COMM.
CH.B
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 25 novembre 2020
Rejet
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 702 F-D
Pourvoi n° D 18-26.387
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 NOVEMBRE 2020
La société Tech Data France, société par actions simplifiée, dont le siège est […] , a formé le pourvoi n° D 18-26.387 contre l’arrêt rendu le 13 septembre 2018 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 5), dans le litige l’opposant à la société Chronopost, société par actions simplifiée, dont le siège est […] , défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kass-Danno, conseiller référendaire, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de la société Tech Data France, de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Chronopost, après débats en l’audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Kass-Danno, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 13 septembre 2018), en exécution d’un contrat-cadre de commission de transport du 9 octobre 2009 la liant à la société Chronopost, la société Tech Data France (la société Tech Data) a confié à cette dernière la livraison de treize colis destinés à la société ADP GSI correspondant à une commande reçue au mois de mars 2015. Lors de la livraison, la marchandise a été volée. Se prévalant d’une faute de la société Chronopost, la société Tech Data l’a assignée en indemnisation de son préjudice.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche, ci-après annexé
2. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Et sur le moyen, pris en ses première, deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
3. La société Tech Data fait grief à l’arrêt de limiter la condamnation de la société Chronopost à la somme de 3 250 euros, alors :
« 1°/ que la société Tech Data soutenait dans ses conclusions que la société Chronopost avait commis une faute lourde et qu’il y avait lieu, en conséquence, de faire application des dispositions de l’article 6.1 du contrat litigieux, libellées comme suit : « En cas de faute lourde du commissionnaire, Chronopost ne pourra plus invoquer aucune limite de responsabilité et devra rembourser l’intégralité de la valeur d’achat du produit endommagé. » ; qu’en s’abstenant de répondre à ce moyen opérant et de rechercher si, en l’état de cette rédaction et en présence d’une faute lourde, le contrat permettait d’écarter la clause limitative de responsabilité, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que commet une faute inexcusable le transporteur qui remet une marchandise sensible et de forte valeur à une personne autre que le destinataire précisément désigné au contrat et donc sans recueillir la signature ni le cachet commercial dudit destinataire, et sans avoir vérifié que le récipiendaire effectif était titulaire d’un mandat de la part du destinataire contractuel ni avoir prévenu son commettant, conformément aux termes du contrat, d’une telle difficulté afin de recueillir ses instructions, tout en suspendant dans cette attente la livraison ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a relevé que la marchandise n’avait pas été remise le 17 mars 2015 à son destinataire mais à un agent d’accueil non habilité et sans que la société Tech Data n’ait été consultée au préalable sur cette difficulté ; qu’il résultait nécessairement de ces constatations que le transporteur avait commis une faute délibérée, qu’il avait conscience de la probabilité du dommage et qu’il l’avait acceptée témérairement et sans raison valable ; qu’en écartant néanmoins la faute inexcusable du transporteur, aux motifs inopérants qu’il résultait de témoignages produits par ses préposés que le site de livraison lui était familier, qu’aucun élément de la cause ne révélait de risque de fraude ou de vol et que le caractère sensible de la marchandise ne suffisait pas à caractériser la perception, en l’espèce, d’un risque particulier, la cour d’appel a violé les articles L. 133-8 du code de commerce et 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause ;
3°/ que les éléments constitutifs de la faute inexcusable du transporteur s’apprécient in abstracto par référence au comportement qu’aurait objectivement eu ou dû avoir un transporteur prudent et avisé dans une situation similaire ; qu’en écartant la faute inexcusable du transporteur motifs pris qu’il résultait de témoignages produits par ses préposés que le site de livraison lui était familier, qu’aucun élément ne révélait de risque de fraude ou de vol et que le caractère sensible de la marchandise ne suffisait pas à caractériser la perception, en l’espèce, d’un risque particulier, motifs subjectifs appréciés in concreto et donc impropres à caractériser les éléments constitutifs de la faute inexcusable commise par Chronopost, la cour d’appel a violé, par fausse interprétation, l’article L. 133-8 du code de commerce ainsi que l’article 1134 du code civil, dans sa version applicable à la cause. »