ARRÊT DU
05 Avril 2023
JYS / NC
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N° RG 21/00686
N° Portalis DBVO-V-B7F -C472
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[R] [L]
C/
SA CAISSE D’EPARGNE AQUITAINE POITOU- CHARENTES
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GROSSES le
aux avocats
ARRÊT n° 156-23
COUR D’APPEL D’AGEN
Chambre Civile
Section commerciale
LA COUR D’APPEL D’AGEN, 1ère chambre dans l’affaire,
ENTRE :
Monsieur [R] [L]
né le [Date naissance 4] 1973 à [Localité 8] ([Localité 8])
de nationalité française, Intérimaire
domicilié : [Adresse 3]
[Localité 6]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/01910 du 04/06/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle d’AGEN)
représenté par Me Edmond COSSET, SCP RMC & ASSOCIES, avocat au barreau d’AGEN
APPELANT d’un jugement du tribunal de commerce d’AGEN en date du 24 mars 2021, RG 2020 005239
D’une part,
ET :
SA CAISSE D’EPARGNE ET DE PRÉVOYANCE AQUITAINE POITOU-CHARENTES pris en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège RCS BORDEAUX 353 821 028
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Betty FAGOT, avocate postulante au barreau d’AGEN
et Me Benjamin HADJADJ, membre de la SARL AHBL AVOCATS, avocat plaidant au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE
D’autre part,
COMPOSITION DE LA COUR :
l’affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 04 mai 2022 devant la cour composée de :
Présidente : Claude GATÉ, Présidente de Chambre
Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller
Jean-Yves SEGONNES, Conseiller qui a fait un rapport oral à l’audience
Greffière : Lors des débats : Charlotte ROSA , adjointe administrative faisant fonction
Lors de la mise à disposition : Nathalie CAILHETON
ARRÊT : prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
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[R] [L], entrepreneur en boulangerie à [Localité 7] (Gers), est titulaire d’un compte de dépôt à la Caisse d’Epargne d’Aquitaine Poitou Charentes, assorti d’une autorisation de découvert permanent de 5 000 euros ; le 2 décembre 2010, il a contracté un prêt d’équipement en véhicule et matériel et de trésorerie de 13 000 euros au taux de 6,49 % d’intérêt annuel remboursable en 60 mensualités de 243,67 euros. Il a fait l’objet, à l’adresse postale du fonds de commerce :
– le 23 décembre 2013, d’un préavis de dénonciation de concours professionnel par résiliation d’autorisation du découvert dans les 60 jours,
– le 10 mars 2014, de deux mises en demeure de payer sous quinzaine de la réception : 5 124,09 euros de découvert et 974,68 euros en principal d’échéances de prêt impayées depuis décembre 2013 plus 7,43 euros de pénalités de retard,
– le 1er avril 2014, de deux déchéances du terme au 26 mars précédent aux montants de 5 124,09 euros et 7 806,07 euros, respectivement.
[R] [L] a fait des paiements partiels à hauteur de 720 euros après les déchéances du terme.
Par jugement réputé contradictoire du 10 avril 2019 sur assignation délivrée le 15 mars 2019, le tribunal de commerce d’Agen a condamné [R] [L] au principal, à payer 9 639,09 euros avec intérêts conventionnels majorés de 3 points, soit 6,95 % à compter du 24 janvier 2019 au titre du prêt et 5 124,09 euros avec intérêts légaux à compter du 1er avril 2014 au titre du solde débiteur du compte courant, décision non avenue car jamais signifiée.
Suivant acte d’huissier délivré le 30 octobre 2020, la Caisse d’Epargne et de prévoyance Aquitaine Poitou Charentes a fait assigner [R] [L] sur le fondement de ses différents concours, à payer au principal :
* 9 639,09 euros outre intérêts postérieurs de retard au taux conventionnel majoré de trois points soit 6,95 % l’an à compter du 24 janvier 2019 au titre du prêt n° 8745726,
* 5 124,09 euros outre intérêts postérieurs au taux légal à compter du 1er avril 2014 au titre du solde débiteur du compte courant n° [XXXXXXXXXX02].
Par jugement réputé contradictoire du 24 mars 2021, le tribunal a :
– condamné [L] [R] à payer à la Caisse d’Epargne et de Prévoyance Aquitaine Poitou Charentes la somme principale de 9 639,09 euros avec les intérêts conventionnels majorés de trois points soit 6,95 % l’an à compter du 24 janvier 2019 jusqu’à parfait paiement au titre du prêt n° 8745726,
– condamné [L] [R] à payer à la Caisse d’Epargne et de Prévoyance Aquitaine Poitou Charentes la somme principale de 5 124,09 euros avec les intérêts légaux à compter du 1er avril 2014 jusqu’à parfait paiement au titre du solde débiteur du compte courant n° [XXXXXXXXXX02],
– condamné la partie défenderesse à payer 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamnée cette partie aux entiers dépens,
– liquidé les dépens dont frais de greffe pour le présent jugement à la somme de 63,36 euros.
Pour condamner [R] [L], le tribunal a jugé qu’il n’a répondu à aucune mise en demeure alors qu’il s’est montré défaillant dans le remboursement des échéances de son prêt ainsi que pour solder son compte courant débiteur.
Par déclaration au greffe de la cour, [R] [L] a fait appel de tous les chefs de ce dispositif, le 30 juin 2021 ; il a intimé la Caisse d’Epargne et de Prévoyance Aquitaine Poitou Charentes.
Selon dernières conclusions visées au greffe le 18 mars 2022, [R] [L] demande de :
– infirmer le jugement et,
statuant à nouveau, de :
– juger la Caisse irrecevable en sa demande en paiement de 974,68 euros au titre des échéances du prêt du 5 décembre 2013 au 5 mars 2014 inclus, comme prescrite,
– réduire l’indemnité de déchéance du terme du prêt réclamé par la Caisse à 1 euro,
– juger la Caisse irrecevable en sa demande en paiement de 5 124,09 euros au titre du découvert en compte, comme prescrite,
– statuer ce que de droit concernant le surplus des demandes de la Caisse d’Epargne et de Prévoyance Aquitaine Poitou Charentes,
– juger n’y avoir lieu à indemnité de l’article 700 du code de procédure civile à la Caisse d’Epargne et de Prévoyance Aquitaine Poitou Charentes,
– statuer ce que de droit quant aux dépens.
L’appelant expose et fait valoir :
– sur le prêt, que les dettes payables successivement se prescrivent par 5 ans à compter de leurs échéances successives et non de la date de la mise en demeure ; ce principe étant général, toutes la demande est prescrite au jour de l’assignation ; subsidiairement, le montant de la clause pénale de 198,10 euros est excessif ;
– sur le compte courant, qu’à défaut de stipulation expresse, le compte bancaire est personnel et son découvert, qui n’est pas professionnel, même si les correspondances sont adressées à sa boulangerie et relève du délai biennal de forclusion du code de la consommation ; la dette étant exigible à la date de la mise en demeure, la demanderesse est forclose en son action.
Selon dernières conclusions visées au greffe le 24 mars 2022, la Caisse d’Epargne et de Prévoyance Aquitaine Poitou Charentes demande de :
– débouter [R] [L] de toutes ses demandes,
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement et,
y ajoutant, de :
– condamner [R] [L] aux dépens et à payer 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
L’intimée expose que les échéances impayées entre décembre 2013 et mars 2014 sont de 974,68 euros, les intérêts de retard, frais et accessoires au 26 mars 2019 sont de 29,78 euros, le capital restant dû est de 6 603,51 euros et les intérêts de retard de 2 553,02 euros outre l’indemnité de déchéance du terme de 198,10 euros ; elle rappelle qu’elle n’a pas fait signifier un premier jugement identique réputé contradictoire du 10 avril 2019 dans les six mois, ayant reçu 720 euros de paiements partiels puis a refait la procédure.
Elle fait valoir que le point de départ du délai est celui de la déchéance du terme rendant les dettes exigibles au 26 mars 2014 et la prescription a été interrompue par le paiement valant reconnaissance de dette. Sur le prêt, [R] [L] ne dit pas en quoi la clause pénale est excessive ; sur le découvert en compte, il est incontestable que le solde n’a été utilisé qu’à des fins professionnelles excluant les dispositions du code de la consommation.
La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions et moyens des parties, fait expressément référence à la décision entreprise et aux dernières conclusions déposées en application de l’article 455 du code de procédure civile.
La procédure a été clôturée le 13 avril 2022.
MOTIFS
1 / sur la nature des engagements de [R] [L] :
Il ressort des pièces communiquées que le compte ouvert à la Caisse d’Epargne sous le n° [XXXXXXXXXX02], s’intitule aux relevés de compte « Boulangerie Mr [L] » et il en résulte que ce compte est expressément professionnel. Il s’en déduit que [R] [L] n’a jamais eu la qualité de consommateur lorsqu’il y a négocié cette autorisation de découvert et encore lorsqu’il a contracté le prêt, au nom de l’enseigne de « boulangerie », d’équipement en véhicule, matériel ainsi que besoin en fonds de roulement, que le montant du prêt a été versé sur ce compte ainsi que les mensualités de remboursement y ont été prélevées, et ce puisqu’il n’agissait que dans sa sphère professionnelle.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
2 / Sur la prescription :
L’article 110-4 du code de commerce dispose : » I.-Les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.(‘) « .
Suivant l’alinéa 2 de l’article 478 du code de procédure civile, la procédure est reprise depuis la réitération de la citation primitive et l’assignation du 15 mars 2019 a interrompu la prescription du délai quinquennal pour agir. Les paiements partiels, valant reconnaissance de dette, ont également interrompu le délai.
En matière de recouvrement des créances professionnelles, en cas de déchéance du terme, l’ensemble des sommes dues devient exigible à cette date et non pas à chacune des échéances successives et l’action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme qui emporte son exigibilité.
En l’espèce, la prescription quinquennale a couru sauf 11 jours et ni la dette de découvert en compte ni la dette de crédit ne sont prescrites.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
3 / Sur le prêt :
Le débiteur ne conteste que le montant de la clause pénale et non le principal de la dette ni les intérêts. Au vu du délai des cinq années objectivement acquises pour se libérer sans s’y conformer, le montant de l’indemnité est justifié.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
4 / Sur le découvert :
Le débiteur ne conteste aucunement le calcul du principal de la dette, ses intérêts et accessoires et la créancière en a déduit des versements partiels sur le montant desquels le débiteur s’accorde également. La demande est justifiée.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
5 / Sur les dépens :
En application de l’article 696 du code de procédure civile, [R] [L] qui succombe derechef en son appel et en toutes ses demandes, les supportera entièrement.
Le jugement sera confirmé, et complété, de ce chef.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, et en dernier ressort,
Confirme le jugement,
Y ajoutant,
Condamne [R] [L] aux dépens d’appel,
Dit n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile.
Vu l’article 456 du code de procédure civile, le présent arrêt a été signé par Dominique BENON, conseiller ayant participé au délibéré en l’absence de Mme la présidente de chambre empêchée, et par Nathalie CAILHETON, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, Le Conseiller,