Clause limitative de responsabilité : 27 mai 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 21/09674

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Clause limitative de responsabilité : 27 mai 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 21/09674

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 11

ARRÊT DU 27 MAI 2022

(n° 2022/ , 11 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/09674 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDW43 (absorbant le RG N° 21/09692)

Sur renvoi après un arrêt de la Cour de cassation prononcé le 03 février 2021 emportant cassation partielle d’un arrêt rendu par la cour d’appel de PARIS (Pôle 5 chambre 11) le 28 septembre 2018 sur appel d’un jugement rendu le 14 décembre 2016 par le Tribunal de Commerce de PARIS, sous le n° RG 2015034388

DEMANDERESSE À LA SAISINE

Société VALTECH SE, société européenne, prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social [Adresse 3] ayant un établissement en France au [Adresse 1] [Localité 4], élisant domicile

[Adresse 2]

[Localité 4]

immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS sous le numéro

389 665 167

Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018,

Ayant pour avocat plaidant Me Sylvain STAUB de la SELAS DS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : K0125 substitué par Me Olivier PIGNATARI, avocat au barreau de PARIS, toque : T07

DÉFENDERESSE À LA SAISINE

S.A.S. SMARTHYS CONSULTING prise en la personne de son représentant légal ayant son siège social

[Adresse 6]

[Localité 5]

immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de NANTERRE sous le numéro 521 140 848

Représentée par Me Audrey HINOUX de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : D0049,

Ayant pour avocat plaidant Me Nicolas HERZOG de la SELEURL H2O Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : A77,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 24 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Mme Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Denis ARDISSON, Président de chambre

Mme Marion PRIMEVERT, Conseillère

Mme Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE,Conseillère

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Mme Meggy RIBEIRO

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour initialement prévue le 20 mai 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par M. ARDISSON, et par Mme BOGAERS , Greffier, présent lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCÉDURE

La société européenne Valtech SE, détentrice de la version HFM 9.3.1 d’un logiciel édité par la société Oracle sous licence « BDD standard », a souhaité l’installation de la version HFM 11.1.2.2 du logiciel et a sollicité à cet effet la société Smarthys Consulting, qui a réalisé la migration le 15 avril 2013. Lors d’un audit effectué par la société Garmendia, mandatée par la société Oracle, à la fin de l’année 2014, sur les licences de la société Valtech, il est apparu que, lors de la migration, la société Smarthys avait téléchargé et installé chez son client Valtech la version « BDD entreprise » pour laquelle la société Valtech n’était pas titulaire de licences. Le rapport final d’audit du 16 février 2015 a exigé la régularisation de l’acquisition par la société Valtech de cinq cent cinquante licences « BDD entreprise », outre des frais de support pour la période d’utilisation des « BDD » sans licence. Le 31 mars 2015, la société Valtech a accepté la proposition de la société Garmendia d’achat de cinq cent quinze licences « BDD standard » et d’enlèvement des « BDD entreprise » pour un montant de 147.060,47 euros HT.

Après avoir vainement demandé à la société Smarthys le remboursement des sommes versées à la société Oracle, la société Valtech l’a assignée en paiement de dommages-intérêts suivant acte du 12 juin 2015 devant le tribunal de commerce de Paris.

Suivant jugement du 14 décembre 2016, le tribunal de commerce de Paris a :

débouté la société Valtech de toutes ses demandes,

condamné la société Valtech à payer la somme de 5.000 euros à la société Smarthys Consulting au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

ordonné l’exécution provisoire du jugement.

La société Valtech a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 9 février 2017.

Suivant arrêt du 28 septembre 2018, la cour d’appel de Paris a :

infirmé le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

débouté la société Valtech de sa demande de nullité du jugement entrepris,

condamné la société Smarthys Consulting à payer à la société Valtech la somme de 283.440,38 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 12 juin 2015 sur la somme de 176.472,68 euros, à compter du 7 juillet 2017 sur la somme de 283.440,38 euros,

dit que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière produisent intérêts,

vu l’article 700 du code de procédure civile,

condamné la société Smarthys Consulting à payer à la société Valtech la somme de 15.000 euros,

rejeté toute demande autre ou plus ample,

condamné la société Smarthys Consulting aux dépens.

