Clause pénale : 5 avril 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/03655

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Clause pénale : 5 avril 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/03655

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 3

ARRET DU 05 AVRIL 2023

(n° , 2 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/03655 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFJLM

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 12 Janvier 2022 -Président du TJ de PARIS – RG n° 21/58528

APPELANTE

S.A.S. S.D.C.R prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliès en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

N° SIRET : 823 290 671

représentée par Me Charles-Hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029

assistée par Me Gautier DORF, avocat au barreau de PARIS, toque : L163, substitué à l’audience par Me Charlène MAIMON; avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur [W], [E], [I] [M]

[Adresse 1]

[Localité 4]

né le 19 Janvier 1967 à [Localité 6]

représenté par Me Audrey KALIFA, avocat au barreau de PARIS, toque : C0942

Madame [K], [N], [Z] [B] épouse [M]

[Adresse 1]

[Localité 4]

née le 03 Avril 1968 à [Localité 5]

représentée par Me Audrey KALIFA, avocat au barreau de PARIS, toque : C0942

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Jean-Paul BESSON, Premier Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Jean-Paul BESSON, Premier Président de chambre

Jean-Christophe CHAZALETTE, Président

Patricia LEFEVRE, conseillère

Greffier, lors des débats : Cécilie MARTEL

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Jean-Paul BESSON, Premier Président de chambre et par Jeanne BELCOUR, greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

Par contrat de réservation de vente en l’état futur d’achèvement en date du 13 mars 2020, M. [M] et Mme [B] épouse [M], ont souhaité acquérir auprès de la société Corsea Promotion 18, pour un prix total de 478 000 euros TTC, les lots 26, 110 et 111 d’un ensemble immobilier dénommé « [Adresse 9] », situé à [Localité 7], [Adresse 8], en Corse.

Selon acte authentique de vente en l’état futur d’achèvement du 12 août 2020, les époux [M] ont acquis cet appartement et ses deux places de parking dans la [Adresse 9] à [Localité 7] en Corse auprès de la société Corsea Promotion 18.

La construction étant dès cette date, hors d’eau et hors d’air, ils ont versé au vendeur une somme de 382 400 euros correspondant à 80% du prix, conformément à l’échéancier stipulé à l’acte de vente.

La livraison, contractuellement fixée au 31 mars 2021, n’a pas été effectuée à cette date.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 02 septembre 2021, le conseil des époux [M] a mis en demeure la société S.D.C.R, anciennement dénommée Corsea Promotion 18, de :

communiquer sous huit jours le détail de l’avancement des travaux de la résidence et plus spécifiquement des lots acquis par les époux [M] ainsi qu’une date ferme de réception,

communiquer le détail et la justification des éventuelles causes de suspension du délai de livraison ayant causé le retard,

leur régler à défaut la somme de 22 950 euros correspondant aux pénalités dues pour le retard entre le 1er avril 2021 au 31 août 2021.

Par courriel en date du 1er octobre 2021, les époux [M] ont été informés de la reprise du chantier et d’une livraison prévisionnelle le 30 mars 2022.

Par acte du 15 novembre 2021, les époux [M] ont fait assigner la société S.D.C.R devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir :

les époux [M] reçus en leur action et la dire bien-fondée, condamner la société S.D.C.R. à payer aux époux [M] la somme provisionnelle de 32 100 euros au titre de l’indemnité contractuelle de retard, à hauteur de 150 euros par jour de retard, sauf à parfaire à la date de l’ordonnance à intervenir, injonction faite à la société S.D.C.R. de transmettre mensuellement aux époux [M] un état précis, actualisée et certifié par l’architecte du chantier de l’avancement des travaux de construction de leur appartement situé au lot 26 et de leurs places de parkings situés aux lots 110 et 111 tels que définis dans le contrat de vente du 12 août 2021, jugé que cet état certifié devra être assorti de photographies les plus récentes de chacune des pièces de chacun des lots 26, 110 et 111, jugé que cet état certifié devra être adressé pour la première fois 8 jours après la signification de l’ordonnance à intervenir, puis mensuellement avant le 5 de chaque mois jusqu’à la livraison effective du bien, assortir à cette injonction, une astreinte de 100 euros par état et par jour de retard à compter du premier jour de retard pour chacun des états, et ce jusqu’au 30 mars 2022, date de la livraison annoncée par la société S.D.C.R., et enfin, jugé que les jours d’astreinte se cumuleront pour chaque état manquant ou communiqué avec retard.

Par ordonnance réputée contradictoire du 12 janvier 2022, rectifiée le 2 février 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris a :

condamné la société S.D.C.R à payer aux époux [M] la somme provisionnelle de 32 100 euros à valoir sur les indemnités contractuelles de retard de livraison ;

enjoint à la société S.D.C.R de communiquer mensuellement aux époux [M] une attestation du maître d’oeuvre relative à l’état d’avancement des travaux de leur appartement (lot 26) et de leurs places de parking (lots 110 et 111), pour la première fois le 8ème jour suivant la signification de la présente ordonnance puis mensuellement avant le 5 de chaque mois jusqu’au 30 mars 2022 date annoncée de livraison ;

assortit cette injonction d’une astreinte de 50 euros par état et par jour de retard à compter du premier jour de retard jusqu’au 30 mars 2022, date annoncée de livraison ;

dit qu’en cas de retard les astreintes seront calculées par jour et par état et se cumuleront ainsi jusqu’à la transmission de l’état d’avancement le plus récent, valant transmission des précédents ;

condamné la société S.D.C.R aux dépens ;

condamné la société S.D.C.R à payer aux époux [M] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

rappelé l’exécution provisoire de la présente décision.

Par déclaration du 11 février 2022, la société S.D.C.R. a relevé appel de l’ensemble des chefs du dispositif de la décision.

Elle demande à la cour, par ses dernières conclusions remises et notifiées le 31 août 2022, et au visa des articles 835 alinéa 2 du code de procédure civile, 1231-5 du code civil et L. 131-1 du code des procédures civiles d’exécution, de :

la déclarer recevable et bien-fondée en son appel et en l’ensemble de ses demandes ;

infirmer l’ordonnance du 12/01/2022 n° RG 21/58528 en ce qu’elle :

l’a condamné à payer aux époux [M] la somme provisionnelle de 32 100 euros à titre de l’indemnité contractuelle de retard, à hauteur de 150 euros par jour de retard, sauf à parfaire à la date de l’ordonnance à intervenir ;

lui a fait injonction de transmettre mensuellement aux époux [M] un état précis, actualisé et certifié par l’architecte du chantier de l’avancement des travaux de construction de leur appartement situé au lot 26 et de leurs places de parking situés aux lots 110 et 111 tels que définis dans le contrat de vente du 12 août 2021 ;

jugé que cet état certifié devra être assorti de photographies les plus récentes de chacune des pièces de chacun des lots 26, 110 et 111 ;

jugé que cet état certifié devra être adressé pour la première fois 8 jours après la signification de l’ordonnance à intervenir, puis mensuellement avant le 5 de chaque mois jusqu’à la livraison effective du bien ;

assorti cette injonction d’une astreinte de 100 euros par état et par jour de retard à compter du premier jour de retard pour chacun des états, et ce jusqu’au 30 mars 2022, date de la livraison annoncée qu’elle a annoncé ;

jugé que les jours d’astreinte se cumuleront pour chaque état manquant ou communiqué avec retard ;

l’avoir condamné à payer aux époux [M] la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;

l’avoir condamné aux entiers dépens de l’instance.

et statuant à nouveau,

à titre principal,

constater que la demande de provision des époux [M] se heurte à des contestations sérieuses ;

constater que l’obligation de faire de communiquer l’état d’avancement du chantier ne repose sur aucun fondement légal ou contractuel et qu’elle se heurte à des contestations sérieuses ;

rejeter la demande incidente formulée par les époux [M] en ce qu’ils sollicitent la condamnation de la société S.D.C.R pour la somme provisionnelle de 40.800 euros au titre de l’indemnité contractuelle de retard à hauteur de 150 euros par jour de retard, entre le 01 novembre 2021 et le 30 juillet 2022 ;

à titre subsidiaire,

constater que le montant de la clause pénale est manifestement excessif et que la modulation de ce montant ne relève pas des pouvoirs du juge des référés ;

en conséquence,

dire n’y avoir lieu à référé ;

en tout état de cause,

débouter les époux [M] de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;

condamner les époux [M] au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile à son profit ;

condamner les époux [M] aux entiers dépens.

Les époux [M] demandent à la cour, par leurs dernières conclusions remises et notifiées le 05 septembre 2022, et au visa des articles 565 et 566, 700, 835 du code de procédure civile, et 1103 et 1104 du code civil, de :

les recevoir en leur appel incident ;

confirmer l’ordonnance du 12 janvier 2022 du Juge du référés du tribunal judiciaire de Paris, rectifiée selon ordonnance du 02 février 2022 du même juge, en toutes ses dispositions ;

y ajoutant,

condamner la société S.D.C.R. à leur payer la somme provisionnelle de 42.600 euros au titre de l’indemnité contractuelle de retard, à hauteur de 150 euros par jour de retard, entre le 1er novembre 2021 et le 05 septembre 2022, sauf à parfaire à la date de l’arrêt à intervenir ;

enjoindre à la société S.D.C.R. de leur communiquer mensuellement une attestation du maître d »uvre relative à l’état d’avancement des travaux de leur appartement (lot 26) et de leurs places de parking (lots 110 et 111), pour la première fois le 8 e jour suivant la signification de l’arrêt à intervenir puis mensuellement avant le 5 de chaque mois jusqu’au 31 décembre 2022 ;

assortir cette injonction d’une astreinte de 50 euros par état et par jour de retard à compter du premier jour de retard pour chacun des états, et ce jusqu’au 31 décembre 2022, dans l’attente de la communication d’une date de livraison ferme par la société S.D.C.R. ;

juger que les jours d’astreinte se cumuleront pour chaque état manquant ou communiqué avec retard ;

débouter la société S.D.C.R. de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

condamner la société S.D.C.R. à leur payer la somme de 5 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société S.D.C.R. aux entiers dépens de l’instance d’appel, dont distraction au profit de Me Kalifa, avocat au Barreau de Paris, sur son affirmation de droit.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 septembre 2022.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

SUR CE,

– Sur l’existence d’une obligation non sérieusement contestable :

En vertu de l’article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

La société appelante indique que n’étant pas comparante en première instance, elle n’a pas été en mesure de formuler de demandes. Elle soutient que l’interprétation d’un contrat ne relève pas de la compétence du juge des référés, juge de l’évidence. Or l’acte de vente prévoit des causes légitimes de suspension du délai de livraison. D’abord, la crise exceptionnelle de Covid-19 a eu des conséquences inévitables sur l’avancement du chantier. Il est sollicité que soit constaté que la crise sanitaire liée à l’épidémie de Covid-19 est une cause légitime de suspension du délai de livraison telle que stipulée à l’acte de vente. Cette crise a légitimement reporté la livraison du bien immobilier des époux [M] de trois mois. En application de l’acte de vente, ces événements décalent mécaniquement la date de livraison d’une durée égale au double du nombre de jours d’arrêt du chantier, soit six mois, ce qui représente 180 jours.

De plus, il y a également eu une suspension estivale, qui n’était pas prévisible puisque la date première de livraison était en mars, ne grevant pas les travaux de la pause estivale. Mais en raison du décalage initié par la pause forcée de la crise de Covid-19, une suspension estivale a eu lieu. En application de l’acte de vente, ces événements décalent mécaniquement la date de livraison d’une durée égale au double du nombre de jours d’arrêt du chantier, soit 122 jours, ce qui représente 4 mois et 2 jours.

Il y a enfin une suspension supplémentaire pour cause d’intempérie. Conformément aux dispositions de l’acte de vente, ces événements ont décalé la date de livraison du chantier de 208 jours, soit près de 7 mois.

Il y a donc des contestations sérieuses portant sur l’existence des causes légitimes de suspension du délai de livraison qui relèvent de l’appréciation du juge du fond. Le juge des référés ne peut donc que constater qu’il n’y a pas lieu à référé.

Les époux [M] soutiennent que la somme provisionnelle de 32 100 euros liée aux indemnités de retard est justifiée et doit être confirmée. En effet, les causes légitimes de retard dans l’achèvement des travaux alléguées par la société S.D.C.R. ne leur ont jamais été notifiées préalablement et ils n’ont jamais reçu de courrier du maître d’oeuvre leur justifiant des causes de ce retard, qui n’est par ailleurs pas contesté.

Par conséquent, faute d’une telle lettre, les circonstances invoquées ne peuvent contractuellement justifier le retard de la livraison et l’obligation de la société S.D.C.R. d’indemniser les concluants n’est donc pas sérieusement contestable.

Il ressort des pièces produites aux débats, et notamment du contrat de réservation en date du 13 mars 2020 et de l’acte authentique du 12 août 2020, que les époux [M] ont signé un acte de vente en l’état futur d’achèvement avec la société Corsea Promotion 18 désormais dénommée société S.D.C.R. portant sur l’acquisition d’un appartement et de deux places de parking constitués des lots 26, 110 et 110 au sein de la [Adresse 9] à [Localité 7] en Corse du Sud. Cet immeuble était déjà hors d’eau, cloison et hors d’air et la livraison était prévue le 31 mars 2021.

Cet acte authentique de vente en l’état futur d’achèvement prévoit expressement que ‘ le vendeur s’oblige à mener les travaux de telle manière que les ouvrages et les éléments d’équipements nécessaires à l’utilisation des biens vendus soient achevés et livrés au plus tard le 31 mars 2021, sauf survenance d’un cas de force majeure ou de suspension du délai de livraison.

En cas de retard du vendeur à mettre les biens à la disposition de l’acquéreur, ce dernier aura droit à une indemnité fixée à titre de stipulation de pénalité, à la somme de cent cinquante euros par jour de retard, sauf survenance de l’une des causes légitimes de suspension énumérées ci-dessous et notamment :

– intempéries au sens de la réglementation des travaux sur les chantiers de bâtiment

– injonctions administratives ou judiciaires de suspendre ou d’arrêter les travaux, à moins que lesdites injonctions ne soinent fondées que sur des fautes ou des négligences imputables au vendeur.

Ces différentes circonstances auraient pour effet de retarder la livraison du bien d’un temps égal au double de celui effectivement enregistré en raison de leur répercussion sur l’organisation générale du chantier.

Il est précisé que dans un tel cas, la justification de la survenance de l’une de ces circonstances sera apportée par le vendeur à l’acquéreur par une lettre du Maître d’Oeuvre’.

Il n’est en cause ni la validité ni l’inteprétation de ce contrat dont la clause précitée est claire et ne nécessite pas ni d’être analysée ni d’être interprétée.

Il est constant que cet appartement n’a pas été livré à cette date contractuellement prévue du 31 mars 2021.

C’est ainsi que selon laclause précitée, il appartenait à la société S.D.C.R. d’indiquer par courrier aux époux [M] les raisons de ce retard et les causes légitimes de suspension du délai de livraison.

Or, cette dernière nommait un médiateur par l’intermédiaire de la société Gestiprom pour tenter de parvenir à un accord amiable entre les parties et le projet d’accord transactionnel transmis par le médiateur le 8 juillet 2021 n’était pas été signé par les époux [M].

Puis, par courriels des 6 juillet et 1er octobre 2021 la société S.D.C.R. indiquait qu’elle procédait à une reprise des travaux et que la livraison de la résidence était reportée au 30 mars 2022. Elle reconnaissait dans le dernier mail que ‘c’est avec retard que ce chantier a réouvert et qu’un retard supplémentaire est à prendre en considération avant la livraison de la résidence. Il était précisé que la société s’était rapproché de la plupart des futurs propriétaires afin de négocier des protocoles transactionnels visant à les indemniser du retard de livraison ‘.

C’est ainsi que la sociétét S.D.C.R. n’a jamais indiqué offiellement aux époux [M] les raisons de ce retard ni fait état de causes légitimes de suspension du délai de livraison avant ses conclusions d’appel du 31 août 2022, faisant état de l’impact de la crise liée à l’épidémie de Covid-19 sur la durée des travaux, des arrêtés municipaux de la commune de [Localité 7] de 2020 et 2021 et des interruptions au titre des intempéries.

Surtout, il y a lieu de constater que pour l’ensemble des causes légitimes de suspension des délais de livraison, il faut produire une attestation du maitre d’oeuvre et que les parties ont convenu, aux termes de la convention précitée, de s’en remettre à ce dernier pour apprécier la légitimité de la suspension.

Lorsqu’elle évoque les causes de suspension de délais de livraison, la société appelante se contente de considération d’ordre général sans jamais apporter aux débats le moindre élément justifiant de leur impact sur le chantier de [Localité 7], et encore moins de leur constat selon les formes prévues par la convention des parties, à savoir, une attestation du maître d’oeuvre.

En l’état du dossier, la contestation de l’appelentante ne paraît pas, avec l’évidence requise en référé, susceptible de prospérer au fond et de faire échec à la demande des époux [M] d’être indemnisés du retard pris dans la réalisation des travaux de construction de leur appartement situé dans la [Adresse 9]. L’ordonnance de référé du tribunal judiciaire de Paris sera confirmée sur ce point.

– Sur le montant de l’indemnité provisionnelle :

En vertu du 2e alinéa de l’article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier.

Les époux [M] soutiennent la confirmation de l’ordonnance entreprise qui leur a alloué une provision d’un montant de 32 100 euros.

La société S.D.C.R. considère que cette indemnité pour retard est une clause pénale, et que, compte tenu de la faculté réservée au juge du fond de moduler la clause pénale prévue au contrat, le juge des référés ne pourra que constater qu’il existe des contestations sérieuses, que seul le juge du fond doit trancher, de sorte que l’ordonnance dont appel doit être infirmée.

Il ressort des pièces produites aux débats que selon l’acte authentique de vente en l’état futur d’achèvement signé le 12 août 2020, dans la partie ‘ délai-livraison’, il est indiqué que le vendeur s’oblige à mener les travaux de telle manière que les ouvrages et les éléments d’équipement nécessaires à l’utilisation des biens vendus soient achevés et livrés au plus tard le 31 mars 2021, sauf survenance d’un cas de force majeure ou de suspension du délai de livraison.

En cas de retard du vendeur à mettre les biens à disposition de l’acquéreur, ce dernier aura droit à une indemnité forfaitairement fixée, à titre de stipulation de pénalité, à la somme de 150 euros par jour de retard, sauf survenance de l’une des causes légitimes de suspension énumérées ci-dessous.

Il est constant que l’appartement en cause n’a pas été livré le 31 mars 2021 et la société S.D.C.R. ne conteste pas l’existence d’un retard qui lui est imputable puisque dans son courriel du 1er octobre 2021 elle précisait qu’elle a allait proposer des protocoles d’accord transactionnels pour indemniser les propriétaires pour le retard pris dans la livraison de leur bien.

Il est exact qu’il n’appartient pas au juge des référés de modifier ou de moduler une clause pénale, ce qui est de la compétence du seul juge du fond.

Pour autant, la simple application de la clause contractuelle de l’acte authentique de vente en l’état futur d’achèvement du 12 août 2020, prévoit une indemnisation forfaitaire de 150 euros par jour de retard du constructeur.

Non seulement, l’indemnité journalière correspond au minimum légal prévu par l’article R 231-14 du code de la construction et de l’habitation, mais la société S.D.C.R ne démontre pas, aucune pièce en ce sens n’étant produite, que cette clause, présente un caractère manifestement excessif au regard du préjudice subi par les acquéreurs, seul élément d’appréciation à prendre en compte.

De la date de livraison initiale de l’appartement fixée contractuellement au 31 mars 2021 à la date de l’assignation en référé devant le tribunal judiciaire de Paris du 1er novembre 2021, il s’est écoulé 216 jours à 150 euros, ce qui correspond à une somme de 32 400 euros, mais les époux [M] ont sollicité à titre d’indemnité provisionnelle une somme de 32 100 euros qui est justifiée et qui leur sera allouée. L’ordonnance entreprise sera donc confirmée sur ce point.

– Sur la demande reconventionnelle de paiement d’une somme provisionnelle complémentaire de 46 200 euros au titre des indemnités de retard de livraison :

Les époux [M] sollicitent une indemnité provisionnelle complémentaire de 46 200 euros correspondant à la période du 1er novembre 2021, correspondant à leur assignation devant le juge des référés, au 5 septembre 2022, correspondant à leurs dernières conclusions d’appel.

La société S.D.C.R. conclut au rejet de la demande.

– C’est ainsi que selon la clause précitée du contrat de vente en l’état futur d’achèvement qui n’est pas sérieusement contestable, il est dû aux acquéreurs une somme complémentaire de 150 euros par jour de retard du 1er novembre 2021 au 5 septembre 2022. Cela donne le montant suivant : 150 euros x 308 jours = 46 200, ce qui correspond au montant sollicité par les époux [M].

Il convient en outre de préciser que la société S.D.C.R. a produit un courriel du 27 juillet 2022 indiquant qu’une pré-réception des travaux aurait lieu entre le 19 septembre et le 3 octobre 2022. Ce qui veut dire qu’ à cette dernière date l’appartement et les deux parkings n’étaient toujours pas livrés aux époux [M].

Dans ces conditions, la société S.D.C.R. sera condamnée à verser aux époux [M] une provision complémentaire de 46 200 euros.

– Sur la demande de communication des états d’avancement des travaux :

La société S.D.C.R. soutient que les injonctions de communiquer des attestations sur l’avancement des travaux constituent une obligation de faire qui ne repose sur aucun fondement contractuel ou légal, et qui ne peut donc pas être ordonné par décision de référé. De plus, cette communication ne peut être effectuée par elle seule, puisque c’est la société Atelier SAG qui est maître d’oeuvre. Enfin, concernant l’astreinte, au regard des éléments précédemment développés, cette astreinte n’est pas justifiée, car étant assortie à des mesures non justifiées.

Les époux [M] estiment que la confirmation des obligations de communication sous astreinte des informations précises sur l’état d’avancement de leurs lots est le seul moyen pour les acquéreurs de disposer d’une information transparente et précise sur l’état d’avancement des travaux de leur lot par le vendeur. Cette mesure peut être ordonnée selon l’article 835 du code de procédure civile. La différence alléguée entre la société S.D.C.R. et la société maître d’oeuvre n’est qu’une façade, car M. [X] est le gérant de ces deux sociétés.

Il ne ressort d’aucune clause de l’acte authentique de vente en l’état futur d’achèvement signé le 12 août 2020 par les parties que le vendeur ait une quelconque obligation contractuelle de communiquer à l’acquéreur des des attestations sur l’état d’avancement de la construction de l’appartement acquis. Aucune disposition légale n’impose non plus une telle obligation.

De plus, il ressort des pièces produites par les parties qu’une pré-réception des travaux a eu lieu entre le 19 septembre et le 3 octobre 2022 et la société S.D.C.R. a adressé à pusieurs reprises aux époux [M] des photographies et rapport de l’état d’avancement des travaux par courriels des 9, 12, 19 et 30 mai 2022

C’est ainsi qu’en l’absence d’obligation légale on contractuelle, il n’appartient pas au juge des référés d’enjoindre à une partie une obligation de faire qui n’est prévue par aucune disposition.

Dans ces conditions, il y a lieu d’infirmer l’ordonnance entreprise du 12 janvier 2022 en ce qu’elle a enjoint à la société S.D.C.R. de communiquer mensuellement à M. et Mme [M] une attestattion du maître d’oeuvre relative à l’état d’avancement des travaux de leur appartement et de leurs parkings, pour la première fois le 8e jour suivant la signification de la présente ordonnance puis mensuellement avant le 5 de chque mois jusqu’au 30 ars 2022, date annoncée de la livraison, et ce sous astreinte de 50 euros par état et par jour de retard.

De même, sur le même fondement, il y a lieu de rejeter la demande complémentaire des époux [M] d’enjoindre à la société S.D.C.R. de communiquer mensuellement un état d’avancement des travaux de leur appartement et de leurs places de parking sur la période compris jsuqu’au 31 décembre 2022.

– Sur les autres demandes :

Les dispositions de l’ordonnance entreprise relatives à la charge des dépens et à l’indemnisation fondée sur l’article 700 du code de procédure civile seront confirmées.

L’appelante et les intimés sollicitent chacun l’allocation d’une somme d’argent au titre de l’article 700 du code de procédure civile et la condamnation de la partie adverse au paiement des dépens.

Il est inéquitable de laisser à la charge de époux [M] leurs frais irrépétibles non compris dans les dépens et il leur sera donc alloué une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’est pas, par contre, pas inéquitable de laisser à la charge de la société S.D.C.R. la charge de ses frais irrépétibles et aucune somme ne lui sera donc allouée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La société S.D.C.R. qui succombe, sera tenue aux dépens d’appel avec distraction au profit de Maître Audrey Kalifa, avocat au barreau de Paris sur son affirmation de droit.

PAR CES MOTIFS,

Confirme l’ordonnance entreprise du 12 janvier 2022, rectifiée le 2 février 2022, en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’elle a enjoint à la SAS S.D.C.R. de communiquer mensuellement à Mme et M. [M] une attestation du maître d’oeuvre relative à l’état d’avancement des travaux de leur appartement et de leurs places de parking pour la première fois le 8ème jour suivant la signification de la présente ordonnance puis mensuellement avant le 5 de chaque mois jusqu’au 30 mars 2022 date annoncée de la livraison, et ce , sous astreinte de 50 euros par état et par jour de retard à compter du 1er jour de retard jusqu’au 30 mars 2022;

Statuant à nouveau et y ajoutant

Condamne la société S.D.C.R. à payer aux époux [M] une indemnité provisionnelle complémentaire de 46 200 euros au titre de l’indemnité contractuelle de retard pour la période comprise entre le 1er novembre 2021 et le 5 septembre 2022;

Rejette la demande des époux [M] d’injonction de communiquer mensuellement une attestation du maître d’oeuvre relative à l’état d’avancement des travaux de leur appartement et de leurs places de parking à compter de la signification de l’arrêt à intervenir et jusqu’au 31 décembre 2022;

Condamne la société S.D.C.R. à payer aux époux [M] une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en appel;

Condamne la société S.D.C.R. aux dépens d’appel avec distraction au profit de Maître Audrey Kalifa, avocat au barreau de Paris sur son affirmation de droit.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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