Clause limitative de responsabilité : 20 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/05569

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Clause limitative de responsabilité : 20 janvier 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/05569

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 11

ARRET DU 20 JANVIER 2023

(n° , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/05569 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBWBB

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Janvier 2020 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2018010068

APPELANTE

S.A.R.L. SARL […] la SARL […], au capital social de 100.000 ¿,immatriculée au RCS de Paris sous le n° B […], dont le siège social est [Adresse 1], est prise en la personne de son Président en exercice et de tous autres représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 1]

[Localité 3]

N° SIRET : B[…]

représentée par Me Guillaume ABOU, avocat au barreau de PARIS, toque : P0074

INTIMEE

S.A.S. […]

[Adresse 2]

[Localité 3]/FRANCE

N° SIRET : […]

représentée par Me David BENAROCH, avocat au barreau de PARIS, toque : E0477

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant L’ELEU DE LA SIMONE, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M.Denis ARDISSON, Président de chambre,

Mme Marion PRIMEVERT, Conseillère,

Mme Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, Conseillère,

Qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : M.Damien GOVINDARETTY

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Denis ARDISSON, Président de chambre, et par Damien GOVINDARETTY, Greffier présent lors de la mise à disposition.

La société […] est un cabinet d’architecture et d’urbanisme. La société […] est spécialisée dans le commerce de gros d’ordinateurs, d’équipements informatiques périphériques et de logiciels mais également dans la maintenance et l’infogérance informatiques.

Le 1er septembre 2015, la société […] a conclu avec la société […] d’une part un contrat de service de solutions managees n° 1722 ayant pour objet la fourniture d’une solution antivirus et antispam à effet au 1er septembre 2015 et d’autre part un contrat d’assistance aux systèmes d’information n° 1724 ayant pour objet le maintien des conditions optimales d’accès au réseau annulant et remplaçant les contrats 602 et 665.

Quatre factures, deux au titre du contrat n° 1722 d’un montant de 900 euros chacune et deux au titre du contrat n° 1724 d’un montant de 1.687,62 euros chacune, n’ont pas été réglées, contraignant la société […] à adresser à la société […] des mises en demeure les 10 juillet et 25 août 2017, en vain.

La société […] a donc, par lettre du 12 octobre 2017, procédé à la résiliation anticipée des contrats 1722 et 1724 et mis en demeure son cocontractant de régler les factures restant dues.

Suivant exploit du 6 février 2018, la société […] a fait assigner la société […] en paiement devant le tribunal de commerce de Paris.

Par jugement du 29 janvier 2020, le tribunal de commerce de Paris a :

condamné la société […] au paiement à la société […] de la somme de 1.800 euros TTC augmentée (i) des intérêts de retard représentant une fois et demi le taux légal, à partir de la date d’échéance de chaque facture et (ii) de la somme de 1.500 euros au titre de l’indemnité de résiliation,

débouté la société […] de ses demandes de paiements des factures dues au titre du contrat d’infogérance,

débouté la société […] de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts,

ordonné l’exécution provisoire de la décision sans constitution de garantie,

condamné la société […] à payer à la société […] la somme de 1.500 euros, déboutant pour le surplus, au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

condamné la société […] aux dépens.

La société […] a formé appel du jugement par déclaration du 20 mars 2020 enregistrée le 27 avril 2020.

Suivant ses dernières conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 1er décembre 2021, la société […] demande à la cour, au visa des articles 1134, 1152, 1226 à 1233, 1229, 1147 et 1184 et suivants (ancien) du code civil :

A titre principal :

– d’infirmer le jugement dont appel sur les motifs suivants :

o La condamnation de la société […] au paiement à la société […] de la somme de 1.800 euros TTC augmentée (i) des intérêts de retard représentant une fois et demi le taux légal, à partir de la date d’échéance de chaque facture et (ii) de la somme de 1.500 euros au titre de l’indemnité de résiliation ;

o Déboute la société […] de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts ;

o Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision sans constitution de garantie ; o Condamne la société […] à payer à la société […] la somme de 1.500 euros déboutant pour le surplus, au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

o Condamne la société […] aux entiers dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 77,84 euros dont 12,76 de TVA.

– de dire et arrêter que la société […] a exécuté ses obligations contractuelles de façon défectueuse, de sorte que la société […] est bien fondée à ne pas procéder au paiement des sommes qu’elle réclame au titre de ses factures (en principal, intérêts et indemnités de résiliation) ;

– de prononcer, au regard de l’inexécution contractuelle dont s’est rendue coupable la société […], la résiliation des Contrats n° 1722 et 1724 conclus avec la société […] et leur anéantissement rétroactif à compter du 24 mars 2017 ;

– de dire et arrêter que la société […] a commis des manquements graves et une faute lourde, justifiant que soit écartée la limitation de responsabilité stipulée aux articles 8 du contrat n°1722 et à l’article 12 du contrat n°1724

En tout état de cause, de dire et arrêter que :

o le montant des sommes sollicitées au titre des indemnités de résiliation du Contrat d’Assistance SI n° 1724 est injustifié ;

o les clauses des Contrats n° 1722 et 1724 portant sur les indemnités de résiliation sont des clauses pénales qui sont manifestement excessives.

– de dire et arrêter que la société […] a commis de nombreux manquements contractuels à l’égard de la société […] ;

– de dire et arrêter que la société […] est recevable et bien fondée à solliciter à titre reconventionnel la réparation des préjudices qu’elle a subis du fait des manquements contractuels de la société […] ;

En conséquence :

– de condamner la société […] au paiement des sommes suivantes auprès de la société […], à titre de dommages et intérêts :

o 996.660 euros, au titre de la reconstitution des projets perdus ;

o 9.315,33 euros, en remboursement des frais déboursés auprès d’autres prestataires informatiques ;

o 20.000 euros, au titre du préjudice lié à la désorganisation interne de la société […] ;

o 50.000 euros, au titre du préjudice moral et d’image subi par la société […].

– de condamner la société […] à verser à la société […] la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

Suivant ses dernières conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 13 octobre 2021, la société […] demande à la cour, au visa de l’article 9 du code de procédure civile et des articles 1103, 1104 et 1231-1 et suivants du code civil :

de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société […] au paiement des factures impayées sur le contrat n°1722 et reconnu le bien fondé des indemnités de résiliation anticipées sur ce contrat,

de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société […] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

d’infirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société […] de ses demandes au titre du contrat n°1724,

Statuant de nouveau,

de condamner le Cabinet […] à payer à la société […] les sommes suivantes :

Sur le contrat n°1722 :

‘ 1.800 euros TTC au titre des factures impayées ;

‘ 10.890 euros TTC au titre de l’indemnité de résiliation anticipée ;

Sur le contrat n°1724 :

‘ 3.375, 24 euros TTC au titre des factures impayées

‘ 27.752,71 euros au titre de l’indemnité de résiliation anticipée,

de condamner la société […] à payer à la SAS […] les intérêts de retard représentant une fois et demi le taux légal, augmenté d’un coefficient de 1,5 par mois de retard sur le montant de chaque facture impayée, à partir de la date d’échéance de chaque facture.

de débouter la société […] de toutes ses demandes plus amples ou contraires.

de condamner la société […] à payer à la Société […] la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

De la condamner en tous les dépens dont distraction au profit de Maître David Benaroch, Avocat aux offres de droit.

*

La clôture a été prononcée suivant ordonnance en date du 2 décembre 2021.

SUR CE, LA COUR,

Les contrats ayant été conclus avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, fixée au 1er octobre 2016, le présent litige est soumis aux dispositions antérieures.

Aux termes de l’article 1134 ancien du code civil :

« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi. »

En vertu de l’article 1147 ancien du même code :

« Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part. ».

Sur le contrat n° 1722

La société […] fait valoir que la société […] n’a pas réglé les factures alors que les anti virus ont été installés et ont fonctionné et ce même si la société appelante a rencontré une attaque de cryptolocker. Elle soutient qu’il n’y a eu aucune défaillance des anti-virus installés ni aucun défaut de mise à jour. Outre le paiement de ses factures, elle sollicite l’intégralité de l’indemnité de résiliation prévue contractuellement.

La société […] soutient que la société […] n’a pas respecté ses obligations contractuelles. Elle lie les deux contrats, n° 1722 et 1724, en soulignant que le contrat n° 1722 s’inscrit dans le cadre global de l’infogérance et de la maintenance. Elle fait valoir qu’il appartenait à la société […], prestataire spécialisé, de maintenir l’antivirus à jour et et de sécuriser le système.

Le contrat n° 1722 signé le 1er septembre 2015 est intitulé « contrat de service de solutions managées virusproof et spamproof ». Il porte sur 1 serveur et 24 postes et « annule et remplace les contrats n° 698 et 603 ». Il était conclu pour une durée de cinq ans dont la période initiale s’achevait le 31 août 2020 et était reconductible par tacite reconduction par périodes de cinq ans.

Le montant mensuel de l’abonnement à l’antivirus était de 10 euros par poste soit 250 euros par mois.

