COMM.
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 15 janvier 2020
Rejet
M. GUÉRIN, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 32 F-D
Pourvoi n° G 18-22.734
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par la société Espace Volcan, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,
contre l’arrêt rendu le 4 juillet 2018 par la cour d’appel de Riom (3e chambre civile et commerciale), dans le litige l’opposant à la société Orange, société anonyme, dont le siège est […] ,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 19 novembre 2019, où étaient présents : M. Guérin, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Sudre, conseiller rapporteur, Mme Darbois, conseiller, Mme Pontonnier, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Sudre, conseiller, les observations de Me Rémy-Corlay, avocat de la société Espace Volcan, de la SCP Colin-Stoclet, avocat de la société Orange, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Riom, 4 juillet 2018), la société Espace Volcan a, le 24 novembre 2010, conclu avec la société Orange un contrat intitulé « Orange Open Pro partagé » afin de regrouper ses prestations de téléphonie fixe, mobile et internet en un seul abonnement.
2. A la suite de dysfonctionnements résultant de prélèvements bancaires sans facture, de problèmes d’accès à internet ou encore à un numéro de téléphone portable, la société Espace Volcan a assigné la société Orange en paiement de dommages-intérêts en réparation de son préjudice commercial et de celui porté à son image de marque.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. La société Espace Volcan fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes de dommages-intérêts alors :
« 1°/ que toute clause qui prive de sa substance l’obligation essentielle du débiteur est réputée non écrite ; que la validité d’une clause limitative de responsabilité s’apprécie globalement, au regard de l’ensemble des exclusions qu’elle prévoit ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que la clause litigieuse prévoyait non seulement qu’elle limitait le type de préjudice réparable entendu comme « les seuls dommages directs, personnels et certains que le client a subis, à l’exclusion expresse de la réparation de tous dommages et/ou préjudices indirects et immatériels, tels que les préjudices commerciaux, les pertes d’exploitation et de chiffres d’affaires, les pertes de données » mais encore qu’elle en limitait le montant, même pour le préjudice réparable, à « 20 % du montant encaissé par Orange France au cours des 12 derniers mois du contrat. Au cas où aucune somme n’aurait été encaissée, le montant de la limitation sera égal à 7 500 euros TTC par client », quel que soit le préjudice subi ; que ce faisant la clause, susceptible de ne pas même couvrir les sommes versées en contrepartie d’un service qui n’était pas rendu, vidait l’obligation de la société Orange de fournir à la fois des services de téléphonie fixes et mobiles et une connexion Internet de tout contenu ; qu’en considérant la clause néanmoins valide sans examiner le contenu de la clause litigieuse dans sa globalité aux motifs que « la clause ne remet pas en cause l’exécution de l’obligation essentielle du contrat, mais limite seulement le préjudice pouvant être indemnisé » quand cette clause limitait également le montant du préjudice indemnisable « strictement limité à 20% du montant encaissé par Orange France au cours des 12 derniers mois du contrat », la cour d’appel a violé les articles 1150, 1152 et 1131 (anciens) du code civil, ensemble l’article 1170 (tel qu’issu de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016) du code civil ;
2°/ que toute clause qui prive de sa substance l’obligation essentielle du débiteur est réputée non écrite ; que la validité d’une clause limitative de responsabilité s’apprécie globalement, au regard de l’ensemble des exclusions qu’elle prévoit ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que la clause litigieuse prévoyait non seulement qu’elle limitait le type de préjudice réparable entendu comme « les seuls dommages directs, personnels et certains que le client a subis, à l’exclusion expresse de la réparation de tous dommages et/ou préjudices indirects et immatériels, tels que les préjudices commerciaux, les pertes d’exploitation et de chiffres d’affaires, les pertes de données » mais encore qu’elle en limitait le montant, même pour le préjudice réparable, à « 20 % du montant encaissé par Orange France au cours des 12 derniers mois du contrat. Au cas où aucune somme n’aurait été encaissée, le montant de la limitation sera égal à 7 500 euros TTC par client », quel que soit le préjudice subi ; que ce faisant la clause, susceptible de ne pas même couvrir les sommes versées en contrepartie d’un service qui n’était pas rendu, vidait l’obligation de la société Orange de fournir à la fois des services de téléphonie fixes et mobiles et une connexion Internet de tout contenu ; qu’en considérant la clause néanmoins valide sans examiner le contenu de la clause litigieuse dans sa globalité aux motifs que « la clause ne remet pas en cause l’exécution de l’obligation essentielle du contrat, mais limite seulement le préjudice pouvant être indemnisé » quand cette clause limitait également le montant du préjudice indemnisable « strictement limité à 20 % du montant encaissé par Orange France au cours des 12 derniers mois du contrat », la cour d’appel a violé les articles 1150, 1152 et 1131 (anciens) du code civil ensemble l’article 1170 (tel qu’issu de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016) du code civil.»
Réponse de la Cour
4. L’arrêt rappelle tout d’abord qu’en application de l’article 10.2.4 des conditions générales d’abonnement « mobilité entreprises voix/Data », lorsque la responsabilité de la société Orange est engagée à la suite d’une faute de sa part, la réparation ne s’applique qu’aux seuls dommages directs, personnels et certains, que le client a subis, à l’exclusion expresse de la réparation de tous dommages et/ou préjudices indirects et immatériels, tels que les préjudices commerciaux, les pertes d’exploitation et de chiffres d’affaires, les pertes de données, qu’en outre, le montant des dommages-intérêts que la société Orange pourrait être amenée à verser dans les conditions précitées est strictement limité à 20 % du montant encaissé par la société Orange au cours des douze derniers mois du contrat et qu’au cas où aucune somme n’aurait été encaissée, le montant de la limitation sera égal à 7 500 euros TTC par client.
5. Il retient ensuite, par motifs propres et adoptés, que les manquements constatés dans l’exécution des prestations de la société Orange, erreur de saisie informatique ayant eu pour conséquence l’absence d’envois de factures de décembre 2010 à mai 2011, dysfonctionnement du service internet de mai à juillet 2011, et création d’une ligne téléphonique mobile n’étant pas utilisée mais dont la preuve de la facturation n’est pas établie, sont à l’origine, pour la société Espace volcan, d’une perte de temps et de problèmes de communication avec ses clients, ce qui constitue un préjudice commercial en raison du trouble causé dans ses conditions d’exploitation.
6. Il retient enfin que le préjudice porté à l’image de marque n’est pas établi.
7. En l’état de ces constatations et appréciations, la cour d’appel a exactement retenu que la clause limitative de responsabilité, qui définissait seulement la nature et le montant des préjudices pouvant être indemnisés, ne remettait pas en cause l’exécution de l’obligation essentielle de la société Orange en la vidant de son contenu, ce dont elle a déduit que le seul préjudice susceptible d’être réparé, indemnisé à concurrence de 3 000 euros par le premier juge, étant immatériel, se heurtait à la clause litigieuse.
8. Le moyen n’est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Espace Volcan aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Espace Volcan et la condamne à payer à la société Orange une somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille vingt.