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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 22/04026 – N° Portalis DBVH-V-B7G-IU2Z
CS
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D’AVIGNON
12 septembre 2022
RG :22/00303
S.A.R.L. NEW LOOK
C/
S.C.I. JADLIN
Grosse délivrée
le
à
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
2ème chambre section B
ARRÊT DU 17 AVRIL 2023
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d’AVIGNON en date du 12 Septembre 2022, N°22/00303
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Corinne STRUNK, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre
Mme Corinne STRUNK, Conseillère
M. André LIEGEON, Conseiller
GREFFIER :
Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l’audience publique du 06 Mars 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 17 Avril 2023.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
APPELANTE :
S.A.R.L.U. NEW LOOK COIFFURE
immatriculée au RCS d’AVIGNON sous le n° 825 235 104
agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Guillaume DE PALMA de la SCP DE PALMA – COUCHET, Plaidant/Postulant, avocat au barreau d’AVIGNON
INTIMÉE :
S.C.I. JADLIN
immatriculée au RCS de NIMES sous le n° 804 685 337
représentée par Mme [B] [G] épouse [R], son co-gérant
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Bénédicte ANAV-ARLAUD de la SELARL ANAV-ARLAUD BÉNÉDICTE, Postulant, avocat au barreau d’AVIGNON
Représentée par Me Karine LE DANVIC de la SELARL AUDEUM, Plaidant, avocat au barreau de TARASCON
INTERVENANTE
S.E.L.A.R.L. ETUDE BALINCOURT
représentée par Maître [E] [D], mandataire judiciaire, ès qualité de mandataire judiciaire de la société NEW LOOK, nommé par jugement du tribunal de commerce d’AVIGNON du 4 janvier 2023
INTERVENANT FORCE
assignée le 15 février 2023 à personne habillitée
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Non comparante ni représentée
Statuant sur appel d’une ordonnance de référé
Ordonnance de clôture rendue le 27 février 2023
ARRÊT :
Arrêt réputé contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre, le 17 Avril 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.
EXPOSE DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 30 mars 2016, la société civile immobilière Jadlin (ci-après dénommée SCI Jadlin) a donné à bail commercial à la société New Look Coiffure, un local sis [Adresse 1], moyennant un loyer mensuel de 700 €.
Par avenant en date du 7 octobre 2016, le montant du loyer a été ramené à la somme de 400 € par mois.
Sur le constat de loyers impayés, la SCI Jadlin a fait délivrer, le 19 novembre 2021, à la société New Look Coiffure un commandement visant la clause résolutoire mentionnée dans le bail.
Par acte du 3 mars 2022, la SCI Jadlin a assigné la société New Look Coiffure devant le juge des référés du tribunal judiciaire d’Avignon, qui, par une ordonnance contradictoire en date du 12 septembre 2022, a :
– constaté que le bail commercial conclu entre la SCI Jadlin et la société New Look s’est trouvé résilié de plein droit le 19 décembre 2021 par le jeu de la clause résolutoire,
– dit qu’à compter cette date, la société New Look est occupante sans droit ni titre,
– débouté cette société de sa demande de délais de paiement,
– ordonné, en conséquence, à la société New Look Coiffure de quitter les lieux occupés indûment avec toutes les personnes s’y trouvant de son chef, et en satisfaisant aux obligations du locataire sortant, dans un délai d’un mois à compter de la signification de la présente ordonnance, faute de quoi il pourra être procédé à son expulsion, au besoin avec l’aide de la force publique et d’un serrurier,
– dit n’y avoir lieu d’assortir la demande d’une astreinte,
– condamné la société New Look Coiffure à payer à la SCI Jadlin la somme provisionnelle de 4254,28 euros au titre de rappels de loyers, taxe d’ordure ménagère et remboursement de taxes foncières visés au commandement de payer, ainsi qu’au paiement d’une indemnité provisionnelle d’occupation mensuelle de 417 euros à compter du 19 décembre 2021 et ce jusqu’à libération effective des lieux,
– dit que les condamnations sont prononcées en deniers ou quittances afin de tenir compte des paiements intervenus depuis la résiliation du contrat de bail,
– condamné la société New Look Coiffure à payer à la SCI Jadlin la somme de 800,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
– condamné la société New Look Coiffure aux entiers dépens, en ce compris le coût du commandement de payer.
Par déclaration du 15 décembre 2022, la société New Look Coiffure a interjeté appel de cette ordonnance.
Par jugement du 4 janvier 2023, le tribunal de commerce d’Avignon, publié au BODACC le 12 janvier 2023, a prononcé l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société New Look.
Par courrier du 8 février 2023, la SCI Jadlin a déclaré sa créance au passif de la procédure collective pour un montant de 13.119,95 € et mis en cause les organes de la procédure.
