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Clause de non-concurrence : 19 septembre 2023 Cour d’appel de Riom RG n° 21/00829

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Clause de non-concurrence : 19 septembre 2023 Cour d’appel de Riom RG n° 21/00829

19 SEPTEMBRE 2023

Arrêt n°

ChR/NB/NS

Dossier N° RG 21/00829 – N° Portalis DBVU-V-B7F-FSOW

S.E.L.A.R.L. MJ DE L’ALLIER en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS Entreprise BOURRON

/

[X] [D], L’UNEDIC, Délégation AGS, CGEA d'[Localité 6]

jugement au fond, origine conseil de prud’hommes – formation paritaire de vichy, décision attaquée en date du 15 mars 2021, enregistrée sous le n° f 19/00119

Arrêt rendu ce DIX NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d’Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :

M. Christophe RUIN, Président

Mme Sophie NOIR, Conseiller

Mme Clémence CIROTTE, Conseiller

En présence de Mme Nadia BELAROUI greffier lors des débats et du prononcé

ENTRE :

S.E.L.A.R.L. MJ DE L’ALLIER en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS Entreprise BOURRON

[Adresse 4],

[Localité 1]

Représentée par Me Regis SENET, avocat au barreau de MOULINS

APPELANT

ET :

M. [X] [D]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représenté par Me Alexandre BENAZDIA, avocat au barreau de CUSSET/VICHY

L’UNEDIC, Délégation AGS, CGEA d'[Localité 6], Association déclarée, représentée par son Directeur, Madame [N] [S], directrice nationale, domicilié es qualité

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Emilie PANEFIEU, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIMES

M. RUIN, Président et Mme NOIR, Conseiller après avoir entendu, M. RUIN, Président en son rapport, à l’audience publique du 05 juin 2023, tenue par ces deux magistrats, sans qu’ils ne s’y soient opposés, les représentants des parties en leurs explications, en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré après avoir informé les parties que l’arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l’article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

La SAS ENTREPRISE BOURRON (SIREN 418 827 119), dont le siège social est situé à [Localité 7]), est une entreprise du bâtiment (plâtrerie, peinture, isolation, revêtements, façades).

Par jugement du 24 septembre 2019, le tribunal de commerce de CUSSET a prononcé l’ouverture d’une procédure de sauvegarde à l’encontre de la société ENTREPRISE BOURRON, désigné la SELARL MJ DE L’ALLIER, représentée par Maître [X] [Z], en qualité de mandataire judiciaire, désigné la SELARL AJ UP, représentée par Maître [W] [P], en qualité d’administrateur judiciaire.

Par jugement du 29 septembre 2020, le tribunal de commerce de CUSSET a converti la procédure de sauvegarde en redressement judiciaire de la société ENTREPRISE BOURRON, maintenu la SELARL MJ DE L’ALLIER, représentée par Maître [X] [Z], en qualité de mandataire judiciaire, maintenu la SELARL AJ UP, représentée par Maître [W] [P], en qualité de d’administrateur judiciaire.

Par jugement du 29 décembre 2020, le tribunal de commerce de CUSSET a prononcé la liquidation judiciaire de la société ENTREPRISE BOURRON, autorisé une poursuite d’activité jusqu’au 29 mars 2021, nommé la SELARL MJ DE L’ALLIER, représentée par Maître [X] [Z], en qualité de liquidateur judiciaire, maintenu la SELARL AJ UP, représentée par Maître [W] [P], en qualité de d’administrateur judiciaire avec extension de mission aux licenciements des salariés.

Monsieur [X] [D], né le 25 novembre 1976, a été embauché par l’EURL BOURRON [X], devenue la SAS ENTREPRISE BOURRON, à compter du 18 janvier 2016, d’abord en qualité de conducteur de travaux suivant contrats à durée déterminés successifs, puis en qualité de directeur (cadre), responsable de l’agence de [Localité 8], à compter du 1er novembre 2016 selon contrat de travail à durée indéterminée, à temps complet.

La convention collective nationale applicable à la relation contractuelle est celle des cadres du bâtiment.

Par courrier recommandé daté du 30 juillet 2019, Monsieur [D] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, avec notification d’une mise à pied conservatoire.

L’entretien préalable s’est tenu le 7 août 2019.

Par courrier recommandé daté du 12 août 2019 (présenté le 13 août 2019), la société ENTREPRISE BOURRON a notifié à Monsieur [X] [D] son licenciement pour faute lourde.

Le 6 septembre 2019, Monsieur [X] [D] a saisi le conseil des prud’hommes de VICHY afin notamment de voir juger son licenciement irrégulier et dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Par jugement contradictoire rendu le 15 mars 2021 (audience du 5 octobre 2020), le conseil des prud’hommes de VICHY a :

– fixé le salaire de référence à la somme de 5.270,29 euros ;

– déclaré irrégulier le licenciement prononcé à l’égard de Monsieur [X] [D] ;

– dit et jugé que le licenciement a été prononcé sans cause réelle et sérieuse ;

– débouté Monsieur [X] [D] de sa demande au titre d’une procédure irrégulière en application de l’article L.1235-2 ;

En conséquence,

– condamné la SAS ENTREPRISE BOURRON à payer et porter à Monsieur [X] [D] les sommes suivantes :

– 2.380,13 euros brut au titre de rappel de salaire concernant la mise à pied conservatoire,

– 15.810,87 euros brut au titre de l’indemnité de préavis,

– 3.952,72 euros brut au titre de l’indemnité de licenciement,

– 15.810,87 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– ordonné à la SAS ENTREPRISE BOURRON de régulariser auprès de la caisse des congés payés du bâtiment de la région Centre, les droits du salarié auprès de ladite caisse :

– soit 4.743,26 euros brut pour les mois restant dus à avril 2019,

– soit 1.317,57 euros brut pour les mois de mai à juillet 2019,

– soit 238,01 euros brut pour la période de mise à pied,

– soit 1.581,09 euros brut pour la période de préavis ;

– condamné la SAS ENTREPRISE BOURRON à payer et porter à Monsieur [X] [D] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et comportement abusif et injustifié ;

– dit que des sommes ci-dessus énoncées en brut devront éventuellement être déduites les charges sociales salariales précomptées et reversées aux organismes sociaux par l’employeur ;

– dit que les sommes s’entendent ‘ net ‘ de toutes cotisations et contributions sociales ;

– ordonné, le licenciement étant intervenu sans cause réelle et sérieuse dans une entreprise comptant plus de 10 salariés et à l’encontre d’un salarié ayant plus de deux ans d’ancienneté, le remboursement au Pôle Emploi Auvergne, en application des dispositions de l’article L.1235-4 du Code du travail, des indemnités de chômage qui ont pu être versées à Monsieur [X] [D] pour une durée de six mois ;

– rappelé qu’en application de l’article R.1454-28 du Code du travail, le présent jugement qui ordonne le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l’article R.1454-14 est exécutoire à titre provisoire dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire et dit n’y avoir lieu au prononcé de l’exécution provisoire pour le surplus ;

– dit qu’il n’y a pas lieu d’ordonner à Monsieur [X] [D] de restituer un tampon et un téléphone mobile NOKIA ;

– condamné la SAS ENTREPRISE BOURRON à verser à Monsieur [X] [D] la somme de 800 euros ‘ net ‘ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– débouté la SAS ENTREPRISE BOURRON de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– condamné la SAS ENTREPRISE BOURRON aux entiers dépens.

Le 9 avril 2021, la SELARL MJ DE L’ALLIER, en qualité de mandataire liquidateur de la SAS ENTREPRISE BOURRON, a interjeté appel de ce jugement qui a été notifié à la personne de son représentant légal le 19 mars 2021 et ce, en intimant Monsieur [X] [D] ainsi que l’association UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6]. Selon la déclaration d’appel, l’appel de la SELARL MJ DE L’ALLIER est limité au fait qu’à la date de l’audience de jugement, la procédure de sauvegarde avait été convertie en procédure de redressement judiciaire et que les parties auraient dû appeler en la cause le mandataire judiciaire, ce qui n’a pas été fait.

Vu les conclusions notifiées à la cour le 1er juin 2021 par la SELARL MJ DE L’ALLIER, en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS ENTREPRISE BOURRON,

Vu les conclusions notifiées à la cour le 3 juin 2021 par Monsieur [X] [D],

Vu les conclusions notifiées à la cour le 30 août 2021 par l’association UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6],

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 9 mai 2023.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières écritures, la SELARL MJ DE L’ALLIER, en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS ENTREPRISE BOURRON, demande à la cour de :

– constater et juger que le jugement rendu par le conseil des prud’hommes de VICHY est nul, et en conséquence, lui est non opposable ;

– constater qu’elle s’en remet à droit sur le fond ;

– dire et déclarer le jugement opposable au CGEA AGS.

La SELARL MJ DE L’ALLIER, en qualité de mandataire liquidateur de la SAS ENTREPRISE BOURRON, expose qu’il n’a pas été appelé en la cause devant le conseil de prud’hommes et, en conséquence, demande à la cour de prononcer la nullité du jugement rendu par le conseil des prud’hommes de VICHY, jugement qui lui sera déclaré inopposable.

Sur le fond, le liquidateur judiciaire s’en remet à droit.

Dans ses dernières écritures, Monsieur [X] [D] demande à la cour de :

– le recevoir en son appel incident en ce qu’il demande de voir confirmer le jugement au regard des sommes qui lui sont octroyées, mais compte tenu de la situation de la société ENTREPRISE BOURRON de les voir fixer ;

– le recevoir de même son appel incident en ce qu’il demande de voir infirmer sur le quantum la somme obtenue à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de 15.810,87 euros ;

– le recevoir en son appel incident en ce qu’il soit infirmé le fait qu’il soit ordonné à la société ENTREPRISE BOURRON de régulariser auprès de la caisse des congés payés du bâtiment les droits du salarié auprès de ladite caisse pour ses congés payés au titre du rappel de la mise à pied, de la période de préavis pour les mois de mai à juillet 2019 et pour les mois restants dus à avril 2019 ;

Statuant à nouveau,

– porter et fixer sa créance à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à 18.446,01 euros ;

– fixer sa créance à la procédure collective de la SAS ENTREPRISE BOURRON aux sommes suivantes relevant des congés payés :

– 4.743,26 euros brut pour les mois restant dus à avril 2019,

– 1.317,57 euros brut pour les mois de mai à juillet 2019,

– 238,01 euros brut pour la période de mise à pied,

– 1.581,09 euros brut pour la période de préavis ;

– fixer sa créance auprès de la procédure collective de la SAS ENTREPRISE BOURRON aux sommes suivantes :

– 2.380,13 euros brut au titre de rappel de salaires concernant la mise à pied conservatoire,

– 15.810,87 euros brut au titre de l’indemnité de préavis,

– 3.952,72 euros brut au titre de l’indemnité de licenciement,

– 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et comportement abusif et injustifié ;

– confirmer la condamnation de la SAS ENTREPRISE BOURRON au travers de la procédure collective ouverte auprès de la SELARL MJ DE L’ALLIER à lui verser la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile concernant le jugement du conseil des prud’hommes ;

– condamner la SELARL MJ DE L’ALLIER, es qualité de mandataire judiciaire de la SAS ENTREPRISE BOURRON, à verser la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile en cause d’appel ainsi qu’aux entiers dépens d’appel.

Monsieur [X] [D] demande à la cour de juger son licenciement irrégulier aux motifs que la procédure lui ayant été appliquée était viciée. Il soutient que l’entretien préalable organisé par son employeur n’a pas permis de véritable discussion, ni même de comprendre véritablement les griefs reprochés, ce dernier ne faisant pas état de faits précis, concrets et circonstanciés.

En outre, Monsieur [D] demande à la cour de juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, contestant les griefs qui lui sont reprochés. Monsieur [D] relève qu’il a eu une simple discussion avec des collègues concernant son futur projet professionnel et qu’il n’a jamais effectué un détournement de clientèle, ce dernier motif étant pour le moins obscur. S’agissant des prétendues faveurs de la part des fournisseurs, si Monsieur [D] ne conteste pas avoir bénéficié d’un voyage offert par le fournisseur GEDIMAT, il soutient qu’il était l’interlocuteur principal de ce fournisseur de sorte qu’il serait logique que le voyage lui revienne, d’autant plus qu’il soutient avoir gagné le challenge permettant de remporter un tel présent. Surtout, il fait valoir qu’aucune disposition du règlement intérieur de l’entreprise ou du contrat de travail n’interdit aux salariés de bénéficier de cadeaux.

Dans ses dernières écritures, l’association UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6], demande à la cour de :

A titre principal,

– réformer le jugement rendu le 15 mars 2021 rendu par le conseil des prud’hommes de VICHY, section encadrement, sous le numéro RG F 19/00119 en ce qu’il a :

– fixé le salaire de référence à la somme de 5.270,29 euros ;

– déclaré irrégulier le licenciement prononcé à l’égard de Monsieur [X] [D] ;

– dit et jugé que le licenciement a été prononcé sans cause réelle et sérieuse ;

– condamné la SAS ENTREPRISE BOURRON à payer et porter à Monsieur [X] [D] les sommes suivantes :

– 2.380,13 euros brut au titre de rappel de salaire concernant la mise à pied conservatoire ;

– 15.810,87 euros brut au titre de l’indemnité de licenciement ;

– 3.952,72 euros brut au titre de l’indemnité de licenciement ;

– 15.810,87 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– ordonné à la SAS ENTREPRISE BOURRON de régulariser auprès de la caisse des congés payés du bâtiment de la région Centre, les droits du salarié auprès de ladite caisse :

– soit 4.743,26 euros brut pour les mois restant dus à avril 2019 ;

– soit 1.317,57 euros brut pour les mois de mai à juillet 2019 ;

– soit 238,01 euros brut pour la période de mise à pied ;

– soit 1.581,09 euros brut pour la période de préavis ;

– condamné la SAS ENTREPRISE BOURRON à payer et porter à Monsieur [X] [D] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et comportement abusif et injustifié ;

– dit que des sommes ci-dessus énoncées en brut devront éventuellement être déduites les charges sociales salariales précomptées et reversées aux organismes sociaux par l’employeur ;

– dit que les sommes s’entendent ‘ net ‘ de toutes cotisations et contributions sociales ;

– ordonné, le licenciement étant intervenu sans cause réelle et sérieuse dans une entreprise comptant plus de 10 salariés et à l’encontre d’un salarié ayant plus de deux ans d’ancienneté, le remboursement au Pôle Emploi Auvergne, en application des dispositions de l’article L.1235-4 du Code du travail, des indemnités de chômage qui ont pu être versées à Monsieur [X] [D] pour une durée de six mois ;

– condamné la SAS ENTREPRISE BOURRON à verser à Monsieur [X] [D] la somme de 800 euros ‘ net ‘ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– condamné la SAS ENTREPRISE BOURRON aux entiers dépens ;

Se faisant et statuant à nouveau,

– déclarer le licenciement pour faute lourde de Monsieur [X] [D] fondé ;

– subsidiairement, requalifier le licenciement de Monsieur [X] [D] en licenciement pour faute grave ;

– débouter Monsieur [X] [D] de sa demande de dommages et intérêts ;

– débouter Monsieur [X] [D] de sa demande au titre des congés payés ;

– débouter Monsieur [X] [D] de l’intégralité de ses fins, demandes et conclusions ;

A titre subsidiaire,

– déclarer l’arrêt à intervenir opposable à l’AGS et au CGEA d'[Localité 6] en qualité de gestionnaire de l’AGS, dans les limites prévues aux articles L.3253-1 et suivants (article L.3253-8), D.3253-5 du Code du travail et du Décret n°2003-684 du 24 juillet 2003 ;

– dire et juger que la garantie de l’AGS est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, au plafond 6 défini à l’article D.3253-5 du Code du travail ;

– dire et juger que les limites de leur garantie sont applicables ;

– dire et juger que l’arrêt à intervenir ne saurait prononcer une quelconque condamnation à leur encontre ;

– dire et juger que l’AGS ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L.3253-1 et suivants du Code du travail (article L.3253-8) que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L.3253-1 et suivants du Code du travail (article L.3253-8) ;

– dire et juger que l’obligation du CGEA de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le mandataire judiciaire ;

– dire et juger que le jugement d’ouverture arrêt le cours des intérêts légaux (articles L.622-28 et suivants du Code de Commerce).

A titre principal, la délégation AGS demande à la cour de débouter Monsieur [X] [D] de sa demande de requalification du licenciement aux motifs qu’elle serait infondée. En effet, l’AGS fait valoir qu’au regard des griefs reprochés au salarié, le licenciement pour faute lourde est parfaitement justifié. Elle rappelle qu’il est notamment reproché au salarié d’avoir détourné un client MINKLEY au profit d’une société concurrente ETI pour laquelle il était désigné principal interlocuteur. En outre, la société ENTREPRISE BOURRON aurait été informée par certains de ses salariés de la proposition qu’ils auraient reçue de la part de Monsieur [D] de travailler pour son propre compte. Enfin, s’agissant de l’attribution d’avantages professionnels sans autorisation, l’AGS rappelle que Monsieur [D] avait, sans autorisation, inscrit son employeur a un challenge organisé par l’un de ses fournisseurs (GEDIMAT) et se serait attribué le cadeau gagné de ce fait, alors qu’il avait été offert à l’entreprise, et ce à l’insu de son employeur.

En conséquence, l’AGS demande à la cour de débouter Monsieur [D] de ses demandes indemnitaires.

Pour plus ample relation des faits, de la procédure, des prétentions, moyens et arguments des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer à la décision attaquée et aux dernières conclusions régulièrement notifiées et visées.

MOTIFS

En application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions des parties. La cour ne statue pas sur des demandes indéterminées, trop générales ou non personnalisées, qui relèvent parfois de la reprise dans le dispositif des conclusions d’une partie de l’argumentaire contenu dans les motifs. Ainsi, la cour ne statue pas sur les demandes de constat, de donner acte ou de rappel de textes qui ne correspondent pas à des demandes précises, exécutables ou exécutoires.

Il échet de rappeler que les expressions “s’en rapporter à justice”, ‘s’en rapporter à la sagesse des juges’ ou ‘s’en remettre à droit’ dans des conclusions d’avocat signifient que le conseil de la partie qu’il représente n’a pas de moyen à opposer à son adversaire ou à la motivation du jugement frappé d’un recours. Concrètement il s’agit pour l’avocat d’indiquer qu’il n’a pas véritablement d’argument à soutenir et qu’il laisse au juge le soin de prendre la décision qu’il jugera adapté. La Cour de cassation considère qu’une expression de ce type dans le dispositif des dernières écritures d’une partie, qui n’est nullement assimilable à un acquiescement, s’analyse une véritable contestation, en infère une demande en justice et, par voie de conséquence, l’interruption du délai de prescription.

– Sur la nullité ou inopposabilité du jugement –

Les instances prud’homales en cours à la date du jugement d’ouverture d’une procédure collective (sauvegarde, redressement judiciaire et liquidation judiciaire) ne sont pas interrompues mais poursuivies de plein droit, quelle que soit la procédure mise en oeuvre. Il s’agit d’une exception par rapport aux autres créances vis-à-vis du débiteur ou de la procédure collective, notamment du fait que les salariés n’ont pas à déclarer leurs créances résultant du contrat de travail car c’est le mandataire judiciaire (ou représentant des créanciers) qui doit établir dans des délais précis les relevés des créances salariales.

Dans le cadre d’une procédure collective de sauvegarde, selon l’article L. 625-3 du code de commerce, les instances en cours devant la juridiction prud’homale à la date du jugement d’ouverture sont poursuivies en présence du mandataire judiciaire et de l’administrateur lorsqu’il a une mission d’assistance ou ceux-ci dûment appelés ; le mandataire judiciaire informe dans les dix jours la juridiction saisie et les salariés parties à l’instance de l’ouverture de la procédure.

Dans le cadre d’une procédure collective de redressement judiciaire, selon l’article L. 631-18 du code de commerce, les dispositions de l’article L. 625-3 sont applicables à la procédure de redressement judiciaire, sous réserve des dispositions qui suivent. Le mandataire judiciaire cité devant le conseil de prud’hommes ou, à défaut, le demandeur appelle devant la juridiction prud’homale les institutions mentionnées à l’article L. 3253-14 du code du travail (délégation AGS). Les institutions mentionnées à l’article L. 3253-14 du code du travail (délégation AGS) sont mises en cause par le mandataire judiciaire ou, à défaut, par les salariés requérants, dans les dix jours du jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou du jugement convertissant une procédure de sauvegarde en procédure de redressement. Les instances en cours devant la juridiction prud’homale à la date du jugement d’ouverture sont poursuivies en présence du mandataire judiciaire et de l’administrateur ou ceux-ci dûment appelés.

Dans le cadre d’une procédure collective de liquidation judiciaire, selon l’article L. 641-14 du code de commerce, les dispositions de l’article L. 625-3 sont applicables à la procédure de liquidation judiciaire et, pour l’application de l’article L. 625-3, les institutions mentionnées à l’article L. 3253-14 du code du travail (délégation AGS) sont mises en cause par le liquidateur ou, à défaut, par les salariés requérants, dans les dix jours du jugement d’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire ou du jugement la prononçant.

La juridiction prud’homale, lorsqu’elle est informée de l’ouverture d’une procédure collective, est tenue d’appliquer les dispositions d’ordre public des articles L. 625-3, L. 631-18 et L. 641-14 du code de commerce , et de convoquer les organes de la procédure collective.

En cas d’ouverture d’une procédure collective, l’instance prud’homale doit donc se poursuivre en présence du mandataire judiciaire (représentant des créanciers) mais également de l’administrateur lorsqu’il a pour mission d’assurer l’administration de l’entreprise, ou ceux-ci dûment appelés.

Doivent donc être mise en cause dans les instances prud’homales en cours :

– le mandataire judiciaire et l’administrateur judiciaire en cas de sauvegarde ou de redressement judiciaire ;

– le liquidateur judiciaire en cas de liquidation judiciaire ;

– le commissaire à l’exécution du plan après adoption par le tribunal de commerce d’un plan de sauvegarde ou de redressement.

En cas de liquidation judiciaire, en principe le liquidateur (généralement le mandataire judiciaire en cas de conversion d’une sauvegarde ou d’un redressement judiciaire) exerce les missions dévolues à l’administrateur judiciaire et au mandataire judiciaire ; il sera donc le seul appelé en la cause. Par exception, lorsque le tribunal de commerce désigne un liquidateur judiciaire mais également un administrateur judiciaire pour administrer l’entreprise, les deux devront être appelés en la cause.

Concrètement, il revient aux conseils de prud’hommes la charge de convoquer, ou plutôt de faire convoquer par leur greffe, les organes de la procédure collective.

La sanction en l’absence de respect de cette procédure de mise en cause impérative des organes de la procédure collective dès que la juridiction prud’homale est informée de l’existence d’une procédure collective en cours est sévère puisque, à défaut, la décision du conseil de prud’hommes sera considérée comme non avenue, c’est-à-dire inopposable au mandataire ou représentant des créanciers.

Reste qu’il appartient au mandataire judiciaire, que ce soit à la sauvegarde, au redressement judiciaire ou à la liquidation judiciaire, d’informer la juridiction prud’homale de l’ouverture de la procédure collective ou de la conversion de celle-ci. C’est seulement si elle est régulièrement informée dans ce cadre que la juridiction prud’homale est tenue de convoquer les organes de la procédure collective, ainsi que l’AGS.

Selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation, lorsque le mandataire judiciaire, ou le liquidateur judiciaire, n’a pas informé la juridiction prud’homale et les salariés parties à l’instance de l’existence d’une procédure collective, l’instance prud’homale se poursuit valablement et la décision du conseil de prud’hommes est opposable aux organes de la procédure collective.

Le mandataire, que ce soit à la sauvegarde, au redressement judiciaire ou à la liquidation judiciaire, qui n’a pas informé la juridiction prud’homale saisie, avant l’ouverture des débats, de l’ouverture de la procédure collective concernant l’employeur, ou de la conversion de cette procédure collective, ne peut valablement se prévaloir d’une inopposabilité de la décision rendue. En conséquence, les juges du fond, qui n’ont pas été informés à temps par le mandataire judiciaire de la société de l’ouverture d’une procédure collective, ou de la conversion de la procédure collective (passage de la sauvegarde au redressement judiciaire ou à la liquidation judiciaire, ou conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire) ont valablement rendu leur décision qui est opposable aux organes de la procédure collective.

En l’espèce, l’audience de jugement du conseil de prud’hommes de VICHY s’est tenue le 5 octobre 2020 et la décision a été rendue le 15 mars 2021.

Le jugement déféré mentionne que la SAS ENTREPRISE BOURRON était représentée par un avocat mais que la SELARL MJ DE L’ALLIER, appelée en la cause et convoquée, et ce par lettre recommandée avec accusé de réception, en qualité de mandataire judiciaire à la sauvegarde de la SAS ENTREPRISE BOURRON, n’a pas comparu et n’était pas représentée.

La SELARL MJ DE L’ALLIER ne conteste pas avoir été appelée en la cause devant le conseil de prud’hommes en qualité de mandataire judiciaire à la sauvegarde de la SAS ENTREPRISE BOURRON, ni avoir été régulièrement convoquée dans ce cadre, mais fait valoir qu’elle n’a pas été appelée en la cause en qualité de mandataire à la procédure de redressement judiciaire de la SAS ENTREPRISE BOURRON lors de l’audience du 5 octobre 2020.

À compter du 24 septembre 2019, la société ENTREPRISE BOURRON était sous procédure collective de sauvegarde avec la SELARL MJ DE L’ALLIER, représentée par Maître [X] [Z], en qualité de mandataire judiciaire.

À compter du 29 septembre 2020, la société ENTREPRISE BOURRON était sous procédure collective de redressement judiciaire, avec la SELARL MJ DE L’ALLIER, représentée par Maître [X] [Z], en qualité de mandataire judiciaire.

À compter du 29 décembre 2020, la société ENTREPRISE BOURRON était sous procédure collective de liquidation judiciaire, avec la SELARL MJ DE L’ALLIER, représentée par Maître [X] [Z], en qualité de liquidateur judiciaire.

Lors de l’audience de jugement du 5 octobre 2020 devant le conseil de prud’hommes de VICHY, la société ENTREPRISE BOURRON était donc sous procédure collective de redressement judiciaire, avec la SELARL MJ DE L’ALLIER, représentée par Maître [X] [Z], en qualité de mandataire judiciaire mais ce, depuis seulement 5 jours.

Il n’est ni démontré qu’à la date du 5 octobre 2020 le conseil de prud’hommes de VICHY avait connaissance de la conversion, en date du 29 septembre 2020, de la procédure de sauvegarde en redressement judiciaire de la société ENTREPRISE BOURRON, ni que la SELARL MJ DE L’ALLIER avait informé la juridiction prud’homale de ce qu’elle n’était plus mandataire à la sauvegarde mais désormais mandataire au redressement judiciaire de la société ENTREPRISE BOURRON et ce, alors que la SELARL MJ DE L’ALLIER avait été régulièrement appelée en la cause et convoquée devant le conseil de prud’hommes de VICHY avant le 29 septembre 2020 en qualité de mandataire à la sauvegarde de la société ENTREPRISE BOURRON mais avait décidé de ne pas comparaître et de ne pas être représentée.

En outre, le jugement du 15 mars 2021 a été notifié à la personne morale de la SELARL MJ DE L’ALLIER le 19 mars 2021 et celle-ci, en qualité de mandataire liquidateur de la SAS ENTREPRISE BOURRON, a interjeté appel de ce jugement en intimant Monsieur [X] [D] ainsi que, d’elle-même, l’association UNEDIC, délégation AGS, CGEA d'[Localité 6].

La cour juge que le jugement du 15 mars 2021 est opposable aux organes de la procédure collective de la SAS ENTREPRISE BOURRON et que la SELARL MJ DE L’ALLIER, que ce soit en qualité de mandataire à la sauvegarde, au redressement judiciaire ou à la liquidation judiciaire, ne peut se prévaloir de la nullité ou de l’inopposabilité du jugement rendu par le conseil de prud’hommes de VICHY.

En conséquence, la SELARL MJ DE L’ALLIER sera déboutée de sa demande afin de constater et juger que le jugement rendu par le conseil des prud’hommes de VICHY est nul, et en conséquence, lui est non opposable.

– Sur la régularité de la procédure de licenciement –

Selon l’article L. 1235-2 du code du travail (dispositions entrant en vigueur à la date de publication du décret d’application et au plus tard le 1er janvier 2018), les motifs énoncés dans la lettre de licenciement peuvent, après la notification de celle-ci, être précisés par l’employeur, soit à son initiative soit à la demande du salarié, dans des délais et conditions fixés par décret en Conseil d’Etat. La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l’employeur, fixe les limites du litige en ce qui concerne les motifs de licenciement. A défaut pour le salarié d’avoir formé auprès de l’employeur une demande en application de l’alinéa premier, l’irrégularité que constitue une insuffisance de motivation de la lettre de licenciement ne prive pas, à elle seule, le licenciement de cause réelle et sérieuse et ouvre droit à une indemnité qui ne peut excéder un mois de salaire. En l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, le préjudice résultant du vice de motivation de la lettre de rupture est réparé par l’indemnité allouée conformément aux dispositions de l’article L.1235-3.

Aucune disposition légale, ni aucun principe fondamental, ne font obligation à l’employeur de mentionner, dans la lettre de licenciement, le droit ouvert au salarié par les dispositions des articles L. 1235-2, R. 1232-13 ou R. 1233-2-2 du code du travail, en y indiquant la possibilité et le délai de cette demande de précision.

En l’espèce, tout en critiquant l’imprécision de la motivation de la lettre de licenciement du 12 août 2019, Monsieur [X] [D] n’a pas sollicité de la société ENTREPRISE BOURRON qu’elle précise les motifs du licenciement dans les conditions précitées, et le salarié ne tire aucune conséquence d’un telle argumentation.

Monsieur [X] [D] dénonce un vice ou une irrégularité de la procédure de licenciement en ce qu’il n’aurait pas bénéficié d’un véritable dialogue au cours de l’entretien préalable ni de précisions suffisantes, notamment en réponse à ses questions, quant aux griefs reprochés par l’employeur.

La procédure de licenciement prévue par le code du travail s’applique aux employeurs de droit privé et à leurs salariés, ainsi qu’au personnel des personnes publiques employé dans des conditions de droit privé, sous réserve de dispositions particulières ayant le même objet.

Selon une jurisprudence constante, l’inobservation de la procédure n’entraîne pas la nullité du licenciement et ne lui donne pas nécessairement un caractère abusif, mais elle ouvre droit néanmoins à réparation.

Selon les dispositions de l’article L. 1235-2 du code du travail, lorsqu’une irrégularité a été commise au cours de la procédure, notamment si le licenciement d’un salarié intervient sans que la procédure requise aux articles L. 1232-2, L. 1232-3, L. 1232-4, L. 1232-11, L.1232-12 et L. 1232-13 ait été observée ou sans que la procédure conventionnelle ou statutaire de consultation préalable au licenciement ait été respectée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.

L’indemnité pour irrégularité de procédure ayant un caractère subsidiaire, elle ne peut être accordée au salarié que si son licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse. À l’inverse, le juge prud’homal ne peut accorder l’indemnité pour procédure irrégulière lorsqu’il juge le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Aux termes de l’article L. 1232-2 du code du travail : ‘L’employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l’objet de la convocation. L’entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation.’.

Aux termes de l’article L. 1232-3 du code du travail : ‘Au cours de l’entretien préalable, l’employeur indique les motifs de la décision envisagée et recueille les explications du salarié.’.

Aux termes de l’article L. 1232-4 du code du travail : ‘Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise. Lorsqu’il n’y a pas d’institutions représentatives du personnel dans l’entreprise, le salarié peut se faire assister soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise, soit par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l’autorité administrative. La lettre de convocation à l’entretien préalable adressée au salarié mentionne la possibilité de recourir à un conseiller du salarié et précise l’adresse des services dans lesquels la liste de ces conseillers est tenue à sa disposition.’

L’employeur qui envisage le licenciement d’un salarié doit le convoquer à un entretien, préalable et individuel, au cours duquel il lui expose les motifs de sa décision et recueille ses explications. L’employeur ou son représentant doit, lors de l’entretien préalable, indiquer au salarié le ou les motifs de la décision de licenciement envisagée et recueillir ses explications. Il n’est pas tenu de lui communiquer les pièces susceptibles de justifier le licenciement. La circonstance que le motif énoncé dans la lettre de licenciement n’a pas été indiqué au salarié lors de l’entretien préalable caractérise une irrégularité de forme mais n’empêche pas le juge de décider que ce grief peut fonder le licenciement. Les propos tenus par le salarié lors de l’entretien préalable ne peuvent constituer, sauf abus, une cause de licenciement. La durée de l’entretien est en principe sans incidence sur la régularité de la procédure, sauf à vider de son sens la procédure.

Les parties en présence sont libres d’accepter de rédiger et de signer un compte rendu de l’entretien préalable permettant de constater le déroulement de celui-ci, les faits évoqués et les explications de chacun. Ce compte rendu peut, le cas échéant, être produit devant l’autorité judiciaire et constituer un élément de preuve s’il est signé par les deux parties. Si l’une des parties ne l’a pas signé, le juge refuse de reconnaître à ce dernier une force probante. L’attestation établie par l’assistant du salarié (ou le représentant ou assistant de l’employeur) lors de l’entretien préalable est une preuve recevable dont il appartient au juge d’apprécier la valeur et la portée.

En l’espèce, Monsieur [X] [D] produit le compte rendu de l’entretien préalable établi par Monsieur [I] [R], conseiller du salarié, qui l’a assisté le 7 août 2019.

Dans sa relation écrite de l’entretien préalable, Monsieur [I] [R] indique que Monsieur [C] [J], dirigeant de l’entreprise, a indiqué à Monsieur [X] [D], de façon laconique, qu’il lui reprochait un détournement de la clientèle au profit d’une entreprise concurrente, un débauchage de salariés et l’usage à titre personnel de cadeaux de fournisseurs à l’entreprise. Monsieur [R] ajoute que Monsieur [D] a nié les fautes reprochées et a demandé, à plusieurs reprises, à Monsieur [J] de préciser notamment les salariés concernés par le débauchage allégué ainsi que les fournisseurs des cadeaux dont il aurait bénéficié, mais Monsieur [J] n’a pas voulu apporter ces précisions et a seulement répondu à chaque interrogation du salarié : ‘plus tard, on sortira les éléments’ ou ‘pareil, on sortira les éléments’ ou ‘pas de soucis, j’ai les éléments’.

S’agissait du déroulement de l’entretien préalable, le témoignage de Monsieur [I] [R] n’est ni contredit par les autres pièces versées aux débats ni même sérieusement contesté par les autres parties. La cour retient en conséquence sa valeur probante.

Il est établi qu’au cours de l’entretien préalable du 7 août 2019, le représentant de l’employeur n’a pas voulu préciser les fautes reprochées au salarié, privant ainsi délibérément Monsieur [X] [D] d’un véritable dialogue et de toute possibilité d’argumenter afin de convaincre Monsieur [J] qu’il n’avait pas commis de faute ou que la mesure de licenciement envisagée n’était pas adaptée.

La société ENTREPRISE BOURRON a manqué à ses obligations s’agissant du déroulement de l’entretien préalable, en tout cas à celles imposées par l’article L. 1232-3 du code du travail. Le conseil de prud’hommes a fait une exacte appréciation des circonstances de la cause ainsi que des droits et obligations des parties en constatant une irrégularité de procédure et en déclarant irrégulier le licenciement de Monsieur [X] [D].

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

– Sur le licenciement –

Le licenciement correspond à une rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur.

La lettre de licenciement fixe les limites du litige sur la cause du licenciement, ce qui interdit à l’employeur d’invoquer de nouveaux ou d’autres motifs ou griefs par rapport à ceux mentionnés dans la lettre de licenciement.

Pour que la rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur soit justifiée ou fondée, en tout cas non abusive, la cause du licenciement doit être réelle (faits objectifs, c’est-à-dire précis et matériellement vérifiables, dont l’existence ou matérialité est établie et qui constituent la véritable raison du licenciement), mais également sérieuse, c’est-à-dire que les faits invoqués par l’employeur, ou griefs articulés par celui-ci, doivent être suffisamment pertinents pour justifier le licenciement.

Le licenciement pour motif personnel est celui qui est inhérent à la personne du salarié. Un licenciement pour motif personnel peut être décidé pour un motif disciplinaire, c’est-à-dire en raison d’une faute du salarié, ou en dehors de tout comportement fautif du salarié (motif personnel non disciplinaire). Il ne doit pas être discriminatoire.

Si l’employeur peut sanctionner par un licenciement un acte ou une attitude du salarié qu’il considère comme fautif, il doit s’agir d’un comportement volontaire (action ou omission). À défaut, l’employeur ne peut pas se placer sur le terrain disciplinaire. La faute du salarié correspond en général à un manquement aux obligations découlant du contrat de travail. Elle ne doit pas être prescrite, ni avoir déjà été sanctionnée. Les faits reprochés au salarié doivent lui être personnellement imputables. Un salarié ne peut pas être licencié pour des faits imputables à d’autres personnes, même proches.

En cas de licenciement disciplinaire, le juge doit vérifier que le motif allégué constitue une faute. Selon sa gravité, la faute commise par le salarié emporte des conséquences plus ou moins importantes. Si les faits invoqués, bien qu’établis, ne sont pas fautifs ou constituent une faute légère mais non sérieuse, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse. En cas de licenciement fondé sur une faute constituant une cause réelle et sérieuse, le salarié a droit au règlement de l’indemnité compensatrice de congés payés, de l’indemnité de licenciement, du préavis ou de l’indemnité compensatrice de préavis (outre les congés payés afférents).Le licenciement pour faute grave entraîne la perte du droit aux indemnités de préavis et de licenciement. Le licenciement pour faute lourde entraîne également pour le salarié la perte du droit aux indemnités de préavis et de licenciement, avec possibilité pour l’employeur de réclamer le cas échéant au salarié réparation du préjudice qu’il a subi (dommages-intérêts). Dans tous les cas, l’indemnité compensatrice de congés payés reste due.

La sanction disciplinaire prononcée par l’employeur, y compris une mesure de licenciement, ne pas doit être disproportionnée mais doit être proportionnelle à la gravité de la faute commise par le salarié. Le juge exerce un contrôle de proportionnalité en matière de sanction disciplinaire et vérifie en conséquence que la sanction prononcée par l’employeur à l’encontre du salarié n’est pas trop sévère compte tenu des faits reprochés.

La faute lourde est celle commise par le salarié avec ou dans l’intention de nuire à l’employeur ou à l’entreprise. Cet élément peut résulter directement de la nature de l’acte commis par le salarié, mais il ne suffit pas que le comportement reproché au salarié ait été préjudiciable à l’entreprise pour caractériser une faute lourde. La disqualification de la faute lourde ne prive pas nécessairement le licenciement de cause réelle et sérieuse, et les juges peuvent même décider que les faits reprochés justifient un licenciement pour faute grave. Seule le faute lourde permet l’engagement de la responsabilité pécuniaire du salarié et fonder une action en dommages-intérêts contre ce dernier.

Le code du travail ne donne aucune définition de la faute grave. Selon la jurisprudence, la faute grave se définit comme étant celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié, constituant une violation des obligations qui résultent du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et la poursuite du contrat de travail pendant la durée du préavis. La faute grave suppose une action délibérée ou une impéritie grave, la simple erreur d’appréciation ou l’insuffisance professionnelle ne pouvant ouvrir droit à une sanction disciplinaire. La gravité d’une faute n’est pas nécessairement fonction du préjudice qui en est résulté. La commission d’un fait isolé peut justifier un licenciement disciplinaire, y compris pour faute grave, sans qu’il soit nécessaire qu’il ait donné lieu à avertissement préalable. La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et justifie la cessation immédiate du contrat de travail sans préavis, en tout cas une rupture immédiate du contrat de travail avec dispense d’exécution du préavis. Elle peut justifier une mise à pied conservatoire, mais le prononcé d’une telle mesure n’est pas obligatoire. La faute grave ne saurait être admise lorsque l’employeur a laissé le salarié exécuter son préavis au salarié. En revanche, il importe peu que l’employeur ait versé au salarié des sommes auxquelles il n’aurait pu prétendre en raison de cette faute, notamment l’indemnité compensatrice de préavis ou les salaires correspondant à une mise à pied conservatoire.

En cas de faute lourde ou de faute grave, la mise en oeuvre de la procédure de licenciement doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur a eu connaissance des faits fautifs, mais le maintien du salarié dans l’entreprise est possible pendant le temps nécessaire pour apprécier le degré de gravité des fautes commises.

Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement ne pèse pas plus particulièrement sur l’employeur (la Cour de cassation juge que la preuve du caractère réel et sérieux du motif de licenciement n’incombe spécialement à aucune des parties), il incombe à l’employeur, en revanche, d’établir la faute grave ou la faute lourde qu’il invoque. Le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Dans tous les cas, en matière de bien-fondé du licenciement, le doute doit profiter au salarié.

Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires (date de convocation à l’entretien préalable ou de prononcé d’une mise à pied conservatoire / date de présentation de la lettre recommandée ou de remise de la lettre simple pour une sanction ne nécessitant pas un entretien préalable) au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur a eu une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits reprochés au salarié.

Si un fait fautif ne peut plus donner lieu à lui seul à une sanction disciplinaire au-delà du délai de deux mois, ces dispositions ne font pas obstacle à la prise en considération de faits antérieurs à deux mois dès lors que le comportement du salarié s’est poursuivi ou s’est réitéré dans ce délai, l’employeur pouvant ainsi invoquer une faute prescrite lorsqu’un nouveau fait fautif est constaté, à condition toutefois que les deux fautes procèdent d’un comportement identique. Toutefois, aucune sanction antérieure de plus de trois ans à l’engagement des poursuites disciplinaires ne peut être invoquée à l’appui d’une nouvelle sanction.

En l’espèce, le courrier de notification du licenciement, daté du 12 août 2019, est ainsi libellé :

‘Monsieur,

Nous faisons suite a notre entretien du 7 août dernier, au cours duquel vous étiez assisté d’un conseiller du salarié du salarie et vous notifions, par la présente, votre licenciement pour faute lourde.

Ainsi qu’il vous l’a été indiqué, cette décision est motivée par les faits inacceptables qui viennent d’être portés à notre connaissance ; faits dont vous êtes rendu coupable au préjudice de notre entreprise, et qui se sont traduits par des détournements de commandes et de clientèle, au profit de tiers et tout dernièrement par des tentatives de débauchage de personnel, au profit d’une entreprise que vous envisagez, semble-t-il de créer.

Bien plus, selon nos informations, vous auriez en outre, bénéficié, à notre insu, de la part de tiers, d’avantages liés à vos fonctions dans notre entreprise, ce qui constitue une atteinte supplémentaire à votre obligation de loyauté, voire un délit pénal.

La volonté de nuire à l’entreprise est patente.

De surcroît votre attitude lors de notre entretien, ou vous vous êtes contenté de nier mollement sans plus d’explication ne nous permet pas de revoir la décision que nous avions préalablement envisagée.

En conséquence et compte tenu de ce qui précède, votre contrat de travail prendra fin à la date de première présentation de ce courrier.

Nous vous précisons que nous tenons à votre disposition, votre certificat de travail, votre attestation chômage, ainsi que le solde de votre compte.

Il vus appartiendra également de restituer à l’entreprise des biens et documents que vous pourriez encore détenir et qui est sa propriété.

Vous veillerez cependant à prendre rendez-vous avant de vous présenter.

Salutations.

Le Président

H. [J]’

Vu les termes de la lettre de licenciement, la société ENTREPRISE BOURRON s’est clairement placée sur le seul terrain disciplinaire pour notifier à Monsieur [X] [D] un licenciement pour faute lourde, et ce en reprochant au salarié les griefs suivants :

1) détournements de commandes et de clientèle, au profit de tiers ;

2) tentatives de débauchage de personnel au profit d’une entreprise que le salarié envisage de créer ;

3) bénéfice, à l’insu de l’employeur, de la part de tiers, d’avantages liés aux fonctions dans l’entreprise.

Le contrat de travail de Monsieur [X] [D] stipule notamment que :

– le salarié jouit d’une grande initiative personnelle pour organiser son travail, sans horaire de travail prédéterminé. Il veille à rendre compte régulièrement de sa mission au gérant, [C] [J], ou à toute autre personne mandatée par lui ;

– le salarié s’interdit de communiquer par écrit, oralement ou sous toute autre forme à des tiers, tout document ou renseignement d’ordre économique, commercial, administratif ou financier dont il pourrait avoir connaissance et dont la divulgation serait de nature à porter préjudice à la société ;

– le salarié s’engage à consacrer tous ses soins et tout son temps à l’accomplissement de sa fonction et s’interdit toute autre activité professionnelle, soit pour son propre compte, soit pour le compte de tiers, sauf autorisation expresse et préalable de la direction.

Le 15 juillet 2019, l’employeur a convoqué le salarié à un entretien en vue de la signature d’une rupture conventionnelle. L’entretien s’est tenu le 19 juillet 2019. Le 19 juillet 2019, Monsieur [X] [D] et Monsieur [C] [J], ce dernier en qualité de président de la société ENTREPRISE BOURRON, ont signé une convention de rupture mentionnant notamment une rémunération mensuelle brute de référence de 5.270,29 euros, une indemnité de 5.800 euros versée par l’employeur et une cessation définitive du contrat de travail du salarié le 31 août 2019. Le 14 août 2019, la Direccte a refusé l’homologation de cette convention de rupture en raison d’une erreur dans la demande d’homologation datée du 5 août 2019.

Le 30 juillet 2019, Monsieur [D] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, avec notification d’une mise à pied conservatoire. L’entretien préalable s’est tenu le 7 août 2019. Le 12 août 2019, Monsieur [X] [D] a été licencié pour faute lourde.

– Sur le premier grief –

S’il apparaît que la société ETI, dont le président serait Monsieur [H] [E], pouvait être une entreprise concurrente de la société ENTREPRISE BOURRON en 2019, il n’est pas établi que Monsieur [D] pouvait avoir une quelconque intérêt social, mandat ou activité pour le compte de l’entreprise ETI à l’époque considérée.

Le liquidateur judiciaire ne produisant aucune pièce pour justifier du licenciement pour motif disciplinaire, c’est la délégation AGS qui produit des pièces numérotées 3 à 9 pour soutenir que s’agissant d’un marché portant sur différents travaux pour la SCI THE MINKLEY (client et maître d’ouvrage), supervisé par le cabinet d’architectes ALVERGNAT (maître d’oeuvre représenté par Monsieur [A]), Monsieur [D] aurait manoeuvré pour que la société ETI bénéficie de l’attribution d’un lot 6 en lieu et place de la société ENTREPRISE BOURRON.

Vu les pièces produites, il apparaît que Monsieur [D] représentait la société ENTREPRISE BOURRON pour postuler sur une partie de ce marché SCI THE MINKLEY qui a été ouvert par le maître d’oeuvre à compter du 12 juin 2019. Monsieur [D] a remis dans ce cadre un devis daté du 11 juillet 2019. Le fait que, au moins dans un premier temps, le maître d’oeuvre ait demandé que les devis soient déposés au plus tard le 28 juin 2019, ne démontre pas que ce délai n’ait pas été prorogé et que Monsieur [D] n’ait pas représenté dans ce cadre, de façon loyale et adaptée, son employeur.

En réalité, le raisonnement proposé par la délégation AGS repose essentiellement sur un compte rendu d’une réunion du 9 juillet 2019 mentionnant la société ETI parmi les entreprises convoquées, et pas la société ENTREPRISE BOURRON, mais surtout Monsieur [D] comme interlocuteur de la société ETI, et ce alors qu’il est indiqué ‘LOT 6 : PLATRERIE PEINTURE ETI’ pour un marché SCI THE MINKLEY.

Outre que la cour n’est pas en mesure de déterminer, vu les seules pièces produites, si l’on parle du même lot, voire du même marché de travaux, s’agissant du lot 6 visant la société ETI et du devis présenté par Monsieur [D] pour le compte de la société ENTREPRISE BOURRON, Monsieur [D] soutient qu’il a été mentionné par erreur par le maître d’oeuvre comme interlocuteur de la société ETI sur le compte rendu d’une réunion du 9 juillet 2019, et il produit en ce sens des courriels datés des 9 et 10 juillet 2019 envoyés par le cabinet d’architectes ALVERGNAT qui, sans être plus déterminants, font toutefois apparaître une erreur, non précisée, reconnue Monsieur [A].

La manoeuvre alléguée à l’encontre de Monsieur [D], afin de détourner un marché ou un client au profit de la société concurrente ETI, n’est pas démontrée et, en tout état de cause, le doute doit profiter au salarié s’agissant de sa mention comme interlocuteur de la société ETI dans un unique document.

Ce grief n’est pas matériellement établi.

– Sur le second grief –

La délégation AGS produit sur ce point deux attestations datés du 27 juillet 2019.

Monsieur [V] et Monsieur [Y], alors salariés de la société ENTREPRISE BOURRON, exposent que le mardi 9 juillet 2019, à la fin de leur journée de travail, Monsieur [D], alors leur supérieur hiérarchique en qualité de directeur du site, les a reçus et leur a parlé d’un futur projet professionnel (non précisé), avec de futurs chantiers en perspective (non déterminés), en leur proposant, ‘par la suite’ ou les ‘jours suivants’, un emploi dans sa future entreprise, offre qu’ils ont décliné.

Il échet d’abord de relever que ces témoignages, peu précis mais concordants, ne mentionnent ni la société ETI ni le marché SCI THE MINKLEY.

La cour peut seulement considérer qu’à la date du 9 juillet 2019, Monsieur [D] avait probablement le projet de quitter la société ENTREPRISE BOURRON pour créer éventuellement une entreprise personnelle dans le même secteur d’activité.

Vu la procédure avortée de rupture conventionnelle (cf supra), il apparaît qu’à l’époque considérée l’employeur n’ignorait pas que Monsieur [D], dont le contrat de travail ne contient aucune clause de non-concurrence, avait le projet de quitter l’entreprise à court terme, probablement pour exercer une activité personnelle.

Il est seulement établi que Monsieur [D] a évoqué verbalement, le 9 juillet 2019, avec deux salariés de la société ENTREPRISE BOURRON son projet professionnel. Il aurait ensuite, dans un délai non précisé, proposé à ses deux collègues de travail de les employer dans sa future entreprise.

Il n’est pas démontré que, hors un ou deux échanges uniquement verbaux, Monsieur [D] aurait effectué des démarches sérieuses pour tenter de débaucher du personnel de la société ENTREPRISE BOURRON, dans le cadre d’un projet éventuel de création d’une entreprise personnelle concurrente dont il n’est pas justifié qu’il aurait abouti ou même connu une suite concrète.

Sans être d’une loyauté absolue vis-à-vis de son employeur d’alors, le comportement de Monsieur [D] à l’égard de Monsieur [V] et Monsieur [Y] ne constitue pas une faute pouvant justifier un licenciement.

– Sur le troisième grief –

Il n’est pas contesté que Monsieur [D] avait la charge des commandes et des relations aves les fournisseurs de la société ENTREPRISE BOURRON, l’enseigne GEDIMAT faisant partie de ces fournisseurs.

Pour le compte de la société ENTREPRISE BOURRON, Monsieur [D] a participé à un challenge commercial organisé par l’enseigne GEDIMAT sur la période du 1er février 2018 au 31 janvier 2019, avec un objectif en terme de chiffre d’affaires. Monsieur [D] a remporté ce challenge et le prix prévu, soit un séjour d’une semaine pour deux personnes au Sénégal, dont il a profité, selon ses dires, avec son épouse.

L’employeur ne justifie d’aucune règle objective et précise (règlement intérieur, contrat de travail, convention collective, usage etc.) opposable aux salariés de la société ENTREPRISE BOURRON quant au bénéfice des récompenses obtenues au titre de challenges proposés par des fournisseurs ou des partenaires de l’entreprise.

Le seul document produit concernant le challenge GEDIMAT est adressé à ‘l’EURL BOURRON PASCAL [Localité 8]’, et non à Monsieur [D] à titre personnel, et, pour le surplus, il n’est pas établi que l’employeur n’aurait pas été informé de la participation de son salarié à ce challenge et de l’usage fait par Monsieur [D] de la récompense obtenue, pas plus qu’il n’est démontré que la société ENTREPRISE BOURRON aurait donné des instructions précises dans ce cadre ou se serait opposée à ce que Monsieur [D], responsable des approvisionnements et des relations avec les fournisseurs, jouisse du séjour au Sénégal avec la personne de son choix.

Le doute devant en tout état de cause profiter au salarié, ce grief n’est pas matériellement établi.

– Sur l’analyse de la mesure de licenciement –

Comme le premier juge, vu les termes de la lettre de licenciement, la cour ne relève pas de faute commise par Monsieur [X] [D] pouvant constituer une faute lourde, une faute grave ou même une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Au regard des principes susvisés et des éléments d’appréciation dont la cour dispose, le conseil de prud’hommes a fait une exacte appréciation des circonstances de la cause ainsi que des droits et obligations des parties en jugeant sans cause réelle et sérieuse le licenciement de Monsieur [X] [D].

Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

– Sur les conséquences du licenciement –

Monsieur [X] [D] a d’abord droit à un rappel de salarié sur la période de mise à pied conservatoire, à une indemnité de licenciement et à une indemnité compensatrice de préavis.

Sur ce premier point, la rémunération mensuelle brute de référence de 5.270,29 euros retenue par le premier juge n’est pas contestée par les parties. Les calculs effectués par le conseil de prud’hommes ne sont pas contestés par le liquidateur judiciaire et la délégation AGS, alors que Monsieur [X] [D], vu le dispositif de ses dernières écritures, conclut à la confirmation du jugement de ces chefs.

En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce que le conseil de prud’hommes a alloué à Monsieur [X] [D] les sommes de 2.380,13 euros brut au titre de rappel de salaire concernant la mise à pied conservatoire, de 15.810,87 euros brut au titre de l’indemnité de préavis et de 3.952,72 euros au titre de l’indemnité de licenciement, mais vu la procédure collective de liquidation judiciaire intervenue depuis, par voie de réformation, cette créance sera fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société ENTREPRISE BOURRON.

S’agissant de la demande de dommages-intérêts, pour les licenciements sans cause réelle et sérieuse notifiés à compter du 24 septembre 2017, l’article L. 1235-3 du code du travail prévoit que si l’une ou l’autre des parties refuse la réintégration, le juge octroie au salarié, en fonction de son ancienneté, une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans un tableau différent selon que l’entreprise emploie habituellement plus de dix ou moins de onze salariés (barème Macron).

En l’espèce, Monsieur [X] [D], âgé de 39 ans au moment de son licenciement, comptait 3 années complètes d’ancienneté au sein d’une entreprise employant habituellement plus de dix salariés et percevait un salaire mensuel brut de 5.270,29 euros.

En application de l’article L. 1235-3 du code du travail, Monsieur [O] [B] peut prétendre à une indemnité de licenciement comprise entre 3 et 4 mois de salaire mensuel brut, soit entre 15.810,87 et 21.081,16 euros.

Monsieur [X] [D] ne justifie en rien de sa situation personnelle depuis le licenciement.

En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce que le conseil de prud’hommes a alloué à Monsieur [X] [D] une somme de 15.810,87 euros (brut), à titre de dommages-intérêts, en réparation du préjudice subi du fait de la perte injustifiée de son emploi, mais vu la procédure collective de liquidation judiciaire intervenue depuis, par voie de réformation, cette créance sera fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société ENTREPRISE BOURRON.

Dans le cas d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, un salarié reste recevable à démontrer l’existence d’un préjudice distinct de la seule perte injustifiée d’emploi pour obtenir une indemnisation échappant aux dispositions de L. 1235-3 du code du travail. C’est le cas notamment de l’indemnité réparant le préjudice subi par le salarié du fait des procédés vexatoires dans la mise en oeuvre ou les circonstances du licenciement.

Le premier juge, par des motifs que la cour adopte, a fait une exacte appréciation des circonstances de la cause ainsi que des droits et obligations des parties en allouant à Monsieur [X] [D] une somme de 5.000 euros, à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice moral du fait des circonstances vexatoires du licenciement, mais vu la procédure collective de liquidation judiciaire intervenue depuis, par voie de réformation, cette créance sera fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société ENTREPRISE BOURRON.

Comme l’a relevé le premier juge, Monsieur [X] [D] ne peut prétendre à une indemnité pour irrégularité de procédure puisque son licenciement a été jugé sans cause réelle et sérieuse et qu’il a été indemnisé à ce titre.

– Sur les congés payés –

Le conseil de prud’hommes a jugé que Monsieur [X] [D] avait droit à une indemnité compensatrice de congés payés et, dans ce cadre, a ordonné à la SAS ENTREPRISE BOURRON de régulariser auprès de la caisse des congés payés du bâtiment de la région Centre, les droits du salarié auprès de ladite caisse comme suit : 4.743,26 euros brut pour les mois restant dus à avril 2019, 1.317,57 euros brut pour les mois de mai à juillet 2019, 238,01 euros brut pour la période de mise à pied, 1.581,09 euros brut pour la période de préavis.

Cette créance du salarié n’est pas contestée en cause d’appel tant en son existence qu’en son montant, mais Monsieur [X] [D] demande désormais à ce qu’elle soit fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société ENTREPRISE BOURRON.

Dans les professions à travail discontinu, des caisses de congés payés se substituent à l’employeur pour le paiement des indemnité de congés payés. Relève notamment de ce régime le secteur du bâtiment et des travaux publics. Sauf dans le BTP où il est possible de déroger à cette règle par accord, les employeurs des professions assujetties aux caisses de congés payés sont tenus de s’y affilier pour leur activité principale, mais aussi pour leurs activités accessoires ou secondaires, même si aucun salarié n’est affecté spécialement à cette activité. Les employeurs affiliés à une caisse de congés payés doivent acquitter des cotisations. Les employeurs ne peuvent se substituer aux caisses de congés payés pour verser des indemnités de congés payés, en se dispensant de verser les cotisations, ni même considérer leurs dette de cotisations éteinte du fait que la caisse n’a pas versé les indemnité de congés payés aux salariés. Les employeurs affiliés à une caisse de congés payés doivent délivrer aux salariés concernés, avant leur départ en vacances ou à leur départ de l’entreprise, en double exemplaire, un certificat justifiant de leurs droits à congés payés. À défaut, ils peuvent être condamnés à réparer le préjudice subi par les salariés. Le point de départ de l’année de référence est fixé au 1er avril. Il ne peut pas être dérogé à cette règle ni par accord collectif ni unilatéralement par l’employeur. La durée du congé annuel ainsi que le montant de l’indemnité de congés payés sont fixés de façon que les salariés à travail discontinu aient les mêmes avantages que ceux du régime général des congés payés. Le paiement de l’indemnité de congés payés est effectué par la caisse sur présentation des attestations remises par les différents employeurs au moment où le salarié prend ses congés. Toutefois, la caisse ne peut pas être condamnée au paiement des indemnités de congés payés pour les périodes non couvertes par les cotisations mises à charge de l’employeur.

En l’espèce, comme le relève à juste titre Monsieur [X] [D], il n’est pas justifié en l’état que la société ENTREPRISE BOURRON a rempli ses obligations vis-à-vis de la caisse des congés payés du bâtiment de la région Centre concernant les congés payés acquis et non pris par le salarié, ni que l’employeur a régularisé la situation comme il a été ordonné par le premier juge.

En conséquence, vu la procédure collective de liquidation judiciaire intervenue depuis, par voie de réformation, cette créance d’indemnité compensatrice de congés payés sera fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société ENTREPRISE BOURRON.

– Sur Pôle Emploi –

Compte tenu que le licenciement sans cause réelle et sérieuse est intervenu dans une entreprise employant habituellement plus de 10 salariés et qu’il a été prononcé à l’encontre d’un salarié ayant plus de deux ans d’ancienneté, il y a lieu, par application des dispositions de l’article L. 1235-4 du code du travail, d’ordonner le remboursement par l’employeur à POLE EMPLOI des indemnités chômage versées au salarié licencié dans la limite de six mois à compter de son licenciement.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

– Sur la garantie de l’AGS –

Le présent arrêt est opposable à l’UNEDIC, CGEA d'[Localité 6], en qualité de gestionnaire de l’AGS.

Les sommes susvisées fixées au passif de la liquidation judiciaire de la société ENTREPRISE BOURRON seront garanties par l’AGS dans les conditions et limites prévues par le code du travail.

– Sur les intérêts –

En application des dispositions de l’article L. 622-28 du code de commerce, qui pose le principe de l’arrêt du cours des intérêts à la date du jugement d’ouverture de la procédure collective pour les créances ayant leur origine avant ledit jugement, les intérêts de retard sur ces sommes ne pourront courir à compter de la date du 24 septembre 2019.

– Sur les dépens et frais irrépétibles –

Par voie de réformation, la SELARL MJ DE L’ALLIER, en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS ENTREPRISE BOURRON, sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d’appel ainsi qu’à verser à Monsieur [X] [D] une somme totale de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

– Réformant, fixe la créance de Monsieur [X] [D] au passif de la liquidation judiciaire de la société ENTREPRISE BOURRON aux sommes suivantes :

* 2.380,13 euros (brut) à titre de rappel de salaire sur la période de mise à pied conservatoire,

* 15.810,87 euros (brut) au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

* 3.952,72 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

* 15.810,87 euros (brut), à titre de dommages-intérêts, en réparation du préjudice subi du fait de la perte injustifiée de son emploi,

* 5.000 euros, à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice moral subi du fait des circonstances vexatoires du licenciement,

* 7.879,93 euros à titre de l’indemnité compensatrice de congés payés (4.743,26 euros pour les mois restant dus à avril 2019, 1.317,57 euros pour les mois de mai à juillet 2019, 238,01 euros pour la période de mise à pied, 1.581,09 euros pour la période de préavis) ;

– Réformant, dit que la SELARL MJ DE L’ALLIER, en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS ENTREPRISE BOURRON, sera tenue aux entiers dépens de première instance ;

– Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions non contraires ;

Y ajoutant,

– Dit que le présent arrêt est opposable à l’UNEDIC, CGEA d'[Localité 6], en qualité de gestionnaire de l’AGS ;

– Dit que les sommes susvisées fixées au passif de la liquidation judiciaire de la société ENTREPRISE BOURRON seront garanties par l’AGS dans les conditions et limites prévues par le code du travail ;

– Rappelle qu’en application des dispositions de l’article L. 622-28 du code de commerce, qui pose le principe de l’arrêt du cours des intérêts à la date du jugement d’ouverture de la procédure collective pour les créances ayant leur origine avant ledit jugement, les intérêts de retard sur ces sommes ne pourront courir à compter de la date du 24 septembre 2019 ;

– Condamne la SELARL MJ DE L’ALLIER, en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS ENTREPRISE BOURRON, à verser à Monsieur [X] [D] une somme totale de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et ce pour les frais irrépétibles de première instance et d’appel ;

– Condamne la SELARL MJ DE L’ALLIER, en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS ENTREPRISE BOURRON, aux dépens d’appel ;

– Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

Le greffier, Le Président,

N. BELAROUI C. RUIN

 


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