Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 11
ARRÊT DU 25 NOVEMBRE 2022
(n° , 6 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/15192 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCRBM
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Septembre 2020 -Tribunal de Commerce de CRETEIL – RG n° 2018F662
APPELANTE
S.A.S.U. IDETEC
agissant poursuites et diligences de son représentant légal audit siège domicilié
[Adresse 3]
[Localité 2]
immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NÎMES sous le numéro 431 382 548
Représentée par Me Elise ORTOLLAND de la SEP ORTOLLAND, avocat au barreau de PARIS, toque : R231
Ayant pour avocat plaidant Me Géraldine BRUN, de PLMC AVOCATS, avocate au barreau de NÎMES
INTIMEE
SAS SGS INTERNATIONAL CERTIFICATION SERVICES SGS-ICS
agissant poursuites et diligences en la personne de son Président domicilié en cette qualtié audit siège
[Adresse 1]
[Localité 4]
immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Créteil sous le numéro 403 293 103
Représentée par Me Luca DE MARIA de la SELARL SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018
Ayant pour avocat plaidant Me Cyrille ANDRE, du cabinet AYACHE, avocat au barreau de Paris, substituant Me Julien ANDREZ, avocat au barreau de Paris
COMPOSITION DE LA COUR :
En l’absence d’opposition des parties, l’audience s’est tenue en juge rapporteur, devant M.[K] [N].
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries lors du délibéré de la Cour, composée de :
M.Denis ARDISSON, Président de chambre
Mme Marion PRIMEVERT, Conseillère
Mme Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, Conseillère
Qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Damien GOVINDARETTY
ARRÊT :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Denis ARDISSON, Président de chambre et par Damien GOVINDARETTY, Greffier, présent lors de la mise à disposition.
La société Idetec, est spécialisée dans la fabrication et le négoce d’équipements d’imagerie médicale soumis à des procédures de certification préalable à la vente encadrées par la directive européenne relative aux dispositifs médicaux, en particulier des tables numériques télécommandées avec capteur plan dynamique pour les examens de fluoroscopie et de radiographie, des matériels de radiographie numérique pulmonaire et osseuse, des matériels mobiles de radiographie pour examens des patients alités et des matériel de radiographie des os et des poumons.
Par contrat du 27 juillet 2011, la société Idetec a convenu avec la société d’inspection et de certification SGS International certification services (‘société SGS’), un premier contrat pour la certification de ses matériels aux normes ISO et CE, puis le 24 juin 2014, les parties ont convenu d’un second contrat d’une durée de trois ans pour des sessions d’audit et de renouvellement des certifications portant sur les matériels de la société Idetec sur les normes ISO 9001 : 2008 (UKAS), ISO 13485 : 2003 EN ISO 13485 : 2012 (UKAS) et l’annexe II de la directive du Conseil 93/42 CEE du 14 juin 1993 relative aux dispositifs médicaux.
La société SGS s’étant engagée à effectuer un audit de renouvellement avant le 31 octobre 2015, les certifications recherchées par la société Idetec expirant à cette date pour les normes ISO et le 19 avril 2015 pour les marquages CE, elle a informé la société Idetec, par courriel du 10 septembre 2014, de l’indisponibilité de ses auditeurs avant le premier trimestre 2015, puis par courriel du 23 décembre 2014, les parties se sont accordées afin qu’un audit pour la prolongation des certificats soit entrepris les 7 et 9 avril 2015 et qu’une nouvelle saison d’audits démarre en octobre suivant.
Alors que la société SGS United Kingdom, société mère de la société SGS, a dénoncé à la société Idetec ke 19 novembre 23019 le retrait de ses certificats provisoires CE de ses matériels au 30 octobre 2015, la société Idetec a contesté ce retrait par lettre du 15 janvier 2016 en se prévalant des éléments de nature à lever les non-conformités qu’elle avait communiqués à l’auditeur en charge de l’évaluation par courriel du 14 décembre 2015.
Par lettres des les 7 et 21 juillet 2017, la société SGS a vainement mis en demeure la société Idetec de régler sa facture d’un montant de 4.670,51 euros TTC, tandis que par lettre du 4 mai 2018, la société Idetec a mis en demeure la société SGS de payer la somme de 1.219.500 euros en réparation de la perte de nombreux marchés dont elle estimait qu’elle résultait de la perte des certifications de ses matériels liée à l’accumulation des retards de la société SGS dans l’accomplissement des missions d’audit, puis elle a assignée la société SGS aux mêmes fins devant le tribunal de commerce de Créteil en remboursement du prix du contrat et en dommages et intérêts.
Par jugement du 15 septembre 2020, la juridiction commerciale a débouté la société Idetec de ses demandes de dommages et intérêts à l’encontre de la société SGS et l’a condamnée à lui payer une facture de 4.590 euros, outre 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’à payer les dépens.
La société Idetec a interjeté appel le 23 octobre 2010.
* *
Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 21 juillet 2021 pour la société Idetec afin d’entendre, en application des articles 1103 et 1104 (ancien article 1134) et 1231-1 du code civil (ancien article 1147) :
– réformer le jugement en touts ses dispositions,
– constater que la société SGS a accumulé les retards dans la réalisation des missions d’audit confiées,
– constater que l’accumulation des retards de la société SGS dans la réalisation des missions d’audit confiées est à l’origine de la perte des certifications,
– dire que de la société SGS commis une faute dont elle doit réparation au titre de sa responsabilité contractuelle,
– dire que la clause relative à l’exonération de responsabilité pour force majeure visée à l’article 11 des conditions générales de vente de la société SGS est abusive et doit être réputée non écrite,
– dire que la clause limitative de responsabilité visée à l’article 12.3 des conditions générales de vente de la société SGS doit être réputée non écrite, car privant l’obligation essentielle de la société SGS de sa substance,
– constater que la société Idetec a subi plusieurs préjudices résultant des fautes commises par la société SGS :
5.931 euros de préjudice financier égal aux sommes indûment payée au titre du contrat de juin 2014,
1.219.500 euros de préjudice financier correspondant à la perte de nombreux marchés,
18.628 euros de préjudice financier pour recommencer sa procédure de certification à zéro,
20 883 euros de préjudice financier liés aux frais de personnel, qu’elle a dû recruter pour faire face au surcroît de travail lié à la nouvelle procédure de certification,
150.000 euros au titre du préjudice moral subi,
– condamner la société SGS à payer la somme de 1.414.942 euros en réparation des préjudices financiers et moraux,
– rejeter l’intégralité des demandes de la société SGS,
– constater que la société SGS ne démontre pas la réalité des prétendues diligences effectuées à l’encontre de la société Idetec, objet de sa facture n°901200250,
– rejeter les demandes de la société SGS tendant à obtenir la condamnation de la société Idetec au paiement de la facture n°901200250,
– condamner la société SGS à émettre un avoir correspondant à la facture n°901200250 au profit de la société Idetec,
– dire que la société Idetec n’a commis aucun abus de droit,
– rejeter les demandes de la société SGS à ce titre,
– condamner la société SGS à payer la somme de 6.000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre le remboursement des entiers dépens ;
Vu les conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 19 janvier 2022 pour la société SGS International certification services , afin d’entendre, en application des articles 73 et suivants et 559 du code de procédure civile, l’annexe II d de la directive 93/42/CE relative aux dispositifs médicaux et les articles 1126, 1134, anciens, du code civil :
– confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
– juger subsidiairement que la force majeure exonère la société SGS de toute responsabilité à l’égard de la société Idetec ;
– limiter subsidiairement la responsabilité de la société SGS à la somme de 5.931 euros en application de la clause limitative de responsabilité,
– débouter la société Idetec en toutes ses demandes,
– condamner la société Idetec à verser à la société SGS la somme de 15.000 euros en réparation du préjudice résultant de son appel abusif,
– condamner la société Idetec au paiement au profit de la société SGS de la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.
SUR CE, LA COUR,
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie à leurs conclusions ainsi qu’au jugement déféré suivant la prescription de l’article 455 du code de procédure civile.
Il est par ailleurs rappelé les parties sont liées par un contrat du 24 juin 2014 de sorte que le litige sera examiné sur le fondement des dispositions du code civil en vigueur avant celles issues de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.
1. Sur la preuve et la nature des manquements contractuels
Pour conclure à la confirmation du jugement en ce qu’il a écarté sa responsabilité et débouté la société Idetec de ses demandes de dommages et intérêts, la société SGS estime que la société Idetec ne fait pas la preuve du lien de causalité entre les délais avec lesquels ont été traitées ses demandes de certifications et les préjudices résultant de la perte de chance de gagner des nouveaux marchés pour ses matériels, en particulier sur la certification du marquage CE de ses matériels et que la société SGS United Kingdom a suspendue avec effet au 30 octobre 2015.
Au demeurant, il est constant que si la société Idetec a concédé des délais pour l’exécution des audits qu’elle a confiée à la société SGS, cette dernière a unilatéralement différé ceux-ci et tandis qu’il est constant, d’une part, que l’auditeur en charge du marquage CE des matériels de la société Idetec n’a pas délivré avant le 23 septembre 2015, son rapport au terme duquel il a pu relever 4 non-conformités majeures, subdivisées en 86 sous-catégories, empêchant la délivrance des marquages CE, et d’autre part, que le marquage de ces matériels expirait à la fin du mois d’octobre 2015, il se déduit la preuve suffisante que la société SGS a manqué à son obligation de diligence restreignant la possibilité pour la société Idetec de corriger les non conformités de ses matériels complexes et normés par les directives européennes, de sorte que le jugement sera infirmé en ce qu’il a écarté la responsabilité de la société SGS qui sera retenue.
2. Sur la réparation des préjudices
A la suite de la responsabilité de la société SGS telle qu’elle est retenue ci-dessus, il en résulte en premier lieu, qu’elle n’est pas fondée à réclamer le solde du prix de la prestation de 4.590 euros que les premiers juge lui a reconnu, en sorte que la décision sera infirmée de ce chef.
Pour s’opposer au remboursement du prix de sa prestation ainsi qu’à l’indemnisation des chefs de préjudices qui sont résultés des pertes de marchés, des coûts financiers, des frais de personnel ainsi que du dommage moral que revendique la société Idetec, la société SGS invoque le décès de l’un de ses auditeurs auquel elle a été confrontée, et dont elle soutient qu’il est à l’origine des délais de traitement des audits de la société Idetec, ce qui constituerait un cas de force majeure tel qu’il est aménagé par l’article 11 des conditions générales du contrat aux termes duquel :
‘En cas d’empêchement de SGS d’exécuter ou d’achever l’un quelconque des Services pour lequel le Contrat a été élaboré, pour quelque raison que ce soit et indépendamment de sa volonté, y compris mais sans limitation à la catastrophe naturelle, la guerre, activité terroriste ou action industrielle ; échec d’obtention d’autorisations de licence ou d’enregistrement, maladie, mort ou démission du personnel ou manquement par le client à l’une de ses obligations contractuelles, le Client paiera à SGS :
(a) Le montant de toute dépense non remboursable effectivement engagée ;
(b) Une fraction du prix convenu égale à la partie du service effectivement exécuté ;
Et SGS encourt aucune responsabilité, pour quelque raison que ce soit, pour l’inexécution partielle ou totale des Services exigés’.
Au demeurant, l’aléa de la perte d’un personnel renvoie au risque normal et prévisible de la vie de l’entreprise, de sorte que ce cas d’exonération de la responsabilité de la société SGS a pour effet de contredire son obligation essentielle d’exécuter la prestation et son application sera écartée.
En revanche, la société SGS est bien fondée à opposer la clause limitative de responsabilité stipulée à l’article 12.3 des conditions générales du contrat aux termes duquel :
‘Sous réserve de la clause 12.2, l’entière responsabilité de SGS envers le client pour toute réclamation pour perte, dommages ou frais de quelque nature ou origine que ce soit ainsi que la présence d’un ou d’une série d’événements, est limitée à un montant équivalent aux honoraires payés à SGS dans le cadre du contrat’.
En effet, contrairement à ce que soutient la société Idetec, il ne résulte pas de la faute de la société SGS telle qu’elle est retenue ci-dessus, la preuve qu’elle a délibérément refusé d’exécuter son engagement, et commis un dol au sens de l’article 1150 du code civil, en sorte qu’en application de cette clause, la société SGS sera condamnée à payer à la société Idetec la somme de 5.931 euros.
3. Sur l’abus de recours, les dépens et les frais irrépétibles
La société SGS succombant à l’action, il convient de la débouter de sa demande de dommages et intérêts fondée sur l’abus de l’appel de la société Idetec et d’infirmer le jugement en ce qu’il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles. Statuant à nouveau de ces deux chefs, y compris en cause d’appel, la société SGS sera condamnée à supporter tous les dépens et à payer la somme de 6.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne la société SGS International certification services à payer à la société Idetec la somme de à 5.931 euros ;
Condamne la société SGS International certification services aux dépens de première instance et d’appel ;
Condamne la société SGS International certification services à payer à la société Idetec la somme de 6.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT