RG N° 15/00172
FP
N° Minute :
délivrée le :
la SCP CONSOM’ACTES
la SELARL CABINET ALEXANDRA WIEN
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE COMMERCIALE
ARRÊT DU JEUDI 06 JUILLET 2017
Appel d’une décision (N° RG 2013J467)
rendue par le Tribunal de Commerce de GRENOBLE
en date du 28 novembre 2014
suivant déclaration d’appel du 16 janvier 2015
APPELANTE :
Société [B] GEMFRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice demeurant en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 2]
Représentée par Me Christian BRASSEUR de la SCP CONSOM’ACTES, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et par Me CHERON, avocat au barreau de PARIS, plaidant
INTIMÉE :
SARL DEDISERVICES représentée par son représentant légal domicilié ès-qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Alexandra WIEN de la SELARL CABINET ALEXANDRA WIEN, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, et par Me ITEANU, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me HARDY, avocat au barreau de PARIS, plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Dominique ROLIN, Président de Chambre,
Madame Fabienne PAGES, Conseiller,
Madame Anne-Marie ESPARBÈS, Conseiller,
DÉBATS :
A l’audience publique du 24 mai 2017 où l’affaire a été mise en délibéré au 29 juin 2017, prorogé au 06 juillet 2017
Madame Fabienne PAGES, Conseiller, en son rapport et Madame Dominique ROLIN, Président, assistées de Madame COSNARD, Greffier, ont entendu les avocats en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile. Il en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu à l’audience de ce jour.
[F] [B] exerce l’activité de vente de pierres et bijoux depuis 1989.
Il crée la société [B] GEMFRANCE le 18 juin 2003, spécialisée dans le commerce de gros et de détail de pierres fines et précieuses.
Cette société vend notamment des pierres et des bijoux sur son site internet.
La société DEDISERVICES, créée en 2004, est une agence web spécialisée notamment en e-commerce.
La société [B] GEMFRANCE se rapproche en 2002 de la société DEDISERVICES pour l’amélioration de son site internet et de façon à développer son activité à partir de son site.
La société [B] GEMFRANCE accepte le devis de la société DEDISERVICES à hauteur de la somme de 26 742,56 euros TTC et signe le contrat de réalisation du site web le 9 juillet 2012.
Elle verse le 1er acompte de 40 % à la commande soit la somme de 10 697,02 euros TTC le 15 août 2012 conformément au contrat.
Faisant valoir que le site commandé n’a finalement jamais été achevé et que la partie adverse a mis en ligne un site non achevé en février 2013, soit comportant de nombreux dysfonctionnements, la société [B] GEMFRANCE sollicite le remboursement de l’acompte versé par une mise en demeure du 4 avril 2013 puis fait citer la société DEDISERVICES par assignation du 16 septembre 2013 en vue de la résolution du contrat et en remboursement de l’acompte.
Par jugement du tribunal de commerce de Grenoble du 28 novembre 2014, il est dit que l’assignation de la société SIKIRJDI GEMFRANCE est recevable, la résiliation du contrat est prononcée aux torts exclusifs de la société [B] GEMFRANCE, la société [B] GEMFRANCE est condamnée à payer à la société DEDISERVICES la somme de 16 045,54 euros au titre des factures impayées avec application des pénalités de retard contractuelles au taux d’intérêt légal augmenté de 1,5 %, la société [B] GEMFRANCE est condamnée à payer à la société DEDISERVICES la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts outre celle de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La société [B] GEMFRANCE relève appel de cette décision par déclaration au greffe en date du 16 janvier 2015.
Au vu de ses dernières conclusions en date du 26 avril 2017, la société [B] GEMFRANCE demande la confirmation du jugement en ce qu’il a jugé l’assignation recevable, de dire et juger que les pièces 14 et 25 constituent un commencement de preuve par écrit et l’infirmation du jugement pour le surplus, de dire que la société [B] GEMFRANCE a pleinement collaboré de bonne foi avec la société DEDISERVICES, de dire et juger que la société DEDISERVICES a manqué à ses obligations de conseil, de respect des délais et de délivrance conforme du site pour lequel elle avait conclu un contrat avec la société [B] GEMFRANCE le 9 juillet 2012, prononcer la résolution du contrat du 9 juillet 2012 aux torts exclusifs de la société DEDISERVICES, remettre les parties en l’état dans lequel elles se trouvaient avant la conclusion du contrat, ordonner à la société DEDISERVICES le remboursement de la somme de 10 697,02 euros au bénéfice de la société [B] GEMFRANCE au titre du premier acompte, condamner la société DEDISERVICES à verser à la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 20 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir qu’elle a parfaitement rempli ses obligations.
Elle ajoute que le retard quant à la réalisation du site est imputable à la partie adverse compte tenu notamment des changements d’interlocuteurs.
Elle ajoute que la partie adverse a manqué à son obligation de conseil n’a pas respecté les délais et a manqué à son obligation de délivrance conforme.
Elle fait valoir l’exception d’inexécution.
Elle explique que le clause limitative de responsabilité ne peut en l’espèce recevoir application compte tenu de l’importance des fautes de la partie adverse.
Au vu des dernières conclusions du 10 mai 2017, la société DEDISERVICES demande la confirmation du jugement contesté en ce qu’il prononce la résolution du contrat aux torts exclusifs de la partie adverse et la condamne au paiement de la somme de 16 045,54 euros au titre des factures restées impayées.
Elle demande la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts.
À titre subsidiaire, elle demande le cantonnement des sommes dues par la société DEDISERVICES à hauteur de la somme de 22 360 euros au titre de la clause limitative de responsabilité prévue au contrat.
En tout état de cause, elle sollicite la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle explique que la collaboration de la partie adverse en vue de l’élaboration du présent projet a été défaillante compte tenu du changement d’intervenants et des validations tardives en particulier la validation des spécifications avec 23 jours de retard, la nécessité de procéder à 24 versions de la maquette de la page d’accueil avant sa validation, la multiplicité des demandes de modifications et le défaut de recette provisoire du nouveau site.
Elle fait par conséquent valoir que l’ensemble des retards incombent à la partie adverse.
Elle précise que les pièces n°14 intitulée « captures d’écran de la version inachevée du site refondu par DEDISERVICES et n°25 intitulée « extraits du site refond par DEDISERVICES comportant des malfaçons » sont constituées de copies d’écran non datées faites dans des conditions indéterminées et doivent être déclarées non probantes et écartées des débats.
Elle en déduit que le non aboutissement du projet est imputable à la société [B] GEMFRANCE compte tenu de ses manquements.
Elle demande la paiement de la totalité du coût de la prestation soit la somme de 16 045,54 euros TTC, les pénalités de retard en application de l’article 12 du contrat, outre la somme de 50 000 euros de dommages et intérêts.
Elle ajoute que la partie adverse ne justifie pas de l’exception d’inexécution alléguée.
Elle précise qu’elle n’établit pas non plus la perte du chiffre d’affaires prétendue.
Motifs de l’arrêt :
Il convient de constater que la société DEDISERVICES ne conteste plus devant la cour la recevabilité de l’assignation délivrée par la société [B] GEMFRANCE à son encontre.
Le contrat conclu entre les parties prévoit l’obligation à la charge de la société DEDISERVICES en sa qualité de concepteur de rédiger le dossier des spécifications avec validation de la société [B] GEMFRANCE au cours de la première phase du projet en se basant sur la proposition commerciale annexée au contrat.
Cette annexe prévoit un planning prévisionnel.
La livraison totale du projet est prévue 90 jours après la réunion de lancement du projet effectuée le 20 juillet 2012.
La société DEDISERVICES justifie de la réalisation en vue de sa validation du dossier de spécifications en date du 26 juillet 2012 mais validé par sa cliente seulement le 18 août 2012.
La société DEDISERVICES démontre par la production des nombreux mails échangés entre les parties avoir réalisé 24 versions de la maquette de la page d’accueil, soit à partir du 30 août et jusqu’au 27 octobre 2012 afin d’en obtenir la validation, y compris concernant le logo.
De la même façon, la société DEDISERVICES démontre par la production des nombreux mails échangés entre les parties la validation de la conception graphique le 23 novembre 2012 alors que le 1er projet a été présenté fin octobre 2012.
Il est justifié de la réalisation de la phase suivante, soit le développement du site et back office le 4 décembre 2012 par la société DEDISERVICES et de la livraison de la 1ère version BETA test du site le 21 décembre 2012.
À nouveau, les échanges de mails entre les parties versés aux débats démontrent les multiples demandes de modifications de la société appelante jusqu’au 31 janvier 2013.
Alors que le site ainsi réalisé par la société DEDISERVICES n’a pas fait l’objet d’une réception provisoire comme prévu à l’article 5 du contrat, ce qui est confirmé par un courrier de son conseil du 18 avril 2013, réception de nature à lui permettre de faire état d’éventuels dysfonctionnements, la société [B] GEMFRANCE a pris acte de la résiliation du contrat imputable à la partie adverse compte tenu à la fois des retards et des dysfonctionnements du site.
Il est démontré que les retards quant à la réalisation du site en cause sont imputables à la société appelante compte tenu, et pour chacune des phases, de ses nombreuses demandes de modifications.
La société [B] GEMFRANCE ne justifie pas du bien fondé de son refus de réception provisoire du site à la date de sa mise en demeure, alors que cette réception avait justement pour objet d’obliger la société DEDISERVICES à faire toute modification au vu des éventuelles réserves mentionnées et dès lors les retards reprochés à cette date lui sont entièrement imputables.
Les captures d’écran versées aux débats en pièces 14 et 25 non datées ne sont pas de nature à démontrer le caractère non recettable du site et ne peuvent dès lors justifier le refus de réception.
Le jugement contesté prononçant la résiliation du contrat de réalisation du site web aux torts exclusifs de la société [B] GEMFRANCE sera par conséquent confirmé de ce chef.
La société [B] GEMFRANCE est par conséquent redevable du coût total de la prestation soit de la facture restée impayée à hauteur de la somme de 16 045,54 euros représentant le solde outre les pénalités de retard prévues par l’article 12 du contrat soit les intérêts au taux légal majoré de 1,5 %.
Le contrat conclu entre les parties prévoit que la charge totale du projet représente « 37 jours hommes tous intervenants confondus ».
Il est justifié par la société DEDISERVICES comme préalablement expliqué de la réalisation de nombreuses interventions et modifications, à la demande de son client à l’origine d’importants retards.
Ce temps de travail supplémentaire a nécessairement généré un coût supplémentaire à la charge de la société DEDISERVICES et par conséquent un préjudice qu’il convient de chiffrer à hauteur de la somme de 10 000 euros compte tenu des éléments dont dispose la cour, soit les différentes modifications dont elle justifie par les différents mails échangés entre les parties.
Le jugement contesté chiffrant la demande de dommages et intérêts de la société DEDISERVICES à hauteur de cette somme sera également confirmé de ce chef et la demande en paiement de cette dernière à hauteur de la somme de 50 000 euros rejetée.
La résiliation du contrat de réalisation de site internet étant imputable à la société [B] GEMFRANCE, elle ne peut demander une quelconque indemnisation du non achèvement de ce site.
Le jugement contesté rejetant cette demande sera également confirmé de ce chef.
L’équité commande de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société DEDISERVICES.
PAR CES MOTIFS,
la Cour
Statuant par décision contradictoire prononcée publiquement et par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et après avoir délibéré conformément à la loi,
Le jugement contesté sera confirmé en toutes ses dispositions.
Y ajoutant,
Condamne la société [B] GEMFRANCE à payer à la société DEDISERVICES la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société [B] GEMFRANCE aux entiers dépens.
SIGNE par Madame ROLIN, Président et par Madame COSNARD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le GreffierLe Président