Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 3
ARRET DU 28 MARS 2023
(n° , 2 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/14271 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCOLB
Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Juin 2020 -TJ à compétence commerciale de PARIS – RG n° 17/08144
APPELANTE
S.C.I. DU BASSIN NORD immatriculée au RCS de Paris sous le n°422 733 402 représentée par son gérant domicilié audit siège en cette qualité
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020
Assistée de par Me Emmanuel ROSENFELD de l’ASSOCIATION VEIL JOURDE, avocat au barreau de PARIS, toque : T06
INTIMEE
S.A.R.L. GOOD FOOT BY H immatriculée au RCS de Paris sous le n°523 797 223, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065
Assistée par Me Gilles HITTINGER ROUX de la SCP HB & ASSOCIES-HITTINGER-ROUX BOUILLOT & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0497
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 07 Mars 2023, en audience publique, rapport ayant été fait par Madame Nathalie RECOULES, Présidente de chambre conformément aux articles 804, 805 et 907 du CPC, les avocats ne s’y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Nathalie RECOULES, Présidente de chambre
Douglas BERTHE, Conseiller
Emmanuelle LEBEE, magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
Greffier, lors des débats : Laurène BLANCO
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par Nathalie RECOULES, Présidente de chambre
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Nathalie RECOULES, Présidente de chambre et par Laurène BLANCO, Greffière, présent lors de la mise à disposition.
Exposé du litige
Par acte sous seing privé en date du 10 décembre 2010, la société civile immobilière du Bassin Nord a donné à bail commercial à la société Good Foot By H (la société Good Foot) un local commercial au rez-de-chaussée du centre commercial Le Millénaire alors en construction, situé [Adresse 5]), pour exercer une activité de vente de chaussures sous l’enseigne ‘ Harcourt ‘.
Le bail commercial a été consenti pour une durée de dix ans à compter du 22 décembre 2010, date de livraison du local, moyennant un loyer annuel minimum hors taxes hors charges de 97 500 euros et un loyer variable correspondant à 7,10 % hors taxes sur le chiffre d’affaires hors taxes réalisé lors de l’année civile.
Le bailleur a consenti au preneur une franchise de loyers à compter de la date de livraison jusqu’à l’ouverture du centre commercial puis des abattements de loyers pour les trois premières années, soit d’avril 2011 à avril 2015.
Le 15 décembre 2014, le bailleur a fait délivrer au preneur une sommation de payer la somme de 58 789,23 euros TTC au titre des 3e et 4e trimestres 2014. Le 27 avril 2017, il lui a fait délivrer un commandement visant la clause résolutoire d’avoir à payer la somme de 318 441,10 euros TTC représentant l’arriéré locatif.
Le 18 mai 2017, la société Good Foot a fait opposition audit commandement devant le tribunal de grande instance de Paris.
Le 16 juin 2017, compte tenu des irrégularités affectant ce commandement de payer, la société civile immobilière du Bassin Nord a fait délivrer au preneur un second commandement visant la clause résolutoire d’avoir à payer la somme de 318 753,96 euros.
Par acte du 7 juillet 2017, la société Good Foot a fait assigner la société civile immobilière du Bassin Nord en opposition à commandement devant le tribunal de grande instance de Paris. Les deux instances ont été jointes.
Parallèlement, la société civile immobilière du Bassin Nord, par assignation délivrée le 27 juin 2017, a diligenté une action devant le tribunal de grande instance de Bobigny, aux ins de paiement de l’arriéré de loyers et charges. Le tribunal de grande instance de Bobigny s’est dessaisi au profit du tribunal de grande instance de Paris et l’instance a été jointe aux précédentes.
Par jugement en date du 2 juin 2020, le tribunal de grande instance de Paris a :
– dit que le commandement de payer visant la clause résolutoire délivré le 27 avril 2017 était nul et de nul effet ;
– débouté la société Good Foot de sa demande de nullité du commandement de payer visant la clause résolutoire délivré le 16 juin 2017 ;
– dit que la société civile immobilière du Bassin Nord a manqué à son engagement contractuel de délivrer un local dans un centre commercial de haut de gamme présentant une décoration soignée ;
– condamné la société civile immobilière du Bassin Nord à payer à la société Good Foot la somme de 300 000 euros au titre du préjudice matériel subi ;
– constaté l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire à la date du l6 juillet 2017 ;
– dit bien fondée la société Good Foot en sa contestation des charges facturées à hauteur de la somme annuelle de 11 478,80 euros HT à compter du 1er janvier 2012 ;
– condamné la société Good Foot à payer à la société civile immobilière du Bassin Nord la somme de 454 504,62 euros TTC au titre des loyers, charges et taxes arrêtés au 30 septembre 2019, déduction faite des charges facturées non justifiées sur la période considérée ;
– rejeté la demande de remboursement de la société Good Foot au titre des charges locatives ;
– ordonné la compensation entre la créance de dommages-intérêts et la créance de loyers et charges déterminée à hauteur de la plus faible ;
– accordé à la société Good Foot des délais de paiement pour s’acquitter de sa dette à hauteur de la somme de 154 504,62 euros après compensation, dit que les effets de la clause résolutoire étaient suspendus durant le cours des délais, qu’à défaut de respect de l’échéancier fixé ou du paiement du loyer courant, l’intégralité de la dette deviendra immédiatement exigible et la clause résolutoire reprendra ses effets, que dans cette hypothèse la société civile immobilière du Bassin du Nord pourra procéder à l’expulsion de la société Good Foot et de tout occupant de son chef, que la société Good Foot devra payer une indemnité d’occupation égale au montant du loyer augmenté des charges et taxes jusqu’à la libération effective des locaux et la remise des clés ;
‘ condamné la société Good Foot aux dépens, dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ordonné l’exécution provisoire du présent jugement et a rejeté toute autre demande.
La société civile immobilière du Bassin Nord a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 8 octobre 2020, la société Good Foot par déclaration en date du 7 décembre 2020. Les deux instances ont été jointes.
Moyens et prétentions en cause d’appel
Pour leur exposé complet, il est fait renvoi aux écritures visées ci-dessous :
Vu les conclusions récapitulatives de la société civile immobilière du Bassin Nord, en date du 28 février 2023, tendant à voir la cour infirmer le jugement entrepris sauf en ce qu’il a constaté l’acquisition de la clause résolutoire au 16 juillet 2017, rejeté les autres griefs soulevés par la société Good Foot et condamné celle-ci à lui payer la somme de 454 504,62 euros, statuer à nouveau, rejeter les demandes de la société Good Foot, ordonner en conséquence de l’acquisition de la clause résolutoire le 16 juillet 2017 l’expulsion de la société Good Foot ainsi que celle de tout occupant de son chef, condamner la société Good Foot à lui verser la somme de 357 235,22 euros au titre des charges et loyers à la date d’acquisition de la clause résolutoire en date du 16 juillet 2017, une indemnité d’occupation (en ce compris les taxes et charges) de 615 078,06 euros arrêtée au 23 janvier 2023, sauf à parfaire jusqu’à la libération effective des lieux par remise des clefs, et subsidiairement à titre de loyers si c’était la résolution judiciaire qui était prononcée, des dommages et intérêts moratoires en application de l’article 29 du bail, subsidiairement, déduire la somme de 87 325,48 euros au titre des charges et loyers au titre des périodes de fermeture administrative, en tout état de cause, condamner la société Good Foot à lui verser à une somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et aux dépens et une somme de 18 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel.
