Clause pénale : 27 avril 2023 Cour d’appel de Chambéry RG n° 22/00685

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Clause pénale : 27 avril 2023 Cour d’appel de Chambéry RG n° 22/00685

COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 27 AVRIL 2023

N° RG 22/00685 – N° Portalis DBVY-V-B7G-G7AL

[J] [C] [L] etc…

C/ [J] [C] [L] etc…

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation de départage d’ANNECY en date du 30 Mars 2022, RG F 20/00244

APPELANTS ET INTIMES INCIDENTS

Monsieur [J] [C] [L]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Thierry BILLET, avocat au barreau d’ANNECY, substitué par Me Frédéric MATCHARADZE, avocat au barreau de CHAMBERY

S.A.S. ALPINE INDUSTRY

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représentée par Me Cécile PESSON de la SARL OCTOJURIS – MIFSUD – PESSON – AVOCATS, avocat plaidant inscrit au barreau de LYON

et par Me Ingrid-Astrid ZELLER, avocat postulant inscrit au barreau de CHAMBERY

INTIMES ET APPELANTS INCIDENTS

S.A.S. ALPINE INDUSTRY

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représentée par Me Cécile PESSON de la SARL OCTOJURIS – MIFSUD – PESSON – AVOCATS, avocat plaidant inscrit au barreau de LYON

et par Me Ingrid-Astrid ZELLER, avocat postulant inscrit au barreau de CHAMBERY

Copies délivrées le :

Monsieur [J] [C] [L]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Thierry BILLET, avocat au barreau d’ANNECY, substitué par Me Frédéric MATCHARADZE, avocat au barreau de CHAMBERY

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l’audience publique des débats, tenue en double rapporteur, sans opposition des parties, le 23 Mars 2023, devant Monsieur Frédéric PARIS, Président de chambre, désigné à ces fins par ordonnance de Madame la Première Présidente, chargé du rapport, et Madame Françoise SIMOND, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, avec l’assistance de Madame Capucine QUIBLIER, Greffier lors des débats, et lors du délibéré :

Monsieur Frédéric PARIS, Président,

Madame Isabelle CHUILON, Conseiller,

Madame Françoise SIMOND, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.

********

FAITS ET PROCÉDURE

Par jugement du 3 décembre 2019 le tribunal de commerce d’Annecy a confié la reprise de la SCOP Alpine Aluminium à la société Samfy Invest, qui s’engageait à reprendre quarante neuf salariés, dont M. [J] [C] [L] qui travaillait en qualité de conducteur référent qualité depuis le 1er mars 2010.

M. [C] [L] a été licencié par lettre du 22 septembre 2020 pour motif économique.

M. [C] [L] a saisi le conseil de prud’hommes d’Annecy le 10 novembre 2020.

Le syndicat CFDT est intervenu volontairement.

Par jugement en date du 30 mars 2022 le conseil de prud’hommes présidé par le juge départiteur a :

– dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

– condamné en conséquence la société Alpine Industry à payer à M. [C] [L] la somme de 12 978 € à titre de dommages et intérêts, celle de 2163 € pour irrégularité de procédure et 1500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté M. [C] [L] de ses demandes relatives au congés payés et de l’indemnité de licenciement,

– ordonné à la société Alpine Industry de rectifier l’attestation Pôle emploi dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement sur la base des sommes figurant sur les fiches de paie sur la période du 1er octobre 2019 au 30 septembre 2020.

– débouté le syndicat CFDT de ses demandes,

– rejeté les demandes formulées par la société Alpine Steel au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Alpine Industry aux dépens.

M. [C] [L] a interjeté appel par déclaration du 21 avril 2022 au réseau privé virtuel des avocats.

Par conclusions notifiées le 13 septembre 2022 auxquelles la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et de ses moyens, M. [C] [L] demande à la cour de :

– confirmer le jugement sauf sur le quantum des dommages et intérêts,

statuant à nouveau,

A titre principal,

– condamner la société Alpine Industry à lui payer la somme de 54 075 € à titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation du maintien à l’emploi et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à titre subsidiaire la somme de 20 332 € net de CSG et CRDS,

– condamner la société Alpine Steel à lui payer la somme de 3500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il soutient en substance que :

La motivation de la lettre de licenciement faisant état de l’incendie de juillet 2019 et de l’interruption totale d’activité ne correspond pas à un motif économique.

La seule motivation du licenciement est la suppression spéculative de tous les postes des salariés repris.

L’employeur ne produit aucun document comptable établissant la cause économique.

Il ne prouve pas qu’il ne pouvait poursuivre une activité.

Il ne peut se fonder sur une nécessaire dépollution du site alors qu’il n’établit pas que ces travaux sont indispensables pour reprendre l’activité. Ces travaux ont pour objectif de présenter aux élus une demande de permis de construire de logements sur le site.

Un audit de sécurité avait été réalisé dans le cadre de procédure commerciale, et le rapport concluait que les travaux de mise en sécurité pouvaient être achevés en 4 à 6 mois soit en juin 2020.

Si de telles dépenses étaient nécessaires, Alpine Industry n’explique pas en quoi cela constituerait un motif économique de licenciement.

Alpine Industry qui soutient que l’atelier fonderie s’est écroulé n’apporte aucune preuve sur ce point.

De manière générale si la poursuite de l’activité n’était plus possible, pour quelles raisons les sociétés Alpine ont licencié des salariés pour faute grave ‘ Et pourquoi un licenciement économique collectif n’a pas été mis en oeuvre ‘

La société s’était engagée pour la fonderie à s’appuyer dans un premier temps sur des demi produits proposés par l’usine Trimet qui a accepté de participer au projet.

L’employeur ne peut se fonder sur l’état de la fonderie pour justifier le licenciement.

Dans son offre de reprise, l’employeur expliquait que la société Alpine Steel serait crée et dédiée à l’activité façonnage notamment sur les produits aciers et faisait état de partenariat avec la société Decremps BTP.

En réalité il n’existait aucun partenariat avec cette société, il s’agissait d’une tromperie.

Surtout, cette activité de Alpine Industry permettait le travail immédiat des salariés dans un premier temps pour se former et mettre en place une entité nouvelle.

Il n’y avait donc aucun motif de reporter l’investissement promis.

Il y a dans cette procédure de licenciement une transgression manifeste des engagements pris devant le tribunal de commerce.

Un élément nouveau est apparu avec la requête du procureur de la république d’Annecy soutenant que les engagements pris devant le tribunal de commerce n’ont pas été tenus.

Cette requête confirme que les engagements de maintien à l’emploi n’ont pas été respectés et le salarié est en droit de préciser sa demande indemnitaire au regard de cette violation de la clause commerciale.

Les demandes ont un lien suffisant avec la demande initiale. Le réquisitoire du procureur de la république d’Annecy constitue un fait nouveau, qu’il ignorait jusque là et qui est rattaché à la question de la légalité du licenciement intervenu.

Son préjudice correspond au différentiel entre la durée de la période de maintien à l’emploi et la date de rupture du contrat de travail.

Il a été licencié avec un préavis de deux mois soit jusqu’au 21 janvier 2021. L’engagement courait jusqu’au 3 décembre 2022 soit sur 23 mois, ce qui pour un salaire mensuel de 2259 € établit un préjudice de 51 957 €.

La procédure de licenciement est irrégulière, une personne étrangère à la société ayant assisté M. [R] lors de l’entretien préalable.

Par conclusions notifiées le 5 janvier 2023 auxquelles la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et de ses moyens, la société Alpine Industry demande à la cour de :

– déclarer irrecevable la demande en paiement de la somme de 54 075 €,

– infirmer le jugement,

statuant à nouveau,

– dire et juger que le licenciement pour motif économique est fondé,

– débouter M. [C] [L] de ses demandes,

Subsidiairement,

– dire que les demandes ne sont pas justifiées tant dans leur principe que leur quantum,

– dire qu’en l’absence de préjudice démontré, l’éventuelle condamnation sera équivalente à trois mois de salaire, et limitée à la somme de 6489 €,

– dire et juger que la demande de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de maintien dans l’emploi est mal dirigée et injustifiée,

Plus subsidiairement,

– confirmer la condamnation dans son montant,

dans tous les cas,

– confirmer le jugement sur le rejet de ses demandes au titre du solde de tout compte,

– condamner M. [C] [L] à lui payer la somme de 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner M. [C] [L] aux dépens.

Elle fait valoir que :

La demande de rappel de salaire est irrecevable au vu de l’appel limité aux dispositions expressément critiquées.

Il s’agit aussi d’une demande nouvelle, ne pouvant reposer sur la survenance de faits nouveaux le salarié connaissant parfaitement les faits depuis l’origine de la procédure.

Il n’appartenait pas au tribunal de commerce dans son jugement de se prononcer sur les ruptures des contrats de travail.

Le jugement du 30 septembre 2022 a bien relevé que les ruptures de contrat de travail ‘ne sont pas consécutives au plan de cession mais relève d’un acte d’administration des cessionnaires’.

De plus, cette demande nouvelle est caduc car elle n’a pas été formulée lors des premières conclusions notifiées, conformément à l’article 910-4 du code de procédure civile.

Au fond, des accidents industriels majeurs se sont produits causant un accident mortel et plusieurs dizaine de blessés.

L’usine est à l’arrêt et le personnel placé au chômage partiel.

En 2020 elle a rencontré des difficultés supplémentaires, avec la nécessité de dépolluer le site.

L’atelier fonderie s’est écroulé en août 2020.

Elle établi les difficultés économiques en versant les liasses fiscales 2020 et 2021 et l’attestation du commissaire aux comptes.

De ce fait, les perspectives de reprise d’activité sont hypothéquées.

La crise sanitaire a retardé les travaux de dépollution.

L’ensemble du site est dans cette attente en situation de danger et aucune reprise de travail n’est prévu à court terme.

Il est évident que cette situation a eu un impact sur les pertes d’exploitation et la trésorerie.

Le licenciement économique a été précédé de nombreuses démarches notamment au niveau du reclassement du salarié.

A titre subsidiaire, l’indemnité est limitée par le barème de l’article L 1235-3 du code du travail.

Faute d’établir son préjudice, le salarié ne peut prétendre qu’à trois mois de salaire au vu de son ancienneté.

Pour contourner ce barème le salarié présente désormais une demande principale au titre de la violation de l’obligation de maintien dans l’emploi, il s’agit d’un subterfuge grossier.

Cette demande est dépourvue de fondement juridique.

Il est faux de prétendre que l’emploi aurait dû être maintenu.

La cour de cassation a déjà jugé qu’ ‘en l’absence de tout engagement relatif au maintien des emplois sur une durée déterminée après la reprise, la cour d’appel en a déduit exactement que la responsabilité de M… ne peut être recherchée’ (Cass soc 2 février 2022).

Sur le quantum, celui-ci n’est pas justifiée. Aucun préjudice distinct n’est établi.

L’instruction de l’affaire a été clôturée le 23 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de la demande de dommages et intérêts formulée en cause d’appel, l’appelant a limité son appel au montant des dommages et intérêts accordés par le conseil des prud’hommes.

Il a repris dans ses conclusions d’appel remis au greffe dans le délai d’appel de l’article 908 du code de procédure civile sa demande tendant à la condamnation de l’employeur à des dommages et intérêts supérieurs aux dommages et intérêts alloués par le jugement attaqué.

Rien n’interdit à l’appelant d’augmenter ses demandes par des conclusions postérieures et de modifier leur fondement juridique.

La demande du salarié formulée dans ses conclusions récapitulatives n’est pas une demande de rappel de salaire, il s’agit d’une demande de dommages et intérêts que le salarié évalue au montant des salaires qu’il aurait perçu en cas de maintien dans l’emploi.

De telles modifications ont un lien évident et suffisant avec la demande initiale du salarié qui était de demander la réparation du préjudice subi du fait du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Au fond, la lettre de licenciement fixant les limites du litige produite aux débats expose:

Faisant suite à notre entretien du vendredi 11 septembre 2020 nous vous informons de notre décision de vous licencier pour le motif économique suivant :

En effet suite à l’incendie de l’atelier laquage en juillet 2019 puis de l’écroulement d’une partie de l’atelier fonderie en août 2020 au sein de la société Alpine Industry, l’activité est totalement et durablement interrompue sans visibilité sur un hypothétique redémarrage.

En conséquence, nous n’avons d’autre choix que de supprimer le poste de conducteur référent qualité que vous occupez, poste exclusivement en lien avec cette activité suspendue.

Malgré nos recherches, nous n’avons identifié aucune possibilité de reclassement…

La lettre de licenciement doit contenir les motifs du licenciement.

L’article L 1233-16 du code du travail dispose : La lettre de licenciement comporte l’énoncé des motifs économiques invoqués par l’employeur.

Ces motifs doivent être précis et matériellement vérifiables.

En l’espèce, la lettre de licenciement fait état de sinistres et d’une interruption totale et durable d’activité, et la suppression du poste du salarié.

Cette situation entraîne de fait des conséquences économiques.

Le juge en cas de litige est donc en mesure de vérifier si le licenciement a bien une cause économique.

Les difficultés économiques doivent être appréciées à la date de la rupture du contrat de travail soit en septembre 2020.

L’article L 1233-3 du code du travail prévoit que constitue un licenciement économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques, à une cessation d’activité de l’entreprise, ou à une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité.

Ainsi que l’a souligné pertinemment le premier juge l’incendie est intervenu plus de quatorze mois avant le licenciement et n’a pas empêché le repreneur de reprendre le contrat de travail du salarié.

L’employeur produit le bilan et comptes de résultat de l’exercice clos au 31 décembre 2021 avec des indications portant sur l’exercice N -1.

Si le bilan de l’année 2021 porte sur une période postérieure au licenciement, il reste que les indications chiffrées de l’année de l’année N -1 établissent que la société a subi en 2020 un résultat d’exploitation négatif de 126 595,50 €, qu’elle n’a dégagé aucun bénéfice, et que résultat avant impôt est de – 130 484,69 €.

Bien que la société connaissait des difficultés économiques lors du licenciement l’employeur n’a repris aucune activité en rapport avec son activité industrielle depuis la cession dont il a bénéficié alors qu’il s’était engagé à reprendre l’activité dans un délai de neuf mois.

Si la crise sanitaire en mars 2020 n’a pu que retarder la reprise, elle n’explique en aucun cas que plus de trente mois après le plan de cession, aucune activité n’ait été maintenue.

Au contraire la société Alpine Industry et les deux autres sociétés du même groupe dirigé par M. [R] ont renoncé à toute reprise d’activité en prétextant le danger que représenterait des cuves contenant des produits radio-actifs et la nécessité de dépolluer le site.

Pourtant le dirigeant de ces sociétés rompu aux affaires connaissait cette situation lors de la reprise.

L’employeur n’établit par aucune pièce qu’il était nécessaire pour la sécurité du site de neutraliser les cuves de produits radio-actifs. Bien plus en effectuant ces travaux, alors qu’il bénéficiait d’une autorisation d’exploitation encore valable, jusqu’au 17 janvier 2024 ainsi qu’il ressort de l’autorisation de l’Autorité de sûreté nucléaire du 20 novembre 2018 produite aux débats, il compromettait au moins partiellement toute reprise de l’activité concernée par ces cuves.

L’employeur a donc rendu de facto l’exploitation de l’activité concernant les cuves sans objet.

Un tel comportement montre que l’employeur n’a eu très rapidement aucune intention de reprendre l’activité.

En outre aux termes de l’offre de reprise, la société Alpine Steel filiale de société Alpine Industry s’engageait à exploiter une activité de façonnage sur les produits aciers et faisait état d’un partenariat avec la société Decremps BTP, basée à [Localité 5]. Il s’engageait à implanter avec ce partenariat une unité industrielle de façonnage et d’investir en conséquence.

Or le représentant de cette société a témoigné n’avoir eu aucun contact avec la société Alpine Steel depuis la reprise.

Ce projet d’activité de façonnage n’a jamais vu le jour.

L’activité Aluminium n’a pas plus reprise.

Concernant l’activité fonderie, le repreneur s’était aussi engagé à se fournir en demi-produits auprès de la société Trimet à [Localité 7] qui acceptait de participer au projet.

Cette activité n’a pas non plus repris. Si l’employeur soutient que l’atelier fonderie a subi un effondrement en août 2020, il ne fournit aucune pièce relatif à ce sinistre ; il ne justifie en outre par aucun élément de preuve qu’avant ce sinistre il avait pris contact avec la société Trimet.

Le dirigeant s’engageait aussi sur le volet emploi à créer cent emplois en quatre ans dont trente et un dans un délai deux années et s’engageait à ne pas rompre les contrats de travail transférés pour motif économique avant un délai de trois années.

Il est constant qu’aucun emploi n’a été crée depuis la reprise, bien plus la quasi totalité des salariés dont les contrats de travail avait été transférés ont été licenciés.

L’employeur n’a donc envisagé aucune reprise d’exploitation sérieuse et les salariés repris n’ont pas repris le travail et les contrats de travail ont été rompus soit dans le cadre de ruptures conventionnelles soit dans le cadre de procédures de licenciement comme en l’espèce pour le salarié.

Enfin il n’est pas contesté que les bâtiments du site sont actuellement loués, cette location n’ayant aucun lien avec l’activité des sociétés repreneuses, ce qui laisse douter pour le moins de la véritable volonté de l’employeur de reprendre à terme une activité industrielle.

Par son comportement particulièrement fautif voire frauduleux, l’employeur a rendu de fait les difficultés économiques inévitables et le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

C’est donc à juste titre que le conseil de prud’hommes a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur le préjudice, le jugement du tribunal de commerce en date du 3 décembre 2019 prévoit dans son dispositif le versement d’une pénalité de 12 500 € pour tout licenciement économique d’un salarié repris dans les trois ans suivant la cession.

Il s’agit d’une clause pénale en cas de licenciement intervenu dans un délai de trois ans après la cession et non d’un engagement à un maintien de l’emploi des salariés repris dans un délai déterminé.

Le repreneur ne s’est donc pas engagé sur une durée précise de maintien dans l’emploi.

C’est donc à tort que le salarié demande la réparation de son préjudice sur la base des salaires qu’il aurait dû percevoir s’il avait bénéficié d’un maintien dans l’emploi.

S’agissant du préjudice de perte d’emploi, le salarié avait une ancienneté de dix ans.

Il percevait un salaire mensuel brut moyen de 2163 €.

Il a droit en application de l’article L 1235-3 du code du travail à une indemnité minimum de trois mois et maximum de dix mois.

Le salarié a retrouvé un emploi et perçoit un salaire mensuel brut de plus de 2000 €.

Compte tenu de ces éléments, le conseil de prud’hommes en allouant une indemnité correspondant à six mois de salaire a exactement apprécié l’indemnité revenant au salarié conformément à l’article L 1235-3 du code du travail.

Enfin le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné l’employeur à une indemnité pour non respect de la procédure de licenciement alors que le cumul d’une telle indemnité avec une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est écarté par l’article L 1235-2 du code du travail.

En application de l’article L 1235-4 du code du travail, il convient d’ordonner d’office le versement par l’employeur des indemnités de chômage du jour du licenciement jusqu’au jour du présent arrêt dans la limite de six mois.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

CONFIRME le jugement en date du 30 mars 2022 rendu par le conseil de prud’hommes d’Annecy en ce qu’il a :

– dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

– condamné en conséquence la société Alpine Industry à payer à M. [J] [C] [L] la somme de 12 978 € à titre de dommages et intérêts, et 1500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– ordonné à la société Alpine Industry de rectifier l’attestation Pôle emploi dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement sur la base des sommes figurant sur les fiches de paie sur la période du 1er octobre 2019 au 30 septembre 2020,

– rejeté les demandes formulées par la société Alpine Steel au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Alpine Industry aux dépens.

L’INFIRME en ce qu’il a condamné la société Alpine Industry à payer à M. [C] [L] la somme de 2163 € au titre de l’irrégularité de procédure ;

Statuant à nouveau sur ce point,

DÉBOUTE M. [C] [L] de sa demande d’indemnité pour irrégularité de procédure ;

Y ajoutant,

ORDONNE d’office le remboursement par la société Alpine Steel à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à M. [C] [L], du jour de son licenciement au jour de la présente décision dans la limite de six mois d’indemnités de chômage.

DIT qu’à cette fin, une copie certifiée conforme du présent arrêt sera adressée à Pôle Emploi Rhône-Alpes – service contentieux – [Adresse 1].

CONDAMNE la société Alpine Industry aux dépens d’appel ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société Alpine Industry à payer à M. [J] [C] [L] une somme de 2500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Ainsi prononcé publiquement le 27 Avril 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur Frédéric PARIS, Président, et Madame Capucine QUIBLIER, Greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président

 


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