RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 22/01108 –
N° Portalis DBVH-V-B7G-IMKA
SL – NR
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES
10 février 2022
RG :15/02541
S.A. GMF
C/
[M]
CPAM DE MAINE ET LOIRE
Grosse délivrée
le 04/05/23
à Me Caroline FAVRE DE THIERRENS
à Me Magali CHATELAIN
COUR D’APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
1ère chambre
ARRÊT DU 04 MAI 2023
Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NIMES en date du 10 Février 2022, N°15/02541
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Mme Séverine LEGER, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre
Mme Elisabeth TOULOUSE, Conseillère
Mme Séverine LEGER, Conseillère
GREFFIER :
Mme Nadège RODRIGUES, Greffière, lors des débats, et Mme Audrey BACHIMONT, Greffière, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l’audience publique du 16 Mars 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 04 Mai 2023.
Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.
APPELANTE :
S.A. GMF
Pris en la personne de son représentant légale en exercice
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Caroline FAVRE DE THIERRENS de la SELARL FAVRE DE THIERRENS BARNOUIN VRIGNAUD MAZARS DRIMARACCI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
INTIMÉS :
Monsieur [O] [M]
né le 22 Février 1986 à [Localité 7]
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par Me Magali CHATELAIN de la SCP CHATELAIN GUTIERREZ, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
CPAM DE MAINE ET LOIRE
[Adresse 3]
[Localité 4]
Assigné à étude le 16 mai 2022
Sans avocat constitué
ARRÊT :
Arrêt rendu par défaut, prononcé publiquement et signé par Mme Marie-Pierre FOURNIER, Présidente de chambre, le 04 Mai 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Le 28 novembre 2012, M. [O] [M] a signé un contrat d’assurance moto tous risques auprès de la garantie mutuelle des fonctionnaires (GMF).
Le 7 février 2013, M. [M] a été blessé suite à un accident de la circulation.
Par courrier du 14 novembre 2013, la GMF a refusé la prise en charge de son préjudice corporel dans la mesure où son incapacité n’excéderait pas 30%.
Par acte du 21 mai 2015, M. [O] [M] a assigné la GMF devant le tribunal de grande instance de Nîmes aux fins d’indemnisation de son préjudice.
Par actes d’huissier du 27 juillet 2015, M. [O] [M] a assigné la caisse nationale militaire de sécurité sociale, la mutuelle d’assurance des armées, le groupement militaire de prévoyance des armées (GMPA), la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) du Maine-et-Loire et la CPAM du Cher devant le tribunal de grande instance de Nîmes aux fins d’indemnisation de son préjudice.
Les affaires ont été jointes par ordonnance du juge de la mise en état du 1er octobre 2015.
Par jugement avant dire droit du 7 novembre 2016, le tribunal de grande instance de Nîmes a :
– reçu la société Allianz Vie en son intervention volontaire en lieu et place du GMPA en sa qualité d’assureur de M. [O] [M] ;
– prononcé la mise hors de cause de la société Allianz Vie ;
– dit que les pratiques de la GMF consistant à présenter un devis dont tous les termes ne sont pas reproduits dans le contrat, dolosives ;
– dit que la clause limitative sera inopposable à M. [O] [M] ;
– condamné la GMF à payer à M. [O] [M] la somme de 2 000 euros de dommages-intérêts pour préjudice moral ;
– ordonné l’expertise médicale de M. [O] [M] ;
– condamné la GMF à payer à M. [O] [M] une provision de 10 000 euros ;
– condamné la GMF aux dépens ;
– condamné la GMF à payer à M. [O] [M] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– rejeté les autres demandes.
Par arrêt du 27 septembre 2018, la cour d’appel de Nîmes a confirmé le jugement avant dire droit en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a condamné la GMF à payer à M. [O] [M] la somme de 2 000 euros de dommages-intérêts pour préjudice moral et l’a débouté de ses demandes à ce titre.
M. [K], médecin, a déposé son rapport d’expertise médicale définitif le 18 septembre 2020.
Par jugement réputé contradictoire du 10 février 2022, le tribunal judiciaire de Nîmes a :
– rappelé que par jugement du 7 novembre 2016, confirmé par arrêt de la cour d’appel de Nîmes du 27 septembre 2018, le tribunal de grande instance de Nîmes a reçu la société Allianz Vie en son intervention volontaire en lieu et place du GMPA en sa qualité d’assureur de M. [O] [M] et prononcé la mise hors de cause de la société Allianz Vie ;
– dit que la GMF est en droit d’opposer les clauses des conditions générales du contrat d’assurance souscrit ;
– constaté que la ‘garantie conducteur’ prévue au contrat conclu par M. [O] [M], selon les termes de son article 2.5, prévoit l’indemnisation de postes de préjudices limitativement énumérés ;
En conséquence ,
– condamné la compagnie d’assurance GMF à payer à M. [O] [M] les sommes suivantes:
Préjudice Patrimonial :
Frais d’assistance temporaire par tierce personne : 5 824 euros
Perte de gains professionnels actuels : 2 455,76 euros
Perte de gains professionnels futurs : 10 037, 43 euros
Incidence professionnelle : 30 000 euros
Frais de véhicule adapté : 8 301,43 euros
Préjudice extra-patrimonial :
Déficit fonctionnel permanent : 34 800 euros
Total : 91 418,62 euros
– dit que la provision préalablement versée viendra en déduction de la somme ainsi allouée ;
– déclaré la présente décision commune et opposable à la CPAM de Maine et Loire ;
– fixé la créance de la CPAM du Maine et Loire à la somme de 10 799,18 euros au titre des dépenses santé actuelles ;
– débouté M. [O] [M] de ses demandes au titre des dépenses de santé actuelles, des frais divers, du préjudice scolaire, du déficit fonctionnel temporaire, des souffrances endurées, du préjudice esthétique temporaire, du préjudice esthétique permanent, du préjudice d’agrément et du préjudice sexuel ;
– condamné la compagnie d’assurance GMF à payer à M. [O] [M] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– débouté les autres parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile;
– condamné la compagnie d’assurance GMF aux dépens, en ceux compris les frais d’expertise judiciaire ;
– ordonné l’exécution provisoire à hauteur de 50% des sommes allouées.
Le jugement a fait application de la clause ‘garantie conducteur’ et a procédé à l’indemnisation des seuls postes de préjudice prévus au contrat en ayant retenu que le précédent jugement du 7 novembre 2016 confirmé par la cour n’avait pas écarté les conditions générales du contrat mais avait seulement déclaré inopposable à l’assuré la clause afférente au seuil d’intervention de la garantie de 30 %.
Par déclaration du 23 mars 2022, la SA GMF a interjeté appel de cette décision.
Par ordonnance du 31 octobre 2022, la procédure a été clôturée le 1er mars 2023 et l’affaire fixée à l’audience du 16 mars 2023 et mise en délibéré par mise à disposition au greffe de la décision le 4 mai 2023.
EXPOSE DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS
Par conclusions notifiées par voie électronique le 19 août 2022, la SA GMF, appelante, demande à la cour de déclarer son appel recevable et bien fondé et de réformer le jugement dont appel en ce qu’il l’a :
condamné à payer à M. [O] [M] la somme de 10 037,43 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs et à la somme de 30 000 euros au titre de l’incidence professionnelle,
condamné la GMF à payer à M. [O] [M] la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens, en ce compris les frais d’expertise judiciaire,
Statuant à nouveau,
– faisan application des conditions générales du contrat signé par M. [M],
– débouter M. [M] de ses demandes sur le fondement de l’incidence professionnelle, ce poste de préjudice n’étant indemnisé qu’à défaut de perte de gains professionnels futurs,
– réduire à de plus juste proportions la somme sollicitée par M. [M] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– confirmer le jugement dont appel pour le surplus,
Sur les demandes formulées par M. [M] devant la cour,
A titre principal :
– se déclarer non saisie d’un quelconque appel incident formulé par M. [M],
– débouter M. [M] de l’ensemble de ses demandes formulées en cause d’appel,
A titre subsidiaire :
– débouter M. [M] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions contraires,
– confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a dit que la GMF est en droit d’opposer les clauses des conditions générales au contrat d’assurance souscrit et constaté que la garantie conducteur prévue au contrat selon les termes de son article 2.5 prévoit l’indemnisation de postes de préjudices limitativement énumérés et en conséquence de confirmer les postes de préjudice fixé par le jugement déféré et le quantum de la condamnation prononcée à son encontre,
Y ajoutant,
– constater que la demande formulée par M. [M] de condamnation de la GMF à lui payer la somme de 10 000 euros au titre d’une prétendue procédure abusive est une demande nouvelle formulée pour la première fois en cause d’appel,
En conséquence :
– déclarer irrecevable d’office la demande formulée par M. [M] de condamnation de la GMF à lui payer la somme de 10 000 euros au titre d’une prétendue procédure abusive en ce qu’elle constitue une demande nouvelle formulée pour la première fois en cause d’appel.
Au soutien de son appel, l’appelante fait essentiellement valoir que les conditions générales du contrat prévoient une indemnisation alternative des postes de préjudices de l’incidence professionnelle et de la perte de gains professionnels futurs de sorte que le cumul de ces postes tel que retenu par le premier juge est injustifié. Elle excipe de l’absence d’appel incident régulièrement formé par l’intimé et considère subsidiairement que la demande de revalorisation des montants alloués par le premier juge n’est pas fondée.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 13 juillet 2022, M. [M], intimé, demande à la cour de :
– déclarer l’appel interjeté par la GMF recevable mais mal fondé,
– débouter la GMF de ses demandes, fins et prétentions,
Reconventionnellement,
– infirmer le jugement du 10 février 2022,
A titre principal,
– rejeter les prétentions de la GMF,
A titre subsidiaire,
– débouter la GMF de toutes ses demandes, fins et conclusions,
Reconventionnellement,
– réformer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a :
condamné la compagnie d’assurance GMF à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
débouté les autres parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
condamné la compagnie d’assurance GMF aux dépens, en ceux compris les frais d’expertise judiciaire ;
ordonné l’exécution provisoire à hauteur de 50 % des sommes allouées.
Statuant à nouveau,
– constater que le tribunal de grande instance dans son jugement du 7 novembre 2016 confirmé par arrêt de la cour d’appel de Nîmes du 27 septembre 2018 a déclaré la clause limitative de garantie inopposable à dons intégralité,
– dire qu’il sera indemnisé de manière intégrale de ses préjudices sans qu’il lui soit opposé une quelconque clause limitative de garanties de la part de son assureur,
– condamner la GMF à lui verser la somme de :
Préjudices Patrimoniaux :
I. Préjudices patrimoniaux temporaires :
Dépenses de santé actuelles : 10 799,18 euros
Frais de timbre, photocopies et photos : 260 euros
Vêtements le jour de l’accident : 1 200 euros
Perte de gains professionnels actuels : 6 535,07 euros
Tierce personne temporaire : 5 824 euros
II. Préjudices patrimoniaux permanents :
Incidence professionnelle : 50 000 euros
Perte de gains professionnels futurs : 21 742,78 euros
Frais de véhicule adapté : 31 240,80 euros
Préjudice scolaire : 20 000 euros
Préjudices extrapatrimoniaux temporaires:
Déficit fonctionnel temporaire : 9 908,75 euros
Souffrances endurées : 18 000 euros
Préjudices esthétiques temporaires : 4 000 euros
Préjudices extra patrimoniaux permanents
Déficit fonctionnel permanent : 34 800 euros
Préjudice d’agrement : 15 000 euros
Préjudice esthétique permanent : 2 000 euros
Préjudice sexuel : 5 000 euros
A titre infiniment subsidiaire, si la clause limitative de responsabilité ne lui était pas déclarée inopposable,
– condamner la GMF à verser à lui verser la somme de 50 000 euros au titre de l’incidence professionnelle,
En tout état de cause :
– déclarer commune et opposable à la CPAM l’arrêt à intervenir,
– condamner la GMF à lui porter et payer la somme de 10 000 euros au titre de réparation du préjudice subi pour procédure abusive,
– condamner la GMF à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la GMF aux entiers dépens y compris les frais d’expertise.
L’intimé excipe d’une inopposabilité de l’intégralité de la clause limitative de responsabilité et sollicite l’indemnisation intégrale de ses préjudices et réclame subsidiairement l’allocation de la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice au titre de l’incidence professionnelle que le premier juge a insuffisamment réparé.
Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l’effet dévolutif :
– sur l’appel principal
Aux termes des dispositions de l’article 562 du code de procédure civile, l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent.
En application de l’article 954 de ce même code, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.
Il résulte de la combinaison de ces textes que la partie qui entend voir infirmer le chef d’un jugement doit d’une part, solliciter expressément l’infirmation ou l’annulation du jugement critiqué et d’autre part, formuler une prétention dans le dispositif de ses conclusions d’appel.
En l’espèce, l’appel principal est limité à deux chefs du jugement expressément critiqués concernant la condamnation au paiement de la somme de 10 037,43 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs et à la somme de 30 000 euros au titre de l’incidence professionnelle ainsi que la condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens pour lesquels l’appelante sollicite la réformation du jugement entrepris et demande à la cour de débouter M. [M] de ses demandes sur le fondement de l’incidence professionnelle et de réduire à de plus justes proportions la somme sollicitée par M. [M] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Au regard de ces prétentions expressément formées dans le dispositif des conclusions d’appelant, la cour est valablement saisie de l’appel interjeté par la société GMF et l’argumentation développée par l’intimé qui excipe d’une absence de prétention présentée par l’appelante sera rejetée.
– sur l’appel incident
Aux termes des dispositions de l’article 551 du code de procédure civile, l’appel incident ou l’appel provoqué est formé de la même manière que le sont les demandes incidentes, c’est-à-dire par voie de conclusions.
Selon l’article 909, l’intimé dispose, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, d’un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant prévues à l’article 908 pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué.
L’appelant excipe de l’absence d’appel incident régulièrement formé par l’intimé au moyen qu’il se contente de formuler des demandes de réformation du jugement de chefs qui ne sont pas critiqués par l’appelante et ne sont donc pas dévolus à la cour.
Il est exact que les conclusions notifiées par l’intimé dans le délai légal de trois mois suivant la notification des conclusions d’appelant le 15 avril 2022 ne précisent pas dans leur intitulé qu’elles visent à former un appel incident.
Mais le dispositif de ces conclusions tend précisément à la réformation du jugement sur certains chefs critiqués pour lesquels il est expressément demandé à la cour de statuer à nouveau et de dire que M. [M] sera indemnisé de manière intégrale de ses préjudices sans qu’il lui soit opposé une quelconque clause limitative de garantie de la part de son assureur et de réformer le quantum de la condamnation prononcée à l’encontre de ce dernier au titre de l’ensemble des postes de préjudice.
En procédant de la sorte, l’intimé a valablement saisi la cour d’une demande de réformation de chefs de jugement non dévolus à la cour au titre de l’appel principal mais dévolus au titre de l’appel incident régulièrement formé par voie de conclusions notifiées dans le délai de l’article 909 du code de procédure civile dont le dispositif est conforme aux exigences des articles 562 et 954 du code de procédure civile.
La cour est ainsi saisie de l’ensemble des chefs de jugement critiqués par la société GMF et par M. [M].
Sur l’opposabilité des conditions générales du contrat :
M. [M] considère que les précédentes décisions rendues entre les parties n’ont pas cantonné la sanction de l’inopposabilité à certaines dispositions de la clause 2.5 du contrat et que la clause limitative a été déclarée inopposable à l’assuré dans son intégralité.
La société GMF conteste cette analyse et indique que seule la clause limitative afférente au seuil d’intervention était critiquée devant les juges du fond en 2016 et non la clause relative à l’indemnisation des postes de préjudice.
Le jugement rendu le 7 novembre 2016 par le tribunal de grande instance de Nîmes entre les parties a dit que la clause limitative sera inopposable à M. [M] mais la question débattue devant le premier juge ne portait que sur la mise en oeuvre de la garantie souscrite et non sur l’indemnisation des postes de préjudice sur lesquels le jugement n’a pas statué mais a ordonné avant dire droit une expertise médicale aux fins d’examen de la victime.
La question précisément tranchée par le tribunal portait sur le seuil d’intervention de la garantie conducteur sur lequel les parties s’opposaient, l’assureur excipant d’un seuil de 30 % et l’assuré d’un seuil de 10 % conformément au devis communiqué le même jour que le contrat à M. [M].
Le tribunal a considéré que la clause prévoyant la mise en oeuvre de la garantie conducteur pour un seuil minimum de 30 % d’incapacité était inopposable à l’assuré mais ne s’est pas prononcé sur les modalités d’indemnisation du préjudice subi et n’a pas statué sur la question de l’inopposabilité des autres clauses contractuelles.
M. [M] excipe de l’inopposabilité de la clause limitative de la garantie prévue par l’article 2.5.2 des conditions générales du contrat qui n’ont été ni signées, ni paraphées par ce dernier et dont il n’est pas justifié qu’elles aient été effectivement portées à sa connaissance.
La société GMF produit les conditions particulières signées par M. [M] le 28 novembre 2012 contenant la mention suivante apposée juste au-dessus de la signature du souscripteur :
‘ Le souscripteur reconnaît avoir reçu la fiche d’information sur les prix, les statuts de la Garantie Mutuelle des Fonctionnaires, les conditions générales 1764/janvier 2011 qui contiennent les informations requises en matière de démarchage, la convention d’assistance 1768/juin 2003 et le présentes conditions particulières.
Ces documents constituent son contrat Motolis à effet du 29 novembre 2012 ‘.
Il est constant que sont opposables à l’assuré les conditions générales dont il reconnaît avoir pris connaissance et qu’il a acceptées avant le sinistre.
Or, la mention, figurant dans les conditions particulières d’un contrat signées par le souscripteur d’assurance, par laquelle ce dernier reconnaît avoir reçu un exemplaire des conditions générales désignées par leur référence, établit que celles-ci, bien que non signées, ont été portées à la connaissance de l’assuré et lui sont, par conséquent, opposables.
En l’espèce, la clause dactylographiée figurant juste au-dessus de la signature de M. [M] établit que celui-ci a effectivement reçu les conditions générales du contrat précisément référencées et leur acceptation se déduit de la signature de l’assuré de sorte que c’est à bon droit que le premier juge a retenu que la clause litigieuse afférente à la définition des préjudices pris en charge par l’assureur au titre de la garantie du conducteur limitativement prévus par l’article 2.5.2 des conditions générales lui était opposable.
La décision sera ainsi confirmée de ce chef.
Sur les préjudices :
I. Sur les préjudices patrimoniaux
1. Sur les préjudices patrimoniaux temporaires
– sur les dépenses de santé actuelles
Les dépenses de santé actuelles ont été fixées par le tribunal à la somme de 10 799,18 euros correspondant au montant des débours définitifs exposés par la CPAM sur lesquels M. [M] ne démontrait pas la preuve de dépenses restées à sa charge à ce titre.
M. [M] n’apportant aucun élément de preuve de nature à lui allouer personnellement la somme fixée devant revenir à l’organisme social comme l’a retenu le premier juge, la décision déférée sera confirmée sur ce point.
– sur les frais divers
M. [M] a été débouté par le premier juge de ses prétentions au titre des frais de timbre, photocopies, photos et du préjudice vestimentaire en l’absence d’une indemnisation contractuellement prévue pour ces postes de préjudice et le jugement sera confirmé, l’intimé ne faisant valoir aucune argumentation sur ce point qui découle de l’opposabilité de la clause litigieuse définissant les postes de préjudice couverts par l’assurance souscrite.
– sur la perte de gains professionnels actuels
M. [M] sollicite l’allocation de la somme de 6 535,07 euros en lieu et place de la somme allouée par le premier juge d’un montant de 2 455,76 euros en excipant de revenus mensuels de 2 306,83 euros sans pour autant apporter une quelconque critique au jugement entrepris ayant retenu au vu des pièces produites que ce dernier avait perçu un salaire moyen de 2 187,78 euros par mois sur une période de 34 mois et 8 jours correspondant précisément à la période retenue par l’expert au titre de l’incapacité temporaire.
La décision sera donc également confirmée de ce chef.
– sur l’assistance tierce personne
Le premier juge a alloué la somme de 5 824 euros à la victime au titre de l’assistance tierce personne, somme également réclamée en cause d’appel par M. [M] et la décision sera donc également confirmée sur ce point.
2. Sur les préjudice patrimoniaux permanents
– sur la perte de gains professionnels futurs
La méthodologie proposée par M. [M] au soutien de sa demande d’indemnisation de la perte de gains professionnels futurs à partir de son salaire brut de 112,88 euros par jour n’est pas adaptée et c’est à bon droit que le tribunal a pris en compte le revenu journalier moyen de la victime avant l’accident de 72,93 euros compte tenu d’un salaire mensuel de 2 187,78 euros.
La décision déférée sera donc également confirmée sur ce poste de préjudice à hauteur de la somme de 10 037,43 euros obtenue par le différentiel entre le salaire journalier net et le montant de l’allocation d’aide au retour à l’emploi servie sur la période retenue par l’expert entre la date de consolidation du 8 août 2016 et le 1er juin 2017.
– sur l’incidence professionnelle
La société GMF fait grief au premier juge d’avoir alloué à M. [M] la somme de 30 000 euros au titre de l’incidence professionnelle au mépris des conditions générales du contrat et se prévaut du caractère alternatif de l’indemnisation au titre de la perte de gains professionnels futurs ou de l’incidence professionnelle.
M. [M] sollicite de son côté la majoration de la somme octroyée par le tribunal à hauteur de 50 000 euros en raison des conséquences de l’accident l’ayant définitivement privé de la possibilité de poursuivre sa carrière de militaire sur le terrain et conteste l’interprétation de la clause telle qu’effectuée par l’assureur.
La clause litigieuse est libellée dans les termes suivants :
‘ Nous garantissons la perte de gains professionnels futurs, c’est-à-dire la perte ou la diminution des revenus subie par l’assuré après consolidation et consécutive à l’incapacité ou l’incidence professionnelle’.
Contrairement à l’argumentation développée par la société GMF, l’emploi de la conjonction de coordination ‘ou’ ne vise nullement à mettre en place une indemnisation alternative des deux postes de préjudice constitutifs d’une part, de la perte de gains professionnels futurs et d’autre part, de l’incidence professionnelle mais renvoie à la définition de la perte de gains comme étant consécutive à l’incapacité ou à l’incidence professionnelle.
L’interprétation proposée par l’assureur est non seulement inadaptée au paragraphe concerné, défavorable à l’assuré mais encore non pertinente en ce que l’assureur ne fournit aucun élément de nature à établir un critère de choix entre le poste de préjudice de perte de gains professionnels actuels et celui de l’incidence professionnelle.
C’est donc de manière pertinente que le tribunal a rejeté l’argumentation de la société GMF afférente à l’interprétation de cette clause en ayant retenu qu’aucun élément ne permettait d’exclure ce poste de préjudice de la garantie contractuelle souscrite.
S’agissant du quantum de l’indemnisation alloué par le premier juge au titre de l’incidence professionnelle, le tribunal a pris en compte les éléments de fait de nature à procéder à une appréciation in concreto du préjudice effectivement subi par M. [M] qui s’est trouvé privé de la poursuite de sa carrière militaire sur le terrain.
Le préjudice sera intégralement réparé par la somme de 30 000 euros accordée par le tribunal, la décision déférée étant confirmée sur ce chef.
II. Sur les préjudices extra-patrimoniaux
L’article 2.5.2 des conditions générales du contrat énumère limitativement les postes de préjudice pris en charge au titre de la garantie contractuelle conducteur qui ne prévoit pas l’indemnisation du déficit fonctionnel temporaire, des souffrances endurées, du préjudice esthétique temporaire, du préjudice d’agrément, du préjudice esthétique permanent, du préjudice sexuel, du préjudice scolaire, ni du préjudice vestimentaire de sorte que les demandes présentées par M. [M] ne peuvent prospérer et seront rejetées par voie de confirmation du jugement déféré.
S’agissant du déficit fonctionnel permanent pris en compte au titre de la garantie, la somme de 34 800 euros a été allouée par le premier juge et sera confirmée, M. [M] sollicitant cette même somme en cause d’appel.
Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive :
C’est vainement que la société GMF conclut à l’irrecevabilité de la demande de dommages-intérêts présentée par l’intimé sur le fondement des dispositions de l’article 564 du code de procédure civile au moyen tiré d’une prétention non soumise au premier juge alors que la prétention se fonde sur le caractère abusif de la procédure d’appel.
Le droit d’appel ne dégénère cependant en abus que dans l’hypothèse de malice ou mauvaise foi ou d’erreur grossière équipollente au dol mais l’appréciation erronée qu’une partie fait de ses droits ne caractérise pas en l’espèce l’abus allégué et M. [M] sera par conséquent débouté de sa demande de dommages-intérêts en l’absence de preuve du caractère abusif de l’appel interjeté par la société GMF.
Sur les autres demandes :
Le jugement déféré étant confirmé dans l’intégralité de ses dispositions, la société GMF, qui succombe en son appel, sera condamnée à en régler les entiers dépens en application de l’article 696 du code de procédure civile.
C’est à raison que le premier juge a alloué la somme de 2 500 euros à M. [M] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et le jugement déféré sera également confirmé de ce chef.
L’équité commande d’allouer à M. [M] une somme supplémentaire de 1 500 euros destinée à compenser les frais irrépétibles exposés en cause d’appel que la société GMF sera condamnée à lui payer.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement déféré dans l’intégralité de ses dispositions soumises à la cour ;
Y ajoutant,
Déclare recevable la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive présentée par M. [O] [M] ;
Rejette la demande de dommages-intérêts présentée par M. [O] [M] ;
Déclare le présent arrêt commun et opposable à la CPAM du Maine et Loire ;
Condamne la SA GMF aux entiers dépens de l’appel ;
Condamne la SA GMF à payer à M. [O] [M] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rejette toute autre demande plus ample ou contraire.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,