Vu les conclusions récapitulatives de la société Good Foot, en date du 24 février 2023, tendant à voir la cour infirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de nullité du commandement de payer visant la clause résolutoire délivré le 16 juin 2017, en ce qu’il a constaté l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire à la date du 16 juillet 2017 et l’a condamnée à payer à la société civile immobilière du Bassin Nord la somme de 454 504,62 euros TTC au titre des loyers, charges et taxes arrêtés au 30 septembre 2019, déboutée de sa demande de remboursement des charges locatives, dit qu’à défaut de respect de l’échéancier fixé ou du paiement du loyer courant, l’intégralité de la dette deviendra immédiatement exigible et la clause résolutoire reprendra ses effets et dit que dans cette hypothèse la société civile immobilière du Bassin Nord pourra procéder à son expulsion et que la société Good Foot devra lui verser une indemnité d’occupation égale au montant du loyer augmenté des charges et taxes jusqu’à la libération effective des locaux et la remise des clés, en ce qu’il a condamné la société Good Foot aux dépens, dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ordonné l’exécution provisoire, confirmer le jugement pour le surplus, statuant à nouveau, rejeter l’ensemble des demandes, fins de la société civile immobilière du Bassin Nord qui ne seraient pas compatibles avec les siennes, dire que le commandement de payer visant la clause résolutoire du 16 juin 2017 est nul et de nul effet, condamner la société civile immobilière du Bassin Nord à lui payer la somme de 1 488 755 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice contractuel subi, du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2018, sauf à parfaire jusqu’au jour de la décision à intervenir, la somme de 110 196,48 euros TTC, au titre des charges réglées du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2020, sauf à parfaire, dire que le montant des échéances facturées au titre du 2e trimestre 2020, du mois de novembre 2020 et du 29 janvier 2021 au 9 juin 2021, soit un montant total de 99 804,24 euros n’est pas exigible, à titre subsidiaire, ordonner la compensation du montant des condamnations de la société civile immobilière du Bassin Nord avec les causes des commandements, dire que la clause résolutoire est réputée ne pas avoir jouée, accorder à la société Good Foot un délai de 24 mois, dire que les effets de la clause résolutoire seront suspendus pendant ce délai, réduire la clause pénale à néant comme manifestement excessive, en tout état de cause, condamner la société civile immobilière du Bassin Nord à lui payer la somme 30 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens dont la distraction est demandée.
Discussion
Sur les obligations contractuelles de la bailleresse :
Il résulte des articles 1134 et 1147 du code civil dans leur version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 et de l’article 1719 du même code, que le bailleur d’un local situé dans un centre commercial est tenu de délivrer au preneur la chose louée, d’entretenir cette chose en état de servir à son usage, en ce incluses les parties communes accessoires nécessaires de la chose louée, d’en faire jouir paisiblement le preneur pendant toute la durée du bail et d’exécuter de bonne foi ses obligations.
À défaut de stipulations particulières du bail, le bailleur n’est pas tenu d’assurer la bonne commercialité du centre. Cependant, il peut engager sa responsabilité, s’il manque à des obligations résultant de stipulations contractuelles particulières.
Sur le défaut de délivrance d’un centre commercial haut de gamme :
Les engagements contractuels des parties sont exposés pages 9 à 11 du jugement attaqué, auquel il est fait renvoi exprès.
à l’appui de sa prétention de voir confirmer le jugement en ce qu’il a dit que la société civile immobilière du Bassin Nord a manqué à son engagement contractuel de délivrer un local dans un centre commercial de haut de gamme présentant une décoration soignée, le preneur soutient qu’en application de l’article 3 des conditions particulières du bail au cas où il serait dans « l’impossibilité de poursuivre son exploitation sous [cette] enseigne », le bailleur l’obligerait à lui soumettre préalablement pour agrément « une enseigne de notoriété et de niveau de gamme et qualité équivalentes », que l’article 13 des conditions générales interdit au preneur d’exploiter les locaux en vue de brader ses prix, que l’article 14 l’oblige à mettre en ‘uvre tous les moyens possibles pour hisser le niveau de qualité de son magasin, notamment en matière d’agencement et de décoration, à hauteur de celui atteint par la réalisation du centre commercial, qu’il résulte de l’ensemble des clauses particulières et générales du bail l’obligation pour le bailleur de délivrer un local situé dans un centre commercial de très haute qualité, avec une décoration soignée, avec des magasins de gamme ne pratiquant pas la vente avec produits d’appels à prix réduit, alors que le bailleur, depuis 2014 a fait entrer dans le centre des enseignes bas de gamme, telle que Sati, Burger King, Chaussea, Neoness, Hema, peu soigneuses de la présentation de leur boutiques, qu’il ne veille plus à ce que le caractère haut de gamme du centre soit porté à la connaissance du public au moyen des activités d’animation, qu’il ne veille pas à ce que la vacance du centre baisse et ne conclut que des baux temporaires.
Cependant, comme le soutient la société civile immobilière du Bassin Nord, ces clauses ne créent aucune obligation à charge du bailleur mais démontrent que celui-ci exigeait le respect d’un équilibre entre les différents commerces et services. Elles ne définissaient d’obligations qu’à la charge du seul preneur afin que soit garantie, en cas de changement d’enseigne, son remplacement par une enseigne de notoriété et de niveau de gamme et qualité équivalentes et non de haut de gamme, et pour exiger que toutes formules de ventes ayant pour objet de permettre au preneur d’attirer la clientèle en lui proposant des prix inférieurs à ses prix habituels ou à des prix de référence, soient, pour respecter l’image du centre, organisées de façon concertée par l’Association des Commerçants, ou justifiées par des circonstances exceptionnelles et, dans ce cas, expressément autorisées par le représentant du bailleur, et simultanément par l’administration compétente, conformément à la réglementation en vigueur.
Sur le défaut de réalisation d’opérations de promotion et d’animation :
La clause 12-4 des conditions générales du bail, intitulée » renonciation à recours ‘, stipule que ‘ le bailleur […] n’est tenu à aucune obligation de résultat dans le cadre de ses actions d’animation, de promotion, de communication et de publicité. Par conséquent, le bailleur […] ne saurait assumer une quelconque responsabilité liée aux effets des opérations mises en place par le fonds commun sur l’activité exercée par le preneur dans le local ou sur l’état de la commercialité du centre commercial et le preneur le dégage de toute responsabilité. »
Le preneur ne discute pas la validité de cette clause de renonciation à recours, mais soutient que le bailleur a ainsi contracté une obligation de moyens à laquelle il n’a pas satisfait, que, notamment, les commerçants n’étaient pas convoqués à la réunion de présentation du plan annuel d’animation et de promotion, que l’espace dédié était insuffisant, que les animations sont organisées à l’extérieur du centre ou de façon dématérialisée, qu’il n’a bénéficié d’aucune retombée positive alors qu’il a contribué au fonds d’animation et de promotion prévu au bail.
Cependant, outre que la clause de renonciation à recours ne permet pas en elle-même de définir a contrario les contours d’une obligation de moyens à mettre en ‘uvre pour l’animation, la promotion et la commercialisation du centre, l’article 12 des conditions particulières du bail relatif au « fonds d’animation et de promotion du centre commercial », en son article 12.3.3 ‘ modalités de détermination des contributions annuelles ‘ est relatif aux obligations du preneur de contribuer financièrement aux actions d’animation et de promotion mais ne met à la charge du bailleur aucune obligation particulière.
Par ailleurs, le bailleur justifie avoir organisé une campagne de promotion pour l’ouverture du centre, des réunions de commerçants auxquels il a présenté les opérations de promotion et d’animation pour les années 2016, 2017, 2018 et 2019 et de l’organisation d’opérations de promotion et d’animation pour les années 2018 à 2022.
En tout état de cause, ainsi que l’a relevé à bon droit le premier juge et que le soutient le bailleur, dès lors que le preneur a expressément dégagé le bailleur de toute responsabilité sur les effets de ces opérations d’animation et de promotion sur son activité, sa responsabilité ne pouvant être recherchée au regard des effets de ces opérations sur activité exercée par le preneur ou l’état de commercialité du centre commercial, il n’est pas fondé à reprocher au bailleur une quelconque inexécution contractuelle de ce chef.
Sur le défaut d’entretien des parties communes et des éléments d’équipements communs :
L’obligation de délivrance du bailleur prévue de l’article 1719 du code civil s’étend, s’agissant de locaux situés dans un centre commercial, aux parties communes et à leur entretien.
Le preneur soutient, en substance, que l’immeuble présente un état général de dépérissement, s’étendant aux portes vitrées coulissantes, escalators, ascenseurs, éclairages, toilettes, parking système de climatisation, de chauffage et de diffusion de musique qui ont conduit à des pétitions. Il en déduit que le bailleur ne satisfait pas à son obligation de délivrance.
Cependant, ainsi que l’a relevé le premier juge pour dire que la preuve d’un manquement de la société civile immobilière à son obligation d’entretien des parties communes et des éléments d’équipements communs du centre n’était pas établie, le preneur ne produit aucun élément sur la durée et l’intensité des dysfonctionnements dénoncés, alors même que la simple constatation de l’un d’entre eux à un instant donné ne témoigne pas de leur dysfonctionnement permanent, que le constat d’huissier de la partie adverse du 22 mars 2019 indique que les portes sont en état de fonctionnement à l’exception de la porte 2 dont le remplacement est programmé et a été effectué en mai 2019, qu’un contrat de maintenance est versé aux débats, que si des toilettes au rez-de-chaussée et au 1er étage ont été en travaux, selon le constat précité de 2019, ces sanitaires sont fonctionnels, que leur nettoyage est assuré de même que l’entretien général des parties communes du centre commercial, que les dysfonctionnements allégués du chauffage ou de la climatisation ne sont pas plus établis à la lumière des seules pétitions versées aux débats, de même que la défectuosité de l’éclairage, contredits par le procès-verbal de constat du 22 mars 2019, étant souligné que le centre commercial dispose d’un éclairage naturel dispensé par des verrières, les plafonds et les façades vitrées et qu’il est démontré que les escalators ont été réparés, le bailleur versant aux débats plusieurs contrats d’entretien des équipements communs.
Sur les charges :
Le bailleur doit justifier les charges qu’il facture et leur conformité aux stipulations contractuelles relatives à la répartition des charges telles que définies aux articles 27 et suivants des conditions particulières et générales du bail, les appels de provisions stipulés contractuellement impliquant des régularisations annuelles.
à l’appui de sa demande tendant à voir condamner le bailleur à lui restituer les charges réglées s’élevant, du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2020, sauf à parfaire, à la somme de 110 196,48 euros TTC, le preneur expose, en substance, qu’il convient d’apprécier les obligations du bailleur à la lumière de la loi n°2014-616 du 18 juin 2014, qu’il appartenait au bailleur de produire tous les justificatifs des dépenses engagées et de procéder aux régularisations nécessaires, ce qu’il n’a pas fait, que dès lors, la facturation de provision annuelle pour charges des années 2012 à 2020 n’est pas causée et qu’il convient de condamner le bailleur à lui restituer cette somme.
Cependant, dès lors qu’il n’est pas contesté par le preneur que le détail des décomptes des charges lui a été adressé, qu’il n’expose pas en quoi, au -delà d’une affirmation de principe, le bailleur lui aurait facturé des charges non contractuellement prévues au bail, et surtout dès lors que le bailleur a mis à sa disposition les pièces justificatives des charges et que le preneur n’expose pas ce qui l’aurait empêché de consulter les pièces ainsi mises à sa disposition, ces charges sont causées et il n’y a pas lieu à répétition.
Sur la validité du commandement de payer visant la clause résolutoire :
Le preneur soutient qu’il convient de prononcer la nullité du commandement en raison de la mauvaise foi du bailleur.
Cependant il résulte de ce qui a été dit plus haut que le commandement de payer n’a pas été délivré de mauvaise foi par le bailleur de sorte qu’il n’y a pas lieu de l’annuler.
Il en résulte que c’est à bon droit, puisqu’il n’est pas discuté que le preneur ne s’est pas acquitté des sommes dues dans le délai d’un mois suivant la signification du commandement du 16 juin 2017, que le jugement attaqué a constaté l’acquisition de la clause résolutoire à la date du 16 juillet 2017.
Sur la suspension de la clause résolutoire et l’octroi de délais :
Le preneur sollicite la confirmation de la décision en ce qu’elle a suspendu les effets de la clause résolutoire et accordé 24 mois de délais. Il expose qu’il est de bonne foi, a des difficultés de trésorerie dues aux manquements persistants du bailleur à ses obligations et aux conséquences du Covid, qu’il a toujours réglé 30 % des loyers, que la fixation d’un loyer de renouvellement à la baisse au 22 décembre 2020 lui permettra de supporter le règlement des échéances courantes et des éventuelles mensualités au titre de tout éventuel arriéré locatif qui resterait à sa charge, alors que la situation financière du bailleur, filiale de deux importantes sociétés foncières, est sans commune mesure avec la sienne.
Cependant, comme le soutient le bailleur, alors que selon l’article 1343-5 du code civil permet au juge d’échelonner la dette dans la limite de deux ans, le preneur n’a plus réglé le loyer facturé depuis le 1er juillet 2014, réduisant unilatéralement ses paiements à environ 30 % du loyer contractuellement prévu, qu’il a ainsi laissé s’aggraver sa dette pendant plus de huit années, étant observé qu’il ne soutient pas s’être acquitté depuis le jugement entrepris, assorti de l’exécution provisoire, ni de la totalité des loyers courants ni des 24 mensualités de 6 437 euros. Il en résulte qu’il n’y a pas lieu de lui accorder les délais sollicités.
Sur le montant des sommes impayées :
Sur le montant des loyers dus à la date d’acquisition de la clause résolutoire :
Les chiffres n’étant pas autrement discutés et compte tenu de ce qui a été plus haut concernant les charges, le montant des charges et loyers impayés à la date de l’acquisition de la clause résolutoire soit le 16 juillet 2017 est de 357 235,22 euros.
Le bailleur demande la condamnation du preneur à lui payer la somme de 615 078,06 euros, charges comprises, arrêtée au 23 janvier 2023, au titre des indemnités d’occupation tandis que le preneur, soutient qu’aucune somme n’est due pour les périodes de fermeture administrative dues à l’épidémie de Covid 19 et la déduction en conséquence des échéances facturées au titre du 2e trimestre 2020, du mois de novembre 2020 et du 29 janvier 2021 au 9 juin 2021, soit un montant total de 99 804,24 euros.
Cependant, les moyens invoqués par le preneur, à savoir, le manquement du bailleur à son obligation de délivrance, la suspension du contrat du fait de la force majeure ou du fait du prince, ainsi que la perte et les vices de la chose louée, sont inopérants dès lors que le contrat de bail est résilié depuis le 16 juillet 2017.
Sur le montant des intérêts moratoires :
La cour adopte les motifs du premier juge qui, pour réduire la somme réclamée par le bailleur au titre de l’article 28 du bail et la réduire à la somme de 100 euros, a relevé qu’il s’agissait d’une clause pénale et que le montant réclamé de 89 836,31 euros, sur la base d’une majoration de cinq points du taux d’intérêt légal à compter de la date d’exigibilité de la somme due, apparaissait manifestement excessif au regard de la dette locative.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
L’intimée qui succombe doit être condamnée aux dépens, déboutée de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer à l’appelante, en application de ces dernières dispositions, la somme dont le montant est précisé au dispositif.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement en ce qu’il a annulé le commandement de payer en date du 27 avril 2017, il a constaté l’acquisition de la clause résolutoire à la date du 16 juillet 2017 et débouté la société civile immobilière du Bassin Nord de sa demande de dommages-intérêts moratoires ;
L’infirme sur le surplus des dispositions soumises à la cour,
Statuant à nouveau ;
Déclare mal fondées les demandes de délais et de suspension de l’acquisition de la clause résolutoire formées par la société Good Foot by H ;
Autorise la société civile immobilière du Bassin du Nord à faire procéder à l’expulsion de la société Good Foot by H et de tout occupant de son chef et dit qu’elle devra payer une indemnité d’occupation égale au montant du loyer augmenté des charges et taxes jusqu’à la libération effective des locaux et la remise des clés,
Dit mal fondées les demandes de dommages-intérêts et de restitution de charges formées par la société Good Foot By H ;
Condamne la société Good Foot By H à payer à la société civile immobilière du Bassin Nord :
‘ la somme de 357 235,22 euros au titre des loyers et charges dus au 16 juillet 2017 ;
‘ celle de 615 078,06 euros, charges comprises, au titre des indemnités d’occupation à la date du 23 janvier 2023 ;
‘ les dépens de première instance et d’appel ainsi que la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rejette toute autres demandes.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE