COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-9
ARRÊT AU FOND
DU 23 MARS 2023
N° 2023/ 256
Rôle N° RG 22/11114 N° Portalis DBVB-V-B7G-BJ3GO
S.A. BANQUE POPULAIRE MEDITERRANEE
C/
[J] [U] [I]
[N] [B] [M]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Maxime ROUILLOT
Me Thimothée JOLY
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de l’exécution de NICE en date du 05 Mai 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 21/00134.
APPELANTE
S.A. BANQUE POPULAIRE MÉDITERRANÉE
société anonyme coopérative de banque populaire, immatriculée au RCS NICE sous le n° 058 801 481, prise en la personne de son Directeur Général en exercice domicilié en cette qualité au siège [Adresse 5]
représentée et assistée par Me Maxime ROUILLOT de la SELARL SELARL d’AVOCATS MAXIME ROUILLOT- FRANCK GAMBINI, avocat au barreau de NICE, substitué par Me Maïlys LARMET, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
Monsieur [J] [U] [I],
né le [Date naissance 2] 1978 à [Localité 9] (Polynésie Française),
demeurant [Adresse 7]
assigné à jours fixe le 01/09/22 à étude
Madame [N] [B] [M],
née le [Date naissance 1] 1984 à [Localité 6],
demeurant [Adresse 7]
assignée à jours fixe le 01/09/22 à étude
Tous deux représentés par Me Thimothée JOLY de la SCP PIETRA & ASSOCIES, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 08 Février 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Evelyne THOMASSIN, Président
Madame Pascale POCHIC, Conseiller
Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Josiane BOMEA.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Mars 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Mars 2023,
Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Madame Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Faits, procédure, prétentions des parties :
La Banque Populaire Méditerranée (BPM ) poursuit à l’encontre de monsieur [I] et madame [N] [M], suivant commandement signifié le 27 mai 2021, la vente de biens et droits immobiliers leur appartenant situés sur la commune de [Localité 10], cadastrés section N°A numéro [Cadastre 3] pour une contenance de 20 a 70 ca et section A numéro [Cadastre 4] pour une contenance de 28 ca, soit une contenance totale de 21a, plus amplement désignés au cahier des conditions de vente déposé au greffe du juge de l’exécution le 9 septembre 2021, pour avoir paiement d’une somme de 372 025,80 € outre intérêts au taux contractuel de 1,60 % l’an sur la somme de 348 434,14 € jusqu’à parfait paiement, en vertu de la copie exécutoire d’un acte notarié contenant prêt du 14 septembre 2018 reçu par maître [O] [T], notaire associé à [Localité 8], et d’une inscription de privilège de prêteur de deniers de 1er rang à hauteur de 330 000 € et d’hypothèque de 1er rang publiée à hauteur de 26 600 €, sur les lots n°3,8 et 14 de l’immeubles [Adresse 7] cadastré section A n°[Cadastre 3] et [Cadastre 4] sur la commune de [Localité 10].
Le commandement, publié le 15 juillet 2021 est demeuré sans effet. Au jour de cette publication, il n’existait aucun créancier inscrit.
A l’audience d’orientation du 18 novembre 2021, les débiteurs saisis n’ont pas constitué avocat et ne se sont pas présentés.
Un jugement du 13 janvier 2022 du juge de l’exécution de Nice invitait la BPM à s’expliquer sur la formule exécutoire délivrée pour un montant limité à 354 660 €.
Un jugement d’orientation du 5 mai 2022 du juge de l’exécution de Nice :
– constatait que les conditions des articles L 311-2, L 311-4 et L 311-6 du code des procédures civiles d’exécution, sont remplies,
– validait la procédure de saisie immobilière pour la somme de 338 117,13 €, y compris la clause pénale réduite à 6 000 €,
– ordonnait la vente aux enchères publiques de l’immeuble saisi selon les modalités du cahier des conditions de vente,
– fixait la date de l’audience d’adjudication et les modalités de visite du bien immobilier saisi,
– disait que les dépens seraient compris dans les frais de vente soumis à taxe.
Le premier juge retenait que la créance devait être fixée à la somme de 354 660 € dans la limite du caractère exécutoire de l’acte notarié au motif que l’article 5 de la loi du 15 juin 1976 n’impose la mention du montant de la créance que dans la copie exécutoire et non dans la formule exécutoire. Il en conclut que la limitation de la créance à 354 660 € dans la formule exécutoire traduit l’intention du créancier de rendre sa créance exigible pour ce seul montant sans pouvoir exiger une somme complémentaire.
Par déclaration reçue le 29 juillet 2022 au greffe de la cour, la BPM formait appel du jugement précité.
Une ordonnance du 3 août 2022 de madame la présidente de la chambre 1-9 de la cour d’appel autorisait l’assignation à jour fixe.
Le 1er septembre 2022, la BPM faisait assigner monsieur [I] et madame [M], débiteurs saisis, d’avoir à comparaître. Les assignations étaient déposées au greffe, le 22 septembre 2022.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RVPA le 03 août 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé du litige, la BPM demande à la cour de :
– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a retenu que le montant de la créance de la BPM s’élève à la somme de 338 117,13 €,
– le confirmer pour le surplus,
En conséquence, statuant à nouveau,
– à titre principal, juger que la créance de la BPM s’élève au 27 janvier 2021 à la somme de 372 025,80 outre intérêts et frais jusqu’à parfait règlement,
– à titre subsidiaire, juger que la créance de la BPM s’élève au 27 janvier 2021 à la somme de 355 483,8 € outre intérêts et frais jusqu’à parfait règlement,
– en toute hypothèse, juger que le titre exécutoire n’est pas plafonné au montant figurant dans la formule exécutoire mais reste efficace pour la créance calculée conformément aux dispositions contractuelles,
– condamner monsieur [I] et madame [M] aux dépens distraits au profit de la Selarl Rouillot-Gambini,
Elle soutient que le commandement aux fins de saisie est fondé sur la copie exécutoire de l’acte notarié du 14 septembre 2018 avec la formule exécutoire portée en fin d’acte.
Elle précise qu’en matière de copie exécutoire à ordre transmissible par endossement, la mention ‘ pour valoir titre exécutoire à concurrence de 354 660 € ‘ résulte de l’obligation pour le notaire, en application de l’article 5 de la loi n°76-519 du 15 juin 1976, de mentionner le montant de la somme due ou restant due à concurrence de laquelle elle vaut titre exécutoire. Elle affirme que les mentions obligatoires de l’article 5 ont pour seule finalité de permettre une transmission simplifiée de la copie exécutoire au moyen d’un endossement et que la mention in fine du montant de la créance n’est qu’indicative.
En conséquence, elle demande l’application de la convention des parties intégrée dans le corps de l’acte authentique, lesquels déterminent le montant de la créance en principal et intérêts, soit un prêt de 354 660 € au taux de 1,60 % remboursable en 300 mensualités.
Elle rappelle que la force exécutoire s’attache aux conditions générales du prêt dès lors qu’elles font corps avec l’acte et que celles signées par l’emprunteur et annexées à l’acte authentique stipulent une indemnité forfaitaire de 7 % et une majoration de trois points du taux des intérêts.
Elle conteste la réduction de la clause pénale prononcée d’office et en tout état de cause relève que la réduction doit s’opérer à partir du montant total de sa créance de 372 025,80 €, soit une créance restant due de 355 483,80 € et non 338 117,13 €.
Monsieur [I] et madame [M], assignés par dépôt à l’étude, ont constitué avocat mais n’ont pas notifié d’écritures devant la cour.
MOTIVATION DE LA DÉCISION :
Sur le montant de la créance, objet du titre exécutoire de la BPM,
Selon les dispositions de l’article L 311-2 du code des procédures civiles d’exécution, tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut procéder à une saisie immobilière dans les conditions fixées par le présent livre et par les dispositions qui ne lui sont pas contraires du livre 1er.
Selon les dispositions de l’article L 111-3, les actes notariés revêtus de la formule exécutoire sont des titres exécutoires. La formule exécutoire apposée sur un acte notarié donne force exécutoire à tous les engagements qu’elle comporte.
Il existe deux formes de copie exécutoire, nominative établie au nom d’une personne déterminée et non transmissible, et à ordre transmissible par voie d’endossement.
Lors de sa remise au créancier, la copie exécutoire à ordre doit comporter les mentions imposées par l’article 5 de la loi n°76-519 du 15 juin 1976 et notamment au titre du 3°, le montant de la somme restant due à concurrence de laquelle elle vaut titre exécutoire.
En l’espèce, l’acte notarié du 14 septembre 2018 fait référence à l’acte de prêt et à ses conditions générales, dont un original est annexé à l’acte et en constitue une partie intégrante ; elles sont donc revêtues de la force exécutoire suite à la délivrance de la formule exécutoire. Cependant, seule cette dernière donne force exécutoire à l’acte notarié du 14 septembre 2018, lequel fonde les poursuites de saisie immobilière exercées contre les intimés.
La formule exécutoire apposée le 11 octobre 2018 mentionne in fine qu’elle est délivrée ‘ pour valoir titre exécutoire à concurrence de la somme de 354 660 € ‘.
Il s’en déduit qu’en l’absence de mention selon laquelle le montant précité correspond au seul principal de la créance de la BPM, son titre exécutoire lui confère une créance liquide et exigible d’un montant total en principal, intérêts et frais, ne pouvant excéder 354 660 €.
Par conséquent, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu’il a retenu que le titre exécutoire de la BPM lui conférait une créance liquide et exigible dans la limite de 354 660 €.
Sur la réduction d’office du montant de la clause pénale,
Selon les dispositions de l’article 1235-1 du code civil, lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
En l’espèce, les conditions particulières du crédit signées par les emprunteurs et annexées à l’acte notarié de prêt stipulent une indemnité forfaitaire de 7 % des sommes dues en cas de défaillance de l’emprunteur et la majoration de trois points du taux des intérêts.
Ainsi, les sanctions précitées de majoration de trois points du taux des intérêts et d’indemnité de 7 % des sommes restant dues constituent des clauses pénales dont le premier juge ne pouvait d’office réduire le montant qu’à la condition de démontrer leur caractère manifestement excessif.
Le créancier n’a pas perçu le remboursement des sommes prêtées dans le délai fixé par la loi des parties et a donc subi un préjudice financier compensé par les pénalités convenues par les parties. La majoration de trois points du taux d’intérêt conventionnel de 1,6 % et une indemnité de 7 % des sommes dues au jour de la déchéance du terme, sont usuellement pratiquées.
Par ailleurs, les dispositions des articles L 321-39 et D 312-6 du code de la consommation autorisent l’emprunteur à demander une indemnité égale à 8% du capital restant du à la date de la défaillance de l’emprunteur. Ainsi, le caractère manifestement excessif des pénalités conventionnellement dues ( majoration de 3 points du taux des intérêts et indemnité de 7 %) n’est pas établi de sorte que la réduction à 6 600 € de l’indemnité de 7 % de 23 142,87 € n’est pas fondée.
En définitive, si la BPM produit un décompte de créance d’un montant de 372 025,80 € en principal, intérêts ( 348 434,14 € et 448,79 € ) et indemnité ( 23 142,87 ), elle ne dispose d’un titre exécutoire que pour un montant limité à 354 660 €.
Par conséquent, le jugement déféré sera confirmé sauf à porter la créance de la BPM à la somme de 354 660 € en principal, intérêts et indemnité.
Les dépens d’appel seront employés en frais de vente soumis à taxe.
PAR CES MOTIFS:
La cour, statuant après débats en audience publique et après en avoir délibéré, conformément à la loi, par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement déféré sauf à porter le montant de la créance de la Banque Populaire Méditerranée à 354 660 € en principal, intérêts, et indemnité, arrêtée au 27 mai 2021 outre intérêts et frais postérieurs, à parfaire,
RENVOIE la procédure au juge de l’exécution de Nice aux fins de poursuite de la procédure de saisie immobilière,
DIT que les dépens d’appel seront employés en frais de vente soumis à taxe.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE