Clause pénale : 10 mai 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 22/01834

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Clause pénale : 10 mai 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 22/01834

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/01834 – N° Portalis DBVH-V-B7G-IOL3

AV

COUR D’APPEL DE NIMES

16 février 2022 RG :21/00657

[D]

C/

[O]

[O]

Ste Coopérative banque Pop. BANQUE POPULAIRE DU SUD

Grosse délivrée

le 10 MAI 2023

à Me Philippe RECHE

Me Géraldine BRUN

Me Sonia HARNIST

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

4ème chambre commerciale

ARRÊT DU 10 MAI 2023

Décision déférée à la Cour : Arrêt du Cour d’Appel de NIMES en date du 16 Février 2022, N°21/00657

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Agnès VAREILLES, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre

Madame Claire OUGIER, Conseillère

Madame Agnès VAREILLES, Conseillère

GREFFIER :

Madame Isabelle DELOR, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique du 13 Avril 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 10 Mai 2023.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANT :

Monsieur [S] [R]

né le [Date naissance 1] 1986 à [Localité 9]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Philippe RECHE de la SELARL CHABANNES-RECHE-BANULS, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représenté par Me Samuel BENHAMOU de la SELARL FOCUS, Plaidant, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉS :

Monsieur [Y] [O]

né le [Date naissance 4] 1983 à [Localité 8]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

Représenté par Me Géraldine BRUN de la SELARL P.L.M.C AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Monsieur [I] [O]

né le [Date naissance 5] 1982 à [Localité 8]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté par Me Géraldine BRUN de la SELARL P.L.M.C AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Ste Coopérative banque Pop. BANQUE POPULAIRE DU SUD agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège social

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Représentée par Me Sonia HARNIST de la SCP RD AVOCATS & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 30 Mars 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 10 Mai 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Vu l’appel interjeté le 15 février 2021 par Monsieur [S] [R] à l’encontre du jugement prononcé le 22 janvier 2021 par le tribunal de commerce de Nîmes, dans l’instance n°2019J307,

Vu l’appel interjeté le 24 février 2021 par Monsieur [Y] [O] et Monsieur [I] [O] à l’encontre du même jugement,

Vu l’ordonnance du 10 mars 2021 de jonction des procédures n° RG 21/00657 et 21/00798 sous le numéro 21/00657,

Vu l’ordonnance rendue le 16 février 2022 par le conseiller de la mise en état qui a prononcé un sursis à statuer jusqu’au dépôt du rapport d’expertise et radié l’instance du rôle des affaires en cours,

Vu la déclaration du 5 mai 2022 de saisine de la cour d’appel de Nîmes à l’initiative de la Société Coopérative Banque Populaire du Sud, intimée,

Vu la réinscription de l’affaire au rôle des affaires en cours le même jour,

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 17 juin 2021 par Monsieur [Y] [O] et Monsieur [I] [O] et le bordereau de pièces qui y est annexé,

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 23 mars 2023 par Monsieur [S] [R], appelant, et le bordereau de pièces qui y est annexé,

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 23 mars 2023 par la société Banque Populaire du Sud, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé

Vu l’ordonnance du 1er décembre 2022 de clôture de la procédure à effet différé au 30 mars 2023,

La SARL Boxing Day, immatriculée au registre du commerce et des sociétés en 2014 sous le numéro 803 621 663, était spécialisée dans l’activité du commerce de détail d’articles de sports. Monsieur [S] [R], Monsieur [Y] [O] et Monsieur [I] [O] en étaient les cogérants.

Par acte sous signature privée du 28 janvier 2016, la Banque Populaire du Sud a émis une offre, acceptée le 10 février 2016, de prêt professionnel d’un montant de 225 000 euros destiné à financer des travaux d’aménagement d’un local de la SARL Boxing Day. Le prêt était remboursable en 84 échéances, au taux de 2,50% l’an. Il était garanti notamment par les cautionnements personnels et solidaires des cogérants à hauteur chacun de 112 500 euros, dans la limite de 50% des sommes restant dues par le débiteur principal en capital, intérêts, frais, commissions et accessoires.

Par jugement du 27 novembre 2017, le tribunal de commerce de Montpellier a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’égard de la société Boxing Day.

Le 7 février 2018, la Banque Populaire du Sud a déclaré sa créance laquelle a été admise à titre privilégié le 11 décembre 2018 pour 177 493,05 euros représentant le capital restant dû au 1er novembre 2017 du prêt de 225 000 euros.

Par courrier recommandé du 7 février 2018, resté sans réponse, la Banque Populaire du Sud a mis en demeure Monsieur [S] [R] et Messieurs [O], en qualité de cautions du prêt accordé le 31 mars 2016 à la société Boxing Day, de régler la somme de 110 753,96 euros et ce, dans un délai de huit jours.

Le 28 août 2019, le liquidateur judiciaire de la société a indiqué qu’il n’existait aucune perspective de recouvrement au bénéfice de la banque.

Par exploit du 3 octobre 2019, la banque a fait assigner les cautions solidaires devant le tribunal de commerce de Nîmes en paiement de la somme de 101 489,96 euros correspondant à 50% de l’encours du prêt au 27 mai 2019, outre intérêts conventionnels au taux de 2,50% du 28 mai 2019 jusqu’à parfait paiement.

Par jugement du 22 janvier 2021, le tribunal de commerce de Nîmes a, au visa des articles 2288 et suivants et 1343-2 du code civil, :

-Condamné solidairement Monsieur [Y] [O], Monsieur [I] [O] et Monsieur [S] [R] à payer à la Banque Populaire du Sud la somme de 101 489,96 euros, outre intérêts au taux de 2,50% du 28 mai 2019 jusqu’à parfait paiement.

-Dit que les intérêts des présentes condamnations se capitaliseront par année entière, et ce par application de l’article 1343-2 du code civil;

-Débouté Monsieur [S] [R] et les consorts [O] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions;

-Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire

-Condamné solidairement Monsieur [Y] [O], Monsieur [I] [O] et Monsieur [S] [R] à payer à la Banque Populaire du Sud la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;

-Rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires;

-Condamné solidairement Monsieur [Y] [O], Monsieur [I] [O] et Monsieur [S] [R] aux dépens de l’instance que le tribunal a liquidés et taxés à la somme de 116,42 euros, en ce non compris le coût de la citation introductive d’instance, le coût de la signification de la décision, ainsi que tous autres frais et accessoires.

Le 15 février 2021, Monsieur [S] [R] a interjeté appel de cette décision aux fins de la voir réformer en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’elle a dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Le 24 février 2021, Monsieur [Y] [O] et Monsieur [I] [O] ont également interjeté appel de cette décision aux fins de la voir réformer en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’elle a dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Par ordonnance du 10 mars 2021, les procédures n° RG 21/00657 et 21/00798 ont été jointes sous le numéro 21/00657.

Monsieur [S] [R] a saisi le conseiller de la mise en état afin de solliciter la désignation d’un expert judiciaire en graphologie avec pour mission de comparer l’acte de cautionnement du 16 février 2016 avec tout autre écrit de la main du demandeur lui apparaissant nécessaire.

Par ordonnance d’incident du 13 octobre 2021, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Nîmes a désigné en qualité d’expert Madame [F] [K] aux fins de réalisation d’une expertise graphologique.

Par ordonnance du 16 février 2022, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Nîmes a :

-Dit qu’il est sursis à statuer jusqu’au dépôt du rapport d’expertise;

-Dit que l’instance est radiée du rôle des affaires en cours et qu’elle sera rétablie après dépôt du rapport d’expertise, à la demande de la partie la plus diligente dès que la cause du sursis aura disparu.

Le 6 avril 2022, l’expert a rendu son rapport définitif.

A la suite de la déclaration du 5 mai 2022 de saisine de la cour d’appel de Nîmes de la Banque Populaire du Sud, il a été procédé à la réinscription de l’affaire au rôle.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, Monsieur [S] [R], appelant, demande à la cour, au visa des articles L. 332-1, L. 331-1, L. 331-2, L. 341-3, L. 333-2, L. 314-17 du code de la consommation, des articles 10, 367, 368, 515, 700 du code de procédure civile, de :

-Réformer le jugement n°2019J0030722 rendu le 22 janvier 2021 par le tribunal de commerce de Nîmes dans toutes ses dispositions

-Ecarter la pièce adverse n° 21 produite tardivement, et hors champ de l’expertise contradictoire;

Et statuant à nouveau,

A titre principal,

-Annuler l’acte de cautionnement dont se prévaut la Banque Populaire du Sud à son encontre, après avoir constaté que la mention manuscrite obligatoire portée sur l’acte de cautionnement n’a pas été écrite à la main par la caution

A titre subsidiaire,

-Déclarer l’acte de cautionnement litigieux inopposable à la Banque Populaire du Sud en ce que :

la Banque Populaire du Sud ne s’est manifestement pas assurée, préalablement à la conclusion de contrat de cautionnement, de la proportionnalité obligatoire entre la portée de l’engagement et les biens et revenus de la caution;

la Banque Populaire du Sud ne démontre pas avoir respecté son devoir de conseil et de mise en garde qui lui incombait à l’égard de Monsieur [S] [R], non averti;

la Banque Populaire du Sud ne produit aucune lettre d’information annuelle qui aurait été notifiée à Monsieur [S] [R];

la Banque Populaire du Sud ne justifie pas avoir informé Monsieur [S] [R] du premier incident de paiement de la société Boxing Day dans le délai légal;

En conséquence,

-Prononcer la déchéance de tous les accessoires, frais et pénalités de la somme réclamée en principal;

En tout état de cause,

-Condamner la Banque Populaire du Sud à régler à Monsieur [S] [R] la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

-Condamner la Banque Populaire du Sud à supporter les entiers dépens de l’instance, en ce compris la somme de 450 euros au titre du remboursement des frais d’expertise en graphologie qu’il dû engager pour les besoins de la présente procédure, ainsi que les 2.085,90 euros avancés au titre de l’expertise judiciaire

-Condamner la Banque Populaire du Sud aux frais, le cas échéant réclamés par l’Huissier de Justice, liés à l’exécution de la décision à intervenir.

Au soutien de ses prétentions et à titre principal, l’appelant fait valoir qu’il a diligenté un complément d’investigation afin de lever le doute sur le défaut d’authenticité de l’acte de cautionnement et qu’un rapport d’expertise complémentaire a été rendu le 26 mai 2020 indiquant qu’il n’avait pas rédigé de sa main l’acte de caution du 16 février 2016; l’expertise judiciaire a également conclu qu’il n’avait pas rédigé la mention d’engagement portée sur l’acte de caution du 16 février 2016 ; la pièce n°21 de la banque relative à un acte de cautionnement du 4 mars 2016 n’a pu être fournie à temps à l’expert et n’a donc pu être authentifiée dans le cadre de l’expertise; elle devra être écartée.

A titre subsidiaire, l’appelant soutient qu’il n’est pas établi que la banque ait cherché à établir la proportionnalité entre la garantie qu’il aurait consentie et ses biens et revenus personnels; la banque ne produit aucune fiche patrimoniale le concernant et à défaut de production de cette fiche patrimoniale, le cautionnement signé le 16 février 2016 à hauteur de 112 500 euros est manifestement disproportionné; il était associé non dirigeant de la société, cet état de fait n’étant pas suffisant pour lui attribuer la qualité de caution avertie; la banque aurait donc dû satisfaire à son obligation de conseil et de mise en garde à son égard ; la banque a failli à son obligation légale d’information annuelle de la caution puisqu’elle ne verse aux débats aucune preuve de l’envoi de cette information à la caution, postérieurement au jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire; la lettre du 7 février 2018 de la banque avait pour objet la mise en demeure de Monsieur [R] en paiement et non pas l’information de ce dernier quant à la défaillance de la société.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique, Monsieur [Y] [O] et Monsieur [I] [O] demandent à la cour, au visa de l’article 1110 du code civil (nouveaux articles 1132 et 1134 du code civil), des articles L. 331-1 et L. 343-1 du code de la consommation, de l’article L 341-4 du code de la consommation (articles L. 332-1 et L.343-4 du code de la consommation), de l’article L313-22 du code monétaire et financier, de l’article 1343-5 du code civil, de :

-Dire et juger l’appel qu’ils ont interjeté recevable et bien fondé

-Infirmer le jugement rendu le 22 janvier 2021 par le tribunal de commerce de Nîmes, en ce qu’il a :

«Retenu que la disproportion des engagements de M. [Y] [O] et M. [I] [O] n’était pas manifeste.

Retenu que la Banque Populaire du Sud avait satisfait à son obligation d’information annuelle des cautions.

Retenu que le montant de la créance déclarée par la Banque Populaire du Sud au passif de la société Boxing Day s’impose aux cautions à défaut de contestation.

Condamné solidairement M. [Y] [O], M. [I] [O] et Monsieur [S] [R] à payer à la Banque Populaire du Sud la somme de 101 489,96 euros, outre intérêts au taux de 2,50 % du 28 mai 2019 jusqu’à parfait paiement.

Dit que les intérêts des présentes condamnations se capitaliseront par année entière, et ce par application de l’article 1343-2 du code civil.

Débouté Monsieur [S] [R] et les consorts [O] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.

Condamné solidairement M. [Y] [O], M. [I] [O] et Monsieur [S] [R] à payer à la Banque Populaire du Sud la somme de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions contraires.

Condamné solidairement M. [Y] [O], M. [I] [O] et Monsieur [S] [R] aux dépens de l’instance que le tribunal liquide et taxe à la somme de 116,42 euros, en ce non compris le coût de la citation introductive d’instance, le coût de la signification de la décision, ainsi que tous autres frais et accessoires. »

Statuant à nouveau,

IN LIMINE LITIS ET A TITRE PRINCIPAL : Sur la nullité des cautionnements de Messieurs [Y] et [I] [O]

-Constater que l’engagement de caution des trois gérants de la société BOXING DAY était une condition déterminante du consentement de Messieurs [Y] et [I] [O].

-Constater que la nullité de l’acte de caution de Monsieur [R] est encourue pour défaut de mention manuscrite rédigée de sa main.

-Dire et juger que la nullité de l’un des actes de cautionnement entraine de facto la nullité des autres actes de caution.

En conséquence,

-Dire et juger que l’engagement souscrit par M. [Y] [O] le 10 avril 2016 est nul.

-Dire et juger que l’engagement souscrit par M. [I] [O] le 10 avril 2016 est nul.

-Dire et juger qu’en conséquence, la Banque Populaire du Sud ne peut se prévaloir du contrat de cautionnement conclu avec M. [Y] [O]

-Dire et juger qu’en conséquence, la Banque Populaire du Sud ne peut se prévaloir du contrat de cautionnement conclu avec M. [I] [O].

A TITRE SUBSIDIAIRE : Sur l’impossibilité de la banque de se prévaloir des cautionnements.

A supposer que la cour ne fasse pas droit à l’argumentation précédente concernant la nullité des cautionnements souscrits par Messieurs [Y] et [I] [O] :

S’agissant du cautionnement de M. [Y] [O].

-Dire et juger que l’engagement de caution de M. [Y] [O] en date du 10 février 2016 était manifestement disproportionné à ses biens et revenus.

-Dire et juger que la Banque Populaire du Sud ne démontre pas que le patrimoine et les revenus de M. [Y] [O] lui permettraient de faire face à ses obligations.

-Dire et juger qu’en conséquence, en application des articles L. 332-1 et L. 343-4 du code de la consommation, la Banque Populaire du Sud ne peut se prévaloir du contrat de cautionnement conclu avec M. [Y] [O].

En conséquence,

-Débouter la Banque Populaire du Sud de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions à ce titre.

S’agissant du cautionnement de M. [I] [O]

-Dire et juger que l’engagement de caution de M. [I] [O] en date du 10 février 2016 était manifestement disproportionné à ses biens et revenus

-Dire et juger que la Banque Populaire du Sud ne démontre pas que le patrimoine et les revenus de M. [I] [O] lui permettraient de faire face à ses obligations.

-Dire et juger qu’en conséquence, en application des articles L. 332-1 et L. 343-4 du code de la consommation, la Banque Populaire du Sud ne peut se prévaloir du contrat de cautionnement conclu avec M. [I] [O]

En conséquence,

-Débouter la Banque Populaire du Sud de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions à ce titre.

En tout état de cause,

-Condamner la Banque Populaire du Sud à payer et porter à Messieurs [O] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens

A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE :

A titre infiniment subsidiaire, même à supposer que les cautionnements de Messieurs [Y] et [I] [O] ne soient pas considérés comme disproportionnés :

-Constater que la Banque Populaire du Sud a déclaré au passif de la société BOXING DAY, débiteur principal, la somme de 177.493,05 euros au titre du prêt cautionné.

-Dire et juger que Messieurs [Y] et [I] [O] ne peuvent être poursuivis au-delà de 50 % de la somme figurant dans la déclaration de créance, soit 88.746,53 euros.

-Limiter la créance garantie de la Banque Populaire du Sud à la somme de 88.746,53 euros

En outre,

-Constater que la Banque Populaire du Sud n’apporte pas la preuve de l’exécution de l’obligation d’information annuelle, conformément à l’article L.313-22 du code monétaire et financier.

Par conséquent,

-Dire et juger que les cautions ne peuvent être tenues qu’au paiement d’une somme maximale de 88.746,53 euros

-Dire et juger que M. [Y] [O] ne peut être tenu au paiement des intérêts conventionnels, pénalités et intérêts de retards échus sollicités par la Banque Populaire du Sud.

-Dire et juger que M. [I] [O] ne peut être tenu au paiement des intérêts conventionnels, pénalités et intérêts de retards échus sollicités par la Banque Populaire du Sud.

-Prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels

Pour le surplus,

-Dire et juger que l’indemnité forfaitaire de 10% est une clause pénale.

-Dire et juger que la Banque Populaire du Sud n’apporte pas la preuve de l’exécution de l’obligation d’information en cas de défaillance du débiteur conformément l’article L 341-1 du code de la consommation (nouveaux articles L. 333-1 et L. 343-5 du code de la consommation).

-Rappeler qu’à défaut de respect de l’obligation d’information en cas de défaillance du débiteur, la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retards échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle elle en a été informée.

En conséquence,

-Dire et juger que M. [Y] [O] ne peut être tenu au paiement des indemnités forfaitaires de recouvrement.

-Dire et juger que M. [I] [O] ne peut être tenu au paiement des indemnités forfaitaires de recouvrement.

-Rejeter les demandes, fins et prétentions de la Banque Populaire du Sud, à ce titre.

-Dire et juger que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêts seulement au taux légal et que les paiements s’imputeront d’abord sur le capital.

En tout état de cause,

-Accorder à M. [Y] [O] un délai de paiement de deux années au titre de l’article 1343-5 du code civil.

-Accorder à M. [I] [O] un délai de paiement de deux années au titre de l’article 1343-5 du code civil.

-Ecarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

-Condamner la Banque Populaire du Sud à payer et porter à M. [Y] [O] et à M. [I] [O] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

A l’appui de leurs prétentions, Messieurs [O] font valoir, à titre principal, que l’engagement des trois gérants de la société était une condition déterminante de leur engagement, compte-tenu de l’importance des engagements souscrits qui représentaient environ trois fois leur revenu annuel. Ils n’ont jamais accepté ou même été avertis de la possibilité de se retrouver seules cautions de la société. La nullité du cautionnement de Monsieur [S] [R] entraîne donc nécessairement la nullité des autres actes de caution.

A titre subsidiaire, Messieurs [O] soutiennent que la banque ne peut se prévaloir de leur cautionnement en raison de son caractère manifestement disproportionné au regard des différents cautionnements souscrits auparavant auprès d’elle et qu’elle ne pouvait dès lors ignorer.

A titre infiniment subsidiaire, Messieurs [O] indiquent qu’ils ne peuvent être poursuivis au delà de 50% de la créance déclarée de 177 493,05 euros au passif du débiteur principal ; la banque est défaillante dans l’administration de la preuve de courriers d’information; le courrier du 7 février 2018 que produit la banque n’est pas un courrier d’information de la défaillance de l’emprunteur mais seulement une mise en demeure de régler la somme de 110 753,96 euros au titre du prêt. Ils ne peuvent dès lors, être tenus au paiement de l’indemnité forfaitaire de 17 793,52 euros.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique, la Banque Populaire du Sud, intimée, demande à la cour, au visa des articles 2288 et suivants du code civil dans leur version applicable au présent litige, de l’article L. 341-4 devenu L. 332-1 du code de la consommation, de l’article 1110 du code civil dans sa version applicable au présent litige, de l’article L. 622-28 du code de commerce et de l’article 1343-5 du code civil, de :

-Juger Monsieur [S] [R] et les consorts [O] mal fondés en leur appel.

-Les débouter de l’ensemble de leurs demandes en ce compris la demande de Monsieur [S] [R] d’écarter ‘la pièce adverse n°21 produite tardivement et hors champ de l’expertise contradictoire’

-Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions

Y ajoutant,

-Condamner Monsieur [S] [R] et les consorts [O] à payer chacun à la Banque Populaire du Sud la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

-Les Condamner aux entiers dépens, en ce compris le coût du rapport d’expertise judiciaire.

Au soutien de ses prétentions, l’intimée fait valoir que si Monsieur [R] n’a pas rédigé la mention d’engagement de caution portée sur l’acte de caution du 16 février 2016, il a rédigé et signé un acte de cautionnement le 4 mars 2016 portant sur un prêt accordé à la société Boxing Day d’un montant de 225 000 euros, et pour le même montant garanti de 112 500 euros ; il appartient à Monsieur [R] d’établir la disproportion du cautionnement à ses revenus et patrimoine; or, il ne verse au débat aucun élément relatif à ces éléments à la date du cautionnement; Monsieur [R] était cogérant de la SARL Boxing Day et est intervenu à l’acte de caution en qualité de ‘responsable entreprise’; il a donc la qualité de caution avertie alors que seule une caution non avertie peut prétendre bénéficier d’une mise en garde de la banque ; même si Monsieur [R] est une caution non avertie, il ne démontre pas que le prêt litigieux était inadapté aux capacités financières de sa société ou à ses propres capacités financières ; aucune déchéance des intérêts ne saurait être mise en oeuvre avant le 16 mars 2017; elle a dûment informé Monsieur [R] par courrier recommandé du 7 février 2018 de la défaillance de l’emprunteur.

S’agissant du cautionnement donné par Messieurs [O], la banque indique qu’il n’est pas établi qu’ils aient renoncé au bénéfice de discussion et de division et aient subordonné leur engagement de caution à l’efficacité comme à la validité de celui de Monsieur [R] ; la mention du contrat de prêt fait seulement référence au caractère solidaire des cautionnements; elle a fait remplir à Monsieur [Y] [O] une déclaration de situation patrimoniale le 4 janvier 2016 dont il résulte que ses revenus annuels étaient de 49 631 euros, outre une épargne de 106 002 euros; elle a donc considéré qu’il disposait de revenus et patrimoine suffisants pour se porter caution dudit prêt; la déclaration de situation patrimoniale de Monsieur [I] [O] démontre qu’il disposait de revenus annuels de 49 631 euros outre une épargne de 79 000 euros et une résidence principale de 280 000 euros; elle était donc fondée à considérer qu’il était apte à faire face à son engagement de caution; l’appréciation doit se faire in concreto et aucun des cautionnements antérieurs souscrits par Messieurs [O] ne pouvait être pris en compte dans leur endettement ; les consorts [O] ne démontrent pas avoir formé une réclamation à l’encontre de l’état des créances dans le délai d’un mois suivant ladite publication, l’admission de créance revêtant l’autorité de chose jugée à leur encontre ; ils sont tenus solidairement à la somme de 101 489,96 euros arrêtée au 27 mai 2019 ; elle a respecté son obligation d’information annuelle des cautions en envoyant des lettres d’information les 9 mars 2015, 4 mars 2016 et 16 mars 2017 et elle a informé les consorts [O], par courriers recommandés du 7 février 2018, de la défaillance de la SARL Boxing Day.

Pour un plus ample exposé, il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

MOTIFS

1) Sur les demandes dirigées à l’encontre de Monsieur [S] [R]

Sur la validité de l’acte de cautionnement du 16 février 2016

L’article 2297 du code civil, issu de l’ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021, a abrogé le titre III du livre III du code de la consommation qui régissait le cautionnement et notamment les articles L. 331-1 et L. 331-2 qui reprenaient les dispositions des articles L. 341-2 et L. 341-3, en vigueur jusqu’au 1er juillet 2016, s’agissant de la mention portée par la caution.

Aux termes de l’article 37 de l’ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021, les cautionnements conclus avant le 1er janvier 2022 demeurent soumis à la loi ancienne, y compris pour leurs effets légaux et pour les dispositions d’ordre public.

La validité des engagements de caution de l’appelant doit donc être appréciée au regard des articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation qui étaient alors en vigueur, lors de la signature de l’acte litigieux du 16 février 2016.

Aux termes de l’ancien article L. 341-2 du code de la consommation, applicable au présent litige, toute personne physique qui s’engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : « En me portant caution de X…, dans la limite de la somme de … couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de …, je m’engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X… n’y satisfait pas lui-même. »

De plus, l’ancien article L. 341-3 du même code prévoyait que lorsque le créancier professionnel demandait un cautionnement solidaire, la personne physique qui se portait caution devait, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante: « En renonçant au bénéfice de discussion défini à l’article 2298 du code civil et en m’obligeant solidairement avec X…, je m’engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu’il poursuive préalablement X… ».

En l’occurrence, l’expertise judiciaire ordonnée par le conseiller de la mise en état a confirmé les conclusions des expertises privées diligentées les 14 janvier et 26 mai 2020 par Monsieur [S] [R] selon lesquelles ce dernier n’a pas rédigé la mention d’engagement de caution portée sur l’acte du 16 février 2016, bien qu’il en soit le signataire.

Ainsi, le formalisme imposé par le législateur, à peine de nullité, pour protéger la caution en attirant son attention sur la portée de ses engagements et l’étendue des risques pris n’a pas été respecté.

Dès lors, il convient d’annuler l’acte de cautionnement du 16 février 2016.

Sur la validité de l’acte de cautionnement du 4 mars 2016

La banque a communiqué, postérieurement au dépôt du rapport d’expertise judiciaire, un autre acte de cautionnement signé le 4 mars 2016.

Cette production ne saurait être considérée comme tardive dès lors qu’elle est intervenue avant clôture de l’instruction de l’affaire et que l’appelant a été en mesure de présenter des moyens en défense sur la nouvelle pièce qui lui a été opposée, soumise au débat contradictoire et à la libre discussion des parties.

L’acte sous signature privée du 4 mars 2016 a été adressé dès le 21 janvier 2022 à l’expert judiciaire et au conseil de Monsieur [S] [R]. Ce dernier qui en a donc eu connaissance avant même le dépôt du rapport d’expertise avait la faculté de solliciter une extension de la mission de l’expert judiciaire afin qu’elle porte également sur l’authenticité de ce document.

Par ailleurs, Monsieur [S] [R] qui invoque une ‘ suspicion légitime’ ne dénie par pour autant formellement être l’auteur de l’écriture et de la signature qui lui sont attribuées.

Il n’y a donc pas lieu d’écarter la pièce n°21 communiquée par la banque.

Sur la disproportion des engagements de la caution

L’ancien article L.341-4 du code de la consommation, en vigueur à la date du cautionnement litigieux, prévoit qu’un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où elle est appelée, ne lui permettre de faire face à ses obligations.

La disproportion manifeste du cautionnement doit être évaluée lors de la conclusion du contrat, au regard du montant de l’engagement et en fonction des revenus et du patrimoine de la caution, en prenant également en considération l’endettement global de celle-ci.

Si en vertu de ces dispositions, la sanction d’une disproportion manifeste entre la situation patrimoniale de la caution au moment de son engagement et le montant de celui-ci est l’impossibilité pour le créancier professionnel de se prévaloir du cautionnement souscrit, il incombe à la caution de rapporter la preuve de la disproportion qu’elle allègue.

En tout état de cause, l’article L.341-4 précité ne met pas à la charge du créancier professionnel l’obligation de vérifier la situation financière de la caution lors de son engagement, en lui faisant remplir une fiche de renseignement patrimoniale.

Monsieur [S] [R] qui ne verse pas la moindre pièce justificative de son patrimoine ou de ses revenus échoue dans la démonstration dont il a la charge que son engagement de caution était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus.

Sur le devoir de mise en garde

La qualité de caution avertie ne peut se déduire de la seule qualité de co-gérant de Monsieur [S] [R] de la société débitrice.

Il appartient à la caution non avertie qui invoque le manquement de la banque à son obligation de mise en garde d’apporter la preuve de la disproportion de son engagement au regard de ses capacités financières ou du risque d’endettement né de l’octroi du crédit, et ce à la date de conclusion de son engagement.

En l’occurrence, Monsieur [S] [R] ne démontre aucunement que son engagement n’était pas adapté à ses capacités financières qui ne sont ni justifiées, ni même décrites. Il ne fournit pas non plus le moindre élément établissant que le prêt n’aurait pas été adapté aux capacités financières de la SARL qu’il dirigeait alors qu’il résulte de la déclaration de créance au passif de la liquidation judiciaire que les mensualités du prêt litigieux consenti le 31 mars 2016 ont été régulièrement payées jusqu’à la liquidation judiciaire prononcée le 27 novembre 2017.

Le manquement au devoir de mise en garde n’est donc pas avéré.

Sur l’information annuelle

L’article L313-22 du code monétaire et financier, dans sa rédaction antérieure à la loi du 9 décembre 2016, dispose :

« Les établissements de crédit ou les sociétés de financement ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l’année précédente au titre de l’obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l’engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.

Le défaut d’accomplissement de la formalité prévue à l’alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l’établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu’à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l’établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette. »

L’établissement de crédit ayant accordé un concours financier au sens de l’art. L. 313-22 est tenu de fournir à la caution les informations prévues par ce texte jusqu’à extinction de la dette et au plus tard avant le 31 mars de chaque année dès lors que la dette existait au 31 décembre, fût-elle née au cours de l’exercice. Cette obligation persiste même si le débiteur principal est en redressement ou en liquidation judiciaire.

La caution s’étant engagée le 4 mars 2016, la banque aurait du lui adresser au plus tard le 31 mars 2017 la première information sur le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir le 31 décembre 2016.

Monsieur [S] [R] ne conteste pas l’accomplissement par la banque, à travers la lettre du 16 mars 2017 versée au débat, de son obligation d’information du montant des engagements de la caution au 31 décembre 2016. Il invoque l’absence d’envoi des lettres d’information au cours des années postérieures à la liquidation judiciaire de l’emprunteur.

La banque ne produisant pas les lettres d’information qui auraient du être envoyées à la caution au plus tard le 31 mars 2018 et le 31 mars des années suivantes, la déchéance du droit aux intérêts conventionnels doit être prononcée à compter de la dernière information du 16 mars 2017.

La créance a été admise au passif de la liquidation judiciaire pour le montant du capital restant dû au 1er novembre 2017 de 177 493,05 euros du prêt litigieux.

La déchéance entraîne une affectation prioritaire des intérêts payés par le débiteur principal sur la créance de la banque sur la caution. Il convient, par conséquent, au vu du tableau d’amortissement, de soustraire de la somme de 177 493,05 euros les intérêts de 3 148,34 euros payés sur les échéances d’avril 2017 à novembre 2017 inclus.

Le concours de Monsieur [S] [R] a été accordé à hauteur de 50%. Il est donc redevable de la somme de 87 172,36 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 7 février 2018.

L’article L.341-1 du code de la consommation, en vigueur à l’époque des cautionnements concernés, disposait que:’ Sans préjudice des dispositions particulières, toute personne physique qui s’est portée caution est informée par le créancier professionnel de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l’exigibilité de ce paiement. Si le créancier ne se conforme pas à cette obligation, la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retards échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle elle en a été informée.’

En l’espèce, l’information prévue par la loi a bien été dispensée aux cautions par la lettre recommandée de mise en demeure du 7 février 2018 qui fait expressément état de la défaillance de la SARL, débitrice principale.

Dès lors, c’est à bon droit que les premiers juges ont considéré que la banque était fondée à solliciter le paiement de la moitié de l’indemnité forfaitaire de 17 793,52 euros, soit la somme de 8 896,76 euros.

Au total, Monsieur [S] [R] doit être condamné à payer la somme de 96 069,12 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 7 février 2018.

2) Sur les demandes dirigées à l’encontre de Messieurs [O]

Le moyen tiré de la nullité des cautionnements au motif que Messieurs [O] ne se seraient engagés qu’en considération de celui de Monsieur [S] [R] est sans objet dès lors que ce dernier s’est valablement porté caution au titre du prêt de 225 000 euros consenti à la SARL, par acte sous signature privée du 4 mars 2016.

Sur la disproportion des engagements de la caution

La fiche de renseignements du 4 janvier 2016 signée par Monsieur [Y] [O] fait état de revenus annuels de 49 631 euros et de charges de loyers de 551 euros par mois ainsi que d’impôts de 3 530 euros par an. Il y est mentionné des avoirs bancaires d’un montant total de 106 275 euros.

La banque n’était pas tenue de vérifier ces informations fournies par Monsieur [Y] [O], en l’absence d’anomalie apparente.

En revanche, la banque ne pouvait ignorer les engagements de caution pris antérieurement auprès d’elle par Monsieur [Y] [O] dont il convient de tenir compte quand bien même ils ne figurent pas sur la fiche de renseignements.

Il n’est pas justifié du cautionnement à hauteur de 46 500 euros qui aurait été signé le 19 mars 2008 par Monsieur [Y] [O]. En tout état de cause, cette garantie aurait été donnée au titre d’un prêt remboursable sur 84 mois au maximum, qui n’était plus en cours à la date de la signature du cautionnement litigieux du 10 février 2016.

Le cautionnement du mois de février 2011 à hauteur de 26 000 euros était destiné à garantir un prêt de 40 000 euros d’une durée de 60 mois dont il ne restait plus qu’une seule échéance d’un montant de 736 euros à régler à la date de la signature du cautionnement litigieux du 10 février 2016.

Le cautionnement à hauteur de 12 500 euros invoqué par Monsieur [Y] [O], est mentionné sur les lettres d’information des mois de mars 2015, 2016 et 2017, versées au débat par la banque. Il concerne un prêt de 150 000 euros venant à échéance le 5 octobre 2021 et doit donc être pris en considération.

Il en est de même du cautionnement de 15 000 euros donné en mars 2015 pour un prêt de 60 000 euros venant à échéance le 5 mars 2022.

L’actif mobilier du patrimoine de Monsieur [Y] [O] n’était pas suffisant pour faire face au montant global de ses engagements de 140 736 euros au cas où il aurait été appelé ; toutefois, après affectation de cet actif, il ne lui aurait resté à rembourser que la somme de 34 461 euros représentant un peu plus de huit mois de son revenu mensuel de sorte que le caractère manifestement disproportionné de l’engagement litigieux n’est pas démontré.

La fiche de renseignements du 6 janvier 2016 signée par Monsieur [I] [O] fait état de revenus annuels de 49 631 euros et de charges de loyers de 1 210 euros par mois ainsi que d’impôts de 3 500 euros par an. Il y est mentionné des avoirs bancaires et parts sociales d’un montant total de 79 000 euros.

Monsieur [I] [O] a également déclaré être propriétaire d’un bien immobilier lui servant de résidence principale d’une valeur de 280 000 euros sur lequel il existait un prêt immobilier en cours d’un montant initial de 266 000 euros de sorte que son actif immobilier net s’élevait à 7 000 euros, après déduction de la part de moitié de sa compagne avec laquelle il était pacsé.

Le prêt souscrit auprès de la société Compagnie Générale de Location n’est pas mentionné dans la fiche de renseignements et n’a pas à être pris en considération.

Tout comme Monsieur [Y] [O], l’actif mobilier et immobilier du patrimoine de Monsieur [I] [O] de 86 000 euros n’était pas suffisant pour faire face au montant global de ses engagements de caution de 140 736 euros au cas où il aurait été appelé ; toutefois, après affectation de cet actif, il ne lui aurait resté à rembourser que la somme de 54 936 euros représentant un peu plus de treize mois de son revenu mensuel de sorte que le caractère manifestement disproportionné de l’engagement litigieux n’est pas démontré.

Sur le quantum de la créance

La banque a déclaré sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SARL pour un montant de 177 493,05 euros, outre intérêts.

Aux termes de l’article L.622-28 du code de commerce, s’agissant d’un contrat de prêt conclu pour une durée supérieure à un an, le jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire n’a pas arrêté le cours des intérêts légaux et conventionnels. Les intérêts de retard au taux contractuel de 2,50 % sont donc dus, sous réserve d’une éventuelle déchéance du fait du non accomplissement par la banque de son devoir d’information.

La banque n’a pas déclaré au passif de la liquidation judiciaire l’indemnité forfaitaire de 17 793,52 euros ; cette créance n’est cependant pas éteinte mais seulement inopposable à la liquidation judiciaire.

Sur l’information de la caution

Monsieur [Y] [O] et Monsieur [I] [O] soulèvent le non respect des dispositions de l’article L313-22 du code monétaire et financier, dans sa rédaction antérieure à la loi du 9 décembre 2016.

Ils ne reconnaissent devoir que la moitié du capital restant dû au 1er novembre 2017 de 177 493,05 euros du prêt.

La charge de la preuve de l’exécution de l’obligation d’information annuelle de la caution incombe à la banque. Cette preuve peut être apportée par tout moyen.

En l’occurrence, il n’est pas anormal que les courriers d’information des 9 mars 2015 et 4 mars 2016 ne comportent aucune information relative au prêt litigieux dès lors qu’il n’était pas encore accordé à la date du 31 décembre de l’année précédente.

Les cautions s’étant engagées le 10 février 2016, la banque aurait du leur adresser au plus tard le 31 mars 2017 la première information sur le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir le 31 décembre 2016.

La seule production de la copie de la lettre du 16 mars 2017 ne suffit pas à justifier de son envoi qui est contesté par les cautions.

La banque est donc défaillante dans la preuve de l’exécution de l’accomplissement de son obligation annuelle d’information pour l’année 2016 à l’égard de la caution.

La déchéance des intérêts conventionnels doit donc être prononcée à compter du 31 mars 2017.

La banque est toutefois en droit d’obtenir l’application des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure par lettre recommandée du 7 février 2018.

Par conséquent, Monsieur [Y] [O] et Monsieur [I] [O] sont redevables, tout comme Monsieur [R], de la somme de 87 172,36 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 7 février 2018.

L’article L341-1 du code de la consommation, en vigueur à l’époque des cautionnements concernés, disposait que:’ Sans préjudice des dispositions particulières, toute personne physique qui s’est portée caution est informée par le créancier professionnel de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l’exigibilité de ce paiement. Si le créancier ne se conforme pas à cette obligation, la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retards échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle elle en a été informée.’

En l’espèce, l’information prévue par la loi a bien été dispensée aux cautions par la lettre recommandée de mise en demeure du 7 février 2018 qui fait expressément état de la défaillance de la SARL, débitrice principale.

Dès lors, c’est à bon droit que les premiers juges ont considéré que la banque était fondée à solliciter le paiement de la moitié de l’indemnité forfaitaire de 17 793,52 euros, soit la somme de 8 896,76 euros.

Au total, Monsieur [Y] [O] et Monsieur [I] [O] seront condamnés solidairement avec Monsieur [S] [R] à payer la somme de 96 069,12 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 7 février 2018.

Sur la demande de délai de paiement

Monsieur [Y] [O] et Monsieur [I] [O] se contentent d’invoquer la période difficile due au Covid 19, sans expliciter en quoi l’épidémie aurait eu un impact sur leur situation économique actuelle dont ils ne justifient aucunement.

Eu égard à l’ancienneté de la dette, ils seront déboutés de leurs demandes fondées sur les dispositions de l’article 1343-5, alinéas 1 et 2, du code civil.

Sur la capitalisation des intérêts de retard

Aucun moyen n’est soutenu par les appelants pour s’opposer à la capitalisation des intérêts de retard ordonnée par le jugement déféré, qui est justifiée dès lors que la demande en a été faite par la banque.

Sur l’exécution provisoire

Dans le dispositif de leurs conclusions d’appel, Monsieur [Y] [O] et Monsieur [I] [O] ont également demandé à la cour d’écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir. Cette demande qui n’est pas fondée en droit sera également rejetée.

3) Sur les frais du procès

Les appelants qui succombent dans l’essentiel de leurs prétentions seront condamnés solidairement aux dépens de l’instance d’appel y compris les frais d’expertise judiciaire.

L’équité ne commande toutefois pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en faveur de l’intimée.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu’il a débouté Monsieur [S] [R] de sa demande d’annulation de l’acte de cautionnement du 16 février 2016, débouté Monsieur [S] [R], Monsieur [Y] [O] et Monsieur [I] [O] de leur demande de déchéance du droit de la banque aux intérêts contractuels et les a condamnés solidairement au paiement de la somme de 101 489,96 euros, outre intérêts au taux de 2,50% du 28 mai 2019 jusqu’à parfait paiement

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Prononce l’annulation de l’acte de cautionnement du 16 février 2016 signé par Monsieur [S] [R]

Déboute Monsieur [S] [R] de sa demande tendant à voir écarter la pièce n°21 communiquée par la banque constituée par l’acte de cautionnement du 4 mars 2016

Condamne solidairement Monsieur [S] [R], Monsieur [Y] [O] et Monsieur [I] [O] à payer à la Banque Populaire du Sud la somme de 96 069,12 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 7 février 2018

Y ajoutant,

Déboute Monsieur [Y] [O] et Monsieur [I] [O] de leur demande de délai de paiement

Déboute Monsieur [Y] [O] et Monsieur [I] [O] de leur demande tendant à voir écarter l’exécution provisoire

Condamne solidairement Monsieur [S] [R], Monsieur [Y] [O] et Monsieur [I] [O] aux entiers dépens d’appel, y compris les frais d’expertise judiciaire,

Déboute la Banque Populaire du Sud de sa demande d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Arrêt signé par la présidente et par la greffiere.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

 


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