Par acte d’huissier délivré le 15 février 2023, la Sci Jadlin a fait assigner la SELARL Balincourt, représentée par Me [D], ès qualités de mandataire judiciaire de la société New Look Coiffure, devant la cour d’appel de Nîmes.
Par des conclusions notifiées le 24 février 2023, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la société New Look Coiffure, appelante, demande à la cour, au visa des dispositions des articles 1225, 1231-5 et 1345-1 du code civil et de l’article L.145-41 du code de commerce, de :
– déclarer l’appel interjeté recevable et bien fondé,
– recevoir la société New Look Coiffure en toutes ses demandes, fins et conclusions,
En conséquence à titre principal,
– constater l’absence de mise en demeure par la société Jadlin à l’endroit de la société New Look Coiffure,
– débouter purement et simplement la société Jadlin de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– infirmer donc purement et simplement l’ordonnance dont appel de ce chef,
A titre subsidiaire,
– accorder à la société New Look Coiffure un délai de 24 mois à compter de la signification de la décision pour s’acquitter de ladite dette,
– déclarer que ladite dette ne peut excéder la somme de 3.454,28 euros,
– déclarer que la clause résolutoire ne jouera pas si la société New Look Coiffure se libère dans le délai imparti,
– débouter donc la société Jadlin de ses demandes d’expulsion et d’indemnité d’occupation,
– infirmer donc purement et simplement l’ordonnance dont appel de ce chef,
A titre encore plus subsidiaire,
– déclarer que la clause du contrat du 30 mars 2016 en vertu de laquelle l’indemnité d’occupation sera « égale à la valeur d’un quart d’une annuité du loyer alors en vigueur sera due au bailleur» constitue une clause pénale,
– la réduire à la somme de 417 euros par mois,
– infirmer donc purement et simplement l’ordonnance dont appel de ce chef,
En tout état de cause,
– débouter la société Jadlin de sa demande formée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– laisser à la charge de chacune des parties les dépens exposés pour leur propre compte.
Au soutien de son appel, la société New Look Coiffure fait valoir, à titre principal, l’absence de mise en demeure préalable au sens de l’article 1225 du code civil, précisant que toutes les réclamations adressées par l’intimé n’étaient que déclaratives et nullement fondées sur le moindre élément objectif.
A titre subsidiaire, elle sollicite l’octroi de délais de paiement sur une période de 24 mois arguant être de bonne foi et connaître une situation financière difficile tel qu’il en résulte de son chiffre d’affaires qui a considérablement chuté depuis la pandémie mondiale de Covid-19 intervenue en 2020. Elle ajoute aussi une baisse importante de son activité en raison de la mise en place du ‘plan faubourg’ par la commune d'[Localité 4], lequel a eu un impact négatif sur l’accès au salon de coiffure.
Enfin, elle entend souligner qu’en l’état de l’ouverture de la procédure collective à son encontre, l’intimée a abandonné sa demande au titre de la résiliation du bail et par conséquent, sa demande d’indemnité d’occupation est devenue sans objet.
Elle rappelle que la clause des baux prévoyant qu’en cas de résiliation ou de congé, le preneur qui ne libère pas à bonne date doit une indemnité d’occupation correspondant au double du dernier loyer contractuel constitue en réalité une clause pénale soumise dès lors au pouvoir de réduction des juges conformément à l’article 1152 du code civil. Elle considère donc que l’indemnité d’occupation doit être qualifiée en clause pénale au regard de son caractère excessif
, n’étant point équivalente à un loyer mais à un quart de loyer annuel.
La SCI Jadlin, en sa qualité d’intimée, par conclusions en date du 20 février 2023, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, demande à la cour, au visa de l’article L.145-1 du code de commerce, de :
– recevoir l’appel de la SARL New Look mais l’en dire mal fondée,
– confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a constaté l’acquisition de la clause résolutoire ;
– débouter la SARL New Look de l’ensemble de ses demandes ;
– fixer au passif de la SARL New Look la somme de 11.742,28 € au titre de loyers impayés ;
– fixer au passif de la SARL New Look la somme de 3.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.
L’intimée rappelle que la charge de la preuve du paiement des loyers appartient au preneur qui s’engage à rembourser la taxe foncière et la taxe d’ordure ménagères au prorata de son occupation, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
Elle indique qu’aucun règlement ou proposition de règlement de la quote-part de la taxe foncière, de la taxe d’ordures ménagères et de l’indexation annuelle des loyers ne sont intervenus dans le mois qui a suivi la signification du commandement de payer.
La clôture de la procédure est intervenue le 27 février 2023 et l’affaire a été fixée à l’audience du 6 mars 2023, pour être mise en délibéré, par disposition au greffe, le 17 avril 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
– Sur la saisine de la cour :
Dans ses dernières conclusions, la Sci Jadlin ne maintient pas la prétention principale relative à la résiliation du bail commercial ainsi que les demandes subséquentes relatives à la reconnaissance de la qualité d’occupant sans droit ni titre de la société New Look, la fixation d’une indemnité d’occupation et à son expulsion.
Il sera relevé que cette position est conforme aux dispositions de l’article L622-21 du code de commerce énonçant que le jugement d’ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de l’article L. 622-17 et tendant :
1° A la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent ;
2° A la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.
II.-Sans préjudice des droits des créanciers dont la créance est mentionnée au I de l’article L. 622-17, le jugement d’ouverture arrête ou interdit toute procédure d’exécution tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de distribution n’ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d’ouverture.
III.-Les délais impartis à peine de déchéance ou de résolution des droits sont en conséquence interrompus (…).
Il est acquis qu’en matière commerciale, la clause résolutoire ne produit ses effets avant l’ouverture de la procédure collective que lorsque sa mise en ‘uvre judiciaire est passée en force de chose jugée. En revanche, lorsqu’à la date du jugement d’ouverture, l’acquisition de la clause résolutoire, pour défaut de paiement des loyers antérieurs, n’a encore été constatée par une décision passée en force de chose jugée, le bailleur ne peut plus poursuivre l’action antérieurement engagée, peu important que l’ordonnance soit exécutoire à titre provisoire (Cass. Chambre commerciale, 28 oct. 2008, n° 07-17.662).
En l’espèce, par jugement du 4 janvier 2023 publié au BODACC le 12 janvier 2023, le tribunal de commerce d’Avignon a prononcé l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société New Look et a désigné la Selarl Etude Balincourt ès qualités de mandataire judiciaire.
L’ordonnance rendue le 12 septembre 2022 a été frappée d’appel par déclaration en date du 15 décembre 2022 et n’était donc pas passée en force de chose jugée à la date du jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire.
En conséquence, la prétention principale relative à la résiliation du bail commercial ainsi que les demandes subséquentes ne peuvent valablement saisir la juridiction de référé.
Il convient donc de prendre en compte la position de la SCI Jadlin sans qu’il y ait lieu de statuer sur ces points .
Pour le surplus, les parties s’opposent sur le montant de la dette locative, l’intimée réclamant la fixation au passif de la société New Look de la somme de 11.742,28 euros au titre des loyers impayés tandis que la société appelante réclame principalement le rejet de cette prétention et à défaut des délais de paiement.
Toutefois, en application de l’article L622-22 alinéa 1 du même code , les instances en cours sont interrompues jusqu’à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. Elles sont alors reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l’administrateur ou le commissaire à l’exécution du plan nommé en application de l’article L. 626-25 dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.
Cependant, ces dispositions sont applicables uniquement contre une instance en cours devant un juge du fond. L’instance en référé qui tend à obtenir une condamnation provisionnelle n’est pas concernée par l’article L.622-22 susvisé. Ainsi, l’instance en référé est effectivement soumise à l’arrêt des poursuites, mais elle est définitivement arrêtée et ne peut donc faire l’objet d’une reprise après la déclaration de créance faite par le créancier (Cass. Com., 19 sept. 2018, n° 17-13.210).
Au visa de l’article 835 al 2 du code de procédure civile, il est dit en effet que dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier.
En l’espèce, la SCI Jadlin a déclaré sa créance au passif de la procédure collective par courrier du 8 février 2023 pour un montant de 13.119,95 euros et mis en cause les organes de la procédure collective.
Il s’ensuit que l’instance introduite par la SCI Jadlin devant le juge des référés ne peut tendre qu’à une condamnation provisionnelle et non à la fixation d’une créance, de sorte que la créance faisant l’objet de cette instance doit être soumise à la procédure normale de vérification et à la décision du juge commissaire.
Il résulte de ce qui précède et dès lors qu’il n’entre pas dans les attributions du juge des référés d’évaluer le montant de la créance dont le créancier poursuit le paiement contre son débiteur à l’encontre duquel une procédure collective est ouverte, il convient d’infirmer l’ordonnance entreprise et de déclarer l’action engagée par la SCI Jadlin irrecevable.
– Sur les demandes accessoires :
Il ya lieu d’infirmer l’ordonnance déférée en ce qu’elle a condamné la société New Look Coiffure à payer à la SCI Jadlin la somme de 800,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens, en ce compris le coût du commandement de payer.
L’équité commande de ne pas faire droit aux demandes présentées au titre des frais irrépétibles. La Sci Jadlin, qui succombe, sera condamnée aux entiers dépens.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, en référé et en dernier ressort,
Infirme l’ordonnance rendue le 12 septembre 2022 par le juge des référés du tribunal judiciaire d’Avignon en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Déclare l’action engagée par la SCI Jadlin irrecevable,
Dit n’y avoir lieu à référé,
Déclare la présente décision opposable à la SELARL Balincourt, représentée par Me [D], ès qualités de mandataire judiciaire de la société New Look Coiffure,
Dit n’y avoir lieu à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la Sci Jadlin aux entiers dépens.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE