2ème Chambre
ARRÊT N°218
N° RG 20/03283
N° Portalis DBVL-V-B7E-QYTQ
M. [E] [Y]
C/
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
– Me DUSSUD
– Me CASTRES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 05 MAI 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Ludivine MARTIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 23 Février 2023
devant Monsieur Jean-François POTHIER, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 05 Mai 2023, après prorogations, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANT :
Monsieur [E] [Y]
né le [Date naissance 2] 1969 à [Localité 4]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représenté par Me Caroline DUSSUD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de QUIMPER
INTIMÉE :
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Hugo CASTRES de la SCP LECLERCQ & CASTRES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
EXPOSE DU LITIGE :
Par acte sous seing privé du 20 janvier 2014, la société BNP Paribas Personal Finance (BNPP PF) a consenti sous l’enseigne CETELEM à M. [E] [Y] un prêt de 20 000 euros remboursable en 84 mensualités de 298,83 euros hors assurance facultative moyennant intérêts un taux nominal de 6,69 % l’an.
Alléguant le non paiement des échéances, la société BNP Paribas Personal Finance a fait assigner devant le tribunal d’instance de Quimper M. [E] [Y] et son curateur l’association tutélaire du Ponant pas actes signifiés respectivement les 27 avril et 06 mai 2019 en paiement des causes impayées du crédit.
Par jugement du 12 juin 2020, le tribunal judiciaire de Quimper a :
Déclaré recevable l’action introduite par la SA BNP Paribas Personal Finance ;
Débouté M. [E] [Y], assisté de l’ATP, en sa qualité de curateur, de ses demandes de nullité du contrat de prêt et de dommages et intérêts ;
Condamné M. [E] [Y], assisté de l’ATP, en sa qualité de curateur, à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 16 645,41 euros, avec intérêts au taux contractuel de 6.90 % à compter du 6 mai 2019 en exécution du contrat de prêt n° 41283582539004 souscrit le 24 janvier 2014 ;
Condamné M. [E] [Y] assisté de l’ATP, en sa qualité de curateur à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 10 euros avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision, au titre de l’indemnité de 8 % prévue contractuellement ;
Débouté M. [E] [Y], assisté de l’ATP, en sa qualité de curateur de sa demande de délais de paiement ;
Dit n’y avoir lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
Rejeté toute autre demande ;
Condamné M. [E] [Y], assisté de l’ATP, aux dépens.
M. [Y] est seul appelant du jugement suivant déclaration du 21 juillet 2020 par suite de la mainlevée de la mesure de curatelle dont il faisait l’objet suivant jugement du juge des tutelles de Quimper du 11 mars 2020.
Par dernières conclusions notifiées le 1er septembre 2020, M. [Y] demande de :
Réformer le jugement du Tribunal Judiciaire de Quimper et, statuant de nouveau :
A titre principal,
Constater la forclusion de l’action de la SA BNP Paribas Personal Finance ;
En conséquence, débouter la SA BNP Paribas Personal Finance de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions.
A titre subsidiaire,
Constater la nullité du contrat de crédit conclu entre M. [Y] et la SA BNP Paribas Personal Finance ;
En conséquence, débouter la SA BNP Paribas Personal Finance de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions.
Dire et juger que la SA BNP Paribas Personal Finance a commis une faute dans la conclusion du contrat de prêt ;
En conséquence, condamner la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à M. [Y] à titre de compensation la somme de 17 258,57 euros, outre les intérêts contractuels à compter du 29 Janvier 2018 et jusqu’au jour du règlement.
A titre infiniment subsidiaire,
Prononcer la déchéance du droit aux intérêts de la SA BNP Paribas Personal Finance ;
Accorder les plus larges délais de paiement à M. [Y] en application des dispositions des articles 1244-1 du code civil ;
En tout état de cause,
Condamner la SA BNP Paribas Personal Finance au paiement au profit de M. [Y] d’une indemnité de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
Condamner la même aux entiers dépens de l’instance.
Par dernières conclusions notifiées le 28 octobre 2020, la société BNP Paribas Personal Finance demande de :
Dire que la dévolution du litige n’a pas pu opérer et que la Cour n’est valablement saisie d’aucune demande de l’appelant ;
Subsidiairement,
Confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a condamné M. [E] [Y] à payer une somme de 16645,41 outre les intérêts au taux contractuel de 6,90 % à compter du 06 mai 2019 date de l’assignation et aux dépens
Réformer le jugement pour le surplus et notamment en ce qu’il a réduit à 10 euros le montant de la clause pénale.
En conséquence,
Condamner M. [E] [Y] à payer une somme de 17 258,57 euros outre les intérêts au taux contractuel de 6,90 % sur la somme de 16 645,41 euros à compter du 06 mai 2019 date de l’assignation et au taux légal pour le surplus jusqu’à complet paiement.
Débouter M. [E] [Y] de toutes ses demandes fins et conclusions.
En tous cas,
Condamner M. [E] [Y] au paiement d’une indemnité de 3000 euros en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens d’appel et sur confirmation de première instance.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions visées.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 janvier 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Pour contester l’effet dévolutif de l’appel formé par M. [Y], la SA BNP Paribas Personal Finance fait valoir que les chefs du jugement critiqués n’ont pas été mentionnés dans la déclaration d’appel mais dans un document annexé auquel la déclaration fait référence.
Mais il convient de relever que l’article 1er du décret 2022-245 du 25 février 2022, applicable aux instances en cours par application de l’article 6, a modifié l’article 901 du code de procédure civile pour consacrer la faculté offerte à l’appelant de joindre, comme en l’espèce, une annexe à la déclaration d’appel.
Il sera constaté que l’annexe à la déclaration d’appel de M. [Y] reproduit le dispositif du jugement attaqué de sorte que l’évolutif de l’appel porte sur l’ensemble des chefs du jugement dont la cour est effectivement saisie.
M. [Y] fait grief au jugement d’avoir écarté le moyen de forclusion de l’action du prêteur.
Par application des dispositions de l’article R. 312-35 du code de la consommation, les actions en paiement engagées par le prêteur à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent, à peine de forclusion, être formées dans les deux ans du premier incident de paiement non régularisé, caractérisé par le défaut de règlement de tout ou partie d’une échéance de remboursement du prêt.
Il est constant que le prêteur a prononcé la déchéance du terme le 27 avril 2017, le premier incident de paiement non régularisé correspondant à l’échéance du 4 février 2016, point de départ du délai pour agir du prêteur.
Pour retenir que l’action du prêteur engagée par assignation des 27 avril et 6 mai 2019 était recevable, le premier juge a retenu que M. [Y] avait été préalablement assigné par acte du 29 janvier 2018 devant le tribunal d’instance de Quimper en paiement des causes impayées du crédit ; que si cette assignation a été annulée par jugement du 19 juillet 2018, elle a cependant interrompu le délai de forclusion conformément aux dispositions de l’article 2241 du code civil.
S’il est constant que par application des dispositions de l’article 2241 alinéa 2, la demande en justice interrompt le délai de prescription et le délai de forclusion y compris lorsque l’acte de saisine de la juridiction est annulé par l’effet d’un vice de procédure, par application de l’article 2243 du code civil, cette interruption est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l’instance ou si sa demande est définitivement rejetée.
Or il est constant que les demandes en paiement du crédit consenti suivant offre préalable du 20 janvier 2014 et formées par assignation du 29 janvier 2018 ont été rejetées par le jugement 19 juillet 2018.
Il n’est pas contesté que ce jugement est définitif et qu’ainsi les demandes en paiement formées par assignation du 19 juillet 2018 ont été définitivement rejetées rendant non avenue l’interruption du délai de forclusion résultant de cette assignation et dont le prêteur ne peut plus se prévaloir.
Il en résulte que la société BNP Paribas Personal Finance est irrecevable en ses demandes comme étant forclose par application de l’article R. 312-35 du code de la consommation l’assignation délivrée le 27 avril 2019 ayant été délivrée plus de deux années après le premier incident de paiement non régularisé en date du 4 février 2016.
Le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions.
La SA BNP Paribas Personal Finance qui succombe sera condamnée aux dépens et à payer à M. [E] [Y] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 12 juin 2020 par le Tribunal Judiciaire de Quimper
Déclare la SA BNP Paribas Personal Finance irrecevable comme étant forclose en ses demandes en paiement des causes du crédit consenti à M. [E] [Y] suivant offre préalable du 20 janvier 2014.
Condamne la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à M. [E] [Y] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamne la SA BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires.
LE GREFFIER LE PRESIDENT