montant de 50.000 euros pour procédure abusive.

Or, le tribunal a exactement retenu que l’intention de nuire susceptible de faire générer en abus le droit d’ester en justice n’est pas en l’espèce caractérisée, Mme [A] [H] ayant pu, sans mauvaise foi, par l’effet de l’avenant au contrat de travail applicable au 1er janvier 2015 et des modifications apportées aux modalités d’exécution de ses fonctions et aux conditions de sa rémunération, se méprendre sur la portée de la cession de droits stipulée dans son contrat de travail.

La demande de dommages-intérêts pour procédure abusive est en conséquence, par confirmation du jugement, rejetée.

L’équité commande de condamner Mme [A] [H] à payer à la société OLT SAS une indemnité complémentaire de 7.000 euros au titre des frais irrépétibles, et de la débouter de sa demande formée à ce même titre, de même que seront rejetées les demandes, à ce même titre, de la SCP Abitbol & [F] et de la SELARL Axyme.

Mme [A] [H] qui succombe à la procédure d’appel en supportera les dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Vu le jugement du 19 juin 2019 du tribunal de commerce de Paris arrêtant le plan de redressement par voie de continuation de la société OLT SAS, mettant fin à la mission de la SCP Abitbol & [F] prise en la personne de Me [O] [F] en qualité d’administrateur judiciaire, maintenant la SELARL Axyme prise en la personne de Me [B] [E] en sa qualité de mandataire judiciaire jusqu’à la remise de son compte-rendu de fin de mission,

Met hors de cause la SCP Abitbol & [F] prise en la personne de Me [O] [F] en qualité d’administrateur judiciaire de la société OLT SAS,

Dit n’y avoir lieu de mettre hors de cause la SELARL Axyme prise en la personne de Me [B] [E] en qualité de mandataire judiciaire de la société OLT SAS,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Condamne Mme [A] [H] à payer à la société OLT SAS une indemnité complémentaire de 7.000 euros au titre des frais irrépétibles,

Déboute Mme [A] [H], la SCP Abitbol & [F] prise en la personne de Me [O] [F] et la SELARL Axyme prise en la personne de Me [B] [E] de leur demande au titre des frais irrépétibles,

Condamne Mme [A] [H] aux dépens de la procédure d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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