La facture FCU3558 du 1er juin 2017 d’un montant de 900 euros TTC correspondant à l’abonnement antivirus et l’abonnement désinfection pour 1 serveur et 24 postes et la facture FCU4149 du 1er septembre 2017 du même montant n’ont pas été réglées.

La société […] a proposé une solution plus efficace à la société […] afin de parer aux attaques cryptockers qu’elle avait détectées. Elle a en effet établi un diagnostic technique concernant les virus informatiques. Par courriel du 1er décembre 2016, la société […] écrit ainsi « il existe une solution pertinente par notre éditeur Sophos ; une couche supplémentaire à l’anti-virus pour vous protéger des Ransomware ; solution créée par rapport aux problèmes mondiaux récents ; les premiers retours, c’est que c’est efficace. ».

Suivant courriel du 24 mars 2017, la société […] détaille la « solution efficace anti- ransomware » qu’elle propose afin de lutter contre les cryptolockers qui attaques les sociétés depuis février 2016. La société […] précise « Même si le Firewall et l’anti-virus sont indispensables pour la sécurité, ils ne sont plus suffisants pour ces nouvelles attaques, donc votre vigilance et celle de vos collaborateurs est votre dernier rempart. Les éditeurs ont enfin réagi et […] a maintenant une solution efficace que nous vous conseillons fortement.

Cela amène une protection complète en complément d’une solution anti-virus existante : prévention des exploits du navigateur (avant d’atteindre le terminal), détection et blocage si activation (avant de s’exécuter sur le terminal), détection du chiffrement spontané et malveillant des données et blocage contre les menaces en cours d’exécution.

Le prix de cette solution est de 10 eurosHT/mois et par poste, merci de me contacter au plus vite pour mettre cette solution en place dans les meilleurs délais. ».

Pourtant la société […] n’y donnera pas suite et fera alors l’objet d’attaques virales.

L’article 2.5 des conditions d’utilisation du contrat de services de l’antivirus et de l’antispam virusproof et spamproof contient notamment les dispositions suivantes :

« La prestation de service associée consiste dans : la mise à jour des Logiciels pour les maintenir dans la version la plus efficace ainsi que les interventions à distance ou sur site pour palier tout problème éventuel du réseau dû aux fonctionnement des Logiciels. Spamproof et Virusproof est un concept de « Services managés » sur site ou à distance permettant d’assurer au Client la meilleure continuité possible de son exploitation tout en renforçant la sécurité de son réseau informatique. ».

Cet article définit l’objet de la prestation de service due par la société […] et les obligations qui en résultent. Au regard des interventions techniques réalisées et de la proposition d’une solution de protection antivirale supplémentaire à laquelle le client n’a pas répondu, la société […] a respecté les obligations issues du contrat n° 1722. La société […] était donc tenue de régler les factures y afférentes et le jugement sera confirmé en ce qu’il l’a condamnée à ce titre.

L’article 11.4 du contrat prévoit le paiement d’une indemnité de résiliation détaillée dans l’article 11.1 soit « d’une part d’une indemnité de résiliation égale à la totalité des montants forfaitaires mensuels le séparant de l’échéance normale du contrat, avec un minimum de 6 fois le montant forfaitaire mensuel, et d’autre part d’une indemnité égale au montant mensuel multiplié par le nombre de mois le séparant de l’échéance normale du contrat, lequel montant est calculé sur la base du montant mensuel moyen facturé réalisé depuis la date d’effet du contrat augmenté d’une pénalité de résiliation de 10 %, ou en prenant la moyenne des 12 mois de facturation successifs durant lesquels la somme des mensualités facturées est la plus élevée. Laquelle somme sera aussi augmentée de 10 %. Le fournisseur se réservant le droit de prendre celui des montants facturés calculés qui est le plus élevé. ».

Cette clause, en revendiquant la totalité du prix jusqu’au terme du contrat sans considération de son exécution, revêt un caractère comminatoire en ayant pour objet de contraindre le client à exécuter le contrat jusqu’à son terme de sorte qu’elle constitue une clause pénale susceptible d’être modérée, ainsi que l’a justement jugé le tribunal. La société […] réclame la somme de 10.890 euros à ce titre.

Au regard de la durée du contrat, de la nature de la prestation et du montant du contrat, les premiers juges seront confirmés en ce qu’ils ont réduit l’indemnité de résiliation de résiliation à la somme de 1.500 euros, la jugeant excessive.

Sur le contrat n° 1724

La société […] reproche à la société […] de n’avoir pas mis en ‘uvre tous les moyens nécessaires pour maintenir le réseau en état de fonctionnement et de n’avoir pas limité les conséquences dommageables des attaques informatiques.

La société […] estime avoir rempli ses obligations au titre du contrat d’infogérance. Elle considère que la société […] a pris le risque de faire appel à des sociétés tierces dont l’intervention a fragilisé son réseau. Elle critique le concours des sociétés Atomicro, Abisoft et Infoarchi et impute aux deux premières une modification de l’environnement informatique du cabinet d’architecte.

Le contrat n° 1724 signé le 1er septembre 2015 est intitulé « contrat d’assistance aux systèmes d’information ». Il porte sur 1 serveur et 24 postes et « annule et remplace le contrat n° 602 et 665 ». Il était conclu pour une durée de cinq ans dont la période initiale s’achevait le 31 août 2020 et était reconductible par tacite reconduction par périodes de cinq ans. Il comprend le forfait « Evolutiv’IT Serenity » pour 462,50 euros HT par mois.

Il a pour objet « toutes les opérations d’assistance vitales à la bonne marche du réseau » et précise que « Cette assistance est essentiellement curative et ne comprend pas l’administration du réseau (…) ».

La facture FCU3559 du 1er juin 2017 d’un montant de 1.687,62 euros TTC et la facture FCU4150 du 1er septembre 2017 du même montant comprennent les prestations suivantes :

supervision PredictiviT

maintien en conditions opérationnelles des serveurs (télémaintenance)

support Helpdesk (télémaintenance)

frais administratifs de maintenance.

Elles n’ont pas été réglées.

Entre 2013 et 2015, la société […] est intervenue à vingt reprises (bons d’intervention technique produits). Ces prestations sont cependant antérieures à la conclusion des contrats objets du présent litige. La société intimée a ensuite établi un tableau récapitulant neuf interventions de sa part en 2016 (7 en septembre et 2 en novembre). Sur ce tableau la dernière intervention de sa part en 2015 date du mois de juillet, soit avant la conclusion du contrat du 1er septembre. Elle produit également les courriels pour attester de sa réactivité face aux problèmes signalés, concernant essentiellement la configuration des boîtes de messagerie en septembre 2016. D’autres difficultés concernaient l’accès au serveur et la connexion réseau.

Les échanges par courriel intervenus entre la société […] et la société […] montrent qu’en septembre 2016, il était envisagé la signature d’un avenant au contrat de maintenance notamment pour « clarifier ce qui est compris ou non dans le contrat » et « pour que la durée soit plus courte ».

Au mois de novembre 2016, la société […] signale que « le problème des mails n’est pas totalement réglé » puisque certains « n’arrivent pas encore à destination ». Est également signalé un problème de liaison des ordinateurs avec les imprimantes. Fin novembre 2016, une demande d’intervention en urgence est formulée en raison de l’attaque d’un cryptolocker. Celle-ci est facturée en sus du contrat signé.

La société […] produit pour sa part des courriels de demande d’intervention des 24 novembre 2015, 16 mars 2016, 6 décembre 2016 (précédé d’un courriel du 17 novembre 2016), 13 mars 2017, 30 et 31 mars 2017 sur la récupération des données, dont il n’est pas démontré qu’elles aient fait l’objet d’un traitement efficace dans les délais contraints prévus contractuellement. Elle produit les factures suivantes, correspondant à l’aide de prestataires extérieurs alors que le contrat d’infogérance avec […] était toujours en cours :

facture du 23 janvier 2017 de la société Atomicro d’un montant de 3.673,60 euros TTC portant sur le projet 8771 (interventions en décembre 2016), le projet 8884 (interventions du 13 au 27 décembre 2016 ([…]) et le projet 8858 (réinstallation + réintégration PC [H]),

facture du 23 mars 2017 de la société Abisoft d’un montant de 300 euros TTC pour une « intervention nécessitant un déplacement sur place d’urgence et de nuit ». Le lendemain un compte-rendu d’audit et d’intervention est adressé par courriel à la société […] et met en évidence de graves défaillances de sécurité de l’infrastructure,

facture du 4 juillet 2017 de la société Infoarchi d’un montant de 6.052,80 euros TTC, pour la reprise générale du réseau,

facture du 19 juillet 2017 de la société Joyjet d’un montant de 1.152 euros TTC pour récupération de données (2 jours).

Au cours de l’été 2017 des courriels montrent que des discussions ont eu lieu, le prestataire proposant à son client d’arrêter le contrat d’infogérance et de continuer le contrat anti-virus, à titre de compromis, ce qui explique l’absence de mise en demeure et de dénonciation du contrat par la société […].

La négociation entre les parties n’a cependant pas abouti, la confiance étant rompue au vu des nombreuses défaillances du réseau et de l’absence de réponse utile de la part du prestataire. Si le compte-rendu très critique établi par le concurrent Abisoft auprès de la société […] n’est pas contradictoire comme le souligne la société […], il est notable que celle-ci n’a elle-même pas dressé de diagnostic sur les différents problèmes rencontrés par le réseau informatique du cabinet d’architecture ce qui a contraint ce dernier à faire appel à d’autres sociétés informatiques en cours d’exécution du contrat d’infogérance.

Il en résulte que le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la société […] de toutes ses demandes au titre du contrat n° 1724.

Sur les demandes de la société […]

La société […] sollicite diverses indemnités à titre de dommages-intérêts pour la reconstitution des projets perdus, pour les frais déboursés auprès d’autres prestataires informatiques, pour sa désorganisation interne et son préjudice moral et d’image.

Si elle produit ses bilans pour les années 2015, 2016 et 2017 démontrant une baisse de son chiffre d’affaires au fil des exercices, l’appelante ne démontre pas le lien de causalité avec les manquements de la société […] au titre de son contrat d’infogérance.

Elle verse aux débats un tableau estimatif de la récupération des données, établi par ses soins et une attestation de son expert-comptable du 8 février 2019 attestant du coût global moyen d’une heure de travail du personnel technique à hauteur de 52,50 euros, pour l’exercice social clos le 31 décembre 2017. Ces deux seules pièces sont insuffisantes à démontrer d’une part, la réalité d’un surcoût de temps de travail de salariés dédiés à la récupération de données et d’autre part son lien de causalité avec des manquements de la société […] à ses obligations.

De la même façon, ni la désorganisation interne de la société Guerin ni une prétendue atteinte à son image ne sont étayées.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté la société […] de ses demandes au titre de ces trois chefs de préjudice.

En revanche, l’intervention de prestataires extérieurs a été rendue nécessaire par la carence de la société […] au titre de sa mission d’infogérance. Cette dernière ne rapporte pas la preuve que ces actions auraient modifié le système informatique de son client. L’appelante sollicite le montant HT des quatre factures acquittées de janvier à juillet 2017 pour pallier les défaillances de la société […]. Ces frais ont directement liés aux manquements de l’intimée.

Le contrat n° 1724 comporte cependant une clause limitative de responsabilité ainsi libellée :

« Article 12 ‘ Limitation de responsabilité :

12.1 La responsabilité d'[…] se limite à l’obligation de remise en état de fonctionnement des éléments tels que définis dans le contrat, à l’exclusion de tout autre. En particulier, […] ne pourra être tenue pour responsable de tout dommage indirect, tel que notamment des pertes de profit ou de jouissance, de quelque nature que ce soit, liées directement ou indirectement à des arrêts de service ou au mauvais fonctionnement des matériels. La responsabilité totale d'[…] à quelque titre que ce soit, est expressément limitée au dernier montant semestriel des sommes effectivement perçues par […] au titre des prestations mises en cause. ».

Si des manquements contractuels de la société […] ont été établis, ils ne constituent pas une faute lourde susceptible d’annihiler le jeu de la clause limitative de responsabilité ci-dessus.

A ce titre, les montants sont acquittés trimestriellement par la société […]. Au vu du coût du contrat signé le 1er septembre 2015, le montant semestriel dû est de 3.375,24 euros TTC. Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a débouté la société […] de sa demande à ce titre et la société […] sera condamnée à lui verser une somme limitée à 3.375,24 euros TTC au titre des frais déboursés auprès d’autres prestataires informatiques.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

L’appelante et l’intimée triomphant et succombant toutes deux à l’action, il convient d’infirmer le jugement en ce qu’il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles. Il convient par conséquent de faire masse des dépens de première instance et d’appel et de dire qu’ils seront supportés par moitié par chacune des parties. Par ailleurs, il n’est pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge de ses propres frais sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

CONFIRME le jugement en ce qu’il a condamné la société […] au titre du contrat n° 1722 et en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes au titre de la reconstitution des projets perdus, du préjudice lié à la désorganisation interne et au titre du préjudice moral et d’image subi, et en ce qu’il a débouté la société […] de ses demandes au titre du contrat n° 1724 ;

L’INFIRME pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la société […] à payer à la société […] la somme de 3.375,24 euros TTC au titre des frais déboursés auprès d’autres prestataires informatiques ;

FAIT MASSE des dépens de première instance et d’appel et dit qu’ils seront supportés par moitié par chacune des parties ;

LAISSE à chacune des parties la charge de ses propres frais sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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