La société Smarthys Consulting a formé un pourvoi n° Z 19-11.851 à l’encontre de cet arrêt.

Suivant arrêt du 3 février 2021, la chambre commerciale, financière et économique de la cour de cassation a cassé partiellement l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 28 septembre 2018, en ces termes :

« CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il condamne la société Smarthys consulting à payer à la société Valtech la somme de 283.440,68 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 juin 2015 sur la somme de 176.472,68 euros et à compter du 7 juillet 2017 sur la somme de 283.440,38 euros, ordonne la capitalisation des intérêts et statue sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile, l’arrêt rendu le 28 septembre 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Valtech aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Valtech et la condamne à payer à la société Smarthys consulting la somme de 3.000 euros ; »

PROCÉDURE SUR RENVOI DE CASSATION :

Par déclaration reçue le 14 mai 2021 et enregistrée le 28 mai 2021 sous le n° de RG 21/09674, la société Valtech a saisi la cour d’appel de Paris afin d’obtenir l’annulation ou la réformation du jugement rendu le 14 décembre 2016 par le tribunal de commerce de Paris par la critique de ses chefs suivants ainsi conçus :

déboute la société Valtech de toutes ses demandes,

condamne la société Valtech à payer la somme de 5.000 euros à la société Smarthys Consulting au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

ordonne l’exécution provisoire du jugement.

Une déclaration identique datée également du 14 mai 2021 a été reçue le 17 mai 2021 et enregistrée le 28 mai 2021 sous le n° de RG 21/09692.

* *

Suivant ses dernières conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 2 mars 2022, la société Valtech SE demande à la cour :

Vu les principes directeurs du procès dont dispose le code de procédure civile,

Vu le Chapitre VI, Titre III, Livre III (ancien) du code civil relatif à la preuve des obligations, applicable à l’espèce,

Vu les articles 2044 et suivants du code civil relatifs aux transactions,

Vu l’article 1626 (ancien) du code civil relatif à la garantie d’éviction du fait personnel,

Vu les articles 1142 et 1143 (anciens) du code civil sur l’inexécution des obligations de faire,

Vu les articles 1382 et 1383 (anciens) du code civil sur la responsabilité civile délictuelle,

Vu les articles 1157 et 1162 (anciens) du code civil sur l’interprétation du contrat,

Vu les articles 1147 et 1151 (anciens) du code civil sur la réparation de la faute contractuelle,

d’infirmer le jugement entrepris dans l’intégralité de ses dispositions, à savoir en ce qu’il a débouté la Société Valtech SE de toutes ses demandes, l’a condamné à payer la somme de 5.000 euros d’article 700 du code de procédure civile, l’a dit mal fondée en ses demandes autres, plus amples ou contraires au présent jugement et l’en a débouté, l’a condamné aux dépens.

Statuant à nouveau

de dire et juger que les serveurs de Valtech respectaient tous la règle d’un maximum de quatre réceptacles de processeurs par serveur et qu’aucune autre infraction aux règles de licence « Standard » d’Oracle n’est avancée ; en conséquence, que l’architecture technique de Valtech était conforme à l’utilisation de licences « Standard » des bases de données d’Oracle ;

de dire et juger que Smarthys ignorait la raison de la non-conformité conclue par l’audit de Garmendia ; que Smarthys n’a réalisé son erreur qu’a posteriori, deux ans après son intervention ; que cette erreur ne peut résulter d’un choix technique avisé de la part de Smarthys ;

de dire et juger que Smarthys est prestataire spécialisé « Oracle Gold Partner », ce qui implique une très forte expertise et de nombreuses et coûteuses formations auprès d’Oracle, que Valtech n’a aucune expertise dans ce domaine et n’avait aucune maîtrise sur le logiciel installé ainsi que les ressources informatiques installées au soutien de ce logiciel, dont les bases de données, que Smarthys a poursuivi ses activités de conseil et de mise à disposition du logiciel jusqu’à l’audit de 2015 et que Smarthys était redevable d’un devoir de conseil et d’information particulièrement élevé à l’égard de Valtech ;

de dire et juger que Valtech n’avait pas connaissance de l’installation de licences « Entreprise » des bases de données d’Oracle et ne les avait pas acceptées, notamment au regard de sa commande supplémentaire de licences « Standard » plus d’un an après le début des prestations de Smarthys ;

de dire et juger que rien n’établit que le brouillon interne produit par Smarthys sur l’installation des bases de données a été communiqué et/ou reçu par Valtech, que la pièce ne respecte pas les conditions d’admissibilité à titre de preuve comme de commencement de preuve, sauf à permettre à Smarthys de se créer à soi-même la preuve d’un acte juridique ;

de dire et juger qu’il n’y a pas eu de recette ou réception implicite de l’erreur d’installation deux ans avant sa découverte ;

de dire et juger qu’au regard des échanges entre Garmendia et Valtech à la suite de l’audit et avec Oracle par la suite, la régularisation du 31 mars 2015 est en réalité une transaction mettant fin à toute demande ou action d’Oracle en contrefaçon de ses licences « Entreprise » en échange du paiement d’une indemnité prenant la forme d’une commande de 515 Licences Standard surnuméraires ;

de dire et juger que Smarthys a reconnu une erreur d’installation des bases de données d’Oracle utilisées par le logiciel principal dans ses différentes écritures de première instance, qui a valeur d’aveu judiciaire ;

de dire et juger que Valtech a manqué à son devoir de conseil et d’information en proposant, lors de l’audit, des modifications, autres que la réinstallation de licences « Standard », qui n’étaient pas nécessaires au regard de l’architecture technique de Valtech, et en refusant d’assumer sa responsabilité pour la contrefaçon passée de deux ans des licences « Entreprise », rejetant la faute sur l’architecture technique de Valtech inchangée depuis son intervention de 2013 ;

de dire et juger que l’erreur d’installation de Smarthys constitue une inexécution fautive d’une obligation de faire d’une particulière négligence, engageant la responsabilité civile contractuelle de Smarthys ; 

Par conséquent, de condamner Smarthys à payer des dommages et intérêts à Valtech pour fautes répétées, graves et lourdes selon l’estimation du préjudice subi établi ci-après ;

A titre subsidiaire, 

Si la cour devait juger que l’architecture technique de Valtech n’était pas conforme à l’utilisation de licences « Standard » des bases de données d’Oracle : 

de dire et juger que Smarthys, en n’identifiant pas cette incompatibilité lors de son intervention de 2013, en s’abstenant d’alerter et de mettre en garde Valtech sur les difficultés que cela posait par rapport à ses demandes et sur la solution technique finalement adoptée, alors que Valtech continuait à payer des licences « Standard », a commis plusieurs fautes à son devoir de conseil et d’information ;

de condamner Smarthys à payer des dommages et intérêts à Valtech pour fautes répétées, graves et lourdes selon l’estimation du préjudice subi établi ci-après ;

Si la cour devait juger que Smarthys n’a pas commis d’inexécution fautive de ses obligations :

de condamner Smarthys à relever et garantir Valtech du préjudice de jouissance subi à ce titre ;

de dire et juger que l’installation de licences « Entreprise » en lieu et place des licences « Standard » demandées et acceptées dans les négociations contractuelles révèle l’existence de fautes délictuelles précontractuelles, soit par incompétence, soit par malveillance, ayant conduit Valtech à conclure une commande fondée sur des éléments inexactes, à savoir la reprise de ses licences « Standard » ;

de condamner Smarthys à payer les dommages et intérêts ci-après exposés ;

de dire et juger qu’aucune preuve valable de l’acceptation par Valtech des conditions générales de vente de Smarthys, qui sont un acte sous seing privé, n’a été versée aux débats ;  

de prononcer en conséquence l’inopposabilité de la clause limitative de responsabilité qui y est énoncée ;

de condamner Smarthys à payer à Valtech des dommages et intérêts de de 236 989,40 euros, dont 147 552,40 euros HT au titre de l’acquisition de 515 licences de la version « Standard » de la base de données Oracle, 75 451,5 euros HT au titre des prestations de Smarthys, 10 015,40 euros HT au titre de l’acquisition des licences de la version « Standard » de la base de données Oracle et 3 970,10 euros HT au titre de la redevance annuelle de maintenance des licences de la version « Standard » de la base de données Oracle

En tout état de cause, de condamner Smarthys à payer à Valtech une indemnité de procédure de 30 000 euros, incluant les dépens de première instance de 5 500 euros payés par Smarthys, ainsi qu’aux dépens ;

d’ordonner la production d’intérêts au taux légal et avec anatocisme à compter du 15 avril 2013 ;

* *

Suivant ses dernières conclusions signifiées le 9 novembre 2021, la société Smarthys Consulting demande à la cour, au visa des articles 1149 et suivants du code civil dans sa version en vigueur au jour de la signature du contrat d’intégration :

A titre principal,

de juger que Valtech ne justifie pas d’un quelconque lien de causalité entre la faute de Smarthys et le préjudice qu’elle allègue avoir subi.

En conséquence,

de confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 14 décembre 2016 en ce qu’il a débouté Valtech de l’intégralité de ses demandes.

A titre subsidiaire,

de juger que Valtech ne justifie pas que la faute de Smarthys lui aurait occasionné un préjudice actuel, direct et certain.

En conséquence,

de confirmer le Jugement du Tribunal de commerce de Paris du 14 décembre 2016 en ce qu’il a débouté Valtech de l’intégralité de ses demandes dans la mesure où cette dernière ne justifie pas avoir subi un préjudice actuel, direct et certain.

En tout état de cause,

de débouter Valtech de sa demande au titre des intérêts légaux et de l’anatocisme.

de débouter Valtech de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de condamner Valtech à payer à Smarthys une somme de 20 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

de condamner Valtech aux entiers dépens d’instance.

* *

La clôture a été prononcée à l’audience du 24 mars 2022.

SUR CE, LA COUR,

Sur la jonction

Aux termes de l’article 367 alinéa 1er du code de procédure civile :

« Le juge peut, à la demande des parties ou d’office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s’il existe entre les litiges un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble. ».

La société Valtech a régularisé deux saisines de la cour, à la suite du même arrêt de la cour de cassation du 3 février 2021, déclarations enregistrées sous deux numéros différents mais concernant le même litige.

Il convient par conséquent d’ordonner la jonction des instances enregistrées sous les numéros de RG 21/09674 et 21/09692 sous le seul n° de RG 21/09674.

Sur le périmètre de la cassation

Aux termes de l’article 623 du code de procédure civile : « La cassation peut être totale ou partielle. Elle est partielle lorsqu’elle n’atteint que certains chefs dissociables des autres. ».

En vertu de l’article 624 du même code : « La portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l’arrêt qui la prononce. Elle s’étend également à l’ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d’indivisibilité ou de dépendance nécessaire. ».

Aux termes de l’article 625 alinéas 1 et 2 du code de procédure civile : « Sur les points qu’elle atteint, la cassation replace les parties dans l’état où elles se trouvaient avant le jugement cassé.

Elle entraîne, sans qu’il y ait lieu à une nouvelle décision, l’annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l’application ou l’exécution du jugement cassé ou qui s’y rattache par un lien de dépendance nécessaire. ».

En vertu de l’article 638 du même code : « L’affaire est à nouveau jugée en fait et en droit par la juridiction de renvoi à l’exclusion des chefs non atteints par la cassation. ».

La cour de cassation a, au dispositif de son arrêt de renvoi du 3 février 2021, cassé partiellement l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 28 septembre 2018 « seulement en ce qu’il condamne la société Smarthys consulting à payer à la société Valtech la somme de 283.440,68 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 juin 2015 sur la somme de 176.472,68 euros et à compter du 7 juillet 2017 sur la somme de 283.440,38 euros, ordonne la capitalisation des intérêts et statue sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile ».

Il en résulte que les moyens soulevés par la société Smarthys Consulting tirés, au principal de l’absence de justification d’un lien de causalité entre la faute de Smarthys et le préjudice allégué, et subsidiairement, de l’absence de justification d’un préjudice actuel, direct et certain, tendant à remettre en cause la responsabilité de Smarthys sont irrecevables comme ayant été irrévocablement tranchés, la cour n’étant saisie que du quantum du préjudice dans les termes ci-dessus rappelés.

C’est à l’aune de cette cassation partielle que la cour statuera.

Sur les demandes de la société Valtech SE

A titre liminaire il sera relevé que la société Valtech ne réclamant plus qu’un montant HT, le débat sur la TVA, soulevé par la société Smarthys Consulting et objet de la cassation partielle, n’a plus lieu d’être.La société Valtech fait valoir que l’erreur d’installation de la société Smarthys Consulting est directement à l’origine du préjudice subi. Elle souligne que la modification de l’architecture technique n’aurait pas permis de régulariser les deux ans écoulés d’utilisation des Licences Oracle et donc lui aurait évité de payer une indemnité. Elle détaille les différents éléments de son préjudice et ne réclame plus qu’un montant HT.

Il est rappelé que le rapport final d’audit du 16 février 2015 a exigé la régularisation de l’acquisition par la société Valtech de 550 licences BDD Entreprise outre des frais de support pour la période d’utilisation des BDD sans licence. Le 31 mars 2015, la société Valtech a accepté la proposition de la société Garmendia d’achat de 515 licences BDD standard, de « désinstallation » des BDD Entreprise pour un montant de 147.060,47 euros HT. Il a donc été prévu le paiement de 515 Licences standard surnuméraires au prix de 147.060,57 euros HT (176.472,68 euros TTC) à Garmendia face à la demande initiale de réparation de la société Oracle à hauteur de 522.500 euros.

La société Smarthys soutient qu’il ne s’agit pas d’une indemnité transactionnelle et estime que l’appelante réaliserait un profit de 515 licences si la somme réclamée lui était allouée et qu’en outre, l’acceptation de sa propre proposition de modification de l’architecture du système d’information de Valtech pour un montant de 6.600 euros aurait évité le paiement de la somme réclamée.

La société Valtech justifie par la production d’une facture de Garmendia Consulting France datée du 1er avril 2015 de l’acquisition des 515 licences Oracle standard d’un montant de 176.472,68 euros TTC (147.060,57 euros HT) et d’un virement de ce montant à Garmendia au 30 avril 2015. Contrairement à ce que soutient la société Smarthys, les pièces produites par la société Valtech démontrent l’existence de discussions intervenues avec Oracle et Garmendia afin de régulariser ces licences Oracle et de permettre une mise en conformité avec l’utilisation des logiciels Oracle, échanges qui se sont concrétisés par l’acceptation par la société appelante de la proposition de Garmendia. Le montant réglé à hauteur de 147.060,57 euros HT est par conséquent un préjudice indemnisable résultant directement des fautes commises par Smarthys dans l’exécution de son contrat, sans que la société intimée ne prouve de quelque manière que ce soit que le refus d’accepter sa proposition commerciale serait à l’origine du préjudice invoqué. La demande à hauteur de ce montant sera accueillie. La société Valtech sollicite l’application des intérêts au taux légal à compter du 15 avril 2013, outre l’anatocisme. La cour relève que le règlement a été effectué le 31 mars 2015 et que la société Valtech a mis en demeure la société Smarthys de lui régler cette somme par une lettre du 27 mai 2015 ‘ dont il n’est pas démontré qu’elle ait été adressée en recommandé avec avis de réception comme indiqué mais dont la société Smarthys reconnaît l’existence dans ses écritures.

En vertu de l’article 1231-7 (ancien article 1153-1) du code civil : « En toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l’absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n’en décide autrement.

En cas de confirmation pure et simple par le juge d’appel d’une décision allouant une indemnité en réparation d’un dommage, celle-ci porte de plein droit intérêt au taux légal à compter du jugement de première instance. Dans les autres cas, l’indemnité allouée en appel porte intérêt à compter de la décision d’appel. Le juge d’appel peut toujours déroger aux dispositions du présent alinéa. ».

Compte-tenu de l’ancienneté du litige et des méandres de la procédure, il apparaît opportun de déroger aux dispositions ci-dessus fixant le point de départ des intérêts à la date du présent arrêt. Les intérêts au taux légal courront sur la somme de 147.060,57 euros HT à compter du 12 juin 2015, date de l’assignation délivrée par la société Valtech à la société Smarthys devant le tribunal de commerce de Paris. Conformément à la demande qui en est faite et en application de l’article 1343-2 du code civil, les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront eux-mêmes intérêts au taux légal.

L’appelante réclame en deuxième lieu la somme de 75.451,5 euros HT (90.540 euros TTC) au titre des prestations de la société Smarthys dont elle sollicite le remboursement en estimant qu’à la suite de la découverte par les parties deux ans après l’exécution du contrat d’une erreur commise par Smarthys lors de son exécution, l’utilisation du Progiciel HFM s’est révélée non conforme à l’usage auquel elle le destinait, de sorte que les sommes engagées au titre du projet de migration l’ont été en pure perte.

La société Smarthys explique avoir fourni les prestations de migration de la version 9.3.1 vers la version 11.1.2.2 du progiciel HFM, version utilisée par la société Valtech et fait valoir que le téléchargement de la version Entreprise au lieu de la version Standard, de la base de données Oracle, ne peut permettre à l’appelante d’échapper au paiement des prestations réalisées.

Force est de constater que la société Valtech aurait dû régler le prix des prestations de la société Smarthys indépendamment du téléchargement par erreur de la version entreprise aux lieu et place de la version standard de la base de données Oracle. Il ne s’agit pas d’un surcoût découlant de la faute de la société Smarthys. La société Valtech sera déboutée de sa demande de ce chef.

La société Valtech réclame enfin la somme de 10.015,40 euros HT au titre de l’acquisition des licences de la version standard de la base de données Oracle ainsi que la somme de 3.970,10 euros HT au titre de la redevance annuelle de maintenance des licences de la version standard de la base de données Oracle, montants dont elle soutient qu’elle n’aurait pas eu à les régler en l’absence de faute commise par la société Smarthys et licences qu’elle a donc cessé d’utiliser aussitôt l’annuité écoulée.

La société Smarthys soutient que ces demandes sont injustifiées et n’ont pas de lien de causalité avec l’erreur commise.

La cour relève qu’aucun élément justificatif n’est produit sur ces deux chefs de préjudice par la société Valtech qui ne vise d’ailleurs aucune pièce dans ses écritures sur ces deux points. Elle en sera déboutée.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

La société Smarthys Consulting, succombant au pourvoi, il convient d’infirmer le jugement en ce qu’il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles et statuant à nouveau y compris en cause d’appel sur renvoi de cassation, elle supportera les dépens et acquittera sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile une indemnité de 15.000 euros.

PAR CES MOTIFS, statuant publiquement

ORDONNE la jonction des instances enregistrées sous les numéros de RG 21/09674 et 21/09692 sous le seul n° de RG 21/09674 ;

DÉCLARE irrecevables comme ayant été irrévocablement tranchés les moyens soulevés par la société Smarthys Consulting tirés à titre principal de l’absence de justification d’un lien de causalité entre la faute de Smarthys et le préjudice allégué, et à titre subsidiaire de l’absence de justification d’un préjudice actuel, direct et certain, tendant à remettre en cause la responsabilité de Smarthys ;

INFIRME le jugement rendu le 14 décembre 2016 par le tribunal de commerce de Paris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la société Smarthys Consulting à payer à la société Valtech SE la somme de 147.060,57 euros HT à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du 12 juin 2015 ;

DIT que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront eux-mêmes intérêts au taux légal ;

CONDAMNE la société Smarthys Consulting aux dépens de première instance et de recours ;

CONDAMNE la société Smarthys Consulting à payer à la société Valtech SE la somme de 15.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

 


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