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Clause de non-concurrence : 7 septembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/16715

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Clause de non-concurrence : 7 septembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/16715

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 07 SEPTEMBRE 2023

N°2023/515

N° RG 22/16715

N° Portalis DBVB-V-B7G-BKPSB

SA [K]

C/

S.A.R.L. MARE NOVA

Copie exécutoire délivrée le :

à :

– SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON

-SELARL BOULAN-CHERFILS-IMPERATORE

Décision déférée à la Cour :

Arrêt de la 2ème chambre civile de la Cour de Cassation de PARIS en date du 24 mars 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 317 F-D suite à l’arrêt de la chambre 1-2 de la Cour d’appel d’Aix en Provence en date du 15 octobre 2020 enregistré au répertoire général sous le n°19/1949.

APPELANTE

SA [K]

Prise en la personne de son représentant légal en exercice

dont le siège social est situé [Adresse 1]

représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

assistée de Me Michel MONTAGARD, avocat au barreau de NICE.

INTIMEE

S.A.R.L. MARE NOVA

Prise en la personne de son représentant légal en exercice

dont le siège social est situé [Adresse 2]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL BOULAN-CHERFILS-IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

et assistée de Me Fatima HAMMOU ALI, avocat au barreau de TOULON, plaidant.

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 juin 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Catherine OUVREL, Présidente, et Mme Angélique NETO, Conseillère, chargées du rapport.

Mme Catherine OUVREL, Présidente, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Catherine OUVREL, Présidente rapporteur

Mme Angélique NETO, Conseillère

Madame Myriam GINOUX, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Charlotte COMBARET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 septembre 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 septembre 2023,

Signé par Mme Catherine OUVREL, Présidente et Mme Julie DESHAYE, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

La SARL Mare Nova est une société située à [Localité 3] qui commercialise des produits de la mer auprès des restaurants, poissonneries et divers commerces de moyennes et grandes distributions en France, au sein de la zone européenne mais également à l’international. Elle embauchait 40 salariés dont plusieurs commerciaux au nombre desquels madame [Z] [D] et monsieur [F] [S], l’équipe commerciale étant dirigée par monsieur [P] [X].

La SA [K] est une société pratiquant le commerce de gros de fruits et légumes outre des produits de la mer. Elle fait partie d’un groupe de sociétés qui commercialisent des produits primeurs.

Invoquant des actes de concurrence déloyale de la part de la SA [K], la SARL Mare Nova a saisi le président du tribunal de grande instance de Grasse d’une requête aux fins de saisie de documents. En effet, la SARL Mare Nova soutient que monsieur [F] [S] a démissionné le 28 novembre 2018 pour travailler chez la SA [K], en emportant et en démarchant une partie de sa clientèle. Elle fait également valoir que madame [Z] [D] en a fait de même le 17 mai 2019. Elle assure encore que monsieur [P] [X] a abandonné son poste le 3 juin 2019 tout en collaborant avec diverses sociétés du ‘groupe [K]’.

Par ordonnance requête en date du 16 juillet 2019, le délégataire du président du tribunal de grande instance de Grasse a désigné la SCP Montayé Sophie De Matteis Fabien, huissiers de justice associés, aux fins de se rendre dans les locaux de la SA [K] et dans ses établissements ou annexes situés dans le ressort de sa compétence territoriale, notamment la société Top Méditerranée, afin de :

– rechercher tous les dossiers, fichiers, documents, correspondances existants entre le 28 novembre 2018 et le jour du constat en rapport avec les faits litigieux exposés,

– prendre connaissance du registre du personnel pour constater l’embauche éventuelle de monsieur [P] [X], madame [Z] [D] et monsieur [F] [S] au sein de l’entreprise [K] depuis le 28 novembre 2018,

– se faire remettre plusieurs contrats, factures et bons de commandes émis entre le 28 novembre 2018 et le jour du constat en listant l’identité des contractants,

– conserver sous séquestre en son étude toutes les copies de documents, ou fichiers réalisées dans les locaux.

Par une seconde ordonnance sur requête en date du 25 juillet 2019, le délégataire du président du tribunal de grande instance de Grasse a ordonné à la SA [K] de remettre l’ensemble des documents visés dans l’ordonnance du 16 juillet 2019, dans les mêmes conditions et termes que cette ordonnance, sous astreinte de 3 000 € par jour de retard à compter de la signification de l’ordonnance et pendant un délai de 6 jours ouvrables.

Par acte d’huissier du 23 août 2019, la SA [K] a fait assigner la SARL Mare Nova en rétractation des ordonnances sur requête des 16 et 25 juillet 2019.

Par ordonnance de référé en date du 25 septembre 2019, le président du tribunal de grande instance de Grasse a :

‘ rejeté la demande de rétractation des ordonnances sur requête des 16 et 25 juillet 2019,

‘ déclaré irrecevable la demande de mainlevée du séquestre des documents saisis par la SCP Montayé De Matteis et de communication de ces documents à la SARL Mare Nova,

‘ condamné la SA [K] à payer à la SARL Mare Nova la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’au paiement des dépens.

La SA [K] a interjeté appel de cette ordonnance le 15 octobre 2019, l’appel étant limité au rejet de la demande de rétractation des ordonnances sur requête, à sa condamnation au paiement d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens et au rejet de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 12 juin 2020, les conclusions déposées et transmises aux intérêts de la SARL Mare Nova ont été déclarées irrecevables comme tardives.

Par arrêt du 15 octobre 2020, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a :

‘ infirmé l’ordonnance déférée sur le rejet de la demande de rétractation des ordonnances sur requête des 16 et 25 juillet 2019, sur la condamnation de la société [K] au paiement d’une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens ainsi que sur le rejet de la demande de la SA [K] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

‘ ordonné la rétractation des ordonnances rendues les 16 et 25 juillet 2019 par le président du tribunal de grande instance de Grasse sur requête de la SARL Mare Nova,

‘ condamné la SARL Mare Nova à payer à la SA [K] la somme de 3 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

‘ condamné la SARL Mare Nova aux dépens de première instance et d’appel.

La SARL Mare Nova a formé un pourvoi en cassation.

Par arrêt du 24 mars 2022, la Cour de cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions l’arrêt du 15 octobre 2020 et renvoyé l’affaire et les parties devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée. Elle a également condamné la SARL Mare Nova au paiement des dépens et d’une somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Selon déclaration de saisine reçue au greffe le 16 décembre 2022, la SA [K] a saisi la cour d’appel d’Aix-en-Provence.

Par dernières conclusions transmises le 22 mai 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, la SA [K] demande à la cour de :

‘ la recevoir en son appel,

‘ débouter la SARL Mare Nova de ses demandes,

‘ déclarer que les mesures d’instruction ordonnées par les ordonnances sur requêtes des 16 et 25 juillet 2019 sont des mesures générales d’investigations illégales,

‘ déclarer qu’elles ne sont fondées sur aucun motif légitime et portent atteinte au secret des affaires,

‘ réformer l’ordonnance déférée en ce qu’elle a rejeté sa demande de rétractation des ordonnances sur requête des 16 et 25 juillet 2019 et l’a condamnée au paiement d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens,

‘ confirmer l’ordonnance déférée sur l’irrecevabilité de la demande de mainlevée des documents saisis par la SCP Montaye De Matteis formée par la SARL Mare Nova,

‘ condamner la SARL Mare Nova au paiement de la somme de 5 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

La SA [K] soutient que les mesures ordonnées par ordonnance sur requête des 16 et 25 juillet 2019 sont générales, larges, portent atteinte au secret des affaires en concernant la saisie de documents sociaux, fiscaux, comptables et administratifs s’agissant de la branche produit de la mer de la SA [K]. Elle invoque la disproportion des mesures prises par rapport au but poursuivi.

Dans un premier temps, la SA [K] soutient que les mesures d’instruction ordonnées procèdent de mesures générales d’investigations, en violation de l’article 145 du code de procédure civile. Elle dénonce, d’abord, la date d’effets de la saisie comme débutant au 28 novembre 2018 ce qui conduit à une saisie trop large de tous les documents, alors que seule la désignation des documents devait se cantonner aux périodes d’activité des anciens salariés au sein de la SA [K]. Elle soutient encore que l’intimée listait un très grand nombre de sociétés et de restaurants clients dont les salariés auraient été en charge, ce qui n’était pas démontré par les pièces produites, de sorte que la saisie aurait dû être limitée. Ensuite, la SA [K] estime que les mesures d’instruction ont été effectuées dans l’ensemble des sociétés du groupe [K] alors que seules certaines d’entre elles vendent des produits de la mer. Enfin, la SA [K] fait valoir que l’intimée a porté plainte contre les trois salariés concernés, sur la base de demandes similaires à celles formulées dans le cadre de son action commerciale. Or, l’appelante souligne l’annulation des citations délivrées par le tribunal correctionnel de Draguignan le 22 avril 2021. Elle en déduit que l’intimée ne peut utiliser dans le cadre de la présente procédure les éléments du dossier pénal, ni ne peut produire les pièces du dossier pénal. Elle s’appuie pour ce faire également sur les termes de l’arrêt de la chambre correctionnelle de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 25 octobre 2022 et sur l’ordonnance du Premier Président de la cour du 27 février 2023 qui a précisément écarté ces pièces.

Dans un deuxième temps, la SA [K] soutient que le motif légitime n’est pas caractérisé et que les mesures ordonnées portent atteinte au secret des affaires. En effet, elle fait valoir qu’il s’agit plus d’un litige prud’homale que d’un litige commercial, elle-même n’étant pas informée de l’existence d’une clause de non concurrence au bénéfice des salariés en cause. Elle explique d’ailleurs que madame [D] a démissionné de la société Pac Primeur le 3 août 2020. L’appelante ajoute que la SARL Mare Nova ne justifiait pas de la perte financière dont elle se plaignait, de sorte que son motif légitime d’action n’était pas démontré. Elle dénonce une atteinte au secret des affaires au vu de l’ampleur des documents commerciaux saisis ainsi que le recours à des procédés illégaux, telle la filature par un détective privé qui constitue un moyen de preuve illicite.

Par dernières conclusions transmises le 24 mai 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, la SARL Mare Nova sollicite de la cour qu’elle :

A titre liminaire,

‘ déclare irrecevables les conclusions récapitulatives et pièces notifiées le 22 mai 2023 pour le compte de la SA [K],

subsidiairement :

‘ ordonne le rabat de l’ordonnance de clôture et admette les présentes conclusions et pièces,

Au ‘fond’ :

‘ confirme l’ordonnance du 25 septembre 2019,

‘ déboute la SA [K] de ses demandes,

‘ condamne la SA [K] au paiement de la somme de 8 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens, en ceux compris les frais de première instance et ceux des investigations ordonnées, avec distraction.

L’instruction de l’affaire a été close par ordonnance en date du 22 mai 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

À l’audience, avant le déroulement des débats, à la demande de chacune des parties, l’ordonnance de clôture rendue le 22 mai 2023 a été révoquée et la procédure a été à nouveau clôturée.

A titre liminaire, il convient de relever qu’aucun appel n’a été formé sur l’irrecevabilité relevée par le premier juge de la demande de main levée du séquestre des documents saisis par l’huissier de justice mandaté ainsi que de la demande de communication de ces pièces à la SARL Mare Nova. La cour n’étant pas saisie, elle n’a pas à statuer sur ce point, ni même à le confirmer.

Sur la procédure

En vertu de l’article 631 du code de procédure civile, relatif à la procédure de renvoi après cassation, devant la juridiction de renvoi, l’instruction est reprise en l’état de la procédure non atteinte par la cassation.

Ainsi, en l’occurrence, et dans la mesure où la cassation sanctionne une erreur de droit des premiers juges d’appel, la procédure antérieure à l’arrêt cassée est maintenue. La présente procédure se poursuit donc en l’état de la procédure engagée devant la première cour d’appel.

Or, par ordonnance du 12 juin 2020, les conclusions prises aux intérêts de la SARL Mare Nova ont été déclarées irrecevables pour avoir été transmises tardivement, c’est-à-dire au delà du délai prévu par l’article 905-2 du code de procédure civile applicable en la matière. Dès lors, l’intimée est irrecevable à conclure ; ses dernières conclusions et pièces transmises le 24 mai 2023, tout comme celles du 13 avril 2023, sont tout autant irrecevables.

La présente cour est donc amenée à apprécier l’affaire à partir de la motivation de l’ordonnance contestée en date du 25 septembre 2019 et des conclusions de l’appelante.

Sur la demande de rétractation des ordonnances sur requête des 16 et 25 juillet 2019

En vertu des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

Par application de l’article 495 du code de procédure civile, l’ordonnance sur requête est motivée. Elle est exécutoire au seul vu de la minute. Copie de la requête et de l’ordonnance est laissée à la personne à laquelle elle est opposée.

En vertu des dispositions de l’article 497 du code de procédure civile, le juge a la faculté de modifier ou de rétracter son ordonnance, même si le juge du fond est saisi de l’affaire.

En vertu de l’article 493 du code de procédure civile, l’ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse.

Le juge saisi d’une demande de rétractation d’une ordonnance sur requête ayant ordonné une mesure sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile est tenu d’apprécier au jour où il statue les mérites de la requête. Il doit s’assurer de l’existence d ‘un motif légitime à ordonner la mesure probatoire et des circonstances justifiant de ne pas y procéder contradictoirement. Le motif légitime existe dès lors que l’action éventuelle au fond n’est pas manifestement vouée à l’échec, que la mesure demandée est légalement admissible, qu’elle est utile et améliore la situation probatoire des parties et ne porte pas atteinte aux intérêts légitimes du défendeur. Le secret des affaires et le secret professionnel ne constituent pas, en eux-mêmes, un obstacle à l’application des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile.

Il est de jurisprudence constante que les mesures d’instruction ne pouvant être ordonnées sur requête que lorsque les circonstances exigent qu’elles ne le soient pas contradictoirement, il appartient au juge, saisi d’une demande de rétractation, de vérifier, même d’office, si la requête et l’ordonnance caractérisent de telles circonstances.

L’ordonnance sur requête, rendue non contradictoirement, doit être motivée de façon précise, le cas échéant par l’adoption des motifs de la requête, s’agissant des circonstances qui exigent que la mesure d’instruction ne soit pas prise contradictoirement. Il y va de la régularité de la saisine du juge, laquelle constitue une condition préalable à l’examen de la recevabilité et du bien fondé de la mesure probatoire sollicitée.

Enfin, si le juge de la rétractation doit apprécier l’existence du motif légitime de la mesure sollicitée au jour du dépôt de la requête initiale ainsi qu’à la lumière des éléments de preuve produits ultérieurement devant lui, il est tenu, en revanche, s’agissant de la nécessité de recourir à une procédure non contradictoire, d’apprécier les seuls éléments figurant dans la requête ou l’ordonnance, sans qu’il puisse en suppléer la carence en recherchant les circonstances justifiant qu’il soit dérogé au principe de la contradiction dans les pièces produites ou les déduire du contexte de l’affaire.

Au cas présent, l’ordonnance sur pied de requête rendue le 16 juillet 2019 par la première vice-présidente du tribunal judiciaire de Grasse, statuant sur délégation du président, est motivée par le visa de la requête à laquelle elle fait droit, ainsi que des pièces jointes. Elle est intrinsèquement dépourvue de toute motivation. L’ordonnance sur pied de requête rendue le 25 juillet 2019 par le même magistrat, se prononce également par simple renvoi à la requête à laquelle elle répond favorablement, sans autre motivation.

La première requête, déposée le 4 juillet précédent, à laquelle renvoie l’ordonnance précitée, consacre près de huit pages à sa motivation. La SARL Mare Nova présente, dans un premier temps, la situation des parties, puis décrit les actes de concurrence déloyale dont elle soupçonne la SA [K], soutenant que monsieur [F] [S], agent commercial précédemment employé chez elle, a démissionné le 28 novembre 2018 pour travailler chez la SA [K], en emportant et en démarchant une partie de sa clientèle. Elle fait également valoir que madame [Z] [D], également agent commercial, en a fait de même le 17 mai 2019. Elle assure encore que monsieur [P] [X], directeur commercial dans sa société, a abandonné son poste le 3 juin 2019 tout en collaborant avec diverses sociétés du ‘groupe [K]’. Elle dénonce une collusion entre ces salariés et la SA [K], et met en avant plusieurs éléments factuels étayant ses affirmations de concurrence déloyale. La SARL Mare Nova affirme subir un préjudice financier conséquent, ces actes mettant en péril la pérennité de son activité. La SARL Mare Nova dénonce la violation par monsieur [P] [X] et par madame [Z] [D] de leurs clauses de non concurrence contractuellement stipulées.

La SARL Mare Nova termine la motivation de sa requête par les paragraphes suivants :

‘ la SARL Mare Nova a, compte tenu de ce qui précède, des raisons légitimes de penser que ces trois salariés commettent des actes de concurrence déloyale et sollicite auprès de monsieur ou madame le président du tribunal de céans, des mesures probatoires a l’égard de monsieur [P] [X], monsieur [F] [S] et madame [Z] [D] au sein de l’entreprise [K] ; 1’entreprise [K] quant à elle commet une faute en employant des salariés qui sont liés à leur ancien employeur par une clause de non concurrence post contractuelle ;

la jurisprudence précise que cette faute est constituée lorsque le nouvel employeur emploie un salarié qui est lié à son ancien employeur par une clause de non concurrence post contractuelle ; par exemple, est fautif le fait pour le nouvel employeur de faire travailler un salarié dans la zone géographique prohibée par la clause de non concurrence post contractuelle qui le liait ;

la cour a réitéré cette solution par arrêt du 15 mars 2011 puisque la société Sud Fertilisant avait embauché à seize mois d’intervalle les deux anciens représentants démissionnaires de la société Procep et les avait affectés, en toute connaissance de cause, alors qu’ils étaient tenus par une clause de non concurrence post contractuelle, à un secteur correspondant à celui que les deux salariés étaient chargés de prospecter pour le compte de leur précèdent employeur ;

la Cour relève aussi qu’il était établi que la société Procep avait perdu progressivement, concomitamment à l’embauche de ces deux salariés, plusieurs clients importants qui se sont retrouvés chez Sud Fertilisant et qu’en conséquence, cette dernière avait, par un procédé déloyal, détourné la clientèle ;

tel est précisément le cas en l’espèce ;

c’est pourquoi, la SA [K] sollicite, en vertu de l’article 145 du code de procédure civile, la désignation la SCP Montayé Sophie De Matteis Fabien, huissiers de justice associés, et précise la mission requise.’

La seconde requête, déposée le 24 juillet 2019, tendait à obtenir le bénéfice d’une astreinte pour l’exécution de la mesure précédemment ordonnée, compte tenu du procès-verbal de difficultés dressé le 23 juillet 2019 par l’huissier de justice désigné. Cette requête est fondée sur le refus manifesté lors de l’exécution de la mesure par monsieur [I] [K], mais ne comprend aucune référence à la nécessité de procéder par requête, donc de manière non contradictoire.

Ainsi, force est de constater que ni les ordonnances des 16 et 25 juillet 2019, ni les requêtes expressément visées, ne comportent de motivation sur les circonstances pouvant justifier que la mesure sollicitée ne soit pas prise contradictoirement, étant observé qu’il n’appartient pas au juge des référés saisi de la demande de rétractation de ces ordonnances, ni à la cour, saisie de l’appel de la décision de ce magistrat, d’y suppléer en recherchant dans les circonstances et la nature des actes reprochés, à savoir des actes de concurrence déloyale, des raisons de déroger au principe de la contradiction. La motivation développée par le premier juge dans son ordonnance du 25 septembre 2019 est donc inopérante, ce qu’avait d’ores et déjà mis dans les débats l’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 15 octobre 2020, cassé pour un autre motif.

Dès lors, l’ordonnance entreprise doit être infirmée de ce seul chef, sans qu’il y ait lieu d’examiner les autres moyens, et les ordonnances sur requête des 16 juillet et 25 juillet 2019 rétractées.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Compte tenu de l’infirmation de l’ordonnance entreprise sur le litige principal, elle doit l’être également sur la charge des dépens et sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La SARL Mare Nova, qui succombe au litige, supportera les dépens de première instance et d’appel. Il serait en outre inéquitable de laisser à la charge de la SA [K] les frais, non compris dans les dépens, qu’elle a exposés pour sa défense. Une indemnité de 2 000 € se trouve justifiée à son profit en appel au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Ordonne la révocation de l’ordonnance de clôture du 22 mai 2023,

Constate que l’affaire est en état d’être jugée,

Constate l’irrecevabilité des conclusions de la SARL Mare Nova, intimée,

Infirme l’ordonnance entreprise rendue le 25 septembre 2019 par le président du tribunal judiciaire de Grasse en toutes ses dispositions soumises à la cour,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Ordonne la rétractation des ordonnances sur requête rendues les 16 juillet 2019 et 25 juillet 2019 par le magistrat délégué par le président du tribunal judiciaire de Grasse avec toutes conséquences de droit,

Condamne la SARL Mare Nova à payer à la SA [K] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL Mare Nova au paiement des dépens.

La Greffière La Présidente

 


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