Clause pénale : 9 mai 2023 Cour d’appel de Reims RG n° 22/00803

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Clause pénale : 9 mai 2023 Cour d’appel de Reims RG n° 22/00803

ARRET N°

du 09 mai 2023

N° RG 22/00803 – N° Portalis DBVQ-V-B7G-FFD4

[Z]

c/

[F]

Formule exécutoire le :

à :

la SCP LEDOUX FERRI RIOU-JACQUES TOUCHON MAYOLET

la SCP DELVINCOURT – CAULIER-RICHARD – CASTELLO AVOCATS ASSOCIES

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRET DU 09 MAI 2023

APPELANTE :

d’un jugement rendu le 07 mars 2022 par le TJ de CHARLEVILLE-MEZIERES

Madame [R] [W] [B] [Z] épouse [J]

[Adresse 6]

[Localité 1] / FRANCE

Représentée par Me Sylvie RIOU-JACQUES de la SCP LEDOUX FERRI RIOU-JACQUES TOUCHON MAYOLET, avocat au barreau des ARDENNES

INTIMEE :

Madame [P] [F]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Isabelle CASTELLO de la SCP DELVINCOURT – CAULIER-RICHARD – CASTELLO AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, présidente de chambre

Madame Véronique MAUSSIRE, conseillère

Madame Sandrine PILON, conseillère

GREFFIER :

Madame Eva MARTYNIUK, greffière lors des débats et Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffière lors du prononcé

DEBATS :

A l’audience publique du 21 mars 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 09 mai 2023,

ARRET :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 09 mai 2023 et signé par Madame Véronique MAUSSIRE, conseillère, en remplacement de la présidente de chambre régulièrement empêchée, et Madame Yelena MOHAMED-DALLAS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS ET PROCEDURE

Suivant compromis de vente reçu par Maître [T] [M], notaire à [Localité 4], les 14 et 21 novembre 2018, Madame [R] [Z] épouse [J] (ci dessous Mme [J]) a vendu à Mme [P] [F], sous condition suspensive d’obtention d’un prêt bancaire les lots n°51, 70 et 118 d’un immeuble placé sous le statut de la copropriété au [Adresse 3], pour un prix principal de 49.000 euros.

La condition suspensive oblige l’acquéreur à déposer ses demandes de prêt dans les 15 jours du compromis, à en justifier au notaire et à payer à celui-ci un dépôt de garantie d’un montant de 2.500 euros.

Ce montant a été réglé le 30 novembre 2018.

Le compromis autorise en outre, de volonté expresse des parties dûment informées par le notaire rédacteur des difficultés pouvant en résulter en cas de non réalisation de la condition suspensive, une entrée en jouissance anticipée de l’acquéreur dans les lieux à compter de l’expiration du délai de faculté de rétractation.

Madame [P] [F] a le 23 novembre 2018 obtenu un accord de principe d’obtention d’un prêt bancaire de la Caisse Régionale de Crédit Agricole du Nord Est et une offre conforme le 21 décembre 2018.

Elle avait pris possession des lieux le 8 décembre 2018.

La réitération de la vente par acte authentique était prévue le 12 février 2019 et la veille, le notaire a obtenu le transfert des fonds correspondant au prêt immobilier.

Le 12 février 2019, Madame [F] a refusé de signer celui-ci et a sollicité l’annulation de son prêt immobilier et réitéré son refus sur sommation interpellative du 7 mars 2019, d’avoir à se présenter à l’étude de Maître [T] [M] le 11 mars 2019 pour ce faire.

Par exploit d’huissier du 17 mai 2019, Madame [J] a assigné Madame [F] devant le tribunal de grande instance, devenu tribunal judiciaire de Charleville-Mézières, aux fins de tirer les conséquences indemnitaires du refus jugé injustifié de réitérer la vente.

Par jugement en date du 7 mars 2022, le tribunal judiciaire de Charleville-Mézières a ordonné la restitution du dépôt de garantie à Madame [P] [F], débouté celle-ci de sa demande au titre des frais divers’et du préjudice moral, a débouté Madame [R] [Z] épouse [J] de sa demande au titre de la clause pénale, de la taxe foncière, de la résistance abusive, et du préjudice moral et a condamné Madame [P] [F] à payer à Madame [R] [Z] épouse [J] les sommes de’:

– 2.500 euros à titre d’indemnité d’occupation ;

– 500 euros au titre des charges de copropriété.

Le tribunal a considéré qu’au 12 février 2019, date de réitération de la promesse synallagmatique de vente, les caractéristiques du bien immobilier objet de la promesse de vente ne correspondaient pas à ce qui était visé en son sein et qu’en conséquence du caractère indéterminé de la chose vendue, la promesse de vente ne pouvait être reconnue comme valant vente’; qu’ainsi Madame [F] était libre de passer ou non acte authentique sur le bien une fois celui ci déterminé et donc sans faute a pu décider d’annuler sa demande de prêt et de solliciter la restitution de son dépôt de garantie.

Il a retenu une occupation des lieux ouvrant droit à indemnité d’occupation de la date prévue pour la réitération de la vente, soit le 12 février 2019, jusqu’à la date de restitution des clés par courrier recommandé avec accusé de réception le 16 août 2019 et une perte de chance de ne pas avoir à régler les charges de copropriété au cours de cette période mais a considéré que dans tous les cas, le paiement de la taxe foncière incombe au seul propriétaire.

Par déclaration en date du 7 avril 2022, Madame [R] [J] a interjeté appel de la décision rendue par le tribunal judiciaire de Charleville-Mézières.

Une ordonnance d’injonction à la médiation a été rendue le 9 août 2022. Aucune partie ne s’est présentée à la réunion.

Aux termes de ses dernières conclusions du 9 janvier 2023, Madame [R] [J] demande à la cour d’infirmer ce jugement en ce qu’il a :

– Ordonné la restitution du dépôt de garantie à Mademoiselle [P] [F], soit la somme de 2.500 euros avec intérêts au taux légal à compter de la date de l’assignation délivrée le 17 mai 2019,

– Débouté Madame [R] [Z] épouse [J] de sa demande au titre de la clause pénale,

– Limité la condamnation de Mademoiselle [P] [F] à payer à Madame [R] [Z] épouse [J] la somme de 2.500 euros à titre d’indemnité d’occupation,

– Limité la condamnation de Mademoiselle [P] [F] à payer à Madame [R] [Z] épouse [J] la somme de 500 euros au titre des charges de copropriété,

– Débouté Madame [R] [Z] épouse [J] de sa demande au titre de la taxe foncière,

– Débouté Madame [R] [Z] épouse [J] de sa demande au titre de la résistance abusive,

– Débouté Madame [R] [Z] épouse [J] de sa demande au titre du préjudice moral,

– Débouté Madame [R] [Z] épouse [J] de sa demande en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– Dit que Madame [R] [Z] épouse [J] et Mademoiselle [P] [F] conserveront chacune la charge de leurs propres dépens,

– Rappelé que l’exécution provisoire était de droit,

– Et plus généralement de toutes les dispositions faisant grief à Madame [R] [Z] épouse [J], bien que non visées au dispositif selon les moyens qui seront développés dans les conclusions,

Et, statuant à nouveau,vu, notamment, l’article 1589 du code civil,

– Constater que le compromis de vente signé en l’étude de Maître [T] [M], Notaire à [Localité 4], en date des 14 et 21 novembre 2018 valait vente,

– Vu le refus persistant de Mademoiselle [P] [F] de régulariser l’acte authentique et la décision de Madame [R] [J] renonçant, pour des motifs pragmatiques, à exiger la réalisation de la vente mais souhaitant voir engager la responsabilité contractuelle et délictuelle de Mme [F] à son encontre,

En conséquence,

– Condamner Mme [F] à payer à Madame [J] :

*au titre de la clause pénale insérée au compromis la somme de 4.900,00 euros de dommages et intérêts,

*à titre d’indemnité d’occupation, la somme de 7.200,00 euros,

*au titre des charges de copropriété, durant la période d’occupation, la somme de 4.199,94 euros,

*au titre de la taxe foncière 2019, la somme de 872,00 euros,

*la somme de 3.000,00 euros de dommages et intérêts, au titre du préjudice moral,

*la somme de 3.000,00 euros de dommages et intérêts, au titre de la résistance abusive et injustifiée,

– Dire et juger que le dépôt de garantie de 2.500,00 euros versé chez le Notaire, Maître [M], sera directement reversé à Madame [J] par Maître [M],

– Débouter Mademoiselle [F] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

– Condamner Mademoiselle [F] à payer à Madame [J] une indemnité d’un montant de 3.000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, pour la procédure de première instance,

Y ajoutant,

– Condamner Mademoiselle [F] à lui payer la somme de 3.000,00 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel et aux entiers dépens de première instance et d’appel, en ce compris le coût de la sommation interpellative de la SCP BORGNIET DUPRE [C], Huissiers de Justice à [Localité 4], en date du 7 mars 2019, et du procès-verbal de constat de Maître [C], Huissier de Justice à [Localité 4], en date du 11 mars 2019, dont distraction au profit de la SCP LEDOUX FERRI RIOU-JACQUES TOUCHON MAYOLET, Avocats aux offres de droit.

Elle estime qu’il n’y a aucune indétermination concernant la cave vendue qui était le numéro de lot 5 ni aucun quiproquo avec la concierge qui occupait cette cave, mais qui l’a restituée par la suite’; que n’est pas parce qu’une mauvaise cave a été remise, que la vente ne portait pas sur la cave n°51 et que d’ailleurs Madame [F] n’a à aucun moment avant l’instance exposé les motifs s’opposant à la réalisation de la vente’; qu’elle opère une confusion entre formation et exécution du contrat.

Elle soutient en outre qu’ayant occupé l’appartement, Madame [P] [F] est également redevable d’une indemnité d’occupation mensuelle contractuellement fixée à 600 euros pour la période d’occupation des lieux soit dès le 8 décembre 2018 jusqu’à restitution des clés le 17 août 2019′; qu’il convient de tenir compte par ailleurs du préjudice résultant de l’impossibilité dans laquelle elle a été de relouer ou de vendre un immeuble du mois de décembre 2018 au mois de novembre 2019 inclus, à minima pendant 8 mois entre la prise de possession et la restitution des clés.’: qu’encore elle doit être tenue au remboursement des charges de copropriété (4199,94 euros) et de la taxe foncière 2019 (872euros) qui auraient été à la charge de Madame [F] dès la réitération de la vente si celle-ci avait respecté ses obligations.

Aux termes de ses dernières conclusions du 6 mars 2023, Madame [P] [F], intimée, demande à la cour, au visa de l’article 1589 du code civil, de’:

– Confirmer le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de Charleville-Mézières le 7 mars 2022 en ce qu’il a :

– Ordonné la restitution du dépôt de garantie à Madame [P] [F] soit la somme de 2.500 euros avec intérêts au taux légal à compter de la date de l’assignation délivrée le 17 mai 2019,

– Débouté Madame [R] [Z] épouse [J] de sa demande au titre de la clause pénale,

– Débouté Madame [R] [Z] épouse [J] de sa demande au titre de la taxe foncière,

– Débouté Madame [R] [Z] épouse [J] de sa demande au titre de la résistance abusive,

– Débouté Madame [R] [Z] épouse [J] de sa demande au titre du préjudice moral,

– Débouté Madame [R] [Z] épouse [J] de sa demande en application de l’article 700 du code de procédure civile.

L’infirmer pour le surplus.

Statuant de nouveau, de’condamner Madame [R] [Z] épouse [J]’:

– à lui rembourser les frais divers dont elle s’est acquittée auprès du notaire à hauteur de 300euros,

– à lui payer à la somme de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral.

– à lui payer la somme de 2.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile s’agissant des frais exposés dans le cadre de la première instance,

– à supporter les entiers dépens de première instance.

En tout état de cause,

– Débouter Madame [R] [Z] épouse [J] de l’intégralité de ses demandes contre elle et la condamner à lui payer la somme de 3.000euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel et à supporter les entiers dépens d’appel.

La concluante affirme que lors de la signature du compromis de vente le 14 novembre 2018, elle a interrogé le notaire sur la cave objet du compromis de vente en lui indiquant que lors de la visite, la cave qui lui avait été présentée portait le n° 54 alors que le compromis de vente vise une cave n°51; que les clés de l’appartement et de la cave lui ont été remises le 8 décembre 2018 par les parents de Madame [J] et que la cave ainsi mise à sa disposition portait sur le lot 54 sans qu’elle n’ait jamais eu la jouissance de la cave portant le numéro de lot 5l, qui figure sur le compromis de vente’; que le constat d’huissier réalisé le 5 mars 2019 établit par ailleurs que la cave 54 est en réalité un bout de couloir qui a été fermé par une porte pour le transformer en cave et qui n’apparaît pas sur les plans.

Elle soutient que le compromis de vente comporte donc une irrégularité qui laissait la chose indéterminée et qui ne permet pas de retenir un accord des parties sur la substance même de la chose objet de la vente’; que ce compromis ne valait donc pas vente et ne l’obligeait pas de sorte qu’elle n’a pas commis de faute’; que cette situation a été provoquée par Madame [J] qui n’a pas mis les bonnes informations, et que elle n’est donc pas victime de la situation, mais plutôt auteure d’une tentative de tromperie de sorte qu’au regard de ce comportement frauduleux, aucune perte de chance ne doit être retenue en sa faveur.

Le cas échéant concernant l’occupation des lieux elle en impute la responsabilité au vendeur qui a fourni des informations erronées et qui dans tous les cas avait gardé un jeu de clé alors qu’elle même a fait toutes les diligences pour lui restituer le trousseau de clés dont par l’intermédiaire du syndic, qui ne s’est pas déplacé lors du constat d’huissier l’obligeant à les envoyer par lettre recommandée avec AR depuis son domicile, à [Localité 5], soit en août, lors de ses congés.

S’agissant des charges de copropriété sollicitées par Madame [J] elle les estime encore sans commune mesure avec l’annonce frauduleuse faite sur le bon coin’ à hauteur de 100euros par mois et met en relation le préjudice moral invoqué par celle-ci avec la longue procédure qui est de son seul fait puisqu’elle a tenté d’obtenir la régularisation par acte authentique d’une promesse de vente entachée d’irrégularités.

Elle sollicite la restitution du dépôt de garantie de 2.500 euros, ainsi que des 300 euros versés au notaire et se prévaut de son propre préjudice moral, lié au fait qu’elle n’a pas pu acquérir de bien dans les Ardennes, qu’elle a été privée de tout moyen de paiement entre février et mars 2019, son compte présentant alors un découvert de plus de 52.000 euros alors qu’en l’absence de réaction du notaire à qui elle avait signalé la difficulté, elle a été contrainte d’effectuer toutes les démarches pour faire les vérifications.

La clôture a été ordonnée le 13mars 2023.

MOTIFS

Sur la valeur de l’acte notarié des 14 et 21 novembre 2018

Mme [J] demande à la cour de constater que le compromis de vente signé en l’étude de Maître [T] [M], Notaire à [Localité 4], en date des 14 et 21 novembre 2018 valait vente.

Par application de l’article 1589 du code civil, la promesse de vente vaut vente lorsqu’elle montre un accord des parties sur la chose et le prix.

En l’espèce, le compromis conclu entre Mme [J], vendeur, et Mme [F], prévoit un accord sur le prix pour la chose soit 49 000 euros, non compris les frais d’acquisition en sus et évalué à 5 350 euros.

S’agissant de la chose, il précise qu’elle porte sur un lot numéro 77 constitué d’un appartement situé au 3ème étage du bâtiment principal en façade sur cour, un lot numéro 116 constitué d’un box particulier situé au sous sol du bâtiment secondaire portant le numéro 33 du plan des garages et d’une cave située au sous sol portant le numéro de lot 51 du plan des caves, outre les parties communes générales de l’immeuble y afférant.

Mais le 12 février 2019 lorsque les parties se présentent devant le notaire, Mme [P] [F] refuse de signer.

Le contenu des mails échangés ultérieurement entre les parties et avec le notaire rédacteur, montre que lui est apparue une anomalie quant à la cave qui lui était proposée au regard du lot indiqué au compromis.

Ainsi, elle expose dans son envoi du 15 février 2019 auxquelles sont jointes des photos «’.. ce n’est pas une cave, c’est un renfoncement dont nous avons parlé qui a été fermé par une porte..’».

Et le procès verbal de constat d’huissier établi le 5 mars 2019, le syndic de la copropriété convoqué mais non présent, photos à l’appui, dont les conclusions ne sont pas contestées, démontre que le problème se présentait ainsi’:

-‘en fin de couloir, celui-ci est fermé par une porte en bois différente des autres portes mais en alignement avec les autres caves qui porte le numéro 54 de calligraphie distincte des autres,

– il y a une rupture de suite logique dans l’attribution des numéros de cave (54- 47-52–51-50-49-48),

– les clés en possession de Mme [F] ouvre cette porte 54,

– les plans dont il dispose lui permettent de conclure que ce local est de plus faible largeur que celle des autres caves dont la cave 51 qui selon la requérante devait lui être attribuée selon le compromis, et qu’il s’agit d’un prolongement du couloir qui a été fermé par une porte,

– que sa surface est de 1m sur 2,5 m et qu’y passe au plafond une poutre en béton renfermant une gaine de ventilation se poursuivant dans le couloir commun de la cave.

Il apparaît ainsi que Mme [F] n’avait pas été mise en possession de la cave numéro 51 et des 19/100 000ème des parties communes mentionnées au compromis mais de la cave 54 représentant 10/100 000 des parties communes et présentant les spécificités particulières décrites par l’huissier et qu’elle était fondée à constater ce point.

Des recherches ultérieures sont démontrées par un mail du notaire du 14 février 2019 qui écrit «’..je suis à la recherche du plan de cave de la résidence Leclerc. J’ai sans succès demandé à Maître [I] qui détient la minute du règlement de copropriété dressé par Maître [U] à l’époque, mais qui ne comporte pas d’annexe.Pas plus de résultat chez Maître [H] qui fait la liquidation de celui-ci.Vous voilà donc mon dernier espoir. Êtes vous en possession de ces plans et pouvez vous me les transmettre ceci afin de trouver la cave appartenant à Mme [Z] (épouse [J])’».

Elles montrent que si la chose était déterminée le 12 février 2019, ne l’était pas en revanche la levée de la condition suspensive prise dans l’intérêt de l’acquéreur «’que le vendeur justifie d’une origine de propriété trentenaire et régulière, que les états délivrés en vue d’une réalisation de la vente ne révèlent pas d’obstacle à celle-ci’», puisque le vendeur a mis l’acquéreur en possession d’une cave numéro 54 et qu’il n’était pas en mesure au jour de la signature prévue le 12 février de justifier de la propriété de la cave numéro 51 et de mettre l’acquéreur en possession de celle-ci.

Si le notaire obtient les plans et les transmets à l’acquéreur, ce n’est que le 25 février 2019 qu’il l’informe qu’il est en mesure de la mettre immédiatement en possession de la chose convenue par un échange des clés avec celles de la concierge qui disposait de cette cave numéro 51 et qui l’avait vidée des affaires qui s’y trouvaient.

Ainsi, il ne s’agit pas seulement d’une erreur minime, d’un quiproquo dans la remise des clés mais bien d’une impossibilité pour le vendeur de justifier de son titre de propriété et de mettre l’acquéreur en possession d’une partie de la chose vendue avant le 25 février 2019.

Or, le compromis’prévoit la possibilité pour l’acquéreur qui constate l’absence de réalisation de la condition suspensive au jour fixé pour la réalisation de l’acte authentique de vente, s’il le désire, de se trouver délier de tout engagement et précise que dans ce cas, la convention est considérée nulle et non avenue.

Encore, cette option lui est offerte si la condition n’est pas levée à l’échéance du délai maximal de signature de l’acte de 3 mois courant de la signature du compromis du 21 novembre 2018 étant précisé que la condition suspensive d’obtention du prêt était quant à elle levée depuis le 23 novembre 2018 (attestation du crédit agricole).

Il appartenait au vendeur de faire toute vérification diligence et recherche pour s’assurer préalablement à ces dates, de sa possibilité de mettre l’acquéreur en possession des biens sur lesquels il disposait d’un titre et visés dans le compromis.

Ainsi, l’impossibilité pour le vendeur de justifier de son titre de propriété ou de la possibilité de faire entrer l’acquéreur en possession du lot numéro 51 inscrit au compromis le 12 février 2019, date prévue pour la réalisation de l’acte authentique après levée de la condition suspensive d’obtention du prêt, ou tout au moins avant le délai de 3 mois courant à compter de la signature du compromis le 21 novembre 2018, ouvrait à Mme [P] [F] la possibilité, sans faute, de refuser de le signer lorsque l’acquéreur a été en mesure de l’assurer de ses titres de propriété le 25 février 2019 et de constater la caducité de celui-ci.

En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu’il considère qu’elle n’était pas tenue d’acquérir le bien objet du compromis de vente.

Sur les conséquences indemnitaires de l’absence de régularisation de l’acte authentique

Dans la mesure où le compromis était nul et de nul effet, Madame [R] [J] ne peut s’en prévaloir pour réclamer l’exécution des conventions qu’il contient et donc pour réclamer le paiement de la clause pénale qui y est insérée et le jugement est confirmé en ce qu’il la déboute de ses prétentions au paiement d’une somme de 4 900 euros à ce titre et l’oblige au remboursement de la consignation de 2 500 euros versée le 30 novembre 2018.

Elle n’en demeure pas moins recevable à réclamer à son contractant la réparation des conséquences de fautes délictuelles qu’elle pourrait lui reprocher et lui ayant occasionné un préjudice.

A ce titre, la cour constate la légèreté avec laquelle a agi Mme [P] [F] qui a occupé les lieux dès le 21 novembre 2018, a obtenu son prêt immobilier dont le montant a été transféré au notaire rédacteur de l’acte qui en disposait le jour convenu pour la réitération de l’acte le 12 février 2019, a pris une assurance multi risque habitation auprès du crédit agricole à compter du 8 décembre 2018 et s’est déclaré satisfaite de la chose puisqu’elle écrit le 10 décembre 2018 par mail au vendeur’ «’…j’ai pris mes repères (cage d’escalier A, cage d’escalier B, boîte aux lettres, local poubelles..j’ai aussi voulu revoir (et j’y suis allée sans me tromper) la cave et le parking souterrain.J’ai essayé toutes les clés avec succès’!!…’».

Elle ne fait pas d’observation quant au numéro de la cave qui a été mise à sa disposition, sa surface ses caractéristiques et elle est informée par le compromis que s’agissant des superficies des parties privatives, celles-ci ne sont soumises aux obligations de la loi Carrez que pour le lot numéro 77 d’une surface Carrez de 35,10 m2 mais que la cave et le box composant les lots numéros 51 et 116 évalués ensemble à la somme de 6 000 euros sont exclus de son champ.

Elle ne peut prétendre qu’elle a été trompée alors que le numéro de la cave apparaît sur la porte et ce n’est que le jour de la signature qu’elle justifie de ses doutes quant aux clés qui lui ont été remises avant de se rétracter moins d’une semaine plus tard, sans laisser le temps au vendeur d’opérer des recherches et de rectifier son erreur.

Dans ces conditions, il lui appartenait tout au moins de vider immédiatement les lieux et de faire toutes diligences pour rendre des clés qui lui offraient la jouissance de lieux sur lesquels elle n’avait aucun droit ce que lui annonçaient les termes du compromis qui prévoient qu’en cas de non réalisation de la vente, l’acquéreur s’engage irrévocablement et immédiatement à quitter les lieux.

Or, elle justifie d’aucune difficulté imputable au vendeur qui aurait compliqué cette remise et de l’impossibilité dans laquelle elle était de renvoyer ces clés par courrier recommandé avec la date du du 16 août 2019.

C’est dès lors, à juste titre, que le tribunal a considéré qu’elle était tenue au paiement d’une indemnité d’occupation jusqu’à cette date.

S’agissant de la période antérieure au 12 février 2019, il convient de retenir que de la commune intention des parties manifestée dans le compromis, elles entendaient qu’une indemnité d’occupation de 600 euros mensuelle hors charges ne serait due qu’en cas de non réalisation de la vente et de maintien dans les lieux de l’occupant sans droit ni titre.

En conséquence, retenant ce montant mensuel et la période de maintien dans les lieux à compter de la non réitération de la vente et jusqu’au 16 août 2019, la cour fixe l’indemnité d’occupation due par Mme [P] [F] à la somme de 3 600 euros et infirme le quantum fixé par le tribunal.

En revanche, concernant le paiement des charges de copropriété et de la taxe foncière, le tribunal a exactement constaté que l’obligation au paiement de celui-ci est principalement liée, non pas à l’occupation des lieux, mais au titre de propriété de Mme [R] [Z] épouse [J] qui n’a jamais été transféré à Mme [P] [F] et que le préjudice ne pourrait donc être constitué que d’une perte de chance de revendre l’appartement avant le départ de Mme [P] [F] et de ne pas avoir à payer celles-ci sur cette période, qui en l’absence de recherches particulières ou de visites démontrées et de la courte période considérée de février à août 2019, apparaît très faible et a été justement évalué à la somme de 500 euros.

Par ailleurs, dans la mesure où l’occupation par la défenderesse a été indemnisée et que les conséquences sur son obligation au paiement de charges de copropriété et de taxe ont été de même analysées, l’appelante ne justifie pas d’un autre préjudice qui résulterait de son impossibilité de vendre le logement au cours de cette période.

En outre, le préjudice moral respectivement invoqué par les deux parties n’apparaît pas en ce que l’absence de réitération de l’acte de vente n’est que la conséquence de règles de droit rappelées au compromis, que l’occupation des lieux avant celle-ci a été décidée et choisie malgré les avertissements du notaire sur les difficultés pouvant en résulter, que le préjudice lié à l’occupation ultérieure a été indemnisé et qu’il a été vu que la volonté du vendeur de tromper l’acquéreur n’a pas été démontrée et que celui-ci bien que disposant de la chose convenue une semaine après la date d’échéance du compromis, a choisi de ne pas acquérir ce bien.

Encore le jugement est donc confirmé en ce qu’il déboute les parties de leur demande à ce titre.

Enfin, il est confirmé en ce qu’il déboute Mme [R] [Z] épouse [J] de sa demande en dommages et intérêts pour résistance abusive qui suppose la démonstration d’une contrainte d’agir en justice pour faire valoir ses droits à la suite d’une résistance abusive de l’adversaire qui n’apparaît pas puisque le droit de l’intimé à ne pas réitérer l’acte a été retenu.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions si ce n’est sur le quantum de l’indemnité d’occupation,

Statuant à nouveau sur ce point et ajoutant,

Condamne Mme [P] [F] à payer à Mme [R] [Z] épouse [J] la somme de 3 600 euros à titre d’indemnité d’occupation,

Déboute les parties de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens

Le greffier La conseillère pour la présidente régulièrement empêchée

 